8 Le roman et la nouvelle au xixe siècle : réalisme et naturalisme CHAPITRE  L

8 Le roman et la nouvelle au xixe siècle : réalisme et naturalisme CHAPITRE  Le roman et la nouvelle réalistes (PAGES 8-15) Présent depuis toujours dans la littérature, le réalisme devient au xixe siècle l’un des enjeux majeurs de l’écriture romanesque. Il s’impose avec La Comédie humaine de Balzac, se trouve rapidement théorisé et défendu contre tous les tenants de « l’idéalisme ». C’est ainsi que le roman réaliste du xixe siècle (au-delà des différences considérables apportées par chaque écrivain) devient la forme de référence, la forme « aboutie » du roman aux yeux des lecteurs. COMPRENDRE L’OBJET D’ÉTUDE (PAGES 8-9) Comment les romanciers essayent-ils de raconter l’homme et la société le plus fidèlement possible ? Introduction La double page d’observation expose les principes, les thèmes et les procédés du roman et de la nouvelle réalistes, pour permettre l’analyse des textes présents dans les exercices, mais aussi de toutes les œuvres qui s’inscrivent dans ce mouve- ment. La confrontation du texte théorique de Duranty (écrit après la mort de Balzac) et de l’extrait de La Fille aux yeux d’or est l’occasion de vérifier la cohérence de la représentation réaliste du monde (comme projet et comme réali- sation). Les illustrations permettent de montrer que – plus qu’un mouvement littéraire – le réalisme est également un mouvement pictural et culturel. Réponses aux questions 1. Pour Duranty, le romancier enregistre scrupuleusement tout ce qu’il voit dans le monde contemporain pour le reproduire dans son œuvre. Aux qualités d’obser- vation (on dira souvent que l’écrivain réaliste est « un œil ») s’ajoute la volonté d’être sincère et vrai : « il ne déforme rien ». Balzac correspond à cette défini- tion, ou il a en tout cas l’ambition d’y correspondre : « la reproduction exacte, complète, sincère, du milieu social, de l’époque où l’on vit » correspond à son projet de « comédie humaine ». 9 Le roman et la nouvelle au xixe siècle : réalisme et naturalisme 2. Balzac est partagé entre l’admiration pour l’énergie que doivent montrer ses contemporains pour « trouver leur place » dans une société bouleversée par la révolution industrielle et l’amertume devant le triomphe de l’argent. L’existence du bourgeois est ainsi programmée : ses efforts sont couronnés par la réussite sociale, mais il n’y a pas de place pour la fantaisie, l’amour ou les sentiments désintéressés. 3. C’est sur les indications précises, « documentaires », que repose l’effet de vérité du texte de Balzac : les sommes d’argent (« douze mille francs par an », « cent cinquante mille francs à leur fille »), les lieux (les halles, un cabinet, le bureau des passeports, la caisse du Théâtre Italien, troisième étage…), la chronologie (de la journée ou de l’existence), les références à la réalité sociale (métiers, cuisinière, bals, croix de la Légion d’honneur…). Le lecteur reçoit de nombreuses informations en quelques lignes. On retrouve cette précision chirurgicale de la représentation du monde dans le tableau de Meunier : la lumière, l’atmosphère, le dessin des corps et des machines, tout contribue à créer dans le tableau un effet de réalité. Chez Daumier en revanche, c’est le sujet de la représentation picturale qui montre la réalité : ici, celle des nourrices allaitant, avec leur part d’animalité… ÉTUDIER L’OBJET D’ÉTUDE (PAGE 11) Qu’est-ce qu’une œuvre réaliste ? Exercice 1* 1. Balzac distingue l’histoire des faits (qui s’arrête aux personnes importantes et aux grands événements) et celle des mœurs (qui s’intéresse aux modes de vie, aux caractères, aux types sociaux). Le romancier représente ainsi scrupuleusement les mœurs de ses contemporains. 2. Balzac expose une démarche précise pour atteindre son but (même si, rappe- lons-le, il a commencé par écrire ses romans avant de théoriser sa méthode) : il explique l’importance de l’inventaire, de la sélection et de la classification en caractères, événements principaux, types, figures saillantes. Son exposé prend ainsi l’allure d’une démarche scientifique pour atteindre un but. Exercice 2* Pour Stendhal, le réalisme en littérature est une manière de refléter le monde tel qu’il est ou, en tout cas, tel que nous le percevons. C’est ainsi qu’il compare le roman à « un miroir » : mais ce miroir reflète aussi bien la beauté (« l’azur des cieux ») que la laideur (« la fange des bourbiers »). « L’homme qui porte le miroir » est l’écrivain ; par conséquent, une œuvre réaliste ne saurait être accusée d’immoralité car elle ne reflète que le réel. Exercice 3** 1. Les verbes sont conjugués au passé simple (« dînèrent », « servit », « allèrent ») ou, le plus souvent, à l’imparfait (« était », « contemplait », etc.). Le passé simple 10 marque les actions considérées comme accomplies (premier plan). L’imparfait est descriptif (second plan). 