1 ESSAI SUR L’ORIGINE DU TOPONYME TZAÏR/DZAÏR (AL-DJAZAÏR) CAPITALE D’ALGERIE P

1 ESSAI SUR L’ORIGINE DU TOPONYME TZAÏR/DZAÏR (AL-DJAZAÏR) CAPITALE D’ALGERIE Par Hammou DABOUZ Comme les humains, les toponymes ont toute une histoire. Ils ont aussi une fonction en tant qu’outil d’identification. Ce que l'on peut voir d'un toponyme est le prolongement, l'aboutissement de centaines, voire de milliers d'années d'évolution. Rechercher l'étymologie d'un toponyme, c'est aussi voyager dans le temps. Au-delà de son contenant, ce qui est fascinant dans un toponyme, c'est sa considération symbolique et son cachet culturel, son histoire et son passé. La valeur historique et sociale, le contenu sémantique et le sens authentique qu'on ne voit souvent pas, sont pourtant riches et passionnants pour toute l’humanité. Comme tout domaine de la connaissance, l’étude des noms de lieux, pour être menée correctement, doit reposer sur certains principes et tenir compte de différentes données auxquelles l’on peut arriver. Pour arriver à éviter, autant que possible, les pièges qui peuvent être rencontrés, il est indispensable de ne pas se fier aux apparences et de considérer les différentes formes existantes des toponymes, de bien prendre en charge les langues historiquement employées et leurs particularités réciproques, la réalité des lieux, leur contexte historique, social et humain. Bien que l'onomastique est une science, la toponymie apporte une aide précieuse à l'histoire. Il est bien évident que le toponyme d’Alger est en soi-même un document historique, révélateur d'un ensemble de données utiles aux chercheurs. Ce toponyme avec ceux de la région algéroise constitue, correctement consulté, tout un livre d'histoire où se lisent non seulement la succession des diverses situations, mais aussi la lointaine origine de l’algérois. Se promener dans la région algéroise et prendre connaissance de son toponyme que de ses micro-toponymes, c’est admirer le kaléidoscope de sa faune et de sa flore, son présent et son passé, c’est découvrir ses caractéristiques tant physiques qu’humaines et, parmi celles-ci, l’apport précieux de sa population qui ne se cesse de se perpétuer au fil des siècles. C’est en bref se familiariser avec la structure spatiale de son urbanisation. Traverser l’Algérois, c’est aussi redécouvrir des termes et des expressions d’un langage populaire que la toponymie doit sauver de l’oubli. Etant donné que l’onomastique qui relève de la lexicologie, est une branche de la linguistique qui, en faisant partie intégrante des sciences sociales et humaines, elle ne peut faire l’objet d’une spéculation anti-philologique ou d’un débat tendanciel, voire fanatique qui fait que chacun croit à la supériorité de la langue qu’il pratique. Défendre une langue est une chose, mais essayer coûte que coûte d’apporter des inexactitudes grossières, des faussetés, d’arabiser les mots de souche amazighe ne peuvent qu’entacher le savoir et embrigader la pensée. Le statut de langue orale de tamazight (absence d’anciens documents écrits dans cette langue) a entravé d’un coté la possibilité de remonter dans l’état diachronique. Par ailleurs, les longs siècles de contact avec l’arabe et l’ignorance de l’élite arabisante des 2 mécanismes et règles de tamazight, et sa tendance à expliquer les mots amazighes par la langue arabe qu’elle maîtrise en exclusivité, a compliqué davantage la situation toponymique. Cette élite a un peu partout et tout le temps parasité, assimilé et intégré, après les avoir fait subir des transformations phonétiques et, en suite, sémantiques, de combien de toponymes (et d’anthroponymes) dans la langue arabe. Il y a lieu de dire que pour arriver à consolider toute hypothèse toponymique, il faut que l’analyse obéisse à une démarche philologique, à une objectivité et à des règles canoniques. A force de la propager par l’écrit et par le pouvoir politique, la forme arabe Al-Djazaïr s’est superposée à la forme populaire Tzaïr avant de prendre officiellement sa place. Outre le fait que la toponymie n'est pas une science exacte, la forme Al-Djazaïr intégrée profondément dans les textes écrits, souligne déjà la complexité de la situation. De même, la graphie arabe est bien pire lorsque les idéologues de cette orthographe s'en sont mêlés. Malheureusement on a oublié que la connaissance des langues qui, dans leurs dialectes et dans leurs prononciations particulières, peuvent fournir le toponyme d’Alger est d’une objectivité primordiale et d’une grande utilité. Depuis des siècles jusqu’à nos jours, l’élite arabisante, à tort et à travers, continue de participer de sa part à expliquer la langue amazighe par la langue arabe. Et pour arriver à cette finalité, on ne trouve pas quoi faire que de tenter d’assimiler, d’altérer, de déformer, si non de remplacer des toponymes découlant de la langue amazighe. Il y a lieu de faire remarquer que cette complexité particulière est propre à l’Afrique du Nord, mais la science onomastique