Sujet : Le théâtre met souvent en scène des conflits d’origine familiale. Pense

Sujet : Le théâtre met souvent en scène des conflits d’origine familiale. Pensez- vous qu’on puisse les réduire au seul cercle de la famille ? Vous répondrez à cette question en vous référant à des exemples précis tirés du corpus, mais aussi des pièces que vous avez étudiées, lues ou vues personnellement. Analyse rapide du sujet - Rapide vérification des connaissances des élèves en théâtre en posant la question générique, mais sans la rendre systématique. Le conflit familial est présent aussi bien dans la comédie que dans la tragédie. Il est même systématisé dans le drame bourgeois (Diderot, Sedaine) et dans le vaudeville (Feydeau, Labiche, par exemple) - Origines du théâtre antique : les Atrides, les Labdacides, grandes familles aux généalogies fondatrices des mythes de l’humanité. Réécriture des tragédies classiques ; drames shakespeariens ; conflits de pouvoir dans les familles de sang ; comédies française, scandinave, russe, par exemple ; drames bourgeois et romantique, etc. - Nécessité d’opposer la thématique familiale à une problématique plus large : relations de pouvoir ; théâtre politique ; théâtre épique de Brecht ; théâtre de l’absurde ; théâtre contemporain à l’écoute des soubresauts du monde, par exemple - Réduction du sujet à un type de conflit, mais ouverture plus importante sur d’autres enjeux du théâtre Pistes de développement du sujet - Le théâtre de l’intime chez Lagarce ; la question du retour ; réécriture des grands mythes (Ulysse, Oreste) ; bouleversement de l’ordre familial par une de ses figures de résistance : Louis, d’où l’impossibilité de dire la mort prochaine à la mère, au frère, à la sœur, la maison familiale n’étant plus le lieu de cette déclaration. Le rapport des autres membres de la famille à la solitude de Louis, à une certaine « marginalité » : il ne vit pas comme eux, dans un schéma traditionnel. - Dans la tradition de la comédie sans parler du vaudeville où c’est la règle, le conflit familial revêt une forme de critique sociale souvent acerbe ; chez Molière, c’est l’occasion de pointer les dysfonctionnements de cet ordre, ses abus, ses codes ancestraux, sa tyrannie (le despotisme d’Harpagon sur les siens par le règne de l’argent ; la « piété dangereuse » d’Orgon mettant en péril la structure familiale en intronisant en son sein un imposteur ; chez Tchekhov, l’équilibre de la famille ne résiste pas aux appels de l’extérieur (Oncle Vania, La Cerisaie), autant de signes avant-coureurs de la fin d’un monde. Même chez Lagarce cet ordre est menacé, voire tourné en dérision avec Les règles du savoir-vivre dans la société moderne. C’est la construction même de cet ordre, avec ses conventions, ses rites, ses devoirs qui est explosée dans l’écriture. - Dans la tragédie, les questions de domination restent au cœur du conflit : la condamnation à mort d’Antigone par son oncle Créon chez Sophocle ; la lutte sans merci de Néron contre Britannicus dans une lutte de pouvoir hallucinée par la haine fratricide ; la conception fanatique de l’honneur d’Horace face à Camille. Ainsi le conflit familial constitue bien le socle du théâtre des origines, mais il y échappe souvent dans son histoire. - Importance des enjeux du théâtre politique. Les grandes pièces de Corneille mettent en scène les appas du pouvoir (Suréna, Cinna et la question de l’exercice même de ce pouvoir), tout comme chez Shakespeare (Richard III, Hamlet, Antoine et Cléopâtre) - La tragédie racinienne laisse bien souvent de côté la seule question du conflit familial pour présenter des héros dévorés par des passions qui les dépassent : Phèdre, Bérénice, Andromaque, autant de destins de femmes qui se débattent dans des conflits intérieurs à la mesure de leurs désirs ou de leur renoncement ou de leur fidélité érigée en devoir absolu. A l’opposé, dans les comédies de Marivaux, les jeux du travestissement, la mise à l’épreuve des sentiments, les inversions des classes sociales (maître/valet) dans ce seul but inscrivent le conflit dans une comédie de dupes. La mise en scène des stratégies amoureuses finit par mettre à jour les intentions profondes, donc l’échec, comme dans La Fausse suivante. - L’épopée brechtienne vient aussi contredire ce présupposé avec Maître Puntila et son valet Matti, Grandeurs et misères du IIIème Reich, par exemple. Le conflit se développe dans le rapport du peuple au pouvoir qui veut soumettre celui-ci à ses exigences ; l’importance des réponses collectives façonne la dramaturgie même, comme dans Mère courage. - Les conflits du monde, la transformation des sociétés, les tyrannies, les peuples déplacés, l’histoire des