La musique acousmatique I - Les origines par Pierre Schaeffer, la naissance d'u

La musique acousmatique I - Les origines par Pierre Schaeffer, la naissance d'un nouveau matériel 2 Pierre Schaeffer Pierre Schaeffer, né à Nancy le 14 août 1910, et mort aux Milles, près d'Aix-en-Provence, le 19 août 1995, est un ingénieur, chercheur, théoricien, compositeur et écrivain français. Il a également été homme de radio, fondateur et directeur de nombreux services. Il est considéré comme le père de la musique concrète et de la musique électroacoustique. Il produit des émissions, dont La coquille à planètes, et crée, en 1942, le Studio d'essai de la RTF, avec Jacques Copeau, voué à l'expérimentation radiophonique, et en 1951, le Groupe de musique concrètequi devient en 1958 le Groupe de recherches musicales. En 1953, chargé de mission au ministère de la France d’outre-mer, Schaeffer crée la Sorafom (Société de radiodiffusion de la France d’outre-mer). De retour à Paris en 1961, il fonde cette fois, au sein de la RTF qui devient l'ORTF en 1964, le Service de la recherche de la RTF, qu’il administre jusqu’en 1975, le Service de la recherche s’intègre alors à l’Institut national de l'audiovisuel. 3 C'est, entre autres, grâce aux travaux de Schaeffer en son sein qu'on sait aujourd'hui que la reconnaissance d'un instrument par son timbre dépend en grande partie de son attaque, et non seulement de la répartition spectrale de sa résonance, comme on le pensait suivant la théorie de Helmholtz répercutée dans l'enseignement musical par Danhauser. Fils d'un père violoniste et d'une mère chanteuse, Schaeffer s'est toujours interrogé sur le phénomène musical. Profitant des installations à sa disposition au Studio d’essai, et notamment de l'arrivée du magnétophone, il commence, en 1948, à effectuer des expérimentations au moyen de sons ou de séquences enregistrés sur des disques de vinyle. Il devient ainsi le pionnier de l'introduction de la technologie dans la composition et donne ainsi naissance à ce qu’il appelle « musique concrète ». Entre autres techniques, il utilise le « sillon fermé », où l'aiguille retombe indéfiniment dans le même sillon du disque. Des « objets sonores » en boucle sont ainsi créés, objets qu'il manipule par montage, par variations de vitesse et par diffusion à l'envers. De ces expérimentations naissent notamment l'Étude aux chemins de fer et la Symphonie pour un homme seul, pièces qui suscitent à la fois l’attention du milieu musical et les railleries des compositeurs de musique sérielle, avec qui Schaeffer sera souvent en conflit. La notion de musique concrète a souvent été mal interprétée. Ce genre désigne non pas un style ou un type de matériau, mais plutôt une démarche : « Lorsqu'en 1948, j‘ai proposé le terme de musique concrète, j‘entendais, par cet adjectif, marquer une inversion dans le sens du travail musical. Au lieu de noter des idées musicales par les symboles du solfège, et de confier la réalisation concrète à des instrumentistes connus, il s‘agissait de recueillir le concret sonore, d'où qu'il vienne, et d‘en abstraire les valeurs musicales qu'il contenait en puissance. » Il s’agit donc pour le compositeur de manipuler directement la matière sonore au lieu de confier cette tâche à des instrumentistes. Ce faisant, et par conséquent, tous les sons, quels 4 qu’ils soient, sont susceptibles d’être organisés en un discours musical, dont Schaeffer s’ingénie à cerner les contours. Assisté de Pierre Henry, devenu un des grands compositeurs du genre, Schaeffer dévoile ainsi un univers sonore qui abolit les limites de la musique instrumentale. Leur opéra Orphée 53, présenté au festival de Donaueschingen en 1953, fait d’ailleurs scandale. Schaeffer continue d’explorer ce nouveau genre musical, se concentrant sur des études d’objets sonores. Il cesse de composer en 1960, pour donner davantage de place à ses activités de chercheur. Il assure toutefois, à partir de 1968, et jusqu’en 1980, un séminaire sur la musique expérimentale au Conservatoire national supérieur de musique et de danse de Paris, conjointement avec le GRM(Groupe de recherches musicales) et Guy Reibel. Il ne revient à la composition, cette fois avec des sons électroniques, qu’en 1975 avec Le Triède fertile composé avec Bernard Durr, et, en 1979, avec Bilude. Souvent invité comme conférencier, où sa verve polémique suscite souvent les débats, il reçoit plusieurs distinctions honorifiques, dont le grand prix des compositeurs de la Société des auteurs, compositeurs et éditeurs de musique (SACEM) en 1976. Pierre Schaeffer s´est éloigné de l'univers musical dans les années 1980, après avoir critiqué l'avant-garde des années 1950 qui cherchait à rompre avec la tradition. Il s'est exprimé sur ce point avec le pianiste Otavio Henrique Soares Brandão qui a effectué sous sa direction une lecture de son ouvrage Traité des objets musicaux. Cette lecture vise à la création d'une technique instrumentale innovante qui