Regards droite sur la 19 mai 2015 - n° 59 - Édité par la cellule “Veille et Rip
Regards droite sur la 19 mai 2015 - n° 59 - Édité par la cellule “Veille et Riposte“ du Parti socialiste l’édito d’A lain Bergounioux Pourquoi tant de démesure ? On peut s’étonner du tombereau d’accusations venues de la droite sur la réforme des collèges proposée par le gouvernement - pour une fois, l’extrême droite est à la traîne, occupée, il est vrai, par son psychodrame politique… « Naufrage », « terrorisme intellectuel », « nivellement par le bas », « la République en danger », etc. Rien que cela ! Et, l’offensive - car, c’est bien de cela qu’il s’agit - est orchestrée par le futur président des « Républicains » - vraiment mal nommés - qui ne veut pas être en arrière de la main face à ses compétiteurs de la primaire, au premier rang desquels Bruno Le Maire manifeste son ambition, sans complexe. Et, pour faire bon poids, à côté des critiques, cela ne dérange pas de cibler la personnalité de la ministre. Ces hommes po- litiques, expérimentés dans le combat idéologique, savent bien ce qu’ils provoquent comme sentiments dans l’opinion ! Certes, toute réforme de l’éducation, compte tenu du rôle que l’école joue dans notre société, mérite le débat et suscite souvent les passions. Il est naturel d’en discuter tel ou tel aspect. Moi- même j’ai des remarques à faire sur les programmes - notamment ceux d’histoire. Et, je m’in- terroge sur la meilleure manière d’établir de la mixité pédagogique et, donc, de la mixité sociale qui suppose de faire sa place à la diversité, dans le cadre d’un collège unifié. Ce ne sont, certes, pas des réalités simples. Mais, le fond de la réforme est juste. Il s’agit, enfin, de penser ensemble l’éducation des débuts de l’école primaire à la fin du collège, en construisant des cycles qui mé- nagent les transitions si importantes, de favoriser la diversité des pédagogies, de donner un ac- compagnement personnalisé, par petits groupes. Cela se fait, le plus souvent, dans les systèmes européens comparables qui ont de meilleurs résultats que le nôtre dans les évaluations interna- tionales. Cette réforme met en place cette école du « socle des connaissances, des compétences et de la culture » que, déjà la loi de 2005, dite loi Fillon, avait inscrite dans l’agenda gouverne- mental. Seulement, la droite l’avait laissée en pointillés, faute de volonté, et avait même com- promis toute amélioration en supprimant, notamment, la formation professionnelle des futurs enseignants ! Alors, de quoi s’agit-il pour la droite ? De faire oublier sa politique passée, sans aucun doute. Elle évite, ainsi soigneusement la discussion fondamentale. Varier les angles d’attaque contre le gouvernement socialiste pour pouvoir coaliser les mécontentements, également. Faire la dé- monstration de ce que Nicolas Sarkozy entend par République. Et, là, c’est tout à fait révélateur. Car, toutes les critiques publiques faites vont dans le même sens. C’est une vision de l’école - en l’occurrence le collège - qui la fige dans ses inégalités, au point d’effacer même les velléités de réforme que marquait la loi de 2005. Or - au-delà même de la préoccupation qui doit être la nôtre de justice sociale -, de fortes inégalités scolaires affaiblissent le pays dans sa force éco- nomique. Enfin, il faut voir, dans tout cela, une volonté de mettre au premier plan de la future campagne de 2017 des questions dites « identitaires » qui dessinent le portrait d’une France nostalgique, angoissée par l’idée de son déclin, et autoritaire. Cela a toutes les chances de n’être qu’une République de papier, mais avec une certaine influence dans l’opinion. La démesure ac- tuelle dans les paroles et les comportements, n’est, donc, pas un emballement momentané, mais révèle une stratégie. A nous de le dire et de mener un débat sans concessions sur les vrais enjeux, en empêchant que les réalités de l’inégalité scolaire soient niées. 2 NOTE DE VEILLE ET RIPOSTE SUR LA SITUATION DE LA DROITE ET DE L’EXTRÊME-DROITE Rupture ou pas ? La crise provoquée par la suspension, le 4 mai dernier, de Jean-Marie Le Pen du Front national et sa décision de créer une nouvelle formation politique sont-elles le signe d’un malaise profond, au sein du mou- vement, sur fond de remise en cause idéolo- gique ? La situation tend à démontrer, en tout cas, qu’il ne porte pas sur ce qui est essentiel et fondamental dans ce qu’est le Front natio- nal, quel que soit son nom, demain. Car, entre le père et la fille, les divