Georges Cœdès Documents sur l'histoire politique et religieuse du Laos occident
Georges Cœdès Documents sur l'histoire politique et religieuse du Laos occidental In: Bulletin de l'Ecole française d'Extrême-Orient. Tome 25, 1925. pp. 1-201. Citer ce document / Cite this document : Cœdès Georges. Documents sur l'histoire politique et religieuse du Laos occidental. In: Bulletin de l'Ecole française d'Extrême- Orient. Tome 25, 1925. pp. 1-201. doi : 10.3406/befeo.1925.3044 http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/befeo_0336-1519_1925_num_25_1_3044 DOCUMENTS SUR L'HISTOIRE POLITIQUE ET RELIGIEUSE DU LAOS OCCIDENTAL Pu- G. CŒDES, Conservateur de la Bibliothèque Nationale de Bangkok, Correspondant de i Ecole Française d'Extrême-Orient. AVANT-PROPOS Le Laos occidental ou Laos siamois, qui correspond en gros à la Vice-royaut é du Nord-Ouest comprenant les deux mônthôn de Phayap et de Mâharàt, est cette région montagneuse où prennent naissance les divers cours d'eau qui se réunissent au sud, dans la plaine, pour former le Mènam ChàoPhya. Géo- graphiquement, cette contrée est bornée vers l'est et le nord-est par la ligne de partage entre Ménam et Mékong et par le Mékong lui-même, vers l'ouest et le nord-ouest par la ligne de partage entre le bassin du Ménam et celui de la Salouen, au sud par la plaine. Ethniquement, ou mieux linguistiquement, c'est le pays des Yuen, limités à l'est par les Laos proprement dits, au sud par les Siamois, à l'ouest par les Mons, les Birmans et les ICarens, au nord par les Shans et les Lirs. Au cours de l'histoire, le pays ainsi défini a formé pendant longtemps un royaume indépendant : c'est le Yonakarattha des textes pâlis (d), le Lan Na des chroniques en langue thai, le Jangoma des auteurs européens des XVI' et XVII" siècles (-), le Pa-ре des historiens chinois (•'). (') Par exemple du Sasanavatnsa, éd. M- Bode, p. 48 sqq. (v Appendice). (-) V. Hobson-Jobson, s. v. Jangomay. (:!) Yulk identifiait le f'a-pe a M ira n g Yong {Marco Polo, II. p. 128). mais les docu ments publiés par F. W. K. MOllkrí Vocab. der Pa-yi- und Pah-poh-Sprachcn, T'oung Pao, III. i8q2, p. 1 ; — Ein Brief in Pa-yi-Sehrift, ibid.. V. 1894, p. 329) ne permettent pas de placer le Pa-ре ailleurs que dans la région de Xieng Mai. Les habitants du Pa-pe l — 2 — Si l'on excepte les renseignements, d'ailleurs fort maigres, épars dans les récits des voyageurs anglais tels que Richardson (*) ou Holt H. Hallett (2), et dans les ouvrages généraux sur le Siam, les seuls travaux spécialement consacrés à l'histoire du Laos occidental sont dus à des Français. Encore sont- ils peu nombreux, et lorsqu'on aura cité les études épigraphiques du P.Schmitt et la traduction de l'histoire de Nang Kiam Maha Tévi dans la Mission Pavie (3) d'une part, et les mémoires de M. P. Lefèvre-Pontalis (*) d'autre part, on aura à peu près épuisé la bibliographie en langue européenne. Les travaux d'érudition en langue siamoise ne sont pas beaucoup plus nom breux (5), mais ils comprennent un ouvrage fort important, le Phóngsávadan Y опок de Phya Pràxakït Kôrâchak, publié à Bangkok en 1907 : c'est une compilation basée sur les chroniques et les légendes locales (b), au texte ori ginal desquelles elle ne dispense naturellement pas de recourir, mais dont elle groupe les données essentielles sous une forme commode et dans une langue plus accessible que le yuen. Je me propose de donner ici, en texte et traduction, des extraits de deux ouvrages pâlis qui exposent d'une façon concise l'histoire — surtout religieu se — du Yonakarattha, des origines au début du XVIe siècle : le Câmadevï- vamsa de Bodhiramsi et la Jinakâlamôlinï de Ratanapaňňa, dont j'ai déjà s ignalé ailleurs 1'importaňce et l'utilité ("'). donnent en effet à leur pays le nom de « Miang phyang chyang hmai », c'est-à-dire Mwâng Phïng i et non Vieng, comme le dit Millier, III, p. 3, п. П Xieng Mai, titre officiel du royaume de Xieng Mai dans Pépigraphie [Mission Pavie, N0. V verso 1, 1 5 ; N0. VI recto и, 11. 4-5, etc.), correspondant au Biàgarattha de la Jinakalamâlinï. D'ailleurs la lettre en écriture Pa-ре publiée vol. V, p. 33 '-332 émane bien de Xieng Mai. Le nom de Miang Yong, donné au Pa-ре par les gens du Pa-yi ou Thais du Yun-nan, corres pond sans doute à Mirâng Yuen. Quant au nom même de Pa-ре, dont on n'a pas encore donné d'explication satisfaisante, ne serait-il pas tout simplement une transcription de l'expression yuen «pape» désignant la forêt-ciairière de diptérocarpées qui cou vre actuellement la moitié du pays icf. Journ. Siam Soc, VIII, p. 1 ) et en couvrait peut- être une plus grande étendue autrefois ? (i) The History of Labong ýrom the Native Records... forming an Appendix to his