ne rompt pas avec la tradition. Recherche L’avènement de la musique concrète conduit Pierre Schaeffer à une réflexion poussée sur le phénomène de la perception musicale. L'essentiel de ses travaux consiste à saisir la nature et la richesse de l'élément sonore, sa substance et sa matérialité, qu'il analyse en utilisant le terme d'« objet sonore ». Ce terme est inspiré de la phénoménologie et désigne 5 une entité sonore détachée de son contexte. L’objet est ainsi apprécié dans ses qualités intrinsèques, sans égard à sa signification ou à son contexte culturel. Plusieurs ouvrages viendront étayer cette démarche. Dans À la recherche d’une musique concrète, paru en 1952, il raconte la genèse de ce nouveau genre musical dont il tente d’apprivoiser l’immensité du domaine ainsi défriché. Un chapitre, écrit par Abraham Moles, dresse d’ailleurs les prémices d’un solfège de l’objet sonore. Ce solfège, contribution clé de Schaeffer et de ses collaborateurs à la recherche musicale, est décrit en détail dans son ouvrage maître, le Traité des objets musicaux, vaste somme philosophique, acoustique et musicologique sur les musiques expérimentales. L’objet sonore y est décrit sous toutes ses facettes avec un vocabulaire adapté à ses attributs typologiques et morphologiques. Schaeffer édicte également dans cet ouvrage un axiome qu’il reprendra souvent (« la musique est faite pour être entendue ») : « dans cette recherche d‘ailleurs, nous ne perdons pas de vue ce postulat, pour nous fondamental, que toute musique est faite pour être entendue. Nous rattachons ainsi tout langage musical possible à des valeurs élaborées au niveau de la perception7. » La formule deviendra son cheval de bataille face à l’abstraction de plus en plus poussée des démarches compositionnelles, souvent détachées de tout souci sonore ou musical au profit d’une construction purement intellectuelle. Schaeffer approfondit ses réflexions dans plusieurs essais et articles, notamment dans La Revue musicale et lors des séminaires du Conservatoire de musique de Paris ou des multiples conférences auxquels il est convié. Une synthèse de ses réflexions sur l’audiovisuel sera publiée dans les deux tomes de Machines à communiquer en 1970 et 1972. 6 Le magnétophone Un magnétophone est un appareil permettant d'enregistrer des sons sur une bande magnétique1 qui peut être enroulée dans une bobine ou une cassette. L'enregistrement magnétique a été imaginé dès 1877 par l'ingénieur américain Oberlin Smith (en)2. Les premières expériences pratiques remontent au Telegraphone de l'ingénieur danois Valdemar Poulsen en 1898. Quatre périodes marquent l'évolution de ces techniques : mécanique, électromécanique, magnétique et enfin électronique. 7 C’est grâce à l'arrivée des techniques d'enregistrement, d'abord le disque souple puis le magnétophone (1939) et la bande magnétique, puis la généralisation de l’utilisation des procédés magnétiques dans l’industrie phonographique (1945), que les tenants de la musique concrète pourront commencer l’exploration du phénomène sonore. En 1948 Pierre Schaeffer, animateur d'une petite équipe de recherche au sein de la Radiodiffusion française, invente une nouvelle forme d’expression artistique qu’il appellera lui-même « musique concrète ». Divers expérimentateurs ont exploré avant Schaeffer des idées mettant en jeu le son ou les bruits comme matériaux relevant des exigences de la composition. Cependant, aucun d’entre eux n’a l’idée d’utiliser l’enregistrement (pourtant accessible et perfectible dès les années 1910) afin de créer un véritable art des sons fixés. Lorem ipsum dolor sit amet, consectetuer adipiscing elit, sed diam nonummy nibh euismod tincidunt ut laoreet dolore magna aliquam erat volutpat. Ut wisi enim ad minim veniam, quis nostrud exerci tation ullamcorper suscipit lobortis nisl ut aliquip ex ea commodo consequat. Les origines Tout débute en 1948, quand Pierre Schaeffer, producteur de la Radio d'Essais de Paris, créait la première œuvre "concrète" : les Etudes de Bruit. En détournant un enregistrement gravé sur un disque de cire dont il referme sur lui-même le sillon plutôt que de lui laisser suivre sa spirale, il imagine d'observer l'effet de suspension surprenant d'un moment sonore, isolant une figure musicale atemporelle ainsi détachée de son origine. C'était le premier "objet sonore", un objet hors du temps... Un peu plus tard, en ouvrant l'enregistrement peu après l'attaque d'un piano, Pierre Schaeffer observe une mutation complète du timbre qui lui semble alors s'apparenter au hautbois. Prolongeant cette exploration par une lecture en sens inverse, il en remarque le résultat inouï, le bouleversement perceptif lié au profil sonore, qu'il désigne du terme d'anamorphose. 8 D'emblée, Pierre Schaeffer perçoit l'immense chantier expérimental qui s'ouvre devant lui à travers cette brèche technologique, uploads/s3/ origines-acousmatique-2.pdf

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