1 M. THIOYE – DROIT DES AFFAIRES DROIT DES AFFAIRES 1 Droit commercial général

1 M. THIOYE – DROIT DES AFFAIRES DROIT DES AFFAIRES 1 Droit commercial général Moussa THIOYE Professeur à l’Université Toulouse 1 Capitole Directeur du Master Droit de l’immobilier Vice-Doyen de la Faculté d’Administration et Communication 2 M. THIOYE – DROIT DES AFFAIRES INTRODUCTION I- Définition du droit commercial et des notions composantes Le Droit ou droit objectif correspond à l’ensemble des règles (de conduite sociale) générales, permanentes et obligatoires pour tous ses destinataires (ceux à qui elles s’appliquent) et dont le respect est assuré par l’autorité publique. Quant au droit commercial proprement dit, il peut être littéralement défini comme celui dont l’objet est de gouverner le « commerce ». Il en existe ainsi deux conceptions possibles : - une conception subjective ou personnaliste : droit applicable aux commerçants (conception du droit allemand) : on insiste sur les personnes. - une conception objective : droit applicable aux actes de commerce quel que soit leur auteur : on insiste sur les actes des commerçants, les opérations commerciales. Le Code de commerce paraît avoir adopté une solution de compromis, même si la seconde conception serait prédominante (la notion d’acte de commerce est la notion clé, et elle est désormais visée en tête du Code de commerce). Ainsi, de manière générale, l’on considère que le droit commercial constitue la composante du droit privé qui s’applique aux commerçants ainsi qu’à certains actes juridiques faits par les commerçants, soit entre eux, soit avec leurs clients, à savoir les actes de commerce. Deux précisions s’imposent : d’une part, celle de la notion de commerce et, d’autre part, celle de l’évolution de l’expression « droit commercial. A- La notion de « commerce » La définition de la notion de « commerce » n’est pas uniforme. Dans un sens général ou courant correspondant à la conception romaine, le commerce ou « commercium » désigne tout échange quels qu’en soient l’objet et/ou les modalités, tous les rapports juridiques que les hommes entretiennent relativement à l’utilisation de leurs biens. Cette conception présente l’inconvénient d’être trop large. Dans un sens plus étroit et plutôt économiste, le terme « commerce » ne désigne que les activités de circulation et de distribution des richesses, à l’exclusion des activités industrielles de production et des activités de pure consommation. La faiblesse de cette conception réside dans son exiguïté. Ces deux conceptions extrêmes (l’une trop vague, l’autre trop restrictive) se sont avérées toutes incomplètes, de sorte qu’il a fallu dégager une conception moyenne : le commerce que régit le droit commercial englobe, en effet, tant les activités de distribution des biens que les activités industrielles de production, 3 M. THIOYE – DROIT DES AFFAIRES ainsi que des activités connexes telles que la banque, le transport, les assurances… Il apparaît, de la sorte, qu’une très grande partie des activités économiques relèvent du domaine du droit commercial. Cela dit, ce domaine n’est pas général, car beaucoup de secteurs économiques y échappent encore, notamment pour des motifs sociologiques et historiques : c’est le cas des activités agricoles, des activités artisanales, des activités immobilières et des activités libérales (du moins lorsqu’elles ne s’exercent pas à travers des sociétés de forme commerciale), lesquelles sont de nature civile. B- Les mutations de la notion de « droit commercial » Le droit commercial classique – conçu comme la partie du droit privé qui s’occupe des opérations juridiques faites par les commerçants ès qualité – s’est progressivement enrichi d’apports tout à fait nouveaux constitués par des éléments tant de droit privé que de droit public et, en particulier, de droit public économique, de droit fiscal, de droit social. C’est ainsi qu’il a paru nécessaire de bâtir des concepts nouveaux, de portée plus large, à même d’englober toutes les règles juridiques applicables à l’entreprise. L’on a ainsi vu naître les expressions, plus ou moins analogues, « droit des affaires », « droit économique », ou encore « droit de l’entreprise ». Ces termes tendent aujourd’hui à supplanter le mot « droit commercial », expression devenue un peu trop étroite. Cela dit, le terme de « droit commercial » demeure vivace et est encore employé pour désigner certains ouvrages ou cours. II- L’évolution historique du droit commercial A- La période antique L’Antiquité ne connaissait pas, à y regarder de près, de droit commercial organisé nettement distinct du droit civil. Il y avait toutefois quelques institutions ou règles spécifiques à la vie commerciale, dont la plus grande partie n’intéressait, au demeurant, que les affaires maritimes. Concernant l’Egypte pharaonique, force est de constater que l’on n’a pas retrouvé de documents relatifs au droit commercial. En revanche, s’agissant de l’Antiquité orientale, les Babyloniens avaient, quant à