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Tous droits réservés © Théologiques, 2011 Ce document est protégé par la loi sur le droit d’auteur. L’utilisation des services d’Érudit (y compris la reproduction) est assujettie à sa politique d’utilisation que vous pouvez consulter en ligne. https://apropos.erudit.org/fr/usagers/politique-dutilisation/ Cet article est diffusé et préservé par Érudit. Érudit est un consortium interuniversitaire sans but lucratif composé de l’Université de Montréal, l’Université Laval et l’Université du Québec à Montréal. Il a pour mission la promotion et la valorisation de la recherche. https://www.erudit.org/fr/ Document généré le 12 avr. 2022 11:26 Théologiques « Respecte pourtant sa vie » (Jb 2,6) Réflexion sur la valeur de la vie en Afrique noire Ghislain Tshikendwa Matadi Théologie africaine et vie Volume 19, numéro 1, 2011 URI : https://id.erudit.org/iderudit/1014179ar DOI : https://doi.org/10.7202/1014179ar Aller au sommaire du numéro Éditeur(s) Faculté de théologie et de sciences des religions, Université de Montréal ISSN 1188-7109 (imprimé) 1492-1413 (numérique) Découvrir la revue Citer cet article Tshikendwa Matadi, G. (2011). « Respecte pourtant sa vie » (Jb 2,6) : réflexion sur la valeur de la vie en Afrique noire. Théologiques, 19(1), 27–46. https://doi.org/10.7202/1014179ar Résumé de l'article L’article traite de la valeur de la vie en Afrique noire en partant du livre de Job (Jb 2,6) où Yahvé intime au Satan l’ordre de respecter la vie de Job. Au-delà de la souffrance évidente qu’endurent les Africains depuis des siècles, leur amour pour la vie est un fait presque banal. Cette attitude ne diffère pas beaucoup de celle de Job qui, au-delà de ses différentes épreuves et peut-être à cause d’elles, continue de croire en la vie et en Celui qu’il croit en être l’auteur : Yahvé. Job devient ainsi un paradigme, celui d’une personne qui, en s’adressant à Dieu pendant l’épreuve, privilégie sa relation avec Celui qui est capable de donner à l’homme non seulement des richesses matérielles, mais aussi et surtout la vie — et qui est capable de la faire respecter à tout prix. © Revue Théologiques 2011. Tout droit réservé. Théologiques 19/1 (2011) p. 27-46 « Respecte pourtant sa vie » (Jb 2,6) Réflexion sur la valeur de la vie en Afrique noire Ghislain Tshikendwa Matadi, SJ* Sciences sociales Université Pontificale Grégorienne (Rome) J’ai choisi d’aborder la question de la valeur de la vie en Afrique en m’ins- pirant d’un verset du livre de Job : Jb 2,6. Ce choix peut étonner ceux qui, à tort ou à raison, considèrent le livre de Job comme traitant essentielle- ment de la souffrance humaine, celle d’un innocent : Job. C’est sous cet aspect, en effet, que le livre est connu et étudié (pour une étude approfon- die de Job, voir Lévêque 1970). N’entend-on pas souvent, au cours des funérailles, le fameux « Yahvé a donné, Yahvé a repris. Que le nom de Yahvé soit loué », même si tous ne savent pas forcément que la citation est tirée du livre de Job ? Si donc la relation du livre de Job à la souffrance humaine est évidente, il est tout aussi vrai que sa relation à la valeur de la vie y est fortement soulignée. Aussi voudrais-je, dans cet article, montrer qu’autant la souf- france humaine traverse de part en part le livre de Job jusqu’à retenir l’attention particulière du lecteur, autant la valeur de la vie y est soulignée de bout en bout. À mon avis, si la souffrance de Job n’échappe pas à l’at- tention du lecteur, c’est parce que, précisément, elle vient perturber et menacer la vie d’un père de famille attaché à Yahvé et de qui il reconnaît avoir reçu la vie en abondance. En effet, c’est parce que la souffrance vient menacer la vie pleine et heureuse d’un croyant, décrite dans les premiers versets du livre, qu’elle choque le lecteur et ne le laisse pas indifférent1. * Ghislain Tshikendwa Matadi est licencié en théologie biblique (Université Pontificale Grégorienne de Rome et Jesuit School of Theology de Berkeley) et licencié en Développement Rural (Institut Supérieur de Développement Rural Mbeo et Bukavu (R. D. Congo). Il est actuellement doctorant en sciences sociales (sociologie) à l’Uni- versité Pontificale Grégorienne de Rome. Son domaine de recherche est la sociologie de la famille africaine dans le contexte des changements sociaux. 