Érudit est un consortium interuniversitaire sans but lucratif composé de l'Univ
Érudit est un consortium interuniversitaire sans but lucratif composé de l'Université de Montréal, l'Université Laval et l'Université du Québec à Montréal. Il a pour mission la promotion et la valorisation de la recherche. Érudit offre des services d'édition numérique de documents scientifiques depuis 1998. Pour communiquer avec les responsables d'Érudit : info@erudit.org Compte rendu Ouvrage recensé : Mary Jo Deegan (dir.) : Women in Sociology. A Bio-bibliographical Sourcebook par Cécile Coderre Recherches féministes, vol. 5, n° 2, 1992, p. 171-173. Pour citer ce compte rendu, utiliser l'adresse suivante : URI: http://id.erudit.org/iderudit/057705ar DOI: 10.7202/057705ar Note : les règles d'écriture des références bibliographiques peuvent varier selon les différents domaines du savoir. Ce document est protégé par la loi sur le droit d'auteur. L'utilisation des services d'Érudit (y compris la reproduction) est assujettie à sa politique d'utilisation que vous pouvez consulter à l'URI https://apropos.erudit.org/fr/usagers/politique-dutilisation/ Document téléchargé le 23 November 2016 01:57 171 Mary Jo Deegan (dir.) : Women in Sociology. A Bio-bibliographical Sourcebook. New York, Greenwood Press, 1991. Dans son ouvrage récent Women in Sociology, Mary Jo Deegan réunit les biographies de femmes sociologues des 150 dernières années soit de 1840 à 1990. Une longue introduction présente les profils biographiques de quelque cinquante femmes marquantes pour la sociologie. Mary Jo Deegan a elle-même rédigé près de la moitié des biographies ; se sont joints à elle des collaboratrices et collaborateurs dont Jane Ollenburger et Michael Hill. Au lieu d'utiliser l'expression « mères fondatrices », elle lui préfère celle de « sœur fondatrices » et ce pour des motifs politiques. Si les termes « sœur fondatrices » ont le mérite de faire référence au concept de la sororité, incluant les catégories analytiques de race et de classe, ils lui permettent surtout de contester l'utilisation du vocable « mères de la sociologie ». Mary Jo Deegan considère que cette appellation va à rencontre des intentions de la plupart de ces femmes sociologues dont l'objectif était de dénoncer les rôles traditionnels assignés aux femmes alors qu'elles voulaient développer leur potentiel intellectuel. L'auteure découpe l'histoire des femmes et de la sociologie en quatre étapes : les précurseures (1840-1890) ; l'âge d'or (1890-1920) ; les années noires (1920-1965) ; la période contemporaine (1965-1990). Deegan considère que ces pionnières l'ont été à plus d'un titre. Harriet Martineau est l'une d'entre elles et fut de celles qui ont permis que la sociologie soit reconnue comme un champ d'étude. D'autres femmes ont été associées de façon plus ténue à la sociologie, comme Mme de Staël, Josephine Butler et Rose Firestone. Cette dernière plus particulièrement est la première femme à avoir obtenu un doctorat en sociologie de la famille en 1887 à l'Université de Woostter (Ohio) et, selon Deegan, la première femme formée en sociologie dans le monde. Un nombre important de théoriciennes féministes dont Mary Woolstonecraft, Lucy Stone et Matilda Joslyn Gage ont établi les principes fondateurs de la théorie féministe et sont donc à ce titre des précurseures de la sociologie féministe. Le deuxième groupe de sœurs fondatrices commence à travailler dans la période 1890-1920. Cette cohorte de femmes voulait établir une nouvelle profession capable de transformer la société. Durant cette période, Deegan voit deux types de parcours chez les femmes sociologues, d'une part les pionnières, d'autre part les premières professionnelles. Les pionnières de l'âge d'or de la sociologie ont lutté pour l'accès des femmes aux études supérieures, le droit de vote, le travail à l'extérieur de la maison et l'utilisation des sciences sociales pour documenter la discrimination que subissent les femmes. Jane Addams est une figure centrale, spécialement dans le développement de la "sociologie appliquée" fondée par l'École de Chicago. Hull-House, dont elle était la directrice, était la principale institution pour les femmes sociologues. Cette institution a développé un modèle de travail combinant l'activité domestique et l'activité professionnelle. Plusieurs des plus 172 brillantes sociologues de cette génération y vécurent et y travaillèrent, dont Edith Abbott, Emily Greene Balch, Sophonisba Breckinridge, Charlotte Perkins Gilman, Florence Kelley, Frances Kellor, Julia Lathrop, Mary McDowell et Annie Marion MacLean. Une douzaine d'autres femmes sociologues dont Beatrice Webb, Ida Β. Wells-Barnett et Alice Masaryk la visitèrent. Selon Deegan, le déclin de la théorie d'Addams correspond à la Première Guerre mondiale. Forcée de choisir entre la vision des femmes pour une société de coopération et la lutte pour la démocratie, elle opte pour une position antimilitariste. Deegan conclut que la censure nationale de ses travaux en tant que pacifiste coïncide avec sa chute comme sociologue, et pour de nombreuses années, elle sera marginale dans la société et dans la profession. Les