Victor Goloubew VI. Le tambour métallique de Hoàng-ha In: Bulletin de l'Ecole f

Victor Goloubew VI. Le tambour métallique de Hoàng-ha In: Bulletin de l'Ecole française d'Extrême-Orient. Tome 40 N°2, 1940. pp. 383-409. Citer ce document / Cite this document : Goloubew Victor. VI. Le tambour métallique de Hoàng-ha. In: Bulletin de l'Ecole française d'Extrême-Orient. Tome 40 N°2, 1940. pp. 383-409. doi : 10.3406/befeo.1940.4801 http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/befeo_0336-1519_1940_num_40_2_4801 LE TAMBOUR MÉTALLIQUE DE HOANG-HA par Victor GOLOUBEW Membre de l'Ecole Française d'Extrême-Orient, I Au mois de mars de l'année 1937, des coulis terrassiers, employés au creus ement d'un canal près du village de Hoàng-ha, dans la province de Hà-dông, trouvèrent un tambour métallique de grande taille, profondément enfoui dans le sol (pi. XXXV, A). Transporté dès le lendemain de sa découverte au phù de Khoái- châu (prov. de Hirng-yên), il fut remis quelques jours après, par M. Lecler, administrateur adjoint, à l'Ecole Française d'Extrême-Orient, pour être conservé au Musée Louis Finot à Hanoi, où il occupe actuellement une place d'honneur, dans l'une des grandes salles du rez-de-chaussée (cote D. 163.206). Le tambour ne mesure pas moins de о m. 615 de hauteur, sur о m. 84 de diamètre maximum. Par ses dimensions et par son décor, il se classe parmi les spécimens les plus remarquables du type I (pi. XXXV, В et pi. XXXVI). Les analogies avec le grand tambour dit « de Ngoc-lù », acquis par l'Ecole Française en avril 1903, sont manifestes (1). Il s'apparente également de près à deux autres pièces de même type, décrites par F. Heger (2). Sur le plateau du tambour sont figurés des personnages coiffés de plumes, des cases sur pilotis, des oiseaux à long bec et à longues pattes, volant à la file; le centre en est occupé par une étoile à 16 rayons. Les barques représentées sur la partie saillante de la caisse de résonance, au-dessous du disque, sont identiques à celles qui transportent sur le tambour de Ngoc-Ш, les âmes de guerriers défunts. L'état de conservation de ce beau tambour est assez; satisfaisant, bien que le disque en soit séparé de la caisse par un brutal découpage, et en dépit d'une épaisse croûte d'oxyde rougeâtre qui le recouvre en partie. (1) Décrit par M. H. Parmentier dans Anciens Tambours de Bronze, BEFEO., tome XVIII (1918), n° 1, pp. 4-16, pi. ni-iv. Voir également Ь'Аце du Bronze au Tonkin et dans le Nord- Annam, par V. Goloubew, t. XXIX du BEFEO. (1929), p. 34 sq. Avant son acquisition par l'Ecole Française, ce tambour appartenait à une pagode située dans la province de Hà-nam. On ne possède aucun autre renseignement sur sa provenance. (2) Alte Metalltrommeln aus Stidost-Asien. Leipzig, 1902, pp. 20-27, pi. i-v. De ces deux tambours, celui que l'on désigne par le nom du vice-résident E. Moulié, avait été offert à ce dernier par la veuve d'un chef mtrcmg. Il disparut mystérieusement, après avoir figuré à l'Exposition Universelle de Paris, en 1889. L'autre tambour a été pendant longtemps la pro priété d'un collectionneur de Hanoi, M. Gillet. Il est conservé actuellement au Musée des Arts et Métiers à Vienne. 25 384 Victor Goloubew Le tambour a été trouvé, nous l'avons dit, en pleine terre, à plus de i m. 50 de profondeur. Des sondages effectués autour de la fosse d'extraction n'ont fourni aucune indication d'intérêt archéologique. Il y a donc lieu d'écarter, comme ab solument contraire à l'évidence, toute supposition d'après laquelle il s'agirait d'un objet associé à une sépulture de l'âge du bronze. H n'était d'ailleurs pas d'usage, à l'époque de Bông-so-n, de déposer dans les tombes des tambours métalliques d'une taille aussi considérable. Le témoignage des fouilles, à ce sujet, peut être considéré comme formel, puisque les spécimens exhumés dans le Thanh-hoá par le Dr. O. Jansé et M. Pajot ne sont que des pièces de taille moyenne ou réduite, sinon de simples lingots reproduisant à des échelles minimes, de vrais tambours. Notre tambour a-t-il été enfoui à la dérobée par une bande de pillards, lesquels auraient essayé préalablement de le découper en plusieurs morceaux, à l'aide de quelque outil tranchant ? De toutes les suppositions et conjectures possibles, celle-ci, pour bien des raisons, nous paraît être la plus vraisemblable. Tout comme son sosie au Musée Louis Finot, le tambour de Hoàng-ha se compose d'une partie circulaire formant saillie, à laquelle adhère le disque sonore, d'une caisse verticale, rigoureusement cylindrique, et d'une base en tronc de cône, à profil de doucine (fig. 