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©http://www.megapsy.com/Textes/Freud/biblio076.htm 1 Les lapsus (1ère partie) Si les matériaux usuels de nos discours et de nos conversations dans notre langue maternelle semblent préservés contre l'oubli, leur emploi en est d'autant plus fréquemment sujet à un autre trouble, connu sous le nom de lapsus. Les lapsus observés chez l'homme normal apparaissent comme une sorte de phase préliminaire des « paraphasies » qui se produisent dans des conditions pathologiques. Je me trouve, en ce qui concerne l'étude de cette question, dans une situation exceptionnelle, étant donné que je puis m'appuyer sur un travail que Meringer et C. Mayer (dont les points de vue s'écartent cependant beaucoup des miens) ont publié en 1895, sur les Lapsus et erreurs de lecture. L'un des auteurs, auquel appartient le rôle principal dans la composition de ce travail, est notamment linguiste et a été conduit par des considérations linguistiques à examiner les règles auxquelles obéissent les lapsus. Il espérait pouvoir conclure de ces règles à l'existence d'un «certain mécanisme psychique rattachant et associant les uns aux autres, d'une façon tout à fait particulière, les sons d'un mot, d'une proposition, voire les mots eux-mêmes ». Les auteurs commencent par classer les exemples de « lapsus » qu'ils ont réunis, d'après des points de vue purement descriptifs interversions (par exemple : la Milo de Vénus, au lieu de la Vénus de Milo); anticipations et empiétements d'un mot ou partie d'un mot sur le mot qui le précède (Vorklang). Exemple : (es war mir auf der Schwest... auf der Brust so schwer; le sujet voulait dire « j'avais un tel poids sur la poitrine »; mais dans cette phrase, le mot schwer - lourd - avait empiété en partie sur le mot antécédent Brust - poitrine); postpositions, prolongation superflue d'un mot (Nachklang) (exemple ich fordere sie auf, auf das Wohl unseres Chefs AUFzustossen; je vous invite à démolir la prospérité de notre chef, au lieu de : boire - stossen - à la prospérité de notre chef); contaminations (exemple er setzt sich auf den Hinterkopf [il s’assoit sur la nuque]; cette phrase étant résultée de la fusion, par contamination, des deux phrases suivantes : er setzt sich emen Kopf auf [il redresse la tête] et : er stellt sich auf die Hinterbeine [il se dresse sur ses pattes de derrière]); substitutions (exemple : ich gebe die Präparate in den Briefkasten [je mets les préparations dans la boîte aux lettres], au lieu de : in den Brütkasten [dans le four à incubation]). A ces catégories les auteurs en ajoutent quelques autres, moins importantes (et, pour nous, moins significatives). Dans leur classification, ils ne tiennent aucun compte du fait de savoir si la déformation, le déplacement, la fusion, etc. portent sur les sons d'un mot, sur ses syllabes ou sur les mots d'une phrase. Pour expliquer les variétés de lapsus qu'il a observées, Meringer postule que les différents sons du langage possèdent une valeur psychique différente. Au moment même où nous innervons le premier son d'un mot, le premier mot d'une phrase, le processus d'excitation se dirige vers les sons suivants, vers les mots suivants, et ces innervations simultanées, concomitantes, empiétant les unes sur les autres, impriment les unes aux autres des modifications et des déformations. ©http://www.megapsy.com/Textes/Freud/biblio076.htm 2 L'excitation d'un son ayant une intensité psychique plus grande devance le processus d'innervation moins important ou persiste après ce processus, en le troublant ainsi, soit par anticipation, soit rétroactivement. Il s'agit donc de rechercher quels sont les sons les plus importants d'un mot. Meringer pense que, « Si l'on veut savoir quel est dans un mot le son qui possède l'intensité la plus grande, on n'a qu'à observer soi-même pendant qu'on cherche un mot oublié, un nom, par exemple. Le premier son qu'on retrouve est toujours celui qui, avant l'oubli, avait l'intensité la plus grande ». « Les sons les plus importants sont donc le son initial de la syllabe radicale, le commencement du mot et la ou les voyelles sur lesquelles porte l'accent ». Ici je dois élever une objection. Que le son initial d'un nom constitue ou non un de ses éléments essentiels, il n'est pas exact de prétendre qu'en cas d'oubli il soit le premier qui se présente à la conscience; la règle énoncée par Meringer est donc sans valeur. Lorsqu'on s'observe pendant qu'on cherche un nom oublié, on croit souvent pouvoir affirmer que ce nom commence par une certaine lettre. Mais cette affirmation se révèle inexacte dans la moitié des cas. Je prétends même qu'on annonce le plus souvent un son initial faux. Dans notre exemple Signorelli, on ne retrouvait, dans