Fortunes et infortunes d’un cas célèbre de NDE : la chaussure de Maria (1ère pa

Fortunes et infortunes d’un cas célèbre de NDE : la chaussure de Maria (1ère partie) Denis BIETTE Note : Cet article a été publié initialement dans la revue "Enquêtes Z" n° 17 (automne 2003). Cette version est légèrement revue. La personne qui souhaite se faire une idée du phénomène des NDE[1] butte rapidement sur l’impossibilité de pouvoir évaluer de manière critique les milliers de cas relatés par une multitude d’ouvrages ou d’articles. Face à ce foisonnement d’informations, il peut choisir de s’intéresser d’abord aux affaires les plus sensationnelles, aux best-of en quelque sorte du dossier. Pour les tenants de l’hypothèse qui déduit du phénomène des NDE la preuve de la survie d’une conscience après la mort, le cas de la chaussure de Maria est précisément l’un de ceux-là. Cet article n’entend nullement faire le point sur l’ensemble du dossier NDE ni même étendre les conclusions de l’analyse de ce cas célèbre à l’ensemble des témoignages. Il est le reflet d’une simple recherche personnelle et ne prétend pas revendiquer la primeur des informations. Son objectif est néanmoins d’insister sur la prudence de rigueur à adopter face aux informations trop souvent présentées comme des preuves indubitables. On en déduira la nécessité de disposer d’éléments véritablement incontestables pour accepter la validité définitive d’une hypothèse extraordinaire comme celle de la survie après la mort. Débat sur la toile C’est ce fameux cas Maria qui fut présenté à l’étude, parmi d’autres, sur la liste de discussion du Cercle Zététique en juillet 2001. L’un des abonnés, Emmanuel-Juste Duits, souhaitait que l’on évoque le thème des NDE « pour échanger des infos et des hypothèses contradictoires sur ce phénomène ». Il précisait par ailleurs que son intention était « d'aborder ces questions en tenant compte des données différentes voire contradictoires, et en les confrontant avec les explications possibles, sans en écarter a priori ». Je suivais le débat naissant d’un œil un peu distrait car la démarche me paraissait de bon aloi. En profitant des informations données par un abonné, j’eus la curiosité de visiter le site Web personnel[2] d’Emmanuel Juste-Duits. Il s’y présente comme enseignant en philosophie, « télématicien » et initiateur de réseaux d'échanges novateurs depuis 1985. Dans l’éditorial du bulletin CENCES[3] n° 0 qu’il reproduit sur son site[4] et dont il est l’auteur, je fus un peu surpris de découvrir des propos assez radicaux : Les rationalistes, justement, procèdent (souvent) comme les sectaires. Par exemple, ils se gausseront des phénomènes paranormaux, prendront l’exemple des fraudes avérées et autres cas d’écoles ridiculisant la naïveté des parapsychologues. Mais nos rationalistes se garderont bien de considérer les quelques cas intéressants et difficiles à expliquer par la fraude, l’illusion, ou le manque de rigueur de leurs contradicteurs. Ces propos ont d’ailleurs été repris tout récemment dans l’introduction rédigée par Emmanuel-Juste Duits à l’ouvrage dont il est le co-directeur (cf. note 3). En y resongeant aujourd’hui, j’ai l’impression que son intervention sur cette liste de discussion relevait d’une motivation plutôt polémiste. La quête de l’information Le débat donna lieu rapidement à des échanges nombreux et animés. Je notais au passage l’étonnement d’Emmanuel quant à la non-connaissance de la littérature « pro-NDE[5] » de base parmi certains membres de la liste. On lui réclamait sans cesse des cas « solides » ! Emmanuel-Juste Duits en proposa trois, l’un publié par le cardiologue américain Michael Sabom[6], l’autre cité dans La mort transfigurée[7] et enfin, le fameux cas de la chaussure de Maria. Il signala vouloir éviter ces deux derniers car, disait-il, il s’agissait de « 2 cas qui sont très connus par le milieu ‘pro‘ et ‘anti’ NDE ». L’un des abonnés demanda pourtant des précisions sur le cas de Maria. Il avait le souvenir, en effet, d’un article du Skeptical Inquirer qui en faisait l’étude critique. Il en retrouva d’ailleurs lui-même les références précises. Le cas Maria avait été évoqué dans le numéro du Skeptical Inquirer (volume 20, numéro 4, pp.27-33) de juillet-août 1996, sous le titre Maria's NDE: Waiting for the Other Shoe to Drop. Les auteurs étaient le professeur Barry.L. Beyerstein et deux de ses anciens étudiants, Hayden Ebbern et Sean Mulligan. NDE : le célèbre cas de la chaussure de Maria file:///Users/denisbiette/Documents/ZETETIQUE/ZETETIQUE ... 