n’a pas encore fini de révéler la grande partie de son contenu. Il faut, en outre, noter que l'incompréhension linguistique, due à la méconnaissance de tamazight, entre géographes et inculture, a poussé à remodeler morphologiquement et sémantiquement le toponyme Tzaïr pour l’effacer au plan des officiels. Ainsi dire, l'histoire linguistique est fortement liée à l'histoire idéologique. Les tenants de l’hypothèse selon laquelle « le pluriel » Al-Djazaïr renvoie à une certaine notion d’île, font rappeler qu’Al-Djazaïr aurait été fondée sur un archipel qui fait face au port d’Alger pour que ce nom de lieu soit à son tour altéré et, ensuite, appliqué par la France coloniale à l’Algérie tout entière et ce, à partir de 1839. Cependant des géographes et des lettrés arabisants avance l’idée selon laquelle le nom d’île désigne la côte fertile sise entre le vaste désert et la Méditerranée, ce qui inspire l’idée d’île fertile, d’île de vie Al-Djazaïr. Là l’aventurisme, l’imprécision et l’intention subjectiviste ont pris le dessus pour tenter d’expliquer cette situation toponymique sous un prisme déformant pour arriver à « justifier » et, ensuite, imposer la forme Al-Djazaïr. Même en référence à une soi-disant « île de vie » ou « île fertile», on s’attendrait plutôt au singulier al-djazira et non pas al-djazaïr. D'après l'étymologie répandue par les pouvoirs politiques, se basant sur des conclusions fantaisistes de certains auteurs versés dans la falsification de l'histoire et de l'identité amazighe multimillénaire, le toponyme Al-Djazaïr est d'origine arabe : ce serait, selon eux, le doublet d'un mot plus connu « al-djozor » qui signifie les îles ! En fait, les tenants de cette hypothèse infondée, s’étaient depuis longtemps tournés vers la langue arabe pour ce qu’elle jouit de prestige pour trouver des interprétations tirées d’une pure imagination. Ils oublient que le noyau ayant donné naissance à Alger depuis l’ancienne Icosium a été de tous les temps bien situé à l’intérieur des terres. En s’écartant d’admettre l’existence évidente de la langue amazighe, ils avaient montré leur incompétence et leur éloignement d’une objectivité requise et indispensable pour toute conclusion. Quand on avance que lorsqu’on désigne Alger dans le langage populaire par Tzaïr (> Dzaïr), cela n’est qu’une contraction du mot djazaïr. Là on peut s’arrêter un tout petit peu pour dire que c’est le contraire qui se confirme. Toutes les données historiques se manifestent en faveur de confirmer qu’Alger, terre depuis des temps immémoriaux des At 3 imazighen, est l’œuvre d’une population amazighe sans rapport avec la langue arabe. Même les anciens écrits attestés, pour désigner Alger, donnent le mot Mozgan, qui n’est lui aussi que l’altération du mot imazighen. Mais de manière incorrecte, cette dimension amazighe de la capitale a été occultée par les partisans de la mystification de l’histoire. Malgré que la traditionnelle élite de la langue arabe a imposé cette forme de Djazaïr montée de toutes pièces, ce dernier mot n’a jamais pu supplanter la pratique populaire qui emploie à ce jour les réalisations Tzaïr et Dzaïr. En fait, c’est que la forme Tzaïr en usage, fut soigneusement altérée, et le sens originel détourné pour une finalité idéologico-politique. D’après la forme de Djazaïr, on peut être conduit à penser que cette dernière était déduite en partant de la forme Dzaïr à laquelle on avait rajouté les éléments el (article défini en langue arabe) et j(a) qui entre dans la lettre arabe dj déjà proche de l’affriquée dz, pour lui permettre de voir le jour sous la forme d’Al-Djazaïr. Bien que pour creuser davantage dans notre sujet et pour aborder les modalités concrètes de la recherche, un examen de la situation de la forme Al-Djazaïr et une vérification de quelques règles de base sont nécessaires. Poser la vraisemblable hypothèse que le toponyme d’Alger provient de Al-Djazaïr, revient à admettre que : 1. La langue arabe a été parlée dans la région algéroise pendant l’apparition de ce toponyme au Moyen Age, chose qui n’est pas vraie. Là l’opinion largement répandue auprès des historiens, et qui ne fait l’objet d’aucune contestation, c’est que les At imazighen (Beni Mezghena d’ascendance massisylienne) étaient depuis toujours les maîtres du territoire algérois. Ce sont leurs générations passées qui occupaient depuis fort longtemps les espaces où existait l’ancienne Icosium à laquelle le prince amazighe Bologhine redonnera vie, lui donnera un caractère spécial et posera les jalons de ce que deviendra des siècles après Alger blanche, capitale actuelle de l’Algérie. En effet, les habitants d’Alger en particulier depuis sa fondation par Bologhine à nos jours sont dans leur majorité écrasante des uploads/s3/ essai-sur-l-x27-origine-du-toponyme-at-tzair-dzair-al-djazair-capitale-d-x27-algerie-2007.pdf

  • 40
  • 0
  • 0
Afficher les détails des licences
Licence et utilisation
Gratuit pour un usage personnel Attribution requise
Partager