1 EGYPTE ET PROCHE ORIENT I. Introduction La pensée occidentale est l’héritière
1 EGYPTE ET PROCHE ORIENT I. Introduction La pensée occidentale est l’héritière de l’Antiquité classique gréco-romaine. Quelle place y occupe l’Egypte ? La Grèce : Pythagore aurait séjourné en Egypte, l’héritage que se donnent les Grecs plonge ses racines dans l’Egypte ancienne. Pour Aristote, les Egyptiens sont les inventeurs des mathématiques, et Isocrate place en Egypte les origines même de la philosophie. Selon les Grecs, l’Egypte est une civilisation de très haute antiquité, ils y voient la plus ancienne culture, et ils vont donc y situer leurs racines. Platon considère que la civilisation égyptienne est vieille de 10 000 ans et a beaucoup influencé la Grèce. Ils veulent légitimer leur propre culture par rapport à la plus vulnérable du bassin méditerranéen. Les contacts entre ces deux régions ont été bien réels. Par exemple, la naissance de la grande statuaire grecque est intimement liée aux statues égyptiennes, on en voit clairement la filiation dans les kouros. Rome : ils reprennent cette admiration, comme pour les monuments : ils vont transporter beaucoup d’obélisques à Rome. Parmi les témoignages de cette admiration : la villa Hadrien à Tivoli (118-138 AD), qui comprend un canope (grand bassin) -> évoque une portion du Nil où s’est noyé le favori de l’empereur. A l’extrémité de ce bassin se trouve un sérapéum, dédié à un dieu égyptien. Avant que l’Egypte n’entre dans l’empire romain (30 BC), des cultes égyptiens se sont propagés dans l’Italie puis tout l’empire, dont le culte du dieu Sérapis (créé à l’époque hellénistique, combo entre Osiris et Apis). Durant l’époque impériale, cette divinité va être associée à deux autres divinités : Isis (d’origine égyptienne) et Harpocrate. Le culte d’Isis s’est aussi propagée à travers l’empire, un iséum a été construit à Pompéi durant le 1er siècle avant JC. Rome est cosmopolite, on y retrouve des cultes originaires de l’ensemble du territoire impérial. Aujourd’hui on connait une quinzaine de temples dédiés à Isis, qui deviendra populaire jusqu’en Gaule ou en Bretagne. Ces cultes égyptiens ont donc connus une très grande popularité. On assiste durant les 1ers siècles de notre ère à la christianisation de l’empire romain -> l’Egypte devient aussi chrétienne (avec les coptes), au IVème siècle de notre ère la plus grande partie des Egyptiens ont laissé tomber les temples. Théodose 1er instaure la chrétienté comme la seule religion de l’empire, et plus tard il interdit les cultes païens -> une grande partie de la culture pharaonique disparait à ce moment, car les temples et leur prêtres étaient les détenteurs de cette tradition depuis toujours. Ces lettrés disparaissent, et la possibilité de lire l’écriture hiéroglyphique avec. La dernière inscription datée remonte au 24 août 394 après JC, à Assouan. Justinien a fermé le temple d’Isis à Philae en 537 PC. L’Egypte byzantine, conquise par les Arabes au VIIème siècle, va voir disparaître la connaissance de la culture pharaonique presque complètement. Les chrétiens, qui avaient gardé un héritage, notamment la langue copte (dernier état de cette langue égyptienne pharaonique), deviennent minoritaires faces aux Arabes. L’accès à la compréhension des monuments, héritage de cette culture, devient un mystère. Malgré cela, beaucoup d’éléments égyptiens, qui ont été légués par l’intermédiaire de l’Antiquité classique, vont survivre. On va retrouver des éléments d’iconographie égyptienne intégrés dans des représentations chrétiennes, comme dans la Vierge à l’enfant de Jean Fouquet, qui est un clin d’œil à Isis. 2 Au Moyen Age, l’Egypte va garder une place importante, essentiellement en relation avec la Bible : ce pays y est cité plus de 600 fois, c’est la terre d’Abraham, de Joseph (terre d’accueil) et de Moïse (terre d’esclavage). Sans parler du voyage de la sainte famille, faisant de Jésus un nouveau Moïse -> vision ambivalente. C’est une image très présente dans notre tradition, mais elle reste imaginaire : les chrétiens avaient peu d’accès à l’Egypte, musulmane alors. L’image qui est donné est fantasmée : les pyramides sont interprétées comme les greniers à blé de Joseph -> au Moyen Age, on parle d’une Egypte biblique. A la Renaissance, on part à la redécouverte de l’Egypte à travers l’Antiquité romaine : en effet, c’est à Rome que l’on trouve les nombreux obélisques ainsi que les statues égyptiennes ou les monuments (tombeau en forme de pyramide, en 12 AC). Il y a aussi une statue de Nes-Hor de la XXVI dynastie (600-580 AC), trouvée en Italie sur la villa Flaminia -> cette statue sera reprise dans les 1ers ouvrages traitant de l’Egypte, notamment dans L’histoire de l’art chez les Anciens de J.J Winckelmann (théoricien de la supériorité de l’art grec sur