Avertissement Pendant ces dernières décennies, l'approche de la grammaire a bea
Avertissement Pendant ces dernières décennies, l'approche de la grammaire a beaucoup changé, particulièrement l'analyse du système prédicatif de l'égyptien ancien. Une période de bouleversement est toujours stimulante intellectuellement, mais il nous manquait un ouvrage qui synthétise les nouvelles données et puisse servir de référence à ceux qui étudient l'égyptologie. Cette lacune a été comblée par la publication de la Grammaire raisonnée de l'égyptien classique, réalisée par Michel Malaise et Jean Winand (Aegyptiaca Leodaniensia 6, Liège 1999, abrégée par GREC dans ces pages). Cet ouvrage n'est toutefois pas un manuel, et pour les débutants, il peut paraître difficile d'accès. C'est pourquoi, en élaborant les cours de langue égyptienne que je donne à l'Université Libre de Bruxelles, j'ai constitué un fascicule qui peut donner une première approche de l'égyptien classique. Ce cours doit beaucoup à la grammaire de M. Malaise et J. Winand, et ne la remplace évidemment pas. On ne condense pas plus de 800 pages en une cinquantaine. Tous les points de grammaire égyptienne ne sont pas traités, et certains le sont de manière trop peu détaillée. Il vise donc à soutenir l'enseignement du premier niveau d'égyptien et, lors de la lecture de textes, il faudra se reporter à la GREC. Je n'ai pas inséré dans ce fascicule de description du système graphique. Cela fera l'objet d'une autre note… Ce fascicule est utilisé à Egyptologica pour les cours de langue égyptienne, et notre Webmaster, Jean-Pol Schrauwen, m'a convaincue de le mettre à la disposition du public en le plaçant sur notre site. Quiconque le souhaite peut donc l'importer et l'utiliser. Je serai bien sûr enchantée de recevoir les commentaires et les critiques qui me permettraient d'améliorer ces pages. Michèle Broze Chercheuse qualifiée au FNRS Université Libre de Bruxelles mbroze@ulb.ac.be 2 Introduction La langue égyptienne est attestée par écrit depuis la fin du quatrième millénaire (env. 3150) jusqu’au XVIIe siècle. Elle est encore employée comme langue liturgique par les chrétiens d’Égypte (les coptes), sans toutefois être encore une langue vivante. L’égyptien appartient à la famille des langues appelées chamito-sémitiques en Europe occidentale, afro-asiatiques dans le monde anglophone1. La dénomination semble impliquer qu’il existe deux sous-groupes, l’un sémitique, l’autre chamitique. Ce n’est pas le cas: à côté du groupe sémitique, le plus important se distinguent cinq groupes, parmi lesquels se trouve la langue égyptienne. La famille chamito-sémitique: 1. Les langues sémitiques: Le terme sémitique est appliqué depuis le XVIIIe siècle aux langues parlées depuis l’Antiquité dans la plus grande partie de l’Asie Occidentale (Mésopotamie, Palestine, Syrie, Arabie), et à la suite de conquêtes, au premier millénaire de notre ère, en Afrique du Nord et en Éthiopie. Le groupe est divisé en trois sous-groupes: au nord: Le groupe oriental est représenté par l’akkadien (dans lequel figure probablement aussi l’éblaïte, attesté en Syrie du Nord, donc dans la partie occidentale). Le groupe occidental est représenté par l’ougaritique, l’amorite, le cananéen (hébreu, phénico-punique, moabite) et l’araméen et le syriaque. au sud: Le groupe méridional est représenté par l’arabe et le sudarabique, et l’éthiopien (résultat de l’émigration en Afrique orientale de populations sudarabiques). 2. L’égyptien ancien anciennement parlé dans la vallée du Nil. 3. Les langues berbères, parlées depuis la côte atlantique jusqu’à l'Oasis de Siwa et depuis la Méditerranée jusqu’au Mali et au Niger par environ cinq millions de personnes. 4. Les langues couchitiques, parlées en Afrique orientale par environ quinze millions de personnes. Elles ne sont connues que depuis le XVIIe siècle. Le bedja, une de ces langues, a des affinités étymologiques avec l’égyptien ancien. 5. Les langues tchadiques, parlées par environ trente millions de personnes, et comprenant environ 140 langues et dialectes, sont attestées en Afrique sub-saharienne (Nigéria, Cameroun, Tchad, Niger). 1 Ou encore sémito-chamitiques en Europe de l'Est. Référence est faite à deux des fils de Noé, Cham et Sem. 3 6. Les langues omotiques, dont on ne sait pas avec certitude s’il faut les rattacher à la famille chamito-sémitique, sont parlées par environ un million de personnes sur les rives de la rivière Omo et au sud-ouest de l’Éthiopie. Pour en savoir plus: D. COHEN (éd.), Les langues chamito-sémitiques, Paris, 1988. C. T. HODGE (ed.) Afroasiatic. A Survey. Janua Linguarum Series Practica CLXIII (The Hague-Paris, 1971. A. LOPRIENO, Ancient Egyptian. A Linguistic Introduction, Cambridge, 1995, p. 1-5. La langue égyptienne en diachronie Attestée pendant plus de quatre millénaires, la langue égyptienne offre un terrain idéal pour l’étude diachronique. On distingue deux grands stades, appelés égyptien de la première phase et égyptien de la seconde phase. Le passage entre les deux phases se caractérise par un changement entre une morpho-syntaxe synthétique et une