Une nouvelle perspective sur la littérature comparée: la réflexion d’Adrian Mar

Une nouvelle perspective sur la littérature comparée: la réflexion d’Adrian Marino Cristina CIUNTUC (ANDRIUȚĂ) Université «Alexandru Ioan Cuza» Iasi, Romania Abstract: The literary theoretician Adrian Marino has tried to offer a real theory which should explain the entire system of comparative literature. The author aimed to realize a veritable poetics in order to re-substantiate this research field. In that case, Adrian Marino becomes the promoter of the idea of Weltliteratur and proposes a new theoretical concept - the literary invariant -, in order to achieve a new analytical perspective on comparative literature. The author strongly believes that the adoption of a hermeneutic perspective can facilitate a most proper interpretation of this field / system, both as a homogeneous whole and as a sum of the components parts, choosing to emphasize the congruent aspects of the world’s literatures instead of the divergent ones. L’intérêt pour l’étude et l’analyse de la littérature comparée et de la littérature mondiale est une préoccupation réellement constante d’Adrian Marino. Les témoignages sont ses articles de la période de sa jeunesse, dans lesquels la passion de découvrir les interférences, les influences, les relations de congruence ou de discontinuité entre les différents auteurs, les mouvements ou les courants culturels et artistiques est fort ressentie (on ne doit qu’énumérer quelques-uns des titres de sa jeunesse pour se rendre compte de cela : Ahasvérus dans la littérature roumaine, Paul Morand et un problème moderne, Un esprit lucide: Prosper Mérimée, Sir Philip Sidney et la défense de la poésie, Sainte-Beuve et le classicisme). Bien sûr, à ce moment de début, l’optique du théoricien de plus tard était en plein processus de cristallisation. À cet égard, les premières études ou articles sur le phénomène comparatif montraient que l’auteur était influencé par l’optique et les méthodes qui allaient être condamnées plus tard par l’auteur et dont il allait se séparer1. Mais justement ces incertitudes de début démontrent le caractère organique du développement de l’intérêt de l’auteur dans la littérature comparée. La preuve de ce fait est son inclusion dans la théorie générale que le critique et puis l’idéocritique Adrian Marino visait à atteindre2. L’appétit théorique d’Adrian Marino considérait le domaine de la littérature comparative un domaine favorable pour la manifestation, l’auteur se proposant l’établissement d’un point de vue distinctif en même temps exhaustif qu’approprié sur le phénomène de la littérature comparée. Les deux livres, publiés à l’origine en français, constituent un ensemble qui défend les mêmes idées et les concepts théoriques. Ainsi, en parlant d’Etiemble dans Le comparatisme militant de René Etiemble, l'auteur parle de lui- même3; en commentant la méthode de l'auteur français, Marino ne 1 Commentant et interprétant le travail d’Al. Macedonski, Adrian Marino estime qu’il est nécessaire d’établir dès le début les points de confluence et d’interférence que le poète roumain établit avec d’autres auteurs étrangers. Ainsi, le critique présente le degré d’originalité de Macedonski, en comparant son travail avec une longue série d’œuvres d’auteurs occidentaux comme Byron, Musset, Shakespeare, Dante, Lamartine, Hugo ou Chateaubriand. Ce genre de comparatisme des influences et des relations directes établies entre les auteurs, les œuvres ou les littératures sera refusé par Adrian Marino qui préfère une nouvelle approche moins déterministe des contacts culturels et littéraires. 2 Ce projet d’envergure, partiellement réalisé, devait comprendre «une théorie de la critique littéraire et des idées littéraires, une théorie de la littérature sur des raisons herméneutiques, une histoire de l’idée de littérature, un dictionnaire des idées littéraires, un système comparatiste, militant et théorique (s.n.), une méthode pour intégrer la littérature roumaine dans la littérature universelle » (Adrian Marino, La biographie de l’idée de littérature, vol. I, Dacia Publishing House, Cluj-Napoca, 2006, p. 6). 3 La plupart des idées des deux auteurs sont communes et l’approche se réalise intellectuellement et comme attitude. Selon l’auteur roumain, Etiemble était un «seul chevalier, un français totalement atypique» (Adrian Marino, La biographie de l’idée de littérature, vol. 5, Dacia Publishing House, 1997, p. 23), qui a été isolé et s’est isolé aussi de l’environnement culturel contemporain fait que préparer la voie pour sa propre méthode qui est en fait un prolongement des idées de René Etiemble. Le comparatisme et la théorie de la littérature n’est que l’expression organisée et complexe de sa théorie qui se reflète non seulement sur la littérature comparée. Mais, avant même de la publication de ces études, les préoccupations de l’auteur pour le domaine de la littérature n’étaient pas nouvelles. Profitant du traitement spécial dont CREL (Cahiers roumains d’études littéraires) bénéficie pendant l’ère communiste (les articles étaient rédigés uniquement en langues de circulation internationale; la publication était distribuée uniquement à