Université de Picardie Jules Verne UFR des Arts et des Lettres Dire l’indicible
Université de Picardie Jules Verne UFR des Arts et des Lettres Dire l’indicible chez Lovecraft. Paradoxes et langage entre rationalité et post-rationalité. GRANDCOING Guillaume Mémoire de Master II parcours Esthétiques Comparées, sous la direction de Valentina Bisconti Juin 2020 DIRE L’INDICIBLE CHEZ LOVECRAFT Université de Picardie Jules Verne UFR des Arts et des Lettres Dire l’indicible chez Lovecraft. Paradoxes et langage entre rationalité et post-rationalité. GRANDCOING Guillaume Mémoire de Master I parcours Esthétique Comparée, sous la direction de Valentina Bisconti Juin 2020 2 DIRE L’INDICIBLE CHEZ LOVECRAFT 7— Sur ce dont on ne peut parler, il faut garder le silence. 1 Ludwig Wittgenstein, Tractatus logico-philosophicus, 1922. Ce que j’essaie de vous traduire est plus mystérieux, s’enchevêtre aux racines mêmes de l’être, à la source impalpable des sensations.2 à J. Gasquet, – Cézanne. 2 MERLEAU-PONTY Maurice, 2006, L’Œil et l’Esprit, France, éd. Galimard, coll. « Folioplus philosophie » p. 6. 1 WITTGENSTEIN Ludwig, 1993, Tractatus logico-philosophicus, éd. Gallimard, coll. « Tel ». p. 112. 3 DIRE L’INDICIBLE CHEZ LOVECRAFT – REMERCIEMENTS – La réalisation de ce mémoire a été possible grâce à la participation et l’engagement de plusieurs personnes à qui je souhaite témoigner toute ma reconnaissance. J’adresse tout d'abord mes sincères remerciements à ma Directrice de mémoire, Madame Valentina Bisconti, d’avoir porté autant d’intérêt à mon sujet et de m’avoir accordé du temps lors de nos rendez-vous et discussions. Ses conseils et son point de vue m’auront été bénéfiques dans ce travail. Je désire également remercier Madame Maud Amoretti, qui m’a permis de découvrir l’œuvre littéraire de Lovecraft au travers de ses magnifiques illustrations. Je voudrais remercier aussi les personnes qui ont accepté de me relire et pas seulement, et seul le grand Cthulhu sait que la tâche fût ardue, Alexis Fady et Audrey Aragnou. Je souhaite évidemment remercier mes parents, ma mère et mon père, pour m'avoir encouragé pendant tout mon parcours à l’université, mais aussi mes amis et camarades de Master qui m’ont soutenu moralement pendant toute la durée de la rédaction de ce mémoire et de ces deux années : Camille Germain, Marie Lippert, Clara Geiger et pour finir, mais non des moindres Mathilde Thiney. NB : Nicholas Roerich, Mount of five treasures (Two worlds), 1933, toile, tempera, 47 x 79 cm, Nicholas Roerich Museum, New York City, NY, US, pour la didascalie de la figure du frontispice 4 DIRE L’INDICIBLE CHEZ LOVECRAFT – TABLE DES MATIÈRES – Remerciements 4 Introduction 7 1. Chapitre I – Lovecraft architecte de l’imaginaire 14 1.1 La perception d’un mythe entre crédibilité et vraisemblance 14 1.2 Déambulation cauchemardesque à travers une troublante architecture 17 1.3 Post-rationalité, tentative de définition 19 1.4 Ainsi s’élèveront de fabuleux minarets 23 1.5 Architecture numérique, un nouvel espace de création possible 27 2. Chapitre II – Limite du langage, au seuil de l’imaginaire 34 2.1 Dire l’indicible au seuil du langage 34 2.2 Post-vérité et superstition, une place pour le doute 36 2.3 Représentation architectural, paradoxe entre précision mathématique et approximation linguistique 39 2.4 Contempler son monde au seuil du langage 45 2.5 Quand la lettre dessine l’indicible 47 3. Chapitre III – Lovecraft, le mirage architectural. 52 3.1 Le livre un l’objet d’art au service du récit. 52 3.2 Du texte à l’image, dialogue muet entre auteur et illustrateur 58 3.3 Dire le regard, représenter la vue 62 3.4 Le mirage architectural, quand l’impossible est montré 64 Conclusion 71 Bibliographie 74 Tables des illustrations 79 5 DIRE L’INDICIBLE CHEZ LOVECRAFT 6 DIRE L’INDICIBLE CHEZ LOVECRAFT – INTRODUCTION – Howard Phillips Lovecraft est un écrivain américain du début du XXème siècle. Il est né en 1890 à Providence, état de Rhode Island où il décédera en 1937, sans jamais avoir publié un seul livre. Il est surtout connu pour ses écrits teintés d’horreur, de fantastique et de science-fiction. Longtemps appelé, à tort, le reclus de Providence, on constate aujourd’hui en France un regain d’intérêt pour ses œuvres. La plus célèbre et la plus complète biographie sur Lovecraft, écrite par S.T. Joshi : I am Providence (2010), est pour la première fois traduite en français en 2019 aux éditions Actusf. Le biographe remet en cause l’image de « l'ermite de Providence » qui a longtemps été véhiculée par les petites biographies introductrices que l’on peut retrouver dans les recueils de ses nouvelles traduites. On le décrit comme un homme assis à son bureau toute la journée, écrivant de sombres récits et n’entretenant que des relations épistolaires ; une image fausse, car il pouvait passer des heures dehors sur la colline de Providence