Tous droits de traduction et d’adaptation réservés pour tous pays © 2022 Studio
Tous droits de traduction et d’adaptation réservés pour tous pays © 2022 Studio So What Co., Ltd. Rappel Après avoir défié le Commissaire Juve et Scotland Yard, l’infâme Fantomas a réussi à s’échapper à vélo, alors que tout le monde le croyait mort dans l’explosion de sa fusée… 1. Les 385 habitants du village d’Asnières-sur-Vègre n’avaient jamais eu l’occasion de faire parler d’eux ni de leur village tranquille. Les amateurs d’architecture médiévale connaissaient parfois l’une des merveilles qu’Asnières recélait, et notamment le Temple, cette ancienne cour de Justice du XIIIe siècle – un édifice remarquable par sa beauté. Mais la France, dans son ensemble, ignorait l’existence de ce paisible patelin, jusqu’à ce qu’un 386e habitant vint s’installer quelques mois plus tôt au manoir de la Tannerie. Il l’avait racheté sur un coup de tête, après avoir été séduit par la sérénité des lieux. Plus encore que la somptueuse bâtisse, c’est le jardin rempli de roses odoriférantes qui avait emballé le nouveau propriétaire. Depuis lors, il sortait peu, tout occupé qu’il était par l’entretien de son parc coloré. Quelques courses à l’épicerie du village à pied, ou à la Flèche en voiture. Quelques promenades dans la belle campagne sarthoise vers Poillé-sur-Vègre, Tassé ou Avoise qui donnaient l’occasion aux habitants de croiser leur nouveau voisin sur le Vieux Pont ou à proximité de l’église Sainte-Hilaire (dont le nouvel habitant appréciait les somptueuses peintures murales). Il ignorait encore la plupart des noms de ses concitoyens, alors que tous le connaissaient et le saluaient immanquablement avec respect : — Bien l’bonjour Commissaire Juve. Peu de temps après s’être définitivement débarrassé de Fantomas (du moins le croyait-il), le Commissaire Juve avait en effet connu une sorte de déprime. La crise couva plusieurs semaines et avait fini par éclater dans son bureau parisien, où l’inspecteur Bertrand était rentré à l’improviste. Il avait trouvé son patron la tête sur le menton, le regard perdu, regardant le ciel par la fenêtre, tel un cancre rongé par l’ennui et qui rêve, au fond de la classe, de s’évader pour de bon. Bertrand s’était inquiété de la santé de son patron. Juve avait à peine tourné la tête vers son adjoint : — Tout va bien, mon petit Bertrand. Tout va bien, je vous assure. Il avait dit cela d’une voix si lasse, qu’à l’évidence il mentait éhontément. — Allons patron. Je vois bien que vous n’êtes pas dans votre assiette. Qu’est-ce qui vous ferait plaisir ? On a une information du tonnerre. Nous sommes sur le point d’arrêter un gang de cambrioleurs. Vous savez, la bande du Grand Jules. Ils s’apprêtent à passer à l’action cet après-midi chez un bijoutier de la place Vendôme. Vous voulez nous accompagner pour l’arrestation ? Ça vous changerait les idées, non ? Le Commissaire Juve afficha une moue boudeuse en guise de réponse. Comme courbé par le poids des ans, il se leva pour aller ouvrir la grande fenêtre de son bureau vers laquelle il se dirigea d’un pas si lent qu’on aurait dit qu’il avait cent ans. Après un silence interminable, il avoua : — Comprenez-moi Bertrand. Ce n’est pas que je n’aime plus mon travail. Mais maintenant que Fantomas est une affaire classée, je suis certes heureux d’avoir fait mon devoir… mais je m’ennuie… terriblement. » Puis il ajouta, l’air rêveur : — Quel dommage que je n’aie jamais pu lui ôter son masque bleu… En effet, l’explosion de la fusée n’avait malheureusement pas permis de révéler l’identité de Fantomas, rien n’ayant pu être extrait des cendres de l’engin spatial. Bertrand comprit que le malaise de son patron était profond. Il tenta alors une autre manœuvre. — Est-ce que vous voulez que nous allions voir ce journaliste, Fandor ? Il travaille toujours au Point du jour à ce que je sais. Ça vous ferait plaisir de déjeuner avec lui ? — Vous êtes gentil mon petit Bertrand, mais non. Nous allons encore parler de Fantomas et ça va me coller le bourdon. — Mais enfin Patron, vous n’allez pas rester là dans votre bureau à ruminer toute la journée ! Où est-il le commissaire Juve que j’ai connu ? Le plus grand policier français ? Celui que le monde entier nous envie ? Sensible à ces compliments, Juve se redressa de toute sa taille (qui était au demeurant fort modeste). Son visage prit un nouvel éclat, sa voix s’affermit, et ce fut d’un ton décidé qu’il déclara : — Vous avez raison Bertrand. Ça ne peut pas continuer ainsi ! À ces mots, l’Inspecteur leva les bras au