2. Les indications se font de plus en plus précises, resserrées comme dans un zoom avant cinématographique, en passant du cadre général aux éléments plus précis du visage et du repas : 1) Point de vue général : auberge // table // fenêtre fixent le décor. 2) Regard de Frédéric à partir de la ligne 3 : « en face de lui », « et il contem- plait » : – éléments du visage de Rosanette : nez, lèvres, yeux, épaules, mains, en alter- nance avec ses vêtements : bandeaux, robe, manchettes ; – arrêt sur les mains et la table. 3) Retour au point de vue englobant : « on leur servit » : – éléments du repas servi en alternance avec les plats et les couverts. 4) Considération générale, conclusive, sur les sentiments des personnages et l’impression provoquée par le repas : « Ils se croyaient presque… ». 3. Ce sont d’abord les précisions apportées sur les vêtements de Rosanette qui donnent une impression de réalité : « bandeaux bouffaient », « robe de foulard écru »… Puis les détails du repas : « un poulet avec les quatre membres étendus », « en terre de pipe », « vin râpeux », « pain trop dur », « couteaux ébréchés ». On le voit, ce sont des termes de plus en plus négatifs, dépréciatifs, qui donnent l’impression que le narrateur ne cache rien de la réalité, ne la déforme pas. Exercice 4** 1. « Passage du Soleil » et « rue de la Pépinière » sont répétés ; puis « rue du Rocher » ; puis, plus largement la mention : « au milieu de ce passage ». Le narra- teur montre qu’il est précis, rigoureux dans l’indication des lieux où évoluent les personnages, comme s’il s’agissait d’informations documentaires. 2. L’inscription est reproduite à la manière d’un document authentique inséré dans le texte (comme une photographie, une prise de vue directe de la réalité). Il s’agit de produire un effet de réel, de donner au lecteur l’illusion de la réalité. 3. D’abord le fumiste sert de guide, puis c’est la baronne qui « aperçut » la boutique et l’indication qui annonce l’Écrivain public (qui, dans le roman, est son mari, qui se cache à la suite d’une liaison amoureuse). ÉCRIRE SUR L’OBJET D’ÉTUDE (PAGE 14) Activité 1. Vers l’invention Écriture. En guise de corrigé, on peut proposer aux élèves d’étudier le portrait de Julien Sorel, tel que Stendhal l’a imaginé : Il avait les joues pourpres et les yeux baissés. C’était un petit homme de dix-huit à dix-neuf ans, faible en apparence, avec des traits irréguliers, mais délicats, et un nez aquilin. De grands yeux noirs, qui, dans les moments tranquilles, annonçaient 11 Le roman et la nouvelle au xixe siècle : réalisme et naturalisme de la réflexion et du feu, étaient animés en cet instant de l’expression de la haine la plus féroce. Des cheveux châtain foncé, plantés fort bas, lui donnaient un petit front, et, dans les moments de colère, un air méchant. Parmi les innombrables variétés de la physionomie humaine, il n’en est peut-être point qui se soit distinguée par une spécialité plus saisissante. Une taille svelte et bien prise annonçait plus de légèreté que de vigueur. Dès sa première jeunesse, son air extrêmement pensif et sa grande pâleur avaient donné l’idée à son père qu’il ne vivrait pas, ou qu’il vivrait pour être une charge à sa famille. Objet des mépris de tous à la maison, il haïssait ses frères et son père ; dans les jeux du dimanche, sur la place publique, il était toujours battu. Stendhal, Le Rouge et le Noir, 1830. Activité 2. Vers la dissertation 1. Zola s’élève résolument contre la conception du réalisme chez Caillebotte. Il lui reproche d’être « la photographie de la réalité ». Ce n’est pas ce qu’il recherche, en tant que romancier, dans le réalisme. L’artiste doit lui ajouter son « talent », son style. On reconnaît là l’influence de Flaubert pour qui le style est primordial. On peut remarquer avec les élèves que la conception du réalisme évolue au fil des décennies et des œuvres : nous sommes en 1876 et la photogra- phie s’est répandue. Le « miroir » de Stendhal n’a plus lieu d’être… 2. Écriture. Émile Zola uploads/Litterature/ methodes-amp-techniques-2de1re-edition-2016-ldp.pdf

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