à écrire et contempler le paysage. Cette vision idéalisée d’un Lovecraft nocturne, ésotérique et occulte participe à un imaginaire autour de ses récits, comme s’il subsistait un fond de réalité. Parallèlement, comme le montre l’affaire du Necronomicon Simon (1977), un grimoire de sorcellerie qui aurait été écrit par l’arabe fou Abdul Al’Hazred, était, en réalité, écrit par les gérants d’une boutique spécialisée dans l’occultisme. Abdul Al’Hazred est un nom tout droit sorti de l’imaginaire du jeune Lovecraft, qui, alors enfant lors de ses jeux d’aventure inspirés de son livre préféré que lui lisait sa mère, Le conte des mille et une nuits, se faisait appeler comme ceci : Abdul « All has read », soit, « celui qui a tout lu ». C’est sa passion pour les sciences et l’astronomie qui mènera Lovecraft, dès l’adolescence, à l’écriture et au journalisme amateur. En effet, il était l’auteur d’une gazette de vulgarisation scientifique locale dans laquelle il tenait les lecteurs de Providence informés des dernières découvertes et avancées scientifiques. À partir de 1920, et davantage après la mort de sa mère, il écrit des nouvelles fantastiques, pour la plupart, publiées dans « Weird Tales », un magazine populaire qui était connu pour ses publications de récits appartenant au genre fantastique et de la fantasy. Son style hypnotique repose sur une écriture oscillant entre réalisme et fantaisie qui transporte le lecteur dans une fantasmagorie inquiétante. On 7 DIRE L’INDICIBLE CHEZ LOVECRAFT reconnaît son goût certain pour le journalisme, car il emprunte au discours narratif de l’enquêteur, du scientifique ou simplement à celui de l’homme curieux. Ses personnages sont ancrés dans le réel, confrontés à des événements terrifiant qu’ils ne comprennent pas ou qui vont à l’encontre de leur rationalité. François Bon élabore, à partir de la définition du genre fantastique de Tzvetan Todorov dans la notice de sa traduction de L’appel de Cthulhu, que ce 3 qui compte pour Lovecraft c’est « la façon dont le réel le plus ordinaire se renverse sur lui-même », c’est-à-dire, qu’il rend compte d’un univers réaliste dans lequel surviennent des événements extraordinaires. La littérature fantastique nous offre une échappatoire au réel. Lovecraft souligne notre tendance naturelle à la curiosité, notre attrait à nous tourner vers l’inconnu. C’est cette fascination et la peur que nous éprouvons face à l’inconnu qui provoquent notre besoin de dire pour pouvoir comprendre le monde. Nous allons, par nature, chercher à comprendre ce qui nous échappe, à le définir et à le connaître. La dénomination est un acte de connaissance qui nous permet de concevoir ou bien de créer une chose. Cela passe par la création de nouveaux termes, par la néologie sémantique, par l’ajout de suffixes aux mots, et même par l’invention d’une langue. L’indicible est pour Lovecraft à la fois le moyen et l’objet de nos peurs et cette peur est à la fois l’effet qu’il cherche à produire chez le lecteur, mais aussi le moyen qu’il a trouvé pour créer cette échappée, cette fuite du réel. On peut en déduire que l’indicible, comme source de peur et comme limite au dire, est aussi une porte ou un passage vers un ailleurs, vers le fantasmagorique. Cette sensation permet de déformer la réalité, de créer une distorsion, un basculement. L’inconnu (ce que l’on ne connaît pas) et l’inconnaissable (ce que l’on ne peut pas connaître) , deviennent un défi pour l’homme confronté à l’altérité et qui résiste au rationnel. L’indicible a pour particularité de ne pouvoir être qu’exclusivement défini par ce qu’il n’est pas, c’est-à-dire, le dicible. Il est le concept de l’inconcevable. L’indicible est alors un tout-au-contraire, le reflet inversé dans le miroir du langage, « l’Envers » . Ce paradoxe, 4 autour de ce qui ne peut-être dit à l’aide de ce qui peut l’être, est notre sujet d’étude. Si nous 4 BADIOU A., 2000, « 1.3.5 5 - Phénoménologie élémentaire négative », in L’Être-là, séminaire, transcription non revue par l’auteur : Yvon Thoraval, ENS salle Paul Celan, Paris. 3 Pour Todorov “le fantastique occupe le temps de cette incertitude ; dès qu’on choisit l’une ou l’autre réponse, on quitte le fantastique pour entrer dans un genre voisin, l’étrange ou le merveilleux. Le fantastique, c’est l’hésitation éprouvée par un être qui ne connaît que les lois naturelles, face à un événement en apparence surnaturel.” in, Introduction à la littérature fantastique, Tzvetan Todorov. 8 DIRE L’INDICIBLE CHEZ LOVECRAFT pouvons nommer l’indicible, il nous est quand même difficile de concevoir ou de définir ce qui échappe à uploads/Litterature/ memoire-gg-dire-l-x27-indicible-chez-lovecraft-v-06-07-2020.pdf
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- Publié le Aoû 05, 2022
- Catégorie Literature / Litté...
- Langue French
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