1 A). La hauteur de la section bombée est de о m. 24; elle est égale, à un centimètre près, à celle de la caisse, laquelle s'évase un peu vers le bas, pour s'adapter au diamètre de la partie tronconique, haute, celle-là, de о m. 13. Ces proportions sont presque identiques à celles du tambour de Ngoc- Ш (fig. 1 В). On les retrouve, à peine modifiées, sur le tambour Moulié, reproduit dans l'ouvrage de F. Heger (fig. 1 С). Sur ce dernier tambour, toutefois, on constate une simplification, très caractéristique, du profil : la génératrice de la base n'est plus une doucine, mais une droite, et la caisse en forme de cylindre se rétrécit sensiblement vers le bas. Quant au quatrième tambour, celui de Vienne, il se distingue des trois autres par une base relativement plus haute et par un bourrelet de faible saillie, qui la rajuste à la caisse (fig. 2). Comme tous les spécimens du type I, notre tambour est muni de quatre anses, disposées symétriquement, par paires. Elles sont exactement semblables à celles que M. H. Parmentier a étudiées sur le tambour de Ngoc-lû (1). Ce sont de larges bandes imitant des cordelettes en fibres de coco, montées sur une mince lamelle de bois ou de métal (fig. 3). A la parenté typologique, si nettement accusée, correspond la parfaite identité des moyens techniques. Les procédés de modelage et de fonte sont rigoureusement les mêmes. On constate, notamment, que sur les quatre tambours, le décor figuré du plateau se présente légèrement en creux, tandis que celui de la surface bombée et de la caisse est exécuté en ce même « relief linéaire » que l'on observe sur les miroirs de bronze chinois, datant des Han. (1) Op. cit., p. 16. А с' V PL XXXV. a ягоащдшш A, Le tambour de Hoàng-ha, photographié après son transport à Hanoi. A côté, les coulis terrassiers qui l'avaient trouvé, enfoui dans le sol (cf. p. 383). Bt Une des barques figurées sur la caisse du tambour (estampage) (cf. p. 383). \ , ■ г PL XXXVI. Tambour de Hoàng-ha, disque (estampage). Diam. : о m. 78 (cf. p. 383). Le tambour métallique de Hoàng-ha 385 II Nous ne pouvons procéder, dans le cadre de la présente étude, à une analyse serrée des éléments dont se compose le décor du tambour (fig. 4). L'étoile qui orne le plateau de percussion est à 16 rayons, alors que l'étoile figurée sur le tambour de Ngoc-Ш en a deux de moins, et que sur le tambour de Vienne on n'en compte que 12. Le fait est à retenir, bien que, dans l'état actuel de nos recherches, nous ne puissions guère en fournir l'explication. Les espaces trian gulaires entre l'étoile et le cercle qui l'entoure, présentent un motif ornemental, lequel se répète, exactement pareil, sur le tambour de Ngoc-Ш. M. H. Parmentier a signalé la ressemblance que ce motif présente avec le dessin ocellé d'une plume de paon (1). D'autre part, on peut y voir une variante locale de la classique pal- mette chinoise, adaptée au contour d'un triangle isocèle. Le même ornement se retrouve sur le tambour Moulié et sur celui de Vienne. Il s'agit donc d'un « thème conducteur » commun au décor des quatre tambours. Autour de l'étoile centrale et du cercle qui la renferme, on compte, sur notre tambour, cinq zones ou bandes concentriques, de caractère purement ornemental. La première et la cinquième ne comportent qu'une succession de minuscules bossettes, très espacées sur le pourtour de la zone; la 2e et la 4e se composent de cercles pointés à tangentes ; celle du milieu présente un ornement géométrique manifestement apparenté à la grecque, mais dans lequel on est tenté, en même temps, de reconnaître comme la transposition en lignes abstraites et rigides, d'un thème animalier bien connu de nous, fréquent sur les tambours métalliques du type I, celui des oiseaux volant à la file (fig. 5). A première vue, la zone ornée de figurations humaines, large de 5 cm., paraît reproduire très exactement la zone qui lui correspond sur le tambour de Ngoc-lu. En réalité, elle se distingue de celle-ci par de nombreux détails qui toutefois n'affectent pas l'ensemble de la composition. Dans une étude consacrée aux bronzes de Dông-scn, nous avons identifié les scènes représentées sur le tambour de Ngoc-Ш, avec les diverses phases d'une fête funéraire rappelant de près la Tiwah ou fête des Morts, célébrée encore de nos jours chez les Dayak de Bornéo (2). Les mêmes scènes figurent sur le tambour de Hoàng-ha. Nous avons donc affaire à deux variantes du même thème, variantes très voisines, d'ailleurs, l'une de l'autre. uploads/Litterature/ le-tambour-metallique-de-hoang-ha 1 .pdf

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