ciel, ravi : — À la bonne heure, je savais bien que l’impétueux Juve, le stratège, que dis-je, le génie allait se réveiller. Alors, on va se l’arrêter le Grand Jules ? Tous les deux comme au bon vieux temps ? Avec une grimace malicieuse, Juve allait pourtant doucher ses espoirs : — Ça ne peut pas durer ainsi, et… je vais… prendre ma retraite ! L’inspecteur poussa un cri d’effroi et s’effondra dans le fauteuil qui faisait face au bureau de Juve : — Ce n’est pas possible. Vous ne pouvez pas nous faire ça. Frappant du poing sa main ouverte, se heurtant ensuite le front comme si une évidence venait de se faire jour, Juve était agité de tics nerveux et sautait tout autour de son adjoint. — Si ! La retraite ! Passer mes journées à pêcher. À faire des mots-croisés ! Ah : les mots-croisés : En huit lettres : N’a rien perdu pour attendre… Reprenant ses esprits, l’inspecteur Bertrand tentait de ramener à la raison le Commissaire : — Mais enfin Patron, vous n’avez jamais été à la pêche de votre vie. Juve se cabra en arrière, raide et souple à la fois puis partit d’un grand éclat de rire bref. — Ah ah ! Raison de plus pour ne pas rester une journée de plus ici. Les poissons m’attendent. Je les entends d’ici crier mon nom ! Joignant le geste à la parole, il mit sa main en pavillon autour de son oreille et gargouilla des bruits humides. Bertrand argumenta, insista, supplia, implora, rien n’y fit. Au bout d’une demi-heure, il finit par rendre les armes. C’était désormais à l’ex-commissaire Juve qu’il s’adressait. Résigné, à son tour, courbé et lent comme une tortue, comme si la dépression de son patron s’était montrée contagieuse, il s’apprêtait à quitter le bureau de son ancien supérieur, quand une partie de leur dialogue lui revint en mémoire : — En huit lettres : « N’a rien perdu pour attendre… Bertrand lui demanda quelle était la réponse à sa définition : — Fantomas ! Lâcha Juve, toujours obsédé par l’homme au masque bleu. Dans les jours qui suivirent, la hiérarchie de Juve s’était montrée compréhensive et avait tout fait pour que la volonté de ce héros national s’accomplisse. Les formalités administratives avaient été rondement expédiées. Il ne fallut que quelques semaines pour que le Commissaire Juve fût rayé du service actif et admis à faire valoir ses droits à la retraite. Trois mois plus tard, il avait fait l’acquisition de sa nouvelle demeure à Asnières-sur-Vègre puis déménagé l’appartement parisien qu’il occupait depuis plus de trente ans. Il réalisa qu’il n’avait pas pris le temps de se marier. Peut-être allait-il trouver l’âme sœur parmi les habitantes de son nouveau village ? La presse locale se fit l’écho de son installation dans la Sarthe. Dans les mois qui suivirent, l’inspecteur Bertrand lui rendit une ou deux fois visite. Fandor lui téléphona à quelques reprises pour prendre de ses nouvelles et promit de passer le voir – une promesse que son emploi du temps ne lui avait pas encore permis d’honorer. Juve avait ensuite passé son premier hiver à Asnières, nous étions désormais au mois de mars et tout dans la nature annonçait l’arrivée du printemps. Sécateur en main, l’ex-commissaire Juve l’attendait comme on attendait un suspect d’importance, prêt à faire son métier. Tout était désespérément calme à Asnières. Il était 10 heures du matin. Juve arpentait son territoire en s’émerveillant tous les trois pas, ici d’un bourgeon, là d’un oiseau. À l’abri des regards, il dansait dans son parc. La journée s’annonçait radieuse. Le téléphone sonna pourtant dans le manoir, obligeant Juve à courir pour ne pas manquer l’appel de son correspondant. Furieux d’avoir été dérangé dans sa promenade bucolique, Juve décrocha d’un ton peu aimable : — Qu’est-ce que c’est !? — Allô, Commissaire Juve ? » fit une voix féminine. — Il n’y a plus de commissaire Juve mademoiselle. Je suis jardinier en chef et vous me dérangez en pleine ronde. Qui est à l’appareil ? C’était Hélène, la fiancée de Fandor, et Juve se radoucit immédiatement. Lui annonçait-elle la venue de son ancien complice de tant d’aventures ? Non, le plus fameux rédacteur du Point du jour venait de s’envoler pour un reportage à l’étranger. Hélène s’était vu confier la garde de son jeune frère pendant quelques jours et voulait simplement rendre visite à son vieil ami. Pour vérifier s’il coulait uploads/Religion/ fantomas-a-moscou-french-edition-juste-leblanc.pdf
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- Publié le Sep 15, 2021
- Catégorie Religion
- Langue French
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