colonisations, les destins politiques individuels, les grandes figures héroïques ont nourri et nourrissent encore le théâtre. - Le théâtre de Beckett ou celui de Ionesco dans sa forme la plus extrême oppose aussi un démenti au pur conflit d’ordre familial. Le langage y devient l’actant principal, et la notion de conflit disparaît au profit d’une humanité dépossédée de ses codes linguistiques habituels (Le monologue de Lucky dans En attendant Godot en est un exemple significatif, tout comme la longue tirade du pompier dans La Cantatrice chauve ; filiation oblige, les Tardieu, Dubillard, Novarina, Durif aujourd’hui explorent ces territoires nouveaux du dialogue avec un égal bonheur permettant en outre de renouveler un genre qui finit par s’user dans la répétition de ses ressorts traditionnels. Le « mécanisme du langage » a remplacé la machine théâtrale tout court. « La machine à dire », selon la formule de Novarina se retrouve dans Juste la fin du monde. Ainsi les personnages de Lagarce bousculent le rituel familial dans cette tentative éperdue de « dire, raconter ». - La conclusion s’impose : ce n’est pas le conflit, fût-il uniquement familial, qui fonde la dramaturgie dans son ensemble, mais la manière dont le théâtre peut se servir éventuellement de la sphère privée pour jauger le monde, pour réinventer des personnages, reconstruire des identités. Mais à l’heure de l’éclatement de la notion même de famille, en tout cas en occident, la question de la survie de ce théâtre peut dès lors se poser. En ce cas, la pièce de Lagarce inaugure une synthèse inattendue et prometteuse par l’émergence de ce que J.-P Ryngaert appelle le « logodrame », « le drame du personnage et celui du langage », expérimenté par N. Sarraute. Dissertation Comment le théâtre met-il en lumière les tensions dans les relations de famille ? Vous prendrez appui sur Juste la fin du monde de Lagarce, Incendies de Mouawad, ainsi que sur le parcours associé « crise personnelle, crise familiale ». Introduction Nulle famille ne peut exister sans tensions en son sein, quels qu’en soient les avatars : étouffées, exprimées, constantes, clairsemées, violentes ou anodines, parfois un réveillon ou un enterrement peuvent suffire à les ranimer, ou à les exorciser. Le théâtre, lieu d’échange et de vie, s’est donc très tôt emparé des crises familiales pour en faire un sujet de choix, car spectaculaire, vivant, et parlant au coeur de la plupart d’entre nous. Mais quelles formes prend cette mise en scène et en texte des tensions dans les familles ? Nous nous attarderons tout d’abord sur la façon dont dramaturges et scénographes tiennent à souligner les difficultés à s’entendre (aux deux sens du mot) entre parents, enfants, fratries. Le poids des héritages familiaux, hérédités douloureuses, obligations asphyxiantes, liens forcés feront l’objet de la suite de notre réflexion : comment le théâtre les met-il en lumière ? Nous analyserons enfin la représentation théâtrale des violences familiales, qui acquiert des formes multiples sur scène et dans les textes. 1. Les difficultés à s’entendre au sein de la famille a) Malentendus et communications chaotiques – On pourra bien sûr penser à la pièce Le Malentendu, de Camus, où le quiproquo génère le tragique. – Dom Juan, qui ne s’entend pas avec son père, se joue de ce dernier en lui faisant croire qu’il s’est converti, mettant ainsi en place une communication pervertie et manipulatrice qui veut résoudre les tensions par une hypocrisie destructrice. – L’incommunication ou la communication erratique, brisée, entre couples abîmés chez Ionesco (La Cantatrice chauve), chez Beckett (Oh ! les beaux jours), chez Tardieu (Un mot pour un autre). b) Les affres du silence et des non-dits : aveux impossibles, confessions manquées – Antoine est au coeur d’une impossible révélation dans Juste la fin du monde : comment annoncer à sa famille une maladie signe de mort ? Alice et sa famille sont au coeur des mêmes tourments communicationnels dans Trois petites soeurs. – Maintes comédies de Molière (L’Avare, par exemple) s’articulent autour de l’impossible aveu par les enfants de leur désir de mariage auprès de leur barbon borné de père. 2. Les poids que fait peser la famille sur ses membres : une tension aux multiples formes a) Le poids des ascendants comme des descendants : la dette familiale – Le Cid met en scène un fils que l’honneur familial et la soumission aux impératifs paternels vont déchirer. – Incendies est une pièce marquée par le thème de la dette, avec un testament qui va lier et contraindre les enfants par-delà la mort. – Une uploads/Litterature/ correction-des-disserts.pdf

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