Journals (Journ. As. Soc. Bengal, VI, 1837, p. 55). (-) A Thousand Miles on an elephant in the Shan States, Edinburgh et London, 1890. Сл) Etudes diverses, Tome III. (*) L'invasion thaïe en Indochine ; — Les Younes du Royaume de Lan-па ou de Pa pe (T'oung Pao, 1897, p. 53 ; 1909, p. 495 ; 1910, p. 105 ; 1911, p. 177). (■') Je ne trouve guère à citer que l'Introduction à l'édition révisée des Annales d'Ayu- dhya par S- A. R. le Prince Damrong. traduite par J. Crosby dans Journ. Siam Soc, vol. XIII, pt. 2 (cf. surtout p. 58 le chapitre intitulé : The region of Lan Na Thai). (f>) Voir à l'Appendice la liste des chroniques conservées à la Bibliothèque Nationale de Bangkok. (") Note sur les ouvrages pâlis composés en pays thai, BEFEO, XV, ni, pp. 43-45- — Documents sur la dynastie de Sukhodaya. Ibid,, XVII, 11, p. 34. — о — Leur valeur documentaire n'est pas douteuse. Ils donnent un état relativ ement ancien de !a chronique, et ont, en qualité de textes pâlis, beaucoup moins souffert que les Phôngsavâdan et Tâmnan des remaniements successifs et de la négligence des scribes. Cette circonstance est particulièrement heureuse en ce qui concerne les dates, que la Jinakâlamàlinï exprime en toutes lettres et souvent dans plusieurs ères différentes. Sans doute, composés par des moines qui portaient surtout intérêt aux faits religieux, les textes en question ne nous révèlent qu'un aspect des événements. Mais, à dire vrai, cet aspect n'est pas le moins intéressant : l'expansion de la religion bouddhique à l aquelle le Laos doit le plus clair de sa civilisation, la chronologie des monu ments dont un grand nombre dressent encore vers le ciel leurs flèches dorées, sont à mon sens des sujets plus attachants que les récits de ces guerres inte rminables où se complaisent les chroniques en langue vulgaire. Le présent travail n'est donc en aucune façon une histoire du Laos occi dental. 11 se contente, comme son titre l'indique, de rendre accessibles des documents peu connus en Europe, et son but serait atteint si ces extraits, avec les éclaircissements donnés en note et les divers renseignements groupés dans l'Appendice, pouvaient servir de point de départ à de nouvelles recher ches dans un domaine encore insuffisamment exploré. Bangkok, septembre 1923. ABREVI AT IONS PY. Phôngsavâdan Yônôk. Jkm. Jinakâlamàlinï. Cdv. Câmadevïvamsa. Sbn. Sihingabuddharupanidâna. - 4 - INTRODUCTION 1. — La Jinakalamâunl La JinakâlamâTinï (ou Jinakâlamâlï) a pour auteur un moine nommé Ra- tanapaňňa, au sujet duquel on voudra bien m'exeuser de répéter ce que j'écrivais en 19 15 dans ma « Note sur les ouvrages pâlis composés en pays thai » (BEFFO, XV, ni, pp. 44-45) : « Une certaine incertitude semble régner parmi les érudits siamois au sujet de l'auteur et de la date de cette Jinakâlamâlinï. Le Phôngsavâdan Yô- nôk (p. 200) dit que Rntanapaňna était chef du monastère Bodhârâma de Xieng Mai. Dans la préface de l'édition de la Jinakâlamalinï publiée à Bang kok en 1908, le Prince Damrong, s'appuyant sur un passage du Phôngsavâ dan Yônôk (p. 263), tiré lui-même de la Jinakâlamâlinï (pp. 155-156), sup pose que le Ratanapaňňa en question est un des deux moines du même nom qui en 151 1 vinrent l'un de Làmpang, l'autre de Phàyâo. pour prendre part à la pose des bornes sacrées du Pupphâràma de Xieng Mai (du Bodhârâma. selon la Jinakâlamâlinï, pp. 155-156). Mais je ne saisis pas très bien en quoi ce fait permet de mettre en doute le témoignage du colophon de la Jinakâla mâlinï qui dit nettement que l'ouvrage a été écrit en 1516 par Ratanapaňňa résidant dans le Rattavana mahàvihâra de Xieng Mai ('). Même si l'on se refuse Í1) Voici ce colophon : Mamrayarajavamsamhi jato Bilakabhupati Siridhammacakkavatti šakale iti vissuto Tassa raja panatta tu dhammiko Buddhair.âmako Narindo so vnahipalo sasanajotauatthiko Rattavane viharamhi karesi kutiyam subham Vasanto yati yo tattha tena raňňfipatthambhito Faniurataiiam asseti Ratanapaňňasannito Tevïsatibbasso so va antovasse vasam tada Jinakàlam vadhitvâna gantham akàsi yam subham Kalam Jinassâpi parampara tam Nanesu ganthesu virajitaň ca Sukhena nàtuin kavinâ vahanto Yasmá tato so Jinakalamalí So yam samàsena tato samattam Anantarayena yathâdhipayam Tatha pajanam subhatà ca masa Nitthaňg-atá ta akhilâ va hotu à admettre l'existence d'un troisième moine du même nom, rien n'empêche de supposer que l'un des deux Ratanapaňňa venus de Làmpang et de Phâyào se soit établi uploads/Litterature/ coedes-george-documents-sur-l-x27-histoire-politique-et-religieuse-du-laos-occidental-article.pdf
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- Publié le Sep 06, 2021
- Catégorie Literature / Litté...
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