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Tous droits réservés © La revue Séquences Inc., 2014 Ce document est protégé par la loi sur le droit d’auteur. L’utilisation des services d’Érudit (y compris la reproduction) est assujettie à sa politique d’utilisation que vous pouvez consulter en ligne. https://apropos.erudit.org/fr/usagers/politique-dutilisation/ Cet article est diffusé et préservé par Érudit. Érudit est un consortium interuniversitaire sans but lucratif composé de l’Université de Montréal, l’Université Laval et l’Université du Québec à Montréal. Il a pour mission la promotion et la valorisation de la recherche. https://www.erudit.org/fr/ Document généré le 10 mars 2022 08:21 Séquences La revue de cinéma La Nouvelle Vague Cinéma-passion, cinéma-révolution, cinéma-libération Anne-Christine Loranger François Truffaut – un cinéma nommé désir Numéro 292, septembre–octobre 2014 URI : https://id.erudit.org/iderudit/72814ac Aller au sommaire du numéro Éditeur(s) La revue Séquences Inc. ISSN 0037-2412 (imprimé) 1923-5100 (numérique) Découvrir la revue Citer cet article Loranger, A.-C. (2014). La Nouvelle Vague : cinéma-passion, cinéma-révolution, cinéma-libération. Séquences, (292), 6–7. Séquences 292 | septembre — octobre 2014 dossier | truffaut 6 Une certaine approche… De Truffaut à Godard, en passant par Rohmer, Rivette et Resnais, il est peu courant d’entendre parler de ce que la Nouvelle Vague doit aux femmes. Brigitte Bardot, dans Et Dieu... créa la femme (1956) de Roger Vadim, incarnera pourtant un nouveau type d’icône féminine. Libre, le cheveu en broussaille, hardiment sexuelle, Bardot amorcera la rupture avec la plastique un peu figée à laquelle le cinéma français avait habitué son public. Le film sera le précurseur d’un nouveau mouvement du cinéma et propulsera Cannes, petit village mêlant pêcheurs et vacanciers nantis, au centre de la planète Cinéma. Deux ans plus tôt, Agnès Varda, jeune photographe éduquée à la Sorbonne, tournait La Pointe courte, premier long métrage de la Nouvelle Vague, un film de 89 minutes (monté par Alain Renais) centré sur deux histoires basées dans le port méditerranéen où elle avait grandi. Tournées en lumière naturelle, très souvent en extérieur, les images collent à la rue. Très mobile, la caméra en ouverture remonte la rue dans une longue séquence ininterrompue, montrant le linge séchant dans les rues et les vêtements rapiécés des pauvres, pour traverser les maisons en observant la vie, l’heure du repas, l’enfant malade, puis s’arrête sur un bric-à-brac dans une cour. Cette proximité avec la vie deviendra l’une des marques de la décennie Nouvelle Vague. Cinéma-passion, cinéma-révolution, cinéma-libération Que dire sur François Truffaut qui n’ait déjà été dit? Ce sont peut-être moins des choses à dire qu’à redire, tels les vers d’un grand poème. Perdus comme nous le sommes – au milieu des dogmes du marketing, du numérique, de la vidéo sur demande, des organismes subventionnaires et jusqu’aux algorithmes calculant l’argent qu’un film rapportera –, il nous faut retourner boire à la fontaine d’eau vive de ces immenses passionnés du cinéma que furent les cinéastes de la Nouvelle Vague. « La vie est-elle aussi importante que le cinéma ? », se demandait Truffaut. Non, évidemment. Parce que le cinéma était, pour lui, la vie. Et qu’il n’a vécu que pour le cinéma. Anne-Christine Loranger La Nouvelle Vague Jules et Jim Photo : Jules et Jim Séquences 292 | septembre — octobre 2014 truffaut | DOSSIER 7 Une certaine tendance... L’année du tournage de La Pointe courte, un talentueux critique de 22 ans publie dans les tout jeunes Cahiers du cinéma une bombe de quinze pages intitulée Une certaine tendance du cinéma français qui met à mal la ‘Qualité française’ et la dictature d’un certain type d’écriture cinématographique. Pour ce jeune critique – qui a pour nom François Truffaut –, l’académisme tout-puissant des scénaristes de l’époque, comme Jean Aurenche et Pierre Bost, et des cinéastes comme Claude Autant-Lara (Le Diable au corps, Le Rouge et le Noir), trahit les œuvres littéraires et le médium, considéré comme une forme inférieure de la littérature. Le réalisateur, selon Truffaut, doit être aussi l’auteur de son œuvre; elle doit lui être personnelle, intime. « Il n’y a pas d’œuvres, il n’y a que des auteurs », explique-t-il, signifiant qu’un film d’auteur, même mauvais, est toujours plus intéressant qu’un film, même réussi, d’un simple