Revue des Sciences Religieuses Jean-Louis Bruch, La philosophie religieuse de K

Revue des Sciences Religieuses Jean-Louis Bruch, La philosophie religieuse de Kant, (Collection Analyse et Raisons) 1968 ; Id., Lettres de Kant sur la morale et la religion. Introduction, traduction et commentaires, (Bibliothèque philosophique bilingue) 1969 Maurice Nédoncelle Citer ce document / Cite this document : Nédoncelle Maurice. Jean-Louis Bruch, La philosophie religieuse de Kant, (Collection Analyse et Raisons) 1968 ;; Id., Lettres de Kant sur la morale et la religion. Introduction, traduction et commentaires, (Bibliothèque philosophique bilingue) 1969. In: Revue des Sciences Religieuses, tome 45, fascicule 2, 1971. pp. 186-189; https://www.persee.fr/doc/rscir_0035-2217_1971_num_45_2_2612_t1_0186_0000_2 Fichier pdf généré le 05/04/2018 186 COMPTES RENDUS montre l'importance du scheme de la proportion dans la pensée platonicienne et quel rôle ce scheme remplit en particulier dans le mythe de la caverne. Viennent en second lieu des essais sur l'usage qu'a fait Platon de certains appareils (par exemple le fuseau, la balance, etc...) pour illustrer ses théories. Enfin, dans un troisième groupe, c'est surtout la biologie platonicienne qui nous est présentée : on remarquera deux chapitres nouveaux sur la biologie du Timée et sur la pathologie mentale. D'autres notices substantielles ont été ajoutées et forment une quatrième section ; elles sont consacrées au cosmos asomatos, aux adèla etc... Mais dans le cours des chapitres anciens, l'auteur a glissé parfois des compléments encore inédits. Ainsi, p. 47, H signale l'exploration récente de la caverne du Mont Ida en Crète par M. Paul Faure. La description de cette grotte convient tout à fait à celle du VIIe livre de la, République. Si l'on accepte le rapprochement, il me semble que certains détails du texte de Platon sur lesquels hésitent parfois lees commentateurs peuvent se préciser : l'ouverture de la caverne est très large et la pente intérieure est rapide. Nous n'avons cependant là qu'une hypothèse. On regrettera que n'aient pas été joints à ce recueil les rapports présentés aux Congrès Budé de 1938 et 1953. M. Schuhl les destine à une autre publication. L'unité des études qu'il nous donne dans cet ouvrage-ci provient de l'intérêt constant qu'il porte au problème de la genèse et de la nature du mythe dans la pensée platonicienne. M. NÉDONCELLB Jean-Louis Bruch, La philosophie religieuse de Kant, Paris, Aubier, 1968, in 8°, 282 p. (Collection Analyse et Baisons). ID., Lettres de Kant sur la morale et la religion. Introduction, traduction et commentaires. Paris, Aubier, 1969, in-S°, 230 p. {Bibliothèque philosophique bilingue). La philosophie pratique de Kant a été l'objet en France d'une étude approfondie, celle de Victor Delbos, qui date de 1905. Mais la philosophie religieuse n'avait pas encore donné lieu chez nous à un examen complet, malgré le livre polémique de Sentroul et, plus récemment, les remarquables contributions de R. Vancourt et J. Lacroix. Aussi la thèse de J. L. Bruch sera- t-elle accueillie avec intérêt et, quand on l'aura lue, avec gratitude ; car elle est d'une excellente facture. A une époque où l'expression de la pensée philosophique est trop souvent entortillée et prétentieuse, l'auteur est resté fidèle à la tradition classique : il pense avec rigueur et clarté, il ne nous accable pas sous le poids de son érudition ; il est incisif et sobre ; il est à la fois capable de sympathie méthodologique et de sang-froid critique. Un tel ensemble de qualités est devenu trop rare pour qu'on ne le signale pas avec joie. La religion dans les limites de la simple raison n'est pas un prolongement banal des trois Critiques. Elle constitue en quelque sorte un nouveau départ. C'est que la notion de mal radical y apparaît pour la permière fois dans toute sa force. Au grand effroi de ses amis les Aufklarer, Kant introduit, dans son système, un pessimisme impitoyable ; il prend COMPTES RENDUS 187 au sérieux le péché et même le péché originel, qui grève la nature de tout individu en ce monde. Il est sur ce point — on serait tenté de dire : sur ce seul point — bon luthérien. Sans doute interprète-t-il le récit de la Genèse d'une manière intemporelle et repousse-t-il l'hypothèse d'une transmission héréditaire. Mais, au prix d'une obscurité ou, si l'on veut, d'un aveu d'ignorance quant à la raison finale de la présence du mal moral en chacun de nous, il maintient ce que l'expérience lui paraît montrer de façon indéniable : la perversion du cœur et la corruption de toutes les maximes qui en découle. Ce n'est pas, semble-t-il, un simple penchant universel au mal, mais une chute effective dans la faute. M. Bruch étudie avec soin la genèse de cette