1 Quand l’innovation sociale est portée par l’entrepreneuriat : la bienveillanc
1 Quand l’innovation sociale est portée par l’entrepreneuriat : la bienveillance au cœur du business model ou le social business en action Julie TIXIER Université Paris-Est, IRG Institut de recherche en gestion Place de la Porte des Champs, 4, route de Choisy, 94010 Créteil - France Julie.tixier@gmail.com Résumé : Dans le cadre de cette recherche, nous nous intéressons à l’innovation sociale et plus spécifiquement aux nouveaux modes de gestion de la question sociale par les entrepreneurs. Nous étudions alors ce que Yunus (2010) a défini comme le social business caractérisé par le fait de « mettre l’homme au cœur du processus » et plus particulièrement à l’entrepreneuriat social. Il s’agit d’entreprises dont la finalité est sociale et/ou sociétale tout en s’inscrivant dans une démarche classique d’entrepreneuriat. Ces entrepreneurs au cœur du dispositif et à l’initiative de cette orientation privilégient des objectifs d’innovation sociale. Nous nous fondons sur la définition de Bouchard (1999 : 2) de l’innovation sociale : « Par innovation sociale, on entend toute nouvelle approche, pratique ou intervention ou encore tout nouveau produit mis au point pour améliorer une situation ou résoudre un problème social et ayant trouvé preneur au niveau des institutions, des organisations, des communautés. ». Nous posons alors la question suivante : dans quelle mesure l’entrepreneuriat social propose une nouvelle conception de l’innovation sociale ? Nous nous interrogeons sur les modèles d’innovation sociale et sur les exemples concrets d’entrepreneuriat social qui bousculent les modes traditionnels de gestion. Nous soumettons ensuite une proposition de nouvelle modélisation de l’innovation sociale par l’entrepreneuriat. Mots-clés : innovation sociale, théorie de la traduction, entrepreneuriat social 2 Quand l’innovation sociale est portée par l’entrepreneuriat : la bienveillance au cœur du business model ou le social business en action Introduction : Dans le cadre de cette recherche, nous nous intéressons à l’innovation sociale et plus spécifiquement aux nouveaux modes de gestion de la question sociale au-delà des contours de l’entreprise. Si un certain nombre de dispositifs existent au sein des organisations pour gérer et anticiper les flux de personnel et l’évolution des compétences, quid de la gestion sociale au sein d’un territoire. La notion d’innovation sociale étudiée est en développement actuellement et prend diverses formes. Ici, la question sociale transcende le cadre de l’entreprise et va au- delà de la gestion des ressources humaines plus classique. La problématique sociale se trouve au cœur des moteurs de la création d’entreprise des entrepreneurs sociaux qui conçoivent leur projet en prenant en considération l’impact social et sociétal de leur entreprise. Nous posons alors la question suivante : dans quelle mesure l’entrepreneuriat social propose une nouvelle conception de l’innovation sociale ? Nous nous interrogeons sur les modèles d’innovation sociale et sur les exemples concrets d’entrepreneuriat social qui bousculent les modes traditionnels de gestion. Pour cela, comme cette recherche est de nature exploratoire et en est à ses débuts, nous nous fondons sur des exemples de social business rencontrés lors de réunions et conférences sur le sujet et auxquelles nous avons pu participer. Des entretiens formels complémentaires sont en cours de réalisation, dans le cadre de cette communication, seuls des entretiens et discussions informels, des témoignages et des articles de presse et de recherche sont utilisés à titre illustratif. Dans un premier temps, nous tentons de définir la notion de social business pour être plus précis au sein de la nébuleuse des concepts de la RSE (responsabilité sociale de l’entreprise) et de l’ESS (économie sociale et solidaire). Nous insistons sur le paradoxe du business model social au cœur du social business. Dans une deuxième partie, nous nous interrogeons sur la définition de la notion d’innovation sociale dans la littérature. Enfin, nous proposons un nouveau modèle d’innovation sociale appliqué au social business. 1. LE SOCIAL BUSINESS EN QUESTION : UN CONCEPT ET DES ACTIONS EN CONSTRUCTION Avant d’analyser l’innovation sociale au sein du social business, il nous semble indispensable de définir ce concept. Alors qu’il a déjà fait l’objet d’un certain nombre de publications aux Etats-Unis (Zahra et al., 2009, Thomson & Doherty, 2006), en France le concept est encore un peu flou et souvent noyé dans le cadre de la responsabilité sociale de l’entreprise (RSE) et de l’économie sociale et solidaire (ESS) notamment. 3 1.1.Entre RSE, ESS, BoP…. quid du « social business » ? Le champ de l’ESS est multiple et varié. Les acteurs, les institutions ainsi que leurs interrelations sont particulièrement hétérogènes. En France, le secteur de l’ESS s’est construit essentiellement sur les coopératives, particulièrement anciennes, et les associations. Les statuts des acteurs en question sont variés et leur mode de fonctionnement également. 