1. Dans une étude antérieure sur le livre de Job, j’ai étudié et interprété ce chef-d’œuvre à partir du contexte du VIH/Sida en Afrique. J’ai davantage mis l’accent sur la rela- 28 ghislain tshikendwa matadi En tenant compte de cet aspect du livre, c’est-à-dire celui de la vie reçue à aimer et à sauvegarder à tout prix, je me propose de réfléchir sur la valeur de la vie en Afrique noire2. Au-delà de la souffrance évidente que les Africains3 ont endurée et continuent d’endurer, leur attachement à la vie est resté inébranlable. Cette attitude ne diffère pas beaucoup de celle de Job qui, au-delà de ses différentes épreuves et peut-être à cause d’elles, continue de croire en la vie et en Celui qu’il croit en être l’auteur : Yahvé. Job devient ainsi un paradigme, celui d’une personne qui, en s’adressant à Dieu pendant l’épreuve, privilégie sa relation avec Celui qui est capable de donner à l’homme non seulement des richesses matérielles, mais aussi et surtout la vie — et qui est capable de la faire respecter à tout prix. La menace à la vie dont font l’objet un bon nombre d’Africains ne peut être niée. Cette menace pour tant d’hommes, de femmes et d’enfants est généralement due à des forces négatives, africaines ou étrangères, à qui Yahvé intime, aujourd’hui encore, le même ordre que celui qu’il intima au Satan à propos de Job : « Soit ! Tout est à votre pouvoir. Mais respectez pourtant leur vie ». C’est le sens même de l’appel du premier Synode afri- cain qui ouvrit ses portes le 10 avril 1994 dans un contexte alourdi par le génocide rwandais : tion d’un croyant à Dieu en temps de souffrance. Tout en ne minimisant pas la souffrance comme étant le thème central du livre, j’ai plutôt insisté sur le fait que ce qui fait davantage souffrir Job, c’est le sentiment que Dieu lui a infligé une souffrance qu’il ne mérite pas (Tshikendwa Matadi 2005). 2. La plupart des études, et la mienne ne fait malheureusement pas exception, parlent du continent africain comme d’« un tout cohérent ». Cette manière de faire est peut- être la plus facile. Elle aboutit cependant à des généralisations qui ne rendent que partiellement compte des particularités propres à chaque pays, voire à chaque culture dans un même pays ou une région. Le professeur Adrien Lentiampa Shenge a donc raison de faire observer « qu’il est difficile et hasardeux de réduire le continent afri- cain à telle ou à telle caractéristique. Par son étendue, écrit-il, l’Afrique foisonne de réalités qui diffèrent du Nord au Sud, de l’Est à l’Ouest. Et la géographie de cette vaste étendue a certainement influencé la manière de vivre des peuples qui l’habitent. Ainsi les peuples de la savane et de la forêt n’ont pas les mêmes mœurs que ceux de zones arides du Sahara ; les tribus de pasteurs connaissent davantage une vie de nomades que les peuples cultivateurs ou ceux qui vivent de la cueillette ». Tout en le disant, Lentiampa Shenge reconnaît néanmoins que « la vie est l’élément fondamental de la culture africaine » (Lentiampa Shenge 2011, 411 et 403). 3. Je fais ici référence à la Traite transatlantique, au colonialisme, au néo-colonialisme, à la dictature, au génocide, aux guerres ethniques, etc. « respecte pourtant sa vie » (jb 2,6) 29 À cette Afrique pressée de toutes parts par les germes de haine, de violence, de conflits et de guerres, les évangélisateurs doivent proclamer l’espérance de la vie enracinée dans le mystère pascal. C’est lorsque, humainement par- lant, sa vie semblait vouée à l’échec, que Jésus a institué l’Eucharistie, « gage de la gloire éternelle », pour perpétuer dans le temps et dans l’espace sa victoire sur la mort. C’est pourquoi l’Assemblée spéciale pour l’Afrique, en cette période où le continent africain, sous certains aspects, est dans une situation critique, s’est voulue « Synode de la Résurrection, Synode de l’Espérance. […] Christ notre Espérance est vivant, nous vivrons ! ». L’Afrique n’est pas vouée à la mort, mais à la vie ! (Jean-Paul II 1995, 57) Ma réflexion sera articulée autour de trois points. Le premier se pro- pose de dégager les références significatives à la vie et à sa valeur dans le livre de Job. Le deuxième point, lui, se penchera sur la question de la vie en Afrique, en relevant le paradoxe (apparent ?) d’une Afrique souffrante, et pourtant joyeuse et pleine d’espérance. Le dernier point, qui sera conclu- sif et prospectif, prendra en compte la recommandation faite par Yahvé au Satan : « Soit ! dit Yahvé au Satan, dispose de lui, mais respecte pourtant sa vie » (Jb 2,6) pour en faire la base sur laquelle doit se construire patiem- ment et lucidement la culture de la vie à sauvegarder à tout prix, uploads/Litterature/ reflexion-sur-la-valeur-de-la-vie-en-afrique-noire-respecte-pourtant-sa-vie-jb-2-6.pdf

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