1 sur 10 21/08/12 16:17 Le numéro du Skeptical Inquirer publiant la contre-enquête. Dans l’intervalle, et devant le flot d’interventions déclenchées par cette discussion, Emmanuel-Juste Duits s’échauffait tout naturellement : Je donne des éléments, à chaque critique que l'on m'oppose, je donne des pistes qu'apparemment PERSONNE ne songe à approfondir par lui-même, au moins en consultant des documents pourtant assez facilement disponibles. Cette remarque piqua ma curiosité et j’eus envie justement d’approfondir le cas sur lequel se fixaient maintenant les discussions, ce fameux cas Maria dont je n’avais personnellement jamais entendu parler jusqu’alors. Je savais pouvoir me procurer l’article du Skeptical Inquirer mais je butais sur la référence que venait de fournir Emmanuel : Kimberley Clark, Clinical interventions with near death experiences, in B. Greyson et C.P. Flynn, The Near Death Experience. Spingfield, Illinois, Charles C. Thomas, 1984, pp. 242-255. C’est donc à ce point de la discussion que j’intervins le 15 juillet 2001. Soucieux d’augmenter ma documentation sur le sujet, je demandais à Emmanuel-Juste Duits s’il pouvait fournir une copie de cet article. Je fus un peu surpris d’apprendre qu’il citait un article qu’il n’avait jamais eu entre les mains ! Le cas Maria lui était en fait connu par les pages qui lui sont consacrées dans un article du docteur Kenneth Ring[8], un célèbre spécialiste des NDE. Il ne connaissait pas davantage l’article du Skeptical Inquirer. Autrement dit, pour un cas si célèbre, il manquait à sa documentation, d’une part l’article original qui avait lancé l’affaire et d’autre part le seul article qui en faisait une étude critique. Curieuse méthodologie d’investigation pour quelqu’un qui évoquait une carence documentaire chez les zététiciens ou qui entendait aborder l’étude des NDE en confrontant tous les éléments. Le cas Maria ou la preuve indubitable En parcourant les pages qu’il a consacrées au cas Maria dans son article[9], je constatai que Kenneth Ring se fiait entièrement, et aveuglément pourrait-on dire, à l’article original de Kimberley Clark. Il précisait clairement que le dossier Maria était l’un de ces rares cas qui fournissaient indubitablement la preuve de la possibilité d’une perception extrasensorielle lors d’une sortie hors du corps, dans des situations de mort clinique ou de péril mortel imminent[10]: Un peu plus loin dans ses commentaires, il ajoutait : « A moins de douter de l'authenticité du témoignage de Clark, on a les plus grandes peines à expliquer les phénomènes étranges du cas de Maria, sans violer les dogmes de la psychologie matérialiste. » Encore plus loin, il évoquait l’idée que ce cas ne pouvait « apparemment pas être mis en doute ». C’est bien là pourtant que le bât blesse ! Devait-on faire l’économie du doute ? Etait-il sage et judicieux d’entériner si vite une affaire aussi sensationnelle en faisant fi de la prudence la plus élémentaire et sans envisager une contre-enquête afin d’être certain des données du dossier ? Hélas, comme souvent, un esprit déjà conquis est prompt à entériner toute nouvelle affaire qui se fait l’écho de ses convictions. Ce biais méthodologique est parfois source d’amères désillusions. Le doute légitime, à peine effleuré par Ring, fut vite remisé au placard ; sous sa plume, le cas était devenu une "preuve" ! Les faits allégués Avant d’aller plus loin, accordons-nous le temps de résumer le dossier tel que le présente Kimberley Clark dans NDE : le célèbre cas de la chaussure de Maria file:///Users/denisbiette/Documents/ZETETIQUE/ZETETIQUE ... 2 sur 10 21/08/12 16:17 l’article où elle l’évoque pour la première fois[11]. Kimberley Clark était alors assistante sociale en milieu hospitalier, fonction qu’elle exerçait au Harborview Medical Center, l’un des plus importants hôpitaux de Seattle. C’est dans le cadre de son travail qu’elle eut à s’occuper de Maria, une ouvrière saisonnière qui était venue visiter des amis à Seattle. Lors de son séjour, celle-ci avait subi une grave attaque cardiaque pour laquelle elle avait été admise d’urgence en pleine nuit dans l’unité cardiologique de soins intensifs (CCU : Coronary Care Unit). Il s’agissait pour Kimberley Clark de faire le point sur les problèmes, par exemple financiers, posés par son hospitalisation, et de voir avec elle les solutions possibles. Quelques jours après son admission, Maria subit un arrêt cardiaque mais comme elle était sous étroite surveillance et en bonne condition physique, elle put être ranimée sans difficulté. Plus tard le jour en question, Kimberley Clark vint la voir et la trouva agitée. Maria qui se sentait probablement en confiance se confia tant bien que mal, en dépit des difficultés de langue[12], et expliqua que la source de son anxiété était l’étrange expérience qu’elle avait vécue pendant son arrêt cardiaque. Lors des tentatives de réanimation, elle avait ressenti une décorporation et avait observé de haut les docteurs et infirmières en train de s’affairer sur son corps. Kimberley Clark confie que sa première impression fut empreinte de scepticisme[13]et qu’elle avait d’abord songé à un uploads/Litterature/ nde-cas-chaussure-maria-denis-biette.pdf

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