jeunes femmes formées à la sociologie l'ont souvent été par les pionnières et par des hommes sympathiques qui, comme George H. Mead et W.I.Thomas, leur servirent de mentor. La plupart de ces étudiantes ne furent pas acceptées comme des égales par les hommes universitaires, mais furent marginalisées dans les départements de sociologie. Des professeures de sociologie à l'Université de Chicago (Edith Abbott, Sophonisba Breckinridge, Mary McDowell et Marion Talbot) furent transférées de la sociologie vers le service social en 1920. D'autres se tournèrent vers l'anthropologie ou la psychologie. Et après 1920, les réseaux des sœurs fondatrices -étudiantes en sociologie, auteures prolifiques, membres actives de l'association professionnelle - disparurent au profit des hommes sociologues. Les années 1920-1965 sont considérées comme les années noires car la sociologie se redéfinit comme une profession masculine. Après la Première Guerre mondiale, on observe, aux Etats-Unis, une opposition systématique au travail et aux écrits des femmes sociologues et l'on assiste à la perte de réseaux internationaux de pouvoir et de visibilité des femmes dans le champ de la sociologie. Les femmes formées en sociologie après la Première Guerre mondiale entrèrent dans un monde d'hommes et dans des structures institutionnelles masculines. Elles étaient des citoyennes de seconde zone sans le pouvoir des réseaux de femmes sociologues. Jessie Bernard, Ruth Shonle Cavan, Frances Donovan, Helen MacGill Hughes, Dorothy Swaine Thomas, entre autres, furent parmi les femmes de cette cohorte. Elles enseignèrent dans des collèges moins prestigieux et reçurent peu de subventions de recherche. Sur le plan méthodologique, les mathématiques étaient considérées originellement comme une part du travail des femmes sociologues. Mais ce travail était technique et défini comme répétitif et sans intérêt. Le travail des hommes quant à lui était créatif et se définissait par la capacité d'analyser les modèles de l'action sociale. Après la Crise, le travail mathématique sera redéfini comme étant plus approprié aux hommes. Contrairement à l'âge d'or, les femmes de cette cohorte se marièrent et plusieurs de leurs conjoints devinrent des sociologues connus. Cette nouvelle génération de sœurs fondatrices eut à combiner le mariage, la maternité et un environnement professionnel hostile aux femmes dans cette profession. Un certain nombre de sœurs fondatrices se sont distinguées par leur contribution à la cause des femmes mais toutes n'étaient pas féministes, entre autres Hannah 173 Arendt. Cependant elles ont partagé fondamentalement une vision du monde. Et malgré leurs différences de générations et la diversité de leurs intérêts et de leurs nationalités, elles étaient des femmes dans un monde d'hommes. Entre 1950 et 1965, la place des femmes était à la maison avec leurs familles. Durant ces années, peu de femmes entreprirent des études en sociologie. Cependant plusieurs des sœurs fondatrices formées à cette époque émergèrent dans les années 1960 et 1970. L'époque contemporaine se caractérise par la lutte des femmes pour l'équité en sociologie. En 1964, Alice Rossi est une des premières à revendiquer l'équité entre les hommes et les femmes. À partir d'un idéal d'égalité et à la suite du mouvement des femmes, le premier groupe de femmes sociologues américaines est créé en 1969 {Sociologists for Women in Society). Une nouvelle ère s'ouvre pour les femmes en sociologie. Leurs revendications connaissent de nombreux succès. Par exemple, les femmes sont élues en plus grand nombre dans les associations professionnelles, l'une d'entre elles devient la président de l'American Sociological Association (1973) et ce, plusieurs années après la nomination de la première femme en 1943. Les « sœurs fondatrices » furent plus critiques que les hommes sur la formation offerte en sociologie et sur la discipline elle-même. À cause de barrières historico-structurelles, les sœurs fondatrices eurent tendance à travailler à l'extérieur des universités, en marge de celles-ci. À la lecture de leurs biographies et ce, spécialement pour les plus contemporaines, il apparaît à Deegan que plus ces femmes vieillissent - les soins des enfants devenant moins exigeants - plus elles produisent, et ce davantage que les hommes des mêmes groupes d'âges qu'elles. La recension des travaux de ces premières sociologues participe au mouvement de découverte de l'histoire des femmes et de reconnaissance à l'égard des pionnières. L'ouvrage de Deegan est essentiel pour les cours d'introduction à la sociologie et d'histoire de la pensée, de même que pour les cours en Études des femmes. Cette publication se limitant le plus souvent aux travaux des Américaines, des Françaises et des Anglaises les plus connues, il sera utile de la compléter par d'autres recherches plus internationales. Cécile Coderre École de service social Université d'Ottawa uploads/Litterature/ compte-rendu-ouvrage-recense 1 .pdf
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- Publié le Mai 16, 2021
- Catégorie Literature / Litté...
- Langue French
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