Revue Médicale Suisse Anxiété dans le cadre de soins palliatifs Auteur : S. Pau

Revue Médicale Suisse Anxiété dans le cadre de soins palliatifs Auteur : S. Pautex V. Toni P. Bossert H. Hilleret D. Ducloux J. Forestier E. Cabotte Y. Philippin H. Guisado N. Vogt-Ferrier Numéro : 3085 Sujet: Gérontologie Selon son intensité, sa durée et ses répercussions sur le fonctionnement quotidien, l’anxiété peut fortement diminuer la qualité de vie du patient en soins palliatifs. L’anxiété d’intensité légère à modérée, c’est-à-dire qui n’obnubile pas le patient, ne nécessite pas l’introduction systématique d’un anxiolytique, mais peut être soignée par la relation d’aide, le massage, la sophrologie, le soutien psychologique ou psychiatrique. La prescription d’anxiolytiques en présence d’une insuffisance rénale ou hépatique, ou en cas de voie d’administration réduite, est brièvement décrite. introduction Lors d'une maladie chronique évolutive avancée, la prévalence de l'anxiété varie entre 28 et 79%, selon la population étudiée, le lieu, l'avancement de la maladie et les outils d'évaluation utilisés.1,2 L'anxiété peut être une réaction liée à l'approche de la mort, ou résulter d'une pathologie psychiatrique ou somatique. L'anxiété peut être majorée par des exigences inadaptées à l'égard du patient de la part de l'entourage ou des médecins et soignants, attitude qui va renforcer le sentiment de solitude du patient et aggraver secondairement une angoisse de mort. Elle nécessite une évaluation nuancée et un traitement spécifique. La détresse psychologique de la personne atteinte d'un cancer a été décrite comme : «Une expérience désagréable de nature émotionnelle, psychologique ou spirituelle qui interfère avec l'aptitude à gérer le traitement du cancer. Elle se prolonge dans un continuum allant d'un sentiment commun normal de vulnérabilité, de tristesse, de peurs, jusqu'à des problématiques plus importantes comme une anxiété, des attaques de panique, une dépression, ou une crise spirituelle.» 3 Selon son intensité, sa durée et ses répercussions sur le fonctionnement quotidien, l'anxiété peut fortement altérer la qualité de vie du patient et compliquer sa prise en soins. De nombreuses ressources existent pour traiter l'anxiété. Notre propos est de favoriser l'identification de l'anxiété chez les patients en soins palliatifs, d'en améliorer l'évaluation et de faire connaître aussi bien les traitements non médicamenteux que pharmacologiques. définition Anxiété «Vague sentiment de malaise, d'inconfort ou de crainte accompagné d'une réponse du système nerveux autonome ; sa source est souvent non spécifique ou inconnue pour la personne. Sentiment d'appréhension généré par l'anticipation du danger. Il s'agit d'un signal qui prévient d'un danger imminent et qui permet à l'individu de réagir face à la menace.» 4 Notre propos sera centré sur l'anxiété en tant qu'épiphénomène de la maladie somatique terminale.5,6 présentation clinique : reconnaître et quantifier l'anxiété Les patients atteints d'une maladie avancée présentent souvent de nombreux symptômes physiques et psychologiques intriqués et la mise en évidence d'une anxiété peut se révéler un vrai défi. Les tableaux 1 à 3 résument les manifestations cliniques de l'anxiété et les facteurs favorisant sa survenue en soins palliatifs. Face à un patient anxieux, l'anamnèse permet de préciser le début du trouble, sa chronologie, la relation avec la maladie et l'histoire de vie du patient, ainsi que les conséquences sur ses activités de la vie quotidienne. L'approche interdisciplinaire consiste à évaluer l'anxiété du patient, souvent à l'aide d'une échelle visuelle analogique des symptômes (type Edmonton). Cette phase d'exploration conduit le soignant à : * Ecouter le patient. * Vérifier ce qu'il sait de sa situation actuelle. * Créer des liens entre le comportement et les sentiments. * Prendre note des stratégies d'adaptation déjà employées par le patient, afin d'identifier les plus utiles dans la situation actuelle. Une pathologie psychiatrique sous-jacente doit bien entendu être recherchée, ainsi qu'une pathologie somatique associée. Dans la mesure du possible, une échelle de dépistage est utilisée.7-9 Outre l'échelle des symptômes d'Edmonton, la plus utilisée en soins palliatifs est l'Hospital Anxiety and Depression Scale (HADS), (annexe 1), car elle a été développée pour des patients atteints d'une pathologie somatique. Elle a été validée en français, ainsi que lors de maladie oncologique avancée et en ambulatoire. Cette échelle, complétée par le patient, permet aussi de mesurer l'efficacité du traitement introduit. Elle est composée de deux sous- échelles de sept items, l'une pour l'anxiété, l'autre pour la dépression, qui peuvent être cotées de façon indépendante. Chaque question peut être annotée (attribution d'un score) de zéro à trois points, ce qui fait un maximum de 21 points pour chaque sous-échelle. Dès sept à huit points, on parle d'une possible anxiété et dès dix à onze points d'une anxiété probable. Les auteurs d'une étude rétrospective récente chez 216 patients atteints de cancers avancés ont comparé la mesure de l'intensité de l'anxiété sur une échelle visuelle analogique (EVA) au score de l'HADS.10 En prenant comme point de référence un score HADS