Prima edizione: giugno 2015 © 2015 Quodlibet srl Via Santa Maria della Porta, 4

Prima edizione: giugno 2015 © 2015 Quodlibet srl Via Santa Maria della Porta, 43 - 62100 Macerata www.quodlibet.it Stampa a cura di pde Promozione srl presso lo stabilimento di Legodigit srl - Lavis (tn) isbn 978-88-7462-753-0 Questo volume è stato realizzato nell’ambito di un Progetto di ricerca di rilevante interesse nazionale, PRIN 2009, «Il soggetto e l’arte». Sommaire Introductions 11 De la porosité des frontières Elisa Bricco 21 Art(s) et écriture(s) en prose : la base de données « Ecriture et art » Chiara Rolla De l’image artistique 37 Medea mediatrix. Pascal Quignard et la figuralité du médium Bernard Vouilloux 55 Espace historique et espace intime dans l’essai littéraire contempo- rain sur la peinture (Claude Esteban, L’ordre donné à la nuit) Dominique Vaugeois 65 Bal des arts, des corps et des Histoires : figuration et incarnation dans Les Œuvres de miséricorde de Mathieu Riboulet Fabien Gris 79 Penser par l’image : l’art de Bosch dans le réécriture de Savitzkaya Marcella Biserni 91 Frida Kahlo, le Mexique et la peinture au regard de J.-M.G. Le Clézio et Gérard de Cortanze Erica Tacchino 103 Image et Histoire : Les Onze, récit de Pierre Michon, et l’œuvre du peintre Neo Rauch Jean-François Py 117 I romanzi di Melania Mazzucco e la storia dell’arte Maurizia Migliorini 6 7 sommaire sommaire De l’exposition d’images et d’autres pratiques contem- poraines 307 Ecritures plastiques et performances du texte : une néolittérature ? Magali Nachtergael 327 L’hypothèse du « roman-exposition » Jean-Max Colard 349 Entretien 369 Abstracts 131 La figure du galeriste dans le roman contemporain Isabelle Dangy De l’image cinématographique 151 Questions de cinéma : Cheyenn de François Emmanuel et Supplé- ment de la vie de Barbara Loden de Nathalie Léger Margareth Amatulli 177 Après l’Apocalypse : formes visuelles de l’écriture chez Maïa Ma- zaurette, Céline Minard et Xabi Molia Denis Mellier 191 « Entrer dans un art par un autre » : cinématographie de la petite scène chez Roland Barthes et Annie Ernaux Marie-Pascale Huglo 203 Effets de projections : l’écriture du sujet par le détour du cinéma Nancy Murzilli 217 Ecrire « avec » le cinéma Annie Oliver 231 La présence du film muet dans les romans de Camille Laurens Jutta Fortin De l’image photographique 245 Narration et photographie. Enjeux intermédiaux dans des pho- to(auto)biographies et photo(auto)fictions contemporaines Marina Ortrud M. Hertrampf 261 Pratiques d’usage de la photo dans la prose contemporaine Elisa Bricco 275 Instantané littéraire : les « légendes » de Michel Butor Bruna Donatelli 293 Des vues et des paroles « gelées » : un dispositif signé Sophie Calle Danièle Méaux Effets de projections : l’écriture du sujet par le détour du cinéma Nancy Murzilli Introduction Le cinéma fait partie de notre culture, de notre histoire person- nelle, de notre mémoire. Il se mêle à nos souvenirs, fait écran, mo- dèle le passé et se trouve ainsi inextricablement lié à nos vies. C’est d’ailleurs la condition de possibilité d’une écriture littéraire qui prend pour objet le cinéma. Le cinéma flirte avec la littérature depuis ses dé- buts, de l’adaptation d’œuvres littéraires, en passant par la novellisa- tion, jusqu’à un phénomène plus récent qui a vu apparaître au cours des trente dernières années de nouvelles formes romanesques où le texte est essentiellement constitué du commentaire d’images cinéma- tographiques1. Je pense entre autres à Supplément à la vie de Barbara Loden de Nathalie Léger2, Cinéma de Tanguy Viel3, Paradis conjugal d’Alice Ferney4, à Que font les rennes après Noël ? et Ils ne sont pour rien dans mes larmes d’Olivia Rosenthal5 ou encore à Ni toi ni moi de Camille Laurens6. C’est sur ces trois derniers textes que j’ai choisi de m’arrêter pour illustrer mon propos. L’ensemble de ces ro- mans redéploie les images cinématographiques dans une perspective littéraire, en les resémantisant au travers de l’interprétation d’un ou plusieurs films portée par un personnage ou un narrateur spectateur. 1 Jean Cléder, Entre littérature et cinéma : Les affinités électives, Armand Colin, Paris 2012, p. 160. 2 Nathalie Léger, Supplément à la vie de Barbara Loden, P.O.L., Paris 2012. 3 Tanguy Viel, Cinéma, Minuit, Paris 1999. 4 Alice Ferney, Paradis conjugal, Albin Michel, Paris 2008. 