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Digitized by the Internet Archive in 2010 with funding from University of Ottawa http://www.archive.org/details/lamlopeantiqOOgeva I LA MÉLOPÉE ANTIQUE CHANT DE L'EGLISE LATINE TOUS DROITS RESERVES LA MÉLOPÉE ANTIQUE DANS LE CHANT DE L'EGLISE LATINE tAR FRfAuGf GEVAERT SUITE ET COMPLÉMENT DE L'HISTOIRE ET THÉORIE DE LA MUSIQUE DE L'ANTIQUITÉ i'^'J^c^ GAND LIBRAIRIE GÉNÉRALE DE AD. HOSTE, ÉDITEUR Rue des Champs, 47 TYPOGRAPHIE C. ANNOOT-BRAECKMAN, AD. HOSTE, SUCC'' 1895 INTRODUCTION. Personne aujourd'hui ne doute que les modes et les cantilènes de la liturgie catholique ne soient un reste précieux de l'art antique. Mais jusqu'à présent tout le monde a dû se contenter de cette notion sommaire et superficielle, qui ne fait que stimuler notre besoin d'en savoir davantage. Quels sont au juste les éléments de la musique gréco-romaine dont l'Église s'est appro- prié l'usage ? S'agit-il seulement de vagues réminiscences, de mélodies à moitié oubliées, ou y a-t-il eu des emprunts positifs, remontant à une époque où la culture de l'art était encore vivante ? Et dans ce dernier cas, à quelle espèce d'œuvres musicales les communautés chrétiennes ont-elles puisé? Enfin quelle date peut-on assigner aux plus anciens chants de l'Antiphonaire romain, tel que le recueil existe de notre temps ? Voilà des questions auxquelles aucun auteur ecclésiastique ou laïque n'a entrepris de répondre avant ce jour. Elles m'ont préoccupé pendant une grande partie de mon existence, et je les croyais encore insolubles en 1880, lorsque, arrivé aux dernières pages de mon livre sur la musique de l'antiquité, je me vis contraint de m'arrêter au seuil de l'époque problématique. Dix années de nouvelles études, poursuivies sans relâche, m'ont mené à une solution satisfaisante du problème. Voici les points princi- paux qui peu à peu se sont dégagés de mes recherches. « Le « chant chrétien a pris ses échelles modales, au nombre de quatre, VI INTRODUCTION. « et ses thèmes mélodiques à la pratique musicale du temps de « l'empire romain, et particulièrement au chant à la cithare (ou « citharodie), genre de musique qui, jusqu'au VP siècle de notre « ère, a tenu dans la vie privée des Romains une place analogue « à celle qu'occupe parmi nous le Lied avec accompagnement (• de piano. Comme la langue latine, la musique gréco-romaine « est entrée de plain-pied dans l'Eglise catholique, et s'y est « continuée telle quelle, à part la suppression de tout élément « instrumental. Vocabulaire et syntaxe sont les mêmes chez le « païen Symmaque et chez son contemporain saint Ambroise ; « modes et règles de la composition musicale sont identiques « dans les hymnes que Mésomède adresse aux divinités du « paganisme et dans les cantilènes des mélographes chrétiens'. « Les plus anciens monuments du chant liturgique remontent à « l'époque où les formes du culte public dans l'Eglise latine « commencent à prendre des contours arrêtés pour nous : aux « confins du IV^ et du V^ siècle ». Au delà le chant chrétien, comme la liturgie elle-même en grande partie, est une terra incognita^ ; il peut fournir la matière de dissertations oratoires, suggérer des conjectures plus ou moins ingénieuses : il ne donne pas prise à la recherche historique. L'ouvrage que nous présentons ici a pour but de démontrer et de développer les précédentes propositions à l'aide de tous les moyens d'investigation actuellement à notre portée. Afin de rendre nos démonstrations aussi probantes que possible, nous avons pris dans le répertoire liturgique toute une classe de chants, les antiennes des Heures, que nous avons mises en ' Voici ce que j'écrivais en 1880 au sujet de ces restes de la musique gréco-romaine, les seuls que l'on connût alors : « La mélodie offre un grand caractère de simplicité; « elle est strictement diatonique sans aucune métabole, tout comme les chants citharo- « diques antérieurs aux innovations de Phrynis et de Timothée. Il faut donc admettre « que du temps d'Hadrien une réaction s'était produite parmi les musiciens dans le sens « de l'archaïsme, ce qui est conforme à l'esprit général de l'époque des Antonins et « à celui de la poésie de Mésomède. » Histoire de la musique de Vantiquité, t. II, pp, 617- 618. J'ai eu la satisfaction de voir mes idées pleinement confirmées par les découvertes musicales faites récemment à Delphes. 