L 8, l'EVA (score L 2) a eu une bonne sensibilité (86%), mais par contre une spécificité faible (56%) pour le dépistage de l'anxiété. Les autres échelles classiquement utilisées dans le dépistage de l'anxiété (échelle d'anxiété d'Hamilton, State Trait Anxiety Inventory) n'ont pas été validées chez des patients atteints d'une maladie évolutive avancée. traitements Le traitement de l'anxiété en soins palliatifs repose souvent sur des données empiriques (publication de rapports de cas). On retrouve néanmoins un certain consensus sur le fait qu'une anxiété d'intensité légère à modérée ne nécessite pas l'introduction systématique d'un traitement médicamenteux anxiolytique, mais peut être prise en charge par des moyens non médicamenteux.3 Pour juger de l'intensité d'une anxiété, nous proposons la définition empirique suivante (G. Bertschy, communication personnelle 2006). Une anxiété est d'intensité sévère lorsqu'elle devient incapacitante, c'est-à-dire lorsqu'elle interfère de manière significative avec les activités du sujet. L'envahissement des pensées anxieuses et la gêne qu'elles représentent sont alors telles dans le cadre de l'activité quotidienne que le patient ne se sent plus disponible mentalement pour les contacts avec ses soignants, avec ses visiteurs, ou pour ses activités personnelles (lecture, télévision, musique). En soins palliatifs, l'anxiété légère à modérée constitue une indication de premier choix aux interventions non médicamenteuses. L'anxiété sévère n'est pas une contre-indication à de telles interventions, qui peuvent être associées aux approches pharmacologiques. Traitements non médicamenteux Le lecteur trouvera ci-dessous la description des approches non pharmacologiques, complémentaires entre elles, des professionnels suivants : 1) l'infirmie(è)r(e), 2) le psychologue, et 3) le psychiatre. Apport des soins infirmiers La relation d'aide, le toucher massage et la sophrologie sont des moyens proposés à but anxiolytique par les soins infirmiers. Ces approches sont décrites successivement. La relation d'aide10 «Aider quelqu'un, c'est s'engager avec lui dans une séquence d'interactions verbales et non verbales, dans le but de faciliter l'expression, la compréhension et la prise en charge de son vécu.»11 Dans la relation d'aide, l'infirmière offre des entretiens (patient-soignant) structurés.12 C'est un processus Dans la relation d'aide, l'infirmière offre des entretiens (patient-soignant) structurés.12 C'est un processus d'interaction l'un avec l'autre, un échange à la fois verbal et non verbal qui permet de créer le climat de confiance dont la personne a besoin pour accéder à sa réalité et reconnaître ce qu'elle est. Cette démarche aide le patient à réduire son anxiété dans l'immédiat et lui permet d'être mieux préparé en cas de récidive. Les objectifs de la relation d'aide ont été énumérés par J.Travelbee (figure 1) et peuvent aider le patient à donner, graduellement, un sens à ce qu'il vit.13 * Les phases dans la relation d'aide et ses implications Peplau14 définit quatre phases dans l'entretien de relation d'aide : orientation, identification, exploration et résolution (tableau 4). * Les actions proposées13 lors d'une relation d'aide comprennent : Prodiguer un enseignement visant le mieux-être du patient. Passer en revue et analyser les événements, les pensées et les sentiments ayant précédé la crise d'anxiété. Inventorier les moyens utilisés avec succès par le patient dans les moments d'anxiété et de nervosité. Inciter le patient à élaborer un programme d'activités ou d'exercices qui peut contribuer à diminuer son anxiété. Proposer au patient des façons d'éliminer les idées noires (prendre conscience des pensées négatives, dire Proposer au patient des façons d'éliminer les idées noires (prendre conscience des pensées négatives, dire «non» lorsqu'elles surviennent et leur substituer des pensées positives, etc.). La contre-indication principale à la relation d'aide est la présence d'un état confusionnel. Pour le patient, les résultats escomptés d'une relation d'aide comprennent : * D'être conscient de son anxiété. * De se sentir moins anxieux. * D'utiliser efficacement les ressources et les réseaux de soutien à sa disposition. Le toucher massage ® Appelé le massage bien-être ou le massage de confort, il s'agit d'un outil d'accompagnement privilégié de la personne en situation d'anxiété.15 Les formes douces de massage semblent réduire le niveau d'anxiété chez certains patients. Le massage permet d'atténuer ce symptôme à un seuil tolérable en apportant une relaxation, une détente et une amélioration du bien-être. Il semble aussi modifier la réponse au stress. Certains patients utilisent le moment du massage comme espace de parole ou d'expression d'émotions. Le massage a fait l'objet d'essais cliniques contrôlés (tableau 5). Quatre études ont été incluses dans une revue systématique montrant une réduction statistiquement significative de l'anxiété chez des patients atteints d'une maladie oncologique après des séances de massages.16 Les uploads/Sante/ anxiete-dans-le-cadre-de-soins-palliatifs.pdf

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  • Publié le Jul 09, 2021
  • Catégorie Health / Santé
  • Langue French
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