« A TOUS DITTEURS » : Le Livre du duc des vrais amants de Christine de Pizan Ac
« A TOUS DITTEURS » : Le Livre du duc des vrais amants de Christine de Pizan Actes de la journée d'étude organisée le 26 novembre 2016 à l'Université Sorbonne Nouvelle – Paris 3 -, édités par Dominique Demartini, Didier Lechat, Gabriella Parussa et Anne Paupert, avec la collaboration de Vanessa Obry. Pour citer ce volume : « A TOUS DITTEURS » : Le Livre du duc des vrais amants de Christine de Pizan, Actes de la journée d'étude organisée le 26 novembre 2016 à l'Université Sorbonne Nouvelle – Paris 3, éd. Dominique Demartini, Didier Lechat, Gabriella Parussa et Anne Paupert, avec la collaboration de Vanessa Obry, <http://www.univ-paris3.fr/publications-de-la-silc-section- francaise--393070.kjsp?RH=1329834238527>. JOURNÉE D’ÉTUDE CERAM t CLESTHIA CONTACTS dominique.demartini@freesbee.fr didier.lechat@wanadoo.fr g.parussa@wanadoo.fr apaupert@wanadoo.fr « » Le Livre du duc des vrais amants de Christine de Pizan UNIVERSITÉ SORBONNE NOUVELLE - PARIS 3 Amphithéâtre D2 Campus Censier 13 rue Santeuil, 75005 Paris 26 novembre 2016 de 9 h à 17 h Journée organisée par Dominique DEMARTINI (Université Sorbonne Nouvelle - Paris 3 / CERAM, EA 173) Didier LECHAT (Université de Caen Normandie / LASLAR, EA 4256) Gabriella PARUSSA (Université Sorbonne Nouvelle - Paris 3 / CLESTHIA, EA 7345) Anne PAUPERT (Université Paris Diderot - Paris 7 / CERILAC) avec le soutien de la branche française de la Société Internationale de Littérature Courtoise Sommaire Jacqueline CERQUIGLINI-TOULET, Écriture de commande et écriture de liberté dans Le livre du duc des vrais amants et les Cent Balades d’amant et de dame de Christine de Pizan ............... 2 Didier LECHAT, Le Lecteur dans Le Livre du duc des vrais amants ........................................ 12 Sylvie LEFÈVRE, Le Livre du duc des vrais amants. Entre dit à insertions et recueil lyrique : Structure fermée, structure ouverte. ......................................................................................... 23 Matthias SIEFFERT, L’autre forge : la poésie lyrique dans Le Livre du duc des vrais amants de Christine de Pizan ..................................................................................................................... 33 Andrea VALENTINI, Entre philologie et linguistique : l’expression du pronom sujet dans Le Livre du duc des vrais amants de Christine de Pizan ............................................................... 44 Lucien DUGAZ, Lignes de crête et lignes de faille dans le lexique amoureux du Livre du duc des vrais amants ....................................................................................................................... 66 Anne PAUPERT, La voix de la dame dans Le Livre du duc des vrais amants ........................... 73 Dominique DEMARTINI, Parler pour deux. Le Livre du duc des vrais amants ......................... 84 « A TOUS DITTEURS » : Le Livre du duc des vrais amants J. Cerquiglini-Toulet 2 Écriture de commande et écriture de liberté dans Le livre du duc des vrais amants et les Cent Balades d’amant et de dame de Christine de Pizan Jacqueline Cerquiglini-Toulet (Université Paris-Sorbonne – Paris 4) Le Livre du duc des vrais amants1 s’ouvre sur une dissociation entre la volonté de Christine et la commande qu’elle reçoit : « Combien que … » (v. 1). Dès ses premiers textes, elle se montre hantée par ce sentiment du décalage entre sa volonté propre et les exigences des commanditaires. Ainsi dès les Cent balades2, son premier recueil : « Aucunes gens me prient que je face / Aucuns beaulz diz, […] Mais je n’ay pas sentement ne espace / De faire diz de soulas ne de joye » (ballade I, v. 1-2 et 9-10). Elle sait bien pourtant, et elle l’affirme à la ballade L de ce premier recueil, que : « Le sentiment qui est le plus legier, / Et qui mieulx plaist a tous de commun cours / C’est d’amours » (v. 11-13). Il faut donc accepter et chanter « par couverture » une joie que l’on n’éprouve pas : « Je chante par couverture, / Mais mieulx plourassent mi œil » (Virelay3, I, v. 1-2)4. C’est le statut de l’écrivain commandité que Guillaume de Machaut mettait en scène à l’aide de l’image du ménestrel « qui chante en place et n’i ha plus courecié de li » (Voir Dit, lettre XXXI) ou « plus dolent de li » (Voir Dit, lettre XXXV5). La formule est un proverbe. Christine l’utilise dans Le Chemin de longue Etude6 pour parler de ce deuil, la mort de son mari, qu’elle doit cacher : « Mais tel rit et se soulace / Qu’il n’a plus triste en la place » (v. 145-146). La réticence de Christine s’approfondit au fil de son oeuvre quand il ne s’agit plus seulement pour elle de