eux, édicté, avec le Code d’Hammourabi (1750 ans avant J. C.), des dispositions relatives, par exemple, aux contrats de prêt à intérêt, de dépôt, de société ou encore de commission. Quant aux Phéniciens, ils avaient inventé des institutions importantes propres au commerce maritime : tel est le cas, par exemple, de la loi rhodienne du jet à la mer (Lex Rhodia de Jactu) qui permettait de répartir entre tous les 4 M. THIOYE – DROIT DES AFFAIRES expéditeurs la perte d’une partie des marchandises, en particulier celles qui auraient été jetées à la mer par le capitaine pour éviter un naufrage (c’est cette institution qui a été à la source de la théorie des avaries communes). De leur côté, les Grecs (ou Hellènes, peuple indo-européen) ont forgé une institution, le nauticum foenus, qui allait être à la base de ce que l’on a appelé le prêt à la grosse aventure (c’est-à-dire un prêt à intérêt concernant des biens exposés à des risques maritimes et conclu sous la condition singulière qu’en cas de dégât l’emprunteur est dispensé de rembourser au prêteur tout ou partie des sommes prêtées). Davantage orienté vers les activités agricoles, Rome ne connaissait pas un droit commercial véritablement organisé, sans doute parce que les activités de négoce y étaient exercées essentiellement par des esclaves et plus tard par des affranchis. Cela dit, le droit romain avait repris un certain nombre d’institutions des peuples méditerranéens en matière commerciale et révélait ainsi une parfaite maîtrise des contrats et de certaines opérations financières comme, par exemple, le cautionnement. B- La période médiévale On peut dire que c’est le Moyen Age qui a vu naître un droit commercial véritablement organisé. En effet, avec l’effondrement de l’empire romain, les villes marchandes, notamment de l’Italie du Nord (Gênes, Milan, Florence, Pise, Venise), des Flandres (Bruges, Gand, Anvers, Amsterdam, Bruxelles), d’Allemagne (Leipzig, Francfort, Brême, Lübeck) et de Champagne (Troyes, Provins), vont se dresser en Républiques autonomes sous l’impulsion des commerçants. Ces derniers vont alors élaborer un solide droit des affaires caractérisé par le statut des villes et le droit des foires avec, notamment, le développement du droit des contrats, la création de la lettre de change (dont le mérite, à l’époque, était d’éviter les transferts de fonds sur des routes peu sûres), l’institution de la procédure de faillite (alors destinée à sanctionner les commerçants mauvais payeurs), l’apparition des premiers éléments de la comptabilité en partie double, l’apparition de la société en commandite permettant de contourner l’interdiction canonique du prêt à intérêt (au lieu de prêter, le capitaliste constituait une société avec un commerçant ayant besoin de financement et, de la sorte, se trouvait ainsi associé tant aux bénéfices qu’aux pertes). L’autre innovation majeure de cette époque fut la création de juridictions spécialisées, en l’occurrence les tribunaux consulaires qui étaient ainsi investis de la mission de régler les contentieux entre commerçants et même ceux appartenant à des pays différents (Consules Mercatorum de Florence ; juridictions consulaires de France : Lyon en 1419, Toulouse en 1549, Paris en 1563). Notons aussi le développement, à cette époque, de la lex mercatoria (droit 5 M. THIOYE – DROIT DES AFFAIRES des marchands résultant des usages) ainsi que la forte dimension internationale du droit. C- L’Ancien droit français (ancien Régime) A compter du 17ème siècle, avec la création des grands Etats modernes et la consolidation du pouvoir royal (y compris dans la vie économique), l’on assiste à une remise en cause du caractère international du droit hérité du Moyen Age. En effet, les Etats essayant de délimiter le cadre de leur souveraineté, notamment par l’édiction de règles propres et autonomes, le droit commercial va devenir à la fin du 18ème siècle un droit écrit et national. Le droit français était ainsi dominé par deux éléments : - d’abord, le régime des corporations limitant artificiellement l’accès aux différents corps de métiers (les corporations allaient devenir obligatoires en 1673 avec l’ordonnance sur le commerce de terre, prise sous l’influence de Colbert et parfois appelée Code Savary, du nom du commerçant qui en a préparé la rédaction) ; - ensuite, la réglementation royale du commerce. Ainsi, avec les ordonnances de Colbert venues réglementer le commerce terrestre (ordonnance de 1673) et le commerce maritime (ordonnance de 1681). Notons qu’à la fin de l’Ancien Régime, le droit commercial ne répondait plus tellement aux nouveaux impératifs ou besoins de l’activité économique et qu’il apparaissait plus comme une superposition de règles uploads/S4/ thioye-droit-des-affaires-introduction.pdf

  • 37
  • 0
  • 0
Afficher les détails des licences
Licence et utilisation
Gratuit pour un usage personnel Attribution requise
Partager
  • Détails
  • Publié le Jui 15, 2021
  • Catégorie Law / Droit
  • Langue French
  • Taille du fichier 0.1715MB