l’étranger), Marino publiait de nombreux articles qui allaient préfigurer la théorie de la littérature comparée ainsi que la théorie comparée de la littérature4. Grâce à un processus d’extrapolation successif, le théoricien Adrian Marino élargissait la sphère de manifestation de sa théorie, ce qui menait à la discussion sur le statut, les fonctions et la valeur de la littérature comparée dans la discussion générale sur l’état de la littérature dans son ensemble. Il est important de noter cela dès le début. La tentative audacieuse d’Adrian Marino a essayé non seulement de configurer un domaine d’action distinct de la littérature comparée, mais aussi de réaliser une définition de la littérature et du caractère littéraire à partir des caractéristiques de la littérature français dans lequel il devrait vouloir s’intégrer. Mais, tout comme Adrian Marino dans l’environnement culturel autochtone, Etiemble choisissait la voie alternative, personnelle, l’opposition envers les règles de l’époque. En ce qui concerne l’identité de la littérature comparée, les deux auteurs partagent le culte pour la valeur idéologique du comparatisme, rejetant l’eurocentrisme et transformant la discipline de l’académisme de la Sorbonne en une extension d’un sujet vivant, pragmatique, engagé, ouvert vers les problèmes de l’actualité. Les deux partagent également la préférence pour l’œcuménisme laïque, favorisant la perspective désacralisée sur le monde et sur la littérature, en favorisant l’idée d’égalité culturelle de toutes les littératures. 4 Il s’agit, entre autres, des éléments tels que : Où situer la «littérature universelle»? (n° 3/1975), Pour une «poétique» comparatiste (n° 1/1983), Le comparatisme des invariants: le cas des avant-gardes (n° 1/1976). universelle / comparée. La méthode dont le théoricien / idéocritique roumain allait s’en servir pour la réalisation des objectifs est la même méthode de l’herméneutique des idées littéraires. Cela permettra de discuter, d’abord, en essayant un redimensionnement et une réintégration des notions telles que l’invariant littéraire ou Weltlitteratur. Esprit d’innovation, l’auteur roumain rejoint ceux qui proclament la nécessité d’un changement dans le domaine de l’activité de la littérature comparée et est donc un réformateur qui s’oppose à la perspective dogmatisante qui domine le domaine de la perspective comparative5. L’auteur parle de la nécessité d’une étude factuelle considérée comme le seul objectif de l’intervention comparative. Ainsi, il est clair de voir et comprendre que la position de Marino est contraire au comparatisme didactique universitaire, au celui historiciste, positiviste, maladroit; son objectif principal est de surmonter ce modèle en le remplaçant par un autre qui soit plus flexible. Selon l’auteur, «le comparatisme doit être défini en tenant compte des caractéristiques de l’acte critique»6. Pour Marino, l’acte critique bénéficie d’une définition personnalisée, qui a été longuement discutée dans Introduction à la critique littéraire et qui comprend une pluralité d’éléments : « l’acte critique est une synthèse des approches historiques, théoriques et d’évaluation parce que ce qui intéresse est la personnalité de l’œuvre caractérisée par la structure, le sens et la valeur»7. En plus, Marino essaie de transférer cette définition dans le domaine de manifestation de la littérature comparée aussi. La particularité de la littérature comparée, sa différence spécifique 5 «Changer le paradigme que nous proposons consiste en une théorie comparative de la littérature avec une base épistémologique, méthodologique et historique autonome» (Adrian Marino, Comparatisme et théorie de la littérature, Polirom, Iasi, 2006, p. 99). De plus, ce que Marino vise est «l’orientation du comparatisme vers la théorie littéraire» (Ibidem, p. 100). 6 Ibidem, p.14. 7 Ibidem, p.13. par rapport à l’étude littéraire proprement dit inclut « le transfère des relations factuelles (particulières) aux relations structurelles (universelles), de l’universel au générique, ainsi que la conversion de ces données dans une synthèse théorique et méthodologique cohérente »8. Ainsi, Marino ne cherche pas à séparer irrémédiablement l’étude de la littérature comparée de l’étude traditionnelle de la littérature, mais il se propose de chercher néanmoins à tracer une ligne entre les deux champs qui sont similaires mais pas identiques. En outre, l’auteur roumain se propose de « connecter » les éléments comparatifs du monde contemporain, qu’il s’agisse de l’établissement de nouvelles lignées théoriques ou extra- esthétiques. Ses livres sur le comparatisme ont certainement contribué au renouvellement théorique du domaine ; l’un des grands mérites de l’auteur roumain consiste dans l’acte de la reprise et de la redéfinition de l’identité de la littérature comparée. En suivant Wellek et Etiemble, l’auteur roumain se considère le disciple de la Weltlitteratur, en opinant que «la littérature universelle (ce qui est, en acceptation traditionnelle, l’objet de la littérature comparée, s.n.) est constituée de la totalité ou uploads/Litterature/ complit-ciuntuc-andriuta-cristina-french.pdf

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