chanter « par couverture » mais quand se fait jour son désir d’une autre écriture, non plus d’amour mais de savoir. La posture qu’elle adopte alors est celle d’« être occupée ailleurs ». C’est la stance sur laquelle elle ouvre Le Livre du duc des vrais amants : « Combien que occupacion / Je n’eusse ne entencion / A present de dittiez faire / D’amours, car en aultre affaire / Ou trop plus me delictoye / Toute m’entente mettoye » (v. 1-6). C’est celle qu’elle reprend dans la ballade prologue des Cent balades d’amant et de dame7 : « Quoy que n’eusse corage ne pensée, / Quant a present, de dits amoureus faire, / Car autre part adés suis apensée » (v. 1-3). À quelle autre chose, où elle prend plus de plaisir qu’à écrire d’amour, peut-elle être occupée entre 1403 et 1405, date que l’on assigne à la composition du Livre du Duc ? (1405 est la date butoir puisque c’est celle du Livre des Trois Vertus8 où figure la lettre de la dame de la Tour). Le Livre de la Mutacion de Fortune, en vers, date de 1403, Le Livre des fais et bonnes meurs du sage roy Charles V, en prose, de 1404. Ce sont des œuvres « de trop greigneur estude » selon la formule qu’utilise Christine dans la ballade prologue des Cent Ballades d’amant et de dame (v.19). La dissociation est extrême dès Le Livre du duc puisqu’il s’agit de célébrer l’amour courtois alors 1 Christine de Pizan, Le Livre du Duc des vrais amants, éd. et trad. Dominique Demartini et Didier Lechat, Paris, Champion, Classiques Moyen Âge, 2013. 2 Dans Œuvres poétiques de Christine de Pisan, éd. Maurice Roy, t. I, Paris, Librairie Firmin Didot, 1886. 3 Œuvres poétiques de Christine de Pisan, t. I, op.cit. 4 Voir également les rondeaux V, VI, VII, XI « De triste cuer chanter joyeusement ». 5 Guillaume de Machaut, Le Livre du Voir Dit, éd. Paul Imbs et Jacqueline Cerquiglini-Toulet, Paris, Librairie générale française, « Lettres gothiques », 1999. 6 Christine de Pizan, Le Chemin de longue Etude, éd. Andrea Tarnowski, Paris, Librairie générale française, « Lettres gothiques », 2000. 7 Christine de Pizan, Cent ballades d’amant et de dame, éd. Jacqueline Cerquiglini-[Toulet], Paris, Union générale d’éditions, « 10-18 », 1982. 8 Christine de Pizan, Le Livres des Trois Vertus, éd. Charity Cannon Willard et Eric Hicks, Paris, Honoré Champion, 1989. « A TOUS DITTEURS » : Le Livre du duc des vrais amants J. Cerquiglini-Toulet 3 qu’elle le réprouve et que sa pensée profonde est qu’il ne s’agit pour la femme que d’un leurre. Elle accepte pourtant la commande du Duc mais décide d’écrire « en sa personne ». Que signifie l’expression ? Qu’elle va écrire en je l’histoire que le duc lui raconte. Une rubrique le dit explicitement. Celui qui parle est : « Le Duc des vrais amants ». Le je que nous entendons et lisons n’est pas celui de Christine ou, comme dans le Dit de la Pastoure9 où intervient également une rubrique La Pastoure après le prologue, n’est pas directement le je de Christine. On retrouve l’expression à la fin du XVe siècle dans une rubrique du Temple de Bocace de George Chastelain10 : « Icy recite l’acteur en la persone de la roine d’Angleterre les parolles dont elle usa envers Jehan Bocace, gisant mort en la tombe » (p. 83). La formule introduit là un dialogue entre la Reine et Boccace. Ce n’est pas le cas chez Christine. La rubrique ouvre un récit. Pourquoi Christine n’a-t-elle pas alors choisi de le faire à la troisième personne ? La volonté est double : être au plus près du récit du duc, « Tout ainsi comme il me compte » (v. 26), mais sans assumer les paroles et conduites évoquées. Christine a recours à toute une gamme de moyens pour affirmer sa liberté. Ils tiennent à la construction globale du livre avec l’introduction de la coda lyrique après le premier explicit ; ils résonnent dans la construction du récit par l’introduction d’un personnage qui porte les idées morales de Christine sur l’amour courtois ; ils se lisent enfin dans une mutation radicale d’un concept concernant l’amour courtois et dans une coloration légèrement subversive de certains détails topiques qui laissent présager, en sous-main, une fin malheureuse pour ces amours racontées. I. Contrainte et liberté : Un double je, une double destination du livre Christine ne s’efface pas une fois le prologue achevé. Elle reprend la parole après le premier explicit dans un curieux mélange de troisième et de première personne. L’adresse est la suivante : « A tous ditteurs qui savoir / Ont en eulx, celle savoir uploads/Litterature/ ldva-volume.pdf
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- Publié le Apv 16, 2022
- Catégorie Literature / Litté...
- Langue French
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