réalisateur. Réagissant au traditionnel jeu ampoulé d’acteurs venus du théâtre, il prône un cinéma libéré de ses chaînes, proche de la vie des gens. Les jeunes Truffaut, Varda, Resnais, Chabrol, Rivette, Godard, Eustache et Rohmer (la plupart critiques aux Cahiers du Cinéma dirigés par André Bazin) formeront la Nouvelle Vague, expression lancée par la journaliste Françoise Giroud dans L’Express, en octobre 1957. Grands admirateurs du cinéma américain de Howard Hawks, Vincente Minnelli, Nicolas Ray et Alfred Hitchcock (Truffaut a d’ailleurs écrit un livre sur Hitchcock), ces jeunes cinéastes – en particulier Truffaut et Godard – influenceront à leur tour Woody Allen, Martin Scorsese, Paul Schrader, Roman Polanski et Steven Spielberg. Éperdu d’admiration pour l’auteur de Jules et Jim, Spielberg invitera d’ailleurs Truffaut à jouer le personnage du scientifique Lacombe dans Close Encounters of the Third Kind (1977). Un certain regard… L’une des particularités de Truffaut est d’avoir non seulement jeté les bases théoriques d’un nouveau cinéma, mais d’en avoir aussi tiré des films. Déjà, dans Une visite (1955) et Les Mistons (1957), ses premiers courts métrages, tous les thèmes chers à son œuvre, de même qu’aux cinéastes de la Nouvelle Vague, se retrouvent : enfance, regard sur la femme, fraîcheur, liberté, proximité de l’auteur et de son œuvre; la technique également, avec une caméra constamment en mouvement et de nombreuses scènes extérieures. Dédaignant les studios, Truffaut préférera toujours tourner les scènes intérieures dans des lieux réels et en lumière naturelle. De même, il privilégiera l’improvisation avec les enfants, ce qui donne aux textes la fraîcheur de la vie. Lors du montage des Quatre Cents Coups (1959), il utilisera le bout d’essai tourné avec Jean-Pierre Léaud à cause de sa spontanéité et jamais ne lui donnera un texte à apprendre. André Bazin affirmait que « la technique renvoie à une métaphysique ». Les cinéastes de la Nouvelle Vague utiliseront une pellicule très sensible leur permettant d’utiliser la lumière naturelle. L’invention de la caméra 16 mm Éclair 16, plus légère et nécessitant peu de lumière, ainsi que l’invention du Nagra (magnétophone portable autonome) leur permettront de tourner facilement en extérieur en enregistrant le son. Ces avancements techniques ouvriront la voie à un nouveau style de montage : le regard de l’auteur cherchera désormais à se manifester à travers la mise en scène. Témoins : les neufs coupes sur la nuque de Jean Seberg, assise dans la voiture volée conduite par Jean- Paul Belmondo dans À bout de souffle de Godard (1959), marqueront à jamais l’Histoire du cinéma. Chez Truffaut, la suite d’images gelées sur le rire de Jeanne Moreau dans Jules et Jim (1961) sanctifie la beauté d’un instant en affirmant : « Regardez- la ! Voyez-la, libre et belle, comme je la vois ! » Une certaine féminité… Enfant mal-aimé, abandonné, envoyé dans une prison pour adolescents, Truffaut créera son propre double, Antoine Doinel, dans Les Quatre Cents Coups. Au fil du temps, il suivra Doinel au cours d’une saga de trois autres films. Jean-Pierre Léaud jouera également dans La Nuit américaine (1973), où Truffaut interprète son propre rôle de réalisateur; Léaud y incarne un acteur romantique, capricieux et instable, calqué sur lui-même. L’œuvre de Truffaut s’intéressera également à la littérature et à l’amour, mêlant parfois les deux comme dans Jules et Jim et Les Deux Anglaises et le Continent (1971), tirés de romans de Henri-Pierre Roché, ou se portant à leur défense avec Fahrenheit 451 (1966). La libération des femmes constituera une part essentielle de la Nouvelle Vague et ses cinéastes ne feront pas faute d’adopter des points de vue inusités et de filmer de nouveaux types féminins, telle la garçonne Jean Seberg de Godard. Truffaut sera l’un des meneurs en la matière : il explorera avec ses héroïnes des paysages jusque-là inconnus dans le cinéma français. À travers sa lentille, les femmes prendront une densité, une complexité, une force et une intelligence qui firent école au sein du cinéma mondial. Sans doute parce qu’il les filmait avec son cœur. « Les films de demain seront un acte d’amour. » (François Truffaut) Les Deux Anglaises et le Continent uploads/Litterature/ nouvelle-vague.pdf
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- Publié le Jan 02, 2022
- Catégorie Literature / Litté...
- Langue French
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