les autres arts anciens, il utilisera l’art égyptien à cette fin). Ou encore la statue en albâtre Horus Albani, découverte à Rome sur le champ de mars, probablement dans un temple d’Isis : il s’agit d’une représentation de Ramsès II (d’après les hiéroglyphes sur le socle), comparable avec la statue de Ramsès II de Tanis -> on peut voir que toute la partie haute a été restaurée. Au XVIII : l’intérêt pour l’Egypte va se répandre encore plus, de cette époque datent les 1ers travaux tentant de déchiffrer les hiéroglyphes. Tout ce qu’on connaissait de l’Egypte à ce siècle était ce qu’on pouvait en lire des auteurs anciens (Romains essentiellement). Cf la fontaine de la régénération de 1793 : influence égyptienne très forte. Bonaparte mènera une expédition en Egypte, en 1798, il emmène un corps expéditionnaire avec lui. Le but officiel des Français était de couper la route vers les Indes des Anglais. Il débarque en Alexandrie, puis dans le Caire, mais la flotte est détruite et ils sont donc bloqués en Egypte jusqu’à se rendre aux Anglais en 1801. Lors de cette expédition, Bonaparte ne part pas seulement avec son armée, il est aussi accompagnée de 167 savants regroupant toutes sortes de spécialités : la commission des sciences et des arts. La mission de cette commission est de dresser un inventaire le plus exhaustif possible du pays, sous tous ses niveaux (politique, artistique, zoologie…). Cette expédition va amener à la découverte de la pierre de Rosette, découverte en 1799 par un officier (Pierre François Xavier Bouchard), mais suite à la reddition de l’armée française, elle sera ramenée à Londres et se trouve aujourd’hui au British Museum. Des copies font que Jean-François Champollion arrive à déchiffrer les inscriptions, écrites en égyptien hiéroglyphique, en démotique et en grec. Il présente les résultats de ses travaux en 1822 dans la Lettre à M. Dacier. En retrouvant la faculté de lire le hiéroglyphique, une spécialité nait : l’égyptologie. Il y a d’autres résultats de cette expédition en Egypte : toutes les infos recueillies par les savants ont été regroupées dans un recueil monumental : Description de l’Egypte. Cela a provoqué un engouement pour l’Egypte dans toute l’Europe. On peut voir cette nouvelle admiration dans l’architecture (Egyptian hall, Londres 1815), la porcelaine, l’opéra (la flûte enchantée est montée dans plusieurs capitales avec des décors empreints d’égyptomanie), jusqu’au pavillon des éléphants dans le zoo d’Anvers en 1855 par Charles Servais. Sans oublier la peinture (The gods and their makers, Edwin Long, 1878; Egyptian chess players, 1865, Sir Lawrence Alma-Tadema), ou encore le pavillon égyptien à Paris en 1867. 3 Au XXème, l’art consiste en une déconstruction, défiant la perspective, pour tenir compte du point de vue du spectateur -> il s’agit de la même façon de représenter le monde que chez les Egyptiens, ils ont une vision bidimensionnelle de l’espace. Trois femmes nues, André Lhote (auteur de « la peinture égyptienne » en 1954). Ta Matete, Paul Gauguin : cette image est une transposition dans son univers particulier d’une peinture égyptienne figurant une scène de banquet avec une série de femmes thébaines : toujours vision bidimensionnelle (rabattements dans le plan, épaules de profil,…), dont il possédait une copie. Tête de Diego, Alberto Giacometti, 1925. C’est un portrait de son frère, la tête est coupée au niveau du coup, avec des traces intentionnelles renvoyant à un groupe d’objets particuliers dans l’histoire de l’art égyptien de la IVème dynastie (vers 2500 AC). L’artiste était très intéressé par l’Egypte. En plus des expositions universelles qui maintiennent l’intérêt pour l’Egypte, l’engouement est ravivé en 1922 avec la découverte de la tombe de Toutankhamon, qui a déclenché une égyptomanie particulièrement développée, elle a suscité de l’intérêt dans le monde entier. Durant le XXème siècle, il y a des influences jusque dans les BD et le cinéma. Nous pouvons donc voir que l’Egypte fait partie intégrante de notre univers culturel occidental selon des modalités plus ou moins complexes. Il y a un phénomène d’appropriation de l’art et de la civilisation égyptienne à travers notre culture. II. Le cadre naturel Territoire d’environ 1 000 000 de km², mais dont seulement 5% est cultivable. A l’est se trouve le désert arabique, et à l’ouest le désert libyque, un des plus arides (grand plateau de calcaire). Ce dernier comprend des réserves d’eau de faible profondeur, avec quelques oasis. Entre les deux déserts : la vallée du Nil, plus grand fleuve d’Afrique (6650 uploads/Histoire/ art-et-archeologie-egypte.pdf
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- Publié le Sep 29, 2022
- Catégorie History / Histoire
- Langue French
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