AULU-GELLE LES NUITS ATTIQUES LIVRE TROISIÈME. I. Pourquoi Salluste a dit que l

AULU-GELLE LES NUITS ATTIQUES LIVRE TROISIÈME. I. Pourquoi Salluste a dit que l'avarice énerve non seulement une âme virile, mais même le corps. Un jour, à la fin de l'hiver, nous nous promenions avec Favorinus devant les bains de Sitius, pour jouir de la chaleur du soleil. T out en nous promenant, nous lisions le Catilina de Salluste, sur l'invitation de Favorinus, qui avait aperçu ce livre entre les mains d'un de ses amis. A la lecture de ce passage : « L'avarice est une soif de l'or que ne connut jamais le sage; cette passion, pleine, pour ainsi dire, d'un poison funeste, énerve le corps et l'âme: toujours infinie, insatiable, elle ne diminue ni par l'abondance ni par le besoin ». Favorinus, se tournant vers moi : «Comment, dit-il, l'avarice peut-elle énerver le corps? Il me semble que je comprends parfaitement que cette passion énerve l'âme la plus virile; mais qu'elle puisse produire cet effet sur le corps, c'est ce que je ne m'explique pas.- Moi aussi, dis-je alors, je me suis bien des fois adressé cette question, et tu n'as fait que prévenir une demande que j'allais te faire ». A peine avais-je ainsi témoigné le désir d'être éclairé sur ce passage, qu'un disciple de Favorinus, qui paraissait versé dans la littérature, prit la parole en ces termes : « Voici ce que j'ai entendu dire à Valérius Probus: Salluste s'est servi d'une tournure poétique, pour faire entendre que l'avarice corrompt l'homme : il a dit que cette passion énerve le corps et l'âme, qui sont les deux parties dont l'homme est composé ». - Jamais, que je sache du moins, dit Favorinus, notre ami Probus, pour expliquer ce passage, n'a eu recours à une subtilité aussi déplacée et aussi téméraire; il n'est pas possible qu'il prête ici une périphrase poétique à Salluste, un auteur qui recherche la concision avec un soin si particulier. Il y avait parmi nous un homme d'une grande érudition; Favorinus lui demande son opinion sur cette difficulté. Ce dernier prend ainsi la parole : « Ceux qui, rongés et dévorés d'ambition, se livrent tout entiers à la passion d'entasser de l'or, sont sans cesse absorbés par cette occupation; comme leur seul but est de thésauriser, ils négligent les autres travaux et tous les exercices qui peuvent entretenir les forces de l'homme; la plupart du temps renfermés chez eux, ils se livrent à des trafics et à des opérations sédentaires qui leur enlèvent la vigueur du corps et de l'âme, et les énervent, comme dit Salluste. » Alors Favorinus fait lire de nouveau le passage de Salluste. Après cette lecture: «Mais que dire, reprend-il alors, quand nous voyons beaucoup d'hommes très avides d'argent, conserver cependant une santé robuste? - T on objection est juste, reprend le premier; cependant je dirai que si l'avare conserve une bonne santé, il faut nécessairement qu'il se livre à certains exercices pour satisfaire d'autres penchants qui l'invitent à prendre soin de son corps; car si l'avarice seule, s'emparant de toutes les affections, de toutes les facultés de l'homme, le pousse jusqu'à l'oubli de son propre corps, au point de lui faire abandonner les soins que réclament et ses propres forces et la nature, on peut dire avec raison que la soif de l'argent énerve le corps et l'âme de celui qu'elle dévore. - T on opinion, dit Favorinus, est admissible, ou Salluste, par haine de l'avarice, en a exagéré la puissance. » II. Quel est, d'après M. Varron, le jour natal de ceux qui sont nés avant ou après la sixième heure de la nuit (minuit) ? Durée de la journée civile chez les différents peuples. Que suivant Q. Mucius, la femme qui n'a pas observé la durée de l'année civile ne peut être épousée par usurpation. On s'est demandé souvent quel est le jour natal de ceux qui naissent à la troisième, à la quatrième ou à toute autre heure de la nuit; est-ce le jour qui précède ou le jour qui suit la nuit de la naissance ? M. Varron, dans son traité des Choses humaines, au livre des Jours, dit: « Les enfants nés dans le même intervalle de vingt-quatre heures, placés entre la moitié d'une nuit et celle de la nuit suivante, sont considérés comme étant nés le même jour ». D'après ce passage, il est facile de voir que Varron établissait la division des jours de telle sorte que l'enfant né après le soleil couché, mais avant minuit, doit avoir pour jour natal celui qui a précédé la nuit de la naissance; qu'au contraire, l'enfant né dans