Filière : Etudes françaises Semestre : 3 Module : 18 Matière : Théâtre classiqu
Filière : Etudes françaises Semestre : 3 Module : 18 Matière : Théâtre classique Professeure : Aicha Bourais 1 Introduction générale Un théâtre en évolution, de l’irrégularité baroque à la régularité classique Au début du 17ème siècle, triomphait un théâtre de l’outrance qui échappait à toute mesure, à toute règle et qui méritait bien son nom de théâtre irrégulier. Durant la période qui va de 1630 à 1661, une évolution importante se produit, la montée des valeurs de modération, de raison et d’unité, jointe à la double influence exercée par les auteurs de l’Antiquité et par les théoriciens italiens, impose un effort de modération, une nécessité de déterminer des règles claires de fonctionnement : ainsi naît ce que l’on appelle le théâtre régulier ou théâtre classique. Mais, il s’agit d’un mouvement progressif. Les partisans de l’irrégularité essaient encore d’imposer leurs vues. Pierre Corneille était de ceux-là, il a pratiqué, à la fois comme d’autres aussi (Jean Mairet 1604-1686), (Jean Rotrou 1609-1650), le théâtre régulier et le théâtre irrégulier. Le déclin de la tragi-comédie, ce genre privilégié du théâtre irrégulier et qui mêle le tragique et le comique et rejette donc l’unité de ton, qui joue sur un romanesque inspiré des auteurs espagnols, ce genre est certes en recul, mais il reste encore le premier genre théâtral et inspire l’un des chefs-d’œuvre de Corneille, Le Cid. Le nombre des tragédies augmente, ce qui souligne le progrès de l’unité de ton : durant la seconde partie de sa carrière, Corneille n’écrira pratiquement plus que des tragédies. Quant à la comédie, si elle demeure le genre le moins pratiqué, elle s’affirme peu à peu au détriment de la tragi-comédie. Elle sort lentement de sa léthargie sous l’impulsion de Mairet, de Rotrou et de Corneille qui lui donnent ses lettres de noblesse, en introduisant un comique plus léger, en l’éloignant des grossièretés de la farce. 2 Le rôle social et politique du théâtre Durant cette période, le théâtre joue un rôle social et politique de plus en plus important. Il étend son audience, en gagnant les milieux de la cour et des salons, plus particulièrement le public féminin rebuté jusque là par ses excès. L’académie française, garante de l’orthodoxie de la lange et de la littérature, s’intéresse au théâtre : en 1638, elle publie les Sentiments de l’Académie française sur la tragi-comédie du Cid, où elle reproche à Corneille de ne pas avoir respecté les règles qui doivent s’imposer dans l’œuvre théâtrale. Le pouvoir politique aussi, conscient de l’importance du théâtre, ne reste pas inactif : Richelieu organise une sorte d’équipe de travail, le groupe des cinq auteurs, dont Corneille fait partie et leur propose des sujets, des canevas de pièces qui donnent lieu à une rédaction collective. Il participe à la polémique qui éclate autour du Cid. Quant aux autorités religieuses, si elles sont encore relativement discrètes, elles interviendront bientôt vivement, Molière en fera la cruelle expérience. Cette situation engendre une dure concurrence théâtrale, la rivalité est forte entre les auteurs et se manifestera au grand jour durant la querelle du Cid. Elle oppose aussi les troupes de théâtre. Il n’existe alors à Paris que deux grands théâtres : le théâtre de l’hôtel de Bourgogne et le théâtre du Marais. Mairet confie ses pièces au premier, Corneille au second. Chacune des deux salles essaie de s’approprier les comédiens particulièrement populaires. Les grandes règles du théâtre classique C’est durant la période de 1630-1661 que se précisent les grandes règles du théâtre classique. Déjà pratiquées notamment par Mairet et par Corneille, ce théâtre régulier connaîtra tout son développement au cours de la période suivante, avec Molière et Racine. Il repose sur un certain nombre d’impératifs, de contraintes : l’application des unités d’action, de temps, de lieu et de ton, le respect des bienséances et des vraisemblances, le sens de la mesure. 3 L’unité d’action : une exigence de concentration L’unité d’action ne s’est pas imposée de façon abstraite. Elle est la conséquence des conditions même de la représentation théâtrale. L’action d’une pièce de théâtre doit être plus ramassée que celle d’un roman. A partir du moment où elle est représentée, elle a en effet, obligatoirement une dimension limitée qui dépend de la durée de la représentation. Il peut exister des romans-fleuves comme le Grand Cyrus de Madeleine de Scudéry dont la lecture nécessite plusieurs dizaines d’heures. Il n’est pas possible, par contre, de maintenir durant un temps comparable le spectateur assis dans son fauteuil. La conséquence de cette limitation obligatoire est évidente : le nombre des événements mis