les noms de substitution, ni le son initial, ni les syllabes essentielles; seules les deux syllabes les moins essentielles, elli, se trouvaient reproduites dans le nom de substitution Botticelli. Pour prouver combien peu les noms de substitution respectent le son initial du nom oublié, nous citerons l'exemple suivant : un jour, je me trouve incapable de me souvenir du nom du petit pays dont Monte-Carlo est l'endroit le plus connu. Les noms de substitution qui se présentent sont : Piémont, Albanie, Montevideo, Colico. Albanie est aussitôt remplacé par Montenegro, et je m'aperçois alors que la syllabe Mont existe dans tous les noms de substitution, à l'exception du dernier. Il me devient facile de retrouver, en partant du nom du prince Albert, celui du pays oublié: Monaco. Quant au nom Colico, il imite à peu de chose près la succession des syllabes et le rythme du nom oublié. Si l'on admet qu'un mécanisme analogue à celui de l'oubli de noms peut présider aussi aux phénomènes du lapsus, l'explication de ces derniers devient facile. Le trouble de la parole qui se manifeste par un lapsus peut, en premier lieu, être occasionné par l'action, anticipée ou rétroactive, d'une autre partie du discours ou par une autre idée contenue dans la phrase ou dans l'ensemble de propositions qu'on veut énoncer : à cette catégorie appartiennent tous les exemples cités plus haut et empruntés à Meringer et Mayer; mais, en deuxième lieu, le trouble peut se produire d'une manière analogue à celle dont s'est produit l'oubli, par exemple, dans le cas Signorelli; ou, en d'autres termes, le trouble peut être consécutif à des influences extérieures au mot, à la phrase, à l'ensemble du discours, il peut être occasionné par des éléments qu'on n'a nullement l'intention d'énoncer et dont l'action se manifeste à la conscience par le trouble lui-même. Ce qui est commun aux deux catégories, c'est la simultanéité de l'excitation de deux éléments; mais elles diffèrent l'une de l'autre, selon que l'élément perturbateur se trouve à l'intérieur ou à l'extérieur du mot, de la phrase ou du discours qu'on prononce. La différence ne paraît pas suffisante, et il semble qu'il n'y ait pas lieu d'en tenir compte pour tirer certaines déductions de la symptomatologie des lapsus. Il est cependant évident que seuls les cas de la première catégorie autorisent à conclure à l'existence d'un mécanisme qui, reliant entre eux sons et mots, rend possible l'action ©http://www.megapsy.com/Textes/Freud/biblio076.htm 3 perturbatrice des uns sur les autres; c'est, pour ainsi dire, la conclusion qui se dégage de l'étude purement linguistique des lapsus. Mais dans les cas où le trouble est occasionné par un élément extérieur à la phrase ou au discours qu'on est en train de prononcer, il s'agit avant tout de rechercher cet élément, et la question qui se pose alors est de savoir Si le mécanisme d'un tel trouble peut nous révéler, lui aussi, les lois présumées de la formation du langage. Il serait injuste de dire que Meringer et Mayer n'ont pas discerné la possibilité de troubles de la parole, à la suite d' « influences psychiques complexes » par des éléments extérieurs au mot, à la proposition ou au discours qu'on a l'intention de prononcer. Ils ne pouvaient pas ne pas constater que la théorie qui attribue aux sons une valeur psychique inégale ne s'appliquait, rigoureusement parlant, qu'à l'explication de troubles tonaux, ainsi qu'aux anticipations et aux actions rétroactives. Mais là où les troubles subis par les mots ne se laissent pas réduire à des troubles tonaux (ce qui est, par exemple, le cas des substitutions et des contaminations de mots), ils ont, eux aussi, cherché sans parti-pris la cause du lapsus en dehors du discours voulu et ils ont illustré cette dernière situation à l'aide de très beaux exemples. Je cite le passage suivant : «Ru. parle de procédés qu'il qualifie de cochonneries " (Schweinereien). Mais il cherche à s'exprimer sous une forme atténuée et commence : " Dann sind aber Tatsachen zum Vorschwein gekommen. "Or, il voulait dire " Dann sind aber Tatsachen zum Vorschein gekommen " (" Des faits se sont alors révélés... "). Mayer et moi étions présents, et Ru. confirma qu'en prononçant cette dernière phrase il pensait aux "cochonneries ". La ressemblance existant entre "Vorscheïn " et "Schweinereien explique suffisamment l'action de celui-ci sur celui-là, et la déformation qu'il lui a fait subir.» «Comme dans les contaminations et, probablement, dans une mesure plus grande encore, les images verbales « uploads/Geographie/ freud-les-lapsus.pdf
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- Publié le Jui 03, 2022
- Catégorie Geography / Geogra...
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