morpho- syntaxe analytique. Exemple: sn.t, la soeur donnera ultimement en copte t-sône. La terminaison du féminin a disparu, mais on note la présence d’un article féminin. Le vocabulaire se modifie également, soit par le glissement du sens de certains mots, soit par l’introduction de mots nouveaux. D'autre part, on constate un changement dans l’ordre des mots (passage de l’ordre Verbe-Sujet-Objet à l’ordre Sujet-Verbe-Objet). Egyptien de la première phase: 1. Ancien égyptien: attesté à l’Ancien Empire (de la troisième à la sixième dynastie). Les documents principaux sont les Textes des Pyramides (corpus de formules funéraires attestées dans les pyramides royales à partir de la cinquième dynastie) et les autobiographies privées (gravées sur les murs des tombes de l’élite sociale). 2. Le moyen égyptien (appelé aussi égyptien classique): attesté depuis la Première Période Intermédiaire jusqu’au début du Nouvel Empire. C’est l’état de langue des Textes des Sarcophages. On le trouve dans de nombreuses inscriptions royales et privées, dans de nombreux textes littéraires et hymnes (par exemple: Sinouhé, le Paysan éloquent, le Naufragé, les «contes « du papyrus Westcar, les instructions (e. a. à Mérikaré), le Dialogue du désespéré avec son Ba, les hymnes au roi Sésostris III,…). Nous disposons aussi de textes administratifs et de lettres. 4 Entre ces deux étapes de la langue, il n’y a pas de rupture, mais une évolution graduelle. On notera que les documents royaux et religieux évoluent moins vite que les textes de la pratique en premier lieu, les textes littéraires profanes ensuite. Égyptien de la seconde phase: Il ne faut pas se représenter un changement radical, survenu d’un coup, mas les différences entre première et seconde phases suffisent pour parler d’un nouvel état de langue. 1. Le néo-égyptien (en anglais: Late Egyptian): attesté depuis le Nouvel Empire jusqu'à la Troisième Période Intermédiaire. Il apparaît d’abord dans des textes de la pratique, mais s’étend aux textes littéraires (par exemple: les stories ramessides). Des traits de moyen égyptien y sont conservés, en proportion variable. 2. Le démotique: attesté depuis la 26e dynastie jusqu’au cinquième siècle de notre ère (époque romaine). Il est utilisé pour des textes de la pratique et pour des textes littéraires (cycle de Satni, geste de Pétoubastis, par exemple). On constate l’emploi de formes nouvelles et l’abandon d’anciennes formes. Le système graphique (appelé démotique) diffère de celui du néo-égyptien. 3. Le copte: se distingue surtout du démotique par le système graphique, c’est-à-dire par l’adoption d’une graphie alphabétique dérivée de l’alphabet grec, ce qui implique la notation des voyelles. Elle a servi notamment à traduire en égyptien l’Ancien et le Nouveau Testaments. C’est aussi la langue des textes de Nag Hammadi (textes gnostiques, hermétiques, et même une traduction d’un extrait de la République de Platon) Ce n’est pas seulement une langue de traduction, mais aussi de création. Elle survit comme langue vivante jusqu’au XVIIe siècle, et reste la langue liturgique des chrétiens d’Égypte appelés coptes. L’égyptien de tradition (Late Middle Egyptian): Depuis le début du Nouvel Empire jusqu’à la fin du paganisme, les Égyptiens utilisent dans certains documents une langue savante qui remonte à l’égyptien classique. C’est la langue des inscriptions royales et religieuses, des textes funéraires, des autobiographies de personnages privés. C’est encore elle qui est utilisée dans les incriptions des temples de l’époque gréco-romaine, comme Edfou, Philae ou Esna. Elle est toutefois perméable à des faits de langue du néo-égyptien et du démotique. 5 Les écritures: Depuis l’Ancien Empire, deux écritures sont attestées, une écriture de type monumental et une écriture cursive. Elles sont appelées respectivement hiéroglyphique et hiératique, suivant l’appellation que les Grecs leur donnèrent à la Basse Époque. L’écriture hiéroglyphique (iJeroglufika; gravmmata), sacralisante, correspond à ce que les Égyptiens appellent mdw n t r, paroles divines. On la trouve notamment gravée ou peinte sur les murs, les stèles, les sarcophages, les papyrus funéraires. Son détenteur divin est le dieu Thot, qui consigne grâce à elle les paroles divines. Présents dans le monde réel sensible, les hiéroglyphes servent à manifester la parole divine, émise dans le monde invisible, dans le monde des hommes. En ce sens, ce qui est écrit en hiéroglyphes est toujours validé. Le hiératique (iJeratika; gravmmata) est utilisé de manière concomitante pour écrire les textes de la pratique et la littérature profane. Toutefois, depuis l’adoption du démotique, elle est utilisée pour les textes liturgiques et certains Livres des Morts. C’est pourquoi les Grecs lui donnèrent le nom de hiératique. Il s’agit d’une cursive, où interviennent quelques ligatures de uploads/Litterature/ introduction-egyptien-classique.pdf
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- Publié le Mai 25, 2022
- Catégorie Literature / Litté...
- Langue French
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