les six dernières heures de la nuit a pour jour natal le jour qui suit immédiatement. Varron nous apprend, dans ce même traité, que les Athéniens comptaient autrement: chez eux, le jour civil commençait au coucher du soleil et finissait le lendemain à la chute du jour. Les Babyloniens avaient une autre manière de compter : chez eux, le jour embrassait tout le temps compris d'une aurore à l'autre. Il ajoute que les Ombriens prennent généralement pour un jour le temps qui se passe d'un midi à l'autre : « Ce qui est absurde, dit-il, car l'enfant qui naîtrait en Ombrie à la sixième heure (midi) des calendes, aurait son jour de naissance moitié dans les calendes et moitié dans le jour suivant.» Le peuple romain, comme l'affirme Varron, compte en effet le jour civil par le milieu de chaque nuit; cette opinion est confirmée par un grand nombre de faits. Chez les Romains, les sacrifices se font en partie pendant la nuit, en partie pendant le jour : les sacrifices de nuit se rapportent aux jours précédents, et non aux nuits; les sacrifices offerts dans les six dernières heures se rapportent au jour suivant. Une autre preuve nous est fournie par les cérémonies et les rites établis pour prendre les auspices. Quand les magistrats doivent consulter les auspices pour un acte public, et dans le même jour exécuter cet acte, ils ont soin de ne prendre les auspices qu'après minuit, et de n'agir qu'après midi: ainsi ils ont pris les auspices et agi le même jour. En outre, les tribuns du peuple, à qui il est interdit de s'absenter de Rome pendant un jour entier, ne sont pas censés avoir violé la loi lorsqu'ils partent après minuit et qu'ils reviennent entre l'heure où l'on allume les flambeaux et le milieu de la nuit suivante, de manière à passer dans Rome une partie de la nuit. J'ai lu aussi que le jurisconsulte Quintus Mucius disait souvent que le mariage par usurpation était impossible si la femme, qui avait vécu depuis les calendes de janvier avec l'homme qu'elle devait épouser, n'avait pas commencé à coucher hors du logis avant le quatrième jour des calendes de janvier suivant; car dans ce cas elle ne peut s'être absentée trois nuits de la maison de cet homme (condition requise par la loi des Douze-T ables pour valider le mariage par usurpation), puisque les six heures de la dernière nuit appartiennent à l'année suivante, qui commence aux calendes. Lorsque j'eus trouvé dans les anciens tous les détails sur la manière de diviser les jours, et les rapports de cette division du temps avec la jurisprudence ancienne, je me rappelai un passage de Virgile où ce poète, sans aucun doute, nous fournit là-dessus une preuve de plus, non pas d'une manière directe et précise, mais par une tournure toute poétique, qui, tout en voilant la réalité, ne laisse pas de rappeler une coutume ancienne; c'est dans ces deux vers : L'humide nuit, dit-il, a parcouru la moitié de sa carrière; et déjà j'ai senti le souffle brûlant des coursiers du soleil. Le poète, en effet, par cette image, ne semble-t-il pas nous dire que, chez les Romains, le jour civil commençait à la sixième heure de la nuit? III. Moyen de reconnaître l'authenticité des comédies de Plaute, puisqu'on a confondu celles qui lui appartiennent véritablement avec celles qui ne sont pas de lui. Que Plaute composa plusieurs de ses ouvrages dans un moulin, et Névius quelques-unes de ses pièces dans une prison. Je vois aujourd'hui combien est juste la réflexion que j'ai entendu faire à des hommes versés dans la littérature; quand on veut, disaient-ils, résoudre les doutes qui se sont élevés sur l'authenticité de la plupart des comédies de Plaute, il ne faut ajouter aucune foi aux catalogues d'Élius, de Sédigitus, de Claudius, d'Aurélius, d'Attius, de Manilius; il faut interroger Plaute lui-même, son génie, son style. Varron n'a pas adopté d'autre méthode; car sans parler des vingt et une pièces appelées varroniennes, que ce critique distingue des autres comme appartenant à Plaute, du consentement de tout le monde, il en a recueilli encore quelques-unes, qui, par le style et par le caractère comique, lui paraissent, offrir des analogies frappantes avec la manière de Plaute, bien qu'elles aient été attribuées à d'autres. C'est ainsi que Varron revendique pour Plaute la Béotienne, que je lisais tout récemment. Bien que cette pièce ne se trouve uploads/Litterature/ aulu-gelle-les-nuits-attiques-livre-troisieme.pdf

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