affirmation dans l'œuvre et il se sert aussi des notes de cours ou de la correspondance. Il veille à marquer exactement les limites de l'idée et à ne pas se laisser entraîner à des majorations indues. Le mal radical n'est pas le mal absolu ou diabolique. C'est une méchanceté plutôt qu'une malignité ou une rébellion ou une volonté du mal pour le mal. Il n'implique pas non plus, si j'ai bien compris, que la finitude soit synonyme de la culpabilité ou commence fatalement par la culpabilité. On ne peut, en somme, établir de symétrie entre le bien et le mal. Nous nous trouvons dans une situation pécheresse plutôt que dans une nature pécheresse par essence. Ce qui me frappe en lisant cet exposé, c'est que Dieu n'est pas mentionné expressément dans la définition du péché ni dans celle de la conversion. Bien que la religion soit l'intention de remplir tous les devoirs comme des commandements divins, les devoirs ne sont relatifs qu'à l'homme ; en un sens, on n'a même de devoir qu'envers le devoir, non envers Dieu. Il y a donc une laïcisation de la faute et de la conversion, en tant que leur motivation est plus morale que religieuse. Kierkegaard aurait été révolté par de tels propos : ne distingue-t-il pas d'emblée la faute d'ordre moral et le péché, qui suppose la foi au Dieu de la révélation î Kant se fait de la sainteté ou purement du mobile une conception strictement humaine. Par ailleurs, la conversion est décrite par lui sons l'influence piétiste comme une naissance instantanée. Il renforce par sa théorie énigmatique du caractère intelligible et du caractère empirique un débat qui devait naître inévitablement chez les disciples de Spener comme dans l'école des évangéliques en Angleterre : dans quelle mesure l'unicité de la conversion peut-elle se monnayer dans un progrès continu et méthodique de la conduite ? Et surtout l'idéalité du temps n'est- elle pas incompatible avec le remodelage du moi qu'opère la conversion ? Brunschvicg voyait dans cette dernière question la pierre d'achoppement de la philosophie morale et religieuse de Kant. Bruch avoue que la difficulté n'est pas complètement résolue par Kant, mais il apporte un élément intéressant de solution en proposant un équivalent non-phénoménal du temps qui pourrait déterminer le temps phénoménal, de la même manière que la Critique du Jugement dédoublait la causabilité en reconnaissant une raison (Grwnd) suprasensible, une eausabilité par la liberté, qui peut déterminer le sensible dans le sujet conformément à ses lois formelles. L'écart de Kant par rapport au christianisme orthodoxe se décèle très vite à propos de la justification. Non pas qu'il exclue la grâce, mais il lui assigne un rôle complémentaire ; elle achève ce que la conduite bonne a effectué ; elle autorise l'espoir d'être justifié aux yeux de Dieu, mais elle n'est jamais une rémission gratuite. C'est pourquoi la charité rédemptrice et l'Incarnation proprement dite sont étrangères à cette philosophie qui met en 188 COMPTES RENDUS avant un principe de justice dans l'homme et dans la divinité. Kant se méfie de l'amour. Les répercussions du moralisme sur la doctrine de l'immortalité de l'âme sont examinées à cette occasion par l'auteur. Notons en passant que la mort n'exprime pour Kant que la finitude biologique et n'a pas de connexion avec le péché. M. Bruch traite rapidement du destin d'outre-tombe, mais en retraçant l'itinéraire de Kant, qui passe d'un platonisme pré-critique à un postulat de la raison pratique. Ici encore s'affirme une conception plus éthique que religieuse : car la foi en la survie n'est pas fondée sur Dieu, mais sur un© exigence de progrès moral et indéfini. Toutefois, la Beligion insiste davantage sur le jugement de Dieu qui règle le compte de la vie terrestre pour la justification ou la damnation. Cette perspective eschatologique nous ramène à la religion révélée dont nous semblions nous être écartés. C'est un fait que Kant admet la réalité de la Révélation, quitte à l'interpréter à sa manière. Indifférent à la préparation juive, il croit à l'action divine dans le Nouveau Testament, bien qu'il réduise souvent la Révélation à une propédeutique de la raison. Que la foi ne contienne pas de mystère, on s'en aperçoit dans les pages qu'il consacre à la Trinité, où il ne discerne que trois propriétés fondamentales de Dieu, sinon trois divisions du pouvoir divin analogues à la séparation des pouvoir» dans Montesquieu... L'un des chapitres les plus originaux du livre concerne l'Eglise. Au-dessus Ides Eglises visibles, il y a la communauté éthique qu'est uploads/Philosophie/ bruch-jean-louis-la-philosophie-religieuse-de-kant.pdf

  • 104
  • 0
  • 0
Afficher les détails des licences
Licence et utilisation
Gratuit pour un usage personnel Attribution requise
Partager