en scène se trouve lui aussi limité. Une autre raison impose cette concentration. La pièce de théâtre n’est pas lue, mais vue et entendue par le spectateur. Or, il est beaucoup plus difficile de saisir et d’assimiler ce qui relève de l’oral et par ailleurs, il est impossible de revenir en arrière si une donnée importante a échappé à l’attention. Dans ces conditions, il est préférable de réduire la complexité de l’action et des événements. La pièce doit être unifiée autour d’un sujet principal qui ne doit jamais être perdu de vue. Si des sujets secondaires apparaissent, ils doivent être étroitement liés au sujet principal. Racine accentuera cette tendance en écrivant des pièces marquées comme Bérénice (1670) ou Phèdre (1677), par une lumineuse simplicité. L’unité de temps, une limitation de la durée de la fiction S’il y a peu d’événements, il y a également peu de temps occupé par ces événements. Le spectateur, au cours de la représentation, vit en quelque sorte, un temps obligé. Contrairement au lecteur, le spectateur ne peut choisir le moment où il contemple le spectacle ni la vitesse de déroulement de ce spectacle. S’il s’absente, s’il est distrait, les comédiens ne s’interrompent pas pour l’attendre, le spectacle continue sans lui. Les partisans du théâtre irrégulier, acquis à la diversité, à la complexité baroque, ne voyaient pas d’inconvénients à ce que le temps de la fiction dépasse largement le temps de la représentation. Les adeptes du théâtre régulier estiment que les spectateurs trouveraient ce dépassement invraisemblable, ne comprendraient pas qu’ils puissent assister, au cours de deux ou trois heures de représentation, à plusieurs jours ou plusieurs mois de fiction. Leur choix de vraisemblance est que : le temps de la fiction qui se déroule au cours de chacun des actes de la pièce correspond à la durée réelle de ces actes. 4 L’action dans son ensemble ne doit pas excéder vingt-quatre heures. L’unité de lieu, une seule scène, un seul lieu fictif L’action théâtrale possède une durée. Elle se situe également dans un lieu. Alors que, pour le lecteur de roman, le lieu demeure abstrait, soumis à la représentation de son imagination, pour le spectateur, il est bien réel, bien concret, inscrit dans un décor qui est là, sous ses yeux. Ce décor prend lui-même place dans un espace précis, celui de la pièce. Contrairement au théâtre irrégulier, le théâtre régulier, au nom de la vraisemblance, choisit la coïncidence : une seule scène, un seul lieu, un seul décor, tel est l’impératif qui s’impose et s’affirme peu à peu. Si en 1637, Corneille situe sa pièce le Cid dans quatre lieux différents, le palais du roi, la maison de Chimène, la maison de Rodrigue et une place publique, en 1640, il fait se dérouler toute l’action d’Horace dans une salle de la maison du personnage principal et adopte donc la formule du lieu unique qui s’imposera, par la suite, dans le théâtre de Racine. L’unité de ton, un seul registre par pièce A ces trois unités, s’ajoute une quatrième, l’unité de ton. Dans un souci de concentration, pour mieux dégager l’essentiel, pour caractériser nettement la tonalité de la pièce, les auteurs dramatiques vont progressivement refuser le mélange des genres ; ne plus reconnaitre que deux grands genres. D’un côté, se place la tragédie ; elle met en scène des personnages éminents dont le sort personnel influe généralement sur le destin de leur peuple, parce que l’action mêle intimement intrigue sentimentale et intrigue politique ; elle s’achève le plus souvent sur une fin malheureuse pour les personnages positifs qui ont à affronter des obstacles redoutables, qui doivent lutter contre une fatalité plus au moins aliénante. De l’autre, s’affirme la comédie : elle représente des gens de moyenne ou petite condition saisis dans leur vie quotidienne ; elle est marquée par un développement dépourvu de tension ; elle se termine par un dénouement heureux pour les 5 personnages sympathiques pour la jeune première et le jeune premier qui parviennent facilement à triompher des obstacles, à leur bonheur. Le théâtre régulier rejette donc la tragi-comédie, ce genre intermédiaire à l’action tendue et à la fin heureuse plus proche de la complexité de la vie, elle conservera encore de nombreux partisans, même à l’époque de Racine où elle se maintiendra de façon déguisée, sous l’appellation de tragédie avec des auteurs comme Thomas Corneille ou Philippe Quinault. Bienséance et vraisemblance ; les conventions sociales Le théâtre est un mode d’expression concret. C’est également un art social par excellence uploads/Litterature/ le-theatre-classique-module-18-semestre-3-aicha-bourais.pdf
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- Publié le Jan 01, 2022
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