2 « Qualis fuerit quatuor primis Ecclesiae saeculis Romanae ecclesiae liturgia in « sacrificio ineffabili, frustra quaeras. » Muratori, Liturgia romana vêtus, Venise, 1748, t. I, p. 10. INTRODUCTION. vu parallèle, quant à la facture musicale, d'une part avec les restes notés de l'époque des Antonins, d'autre part avec les doctrines harmoniques de l'antiquité. Nous avons limité notre examen comparatif aux antiennes de l'office, les considérant comme la seule catégorie de productions qui puisse servir de point de départ à une exploration scientifique du trésor des mélodies chrétiennes. Les motifs de notre préfé- rence sont les suivants. En premier lieu, les susdits chants sont ceux dont nous pouvons, en remontant le cours des âges, suivre les vestiges le plus loin, sans cesser d'être guidés par des documents écrits. Non-seulement nous voyons apparaître déjà vers le milieu du IX" siècle des catalogues oii les mélodies antiphoniques sont classées d'après leurs modes, leurs sons initiaux, et notées par- tiellement en neumes; nous possédons encore une assez grande quantité d'antiennes transcrites dès cette époque dans une nota- tion exprimant des intervalles précis : fait des plus considérables pour quiconque sait que, vers la fin du X^ siècle, les cantilènes liturgiques ont subi de nombreuses altérations modales. En ce qui concerne les morceaux autres que les antiennes, les rensei- gnements musicaux sont loin d'être aussi étendus. A la vérité, les chants développés et ornés de l'office et de la messe (répons nocturnes, graduels, offertoires, introïts, communions, etc.) figurent déjà en abondance dans les manuscrits du IX^ et du X^ siècle, mais uniquement notés en neumes, donc indéchiffrables par eux-mêmes^ En outre, les premiers écrivains didactiques s'en I Une mélodie indiquée par des neumes ne devient lisible qu'à l'aide d'une traduction en notation diastématique : sur la portée, ou par signes alphabétiques. Voir la Paléogra- phie musicale des PP. Bénédictins de Solesmes, 1889, t. I, pp. 40, 47. Guy d'Arezzo com- pare les neumes à un puits sans corde, dont les eaux, pour abondantes qu'elles soient, ne peuvent abreuver aucun être humain. Ibid., p. 108. Tout en reconnaissant hautement le service que les Bénédictins ont rendu au chant liturgique par leur belle publication archéologique, nous ne pouvons nous rallier à leur méthode d'investigation qui, sous une apparence d'exactitude rigoureuse, est en réalité aussi peu scientifique que possible. Négligeant systématiquement les précieux renseignements contenus dans la littérature anté-guidonienne (Aurélien de Réomé, Réginon de Prum, Hucbald, VEnchiriadis, la Commemoratio pseudo-hucbaldienne), ils se contentent de traduire les plus anciens docu- ments neumatiques par des versions diastématiques postérieures à Guy d'Arezzo, sans tenir compte des transformations modales que mainte mélodie a subies entre le IXe et VIII INTRODUCTION. sont peu occupés et ne les ont pas soumis à un classement détaillé'. Pour les hymnes, incontestablement les plus anciens chants ecclésiastiques conservés en Occident, il en est pis encore. Comme elles sont restées exclues de l'office local de Rome jusqu'en plein moyen âge (ci-après, p. 78), leurs mélodies n'ont été ni recueillies ni analysées dans les écrits théoriques"*, et ne nous sont transmises que par des documents assez jeunes. Pas plus que les répons et les antiennes de la messe, elles n'offrent un terrain propice à l'exploration historique. La seconde raison qui nous a décidé en faveur des mélodies antiphoniques, c'est qu'elles ont pu, mieux que toutes les autres, résister aux défaillances de la mémoire, aux caprices du goût individuel. En effet, l'extrême simplicité de leur dessin, l'absence presque complète de groupes mélismatiques (à cet égard elles présentent avec les hymnes païens une analogie frappante), non le XI« siècle. De là vient que leurs livres de chant ne sont pas supérieurs, pour l'authenticité des mélodies, aux autres recueils modernes. Deux faits suffiront à prouver notre assertion. — Le Liber Gradualis de D. Pothier contient 27 antiennes ad commu- nionem (sur les 123 enregistrées par Réginon) qui ont perdu leur primitive forme modale. (Beaucoup d'entre elles sont mentionnées ci-après dans les notes du ch. VII, p. 194 et suiv.) — Le graduel Justus ut palma, que la Paléographie donne comme spécimen de la méthode suivie à Solesmes pour la restauration des chants grégoriens, est transcrit avec la mélodie dénaturée qui se lit partout aujourd'hui : c'est-à-dire dans un prétendu Ile mode irrégulier qui n'a aucune existence légitime. Or tout le groupe de chants auquel se rattache la mélodie du susdit graduel était du IV^ mode au temps d'Aurélien de Réomé, vers 850 (voir ci-après p. igg, note ij. A quoi sert de posséder la même mélodie en dix, vingt manuscrits du IXe siècle, tous parfaitement concordants, si l'on s'en remet aveuglément, pour les interpréter, à un traducteur plus jeune de trois cents ans et qui ne sait que la langue parlée de son temps ? 1 Réginon a recueilli dans son uploads/Litterature/ lamlopeantiq00geva-pdf 1 .pdf

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