1.1.1. RSE : un concept et une mise en pratique polymorphe L’entrée au sein de la recherche sur le social business commence le plus souvent par le champ de la RSE. En effet, depuis plus de cinquante ans aux Etats-Unis avec le concept de Corporate Social Responsability (CSR) et un peu plus récemment en France, le concept de RSE est étudié attentivement. Les chercheurs s’intéressants aux comportements des multinationales observent et analysent de nouveaux modes de fonctionnement à l’image de Pestre (2010) dans sa monographie de Danone. Ce groupe a engrangé depuis 1997 une politique de RSE et fait office de pionnier en France en la matière. Ce champ de la RSE est toujours en construction et de nombreux acteurs hétérogènes y cohabitent. Brabet souligne le fait que le champ soit encore contesté, mais en rappelle les enjeux et objectifs : « L’intérêt général, le respect de l’environnement et des droits humains, une meilleure équité, la lutte contre la pauvreté....sont revendiqués comme des objectifs prioritaires par tous les acteurs du champ mais les analyses différent grandement quant il s’agit des moyens à mettre en œuvre pour atteindre ces objectifs ». Brabet (2010 : 32). Les objectifs de la RSE sont donc relativement homogènes, mais ils sont également partagés par d’autres tels que l’ESS, le BoP et le social business. En revanche, le concept de RSE s’inscrit plus généralement dans le cadre des politiques des multinationales. Ces dernières soignent alors leur communication au travers d’actions spécifiques répondant aux impératifs du développement durable. Le potentiel régulatoire de la RSE étudié par l’équipe de Brabet met en évidence l’évolution des règles du jeu. Martinet et Payaud (2008) proposent une typologie de RSE se situant sur un continuum partant du modèle d’entreprise classique « profit for profit » pour ensuite définir la RSE dite « cosmétique », ensuite la RSE impliquée puis la RSE – BoP (the Bottom of the Pyramid – défini dans le 1.1.3) et enfin l’entreprise sociale. Les auteurs définissent la RSE dite « cosmétique » comme le premier degré de RSE au sein de l’entreprise et d’une mise en œuvre légère : « ces entreprises remplissent les conditions légales de l’article 116 de la loi française sur les Nouvelles réglementations économiques (NRE) qui stipule l’obligation pour les entreprises cotées de fournir des informations sur les conséquences sociales, territoriales et environnementales de leurs activités dans leur rapport annuel. » Martinet et Payaud (2008 : 202). Concrètement cela prend la forme de partenariat ponctuel avec une association ou un évènement. Les auteurs distinguent également deux types de RSE impliquée : la RSE périphérique et la RSE intégrée. La RSE périphérique ou annexes représente des actions spécifiques de l’entreprise mais sans lien avec son activité. Le mécénat est une illustration classique de ce type de RSE. Enfin, la RSE dite intégrée au sein des entreprises prend la forme d’indicateurs sociaux ou même de « sustainability scorecard ». Certaines entreprises commencent à contrebalancer les indicateurs de performance économique par l’introduction 4 d’indicateurs sociaux pour mesurer une performance « globale », voire même selon les auteurs la possibilité d’une performance « durable ». Toutefois, le recours croissant à un argumentaire RSE cherchant à légitimer des actions devient plus que suspect dans certaines entreprises. Le développement du « green-washing » (communication de RSE sans de nécessaires réelles actions) pousse à une prise de recul par rapport à ces politiques affichées de RSE. Notons également une distinction forte entre des actions internes et externes de RSE. Certaines entreprises en quête de légitimité vont mettre en place des dispositifs de RSE externes tout en gardant une politique de gestion des ressources humaines plus que discutable d’un point de vue RSE. Les trois dimensions RSE (économique, sociale et environnementale) sont rarement mise en œuvre de manière uniforme. Des choix sont réalisés au sein des entreprises et la dimension externe est souvent privilégiée car plus visible du grand public (consommateurs et investisseurs). Certaines grandes entreprises vont jusqu’à mettre en place une communication de RSE en même temps qu’un PSE (plan de sauvegarde de l’emploi) ou encore des fermetures d’usines. Contrairement à Martinet et Payaud, nous considérons que les concepts de BoP et d’ESS s’inscrivent certes dans un champ proche de la RSE mais ne répondent pas aux mêmes logiques économiques ni même sociales, c’est pourquoi nous les présentons séparément. 1.1.2. ESS : un secteur bien spécifique marqué par les associations et les coopératives Le secteur de l’économie sociale et solidaire (ESS) connait uploads/Management/ 2011-tixier.pdf
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- Publié le Jul 05, 2022
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