5 Olivia Rosenthal, Que font les rennes après Noël ?, Verticales, Paris 2010 et Ils ne sont pour rien dans mes larmes, Verticales, Paris 2012, abrégé ci-après QFR. 6 Camille Laurens, Ni toi ni moi, P.O.L., Paris 2006, abrégé ci-après NTM. 204 205 nancy murzilli effets de projections : l’écriture du sujet par le détour du cinéma Ils rapportent une expérience de cinéma mettant en résonance le film avec le vécu, dans le mouvement réflexif d’une quête identitaire ou existentielle. Détournement, prolongement, hypothèses, on assiste à une réappropriation des récits cinématographiques par le personnage ou le narrateur, en fonction de ce qui fait écho en lui dans les images projetées. Ces textes présentent un sujet inquiet, au sens philoso- phique du terme, en quête de réponses sur l’existence. Ce sujet est un spectateur sceptique, cherchant dans la succession des images une compréhension du monde, de soi et des autres, qui pourrait mettre à mal sa propre croyance sceptique selon laquelle nous ne pouvons connaître ni le monde ni les autres esprits, pour le dire à la manière du philosophe du cinéma Stanley Cavell. Les exemples d’écriture du sujet par le détour du cinéma sont représentatifs d’un phénomène qui touche des auteurs partageant la même conviction que les films recèlent une vérité à laquelle le spectateur n’a pas immédiatement accès. Ces auteurs mettent en évidence le pouvoir de certaines œuvres cinématographiques à proposer des solutions et permettre une forme de compréhension de soi. D’où l’obsession récurrente chez leurs per- sonnages de voir et revoir les films pour comprendre l’effet qu’ils ont sur eux. Cet effet passe d’abord par l’émotion, une émotion qui alerte et pousse à l’interrogation − « pourquoi ce film me touche-t- il autant ? » −, et qui lance les personnages dans une quête de sens. Le ressassement de la projection, jusqu’à la compréhension finale, se plie au mouvement et au temps de l’écriture et de la ré-écriture de soi dans un jeu de va-et-vient entre l’interprétation et l’auto-interpréta- tion par le biais du cinéma. Ce qui se joue principalement ici est la mise en œuvre littéraire du regard interprétatif du spectateur qui se pose aussi bien sur le film que sur la vie, dont la compréhension ap- pelle des schèmes cinématographiques. Un tel regard est exposé sous toutes les modalités de ses allers et retours du film à la vie. On peut s’interroger sur ce qui motive de telles expérimentations littéraires. Qu’y a-t-il à retirer de la double médiation du cinéma et de l’écriture ? Comment comprendre l’attrait qu’exerce l’expérience du spectateur sur une forme d’écriture visant le questionnement de l’intime ? Pour quelles raisons le sujet prend-il ici le détour du cinéma pour s’écrire ? Je ferai moi-même un détour par la philosophie pour tenter de répondre à ces questions, en m’appuyant sur la notion de projection telle qu’elle a été pensée par Stanley Cavell, en bon héritier de Wit- tgenstein. Cette notion me semble en effet tout à fait intéressante pour comprendre comment on assiste dans ces textes, à travers la double médiation du cinéma et de l’écriture, à une mise en abyme qui permet au sujet une appropriation consciente de soi. Il s’agira de réfléchir aux « effets de projections », au pluriel, selon les diverses significations qu’ils empruntent : effets de la projection mécanique du film, effets de la projection des émotions du spectateur sur le film, effets de la projection du film sur la vie elle-même. J’adopterai ici une perspective pragmatique selon laquelle le cinéma – tout comme la littérature – n’est pas un pur divertissement, mais peut avoir des « effets » pratiques sur la vie. De ce point de vue, si l’on veut par- ler de divertissement, le terme doit être entendu dans son sens éty- mologique comme un détournement (divertir, du latin « divertere », signifiant « détourner »). On peut considérer en ce sens le cinéma et la littérature comme des arts ayant la capacité de « faire diversion », permettant au sujet de prendre un « détour » peut-être pour mieux revenir à lui-même et au réel, au moyen – c’est l’hypothèse sur la- quelle se fonde cette étude – d’un processus de projection. i. Je n’y suis pas : scepticisme vs solipsisme Selon Stanley Cavell, la projection cinématographique se carac- térise par une structure ambivalente qui se manifeste à travers l’au- tomatisme au moyen duquel le spectateur est mis en présence d’un monde d’où il est absent. Cette idée, qu’il défend dans La projection du monde7, le premier ouvrage qu’il a consacré au cinéma en 1971, va à l’encontre des théories qui soutiennent que le cinéma serait un « art du présent », « où la présence du monde aurait trouvé en lui un mode de présentation homologue à celle du temps vécu »8. Le ciné- ma est un lieu où le monde est présenté et uploads/Litterature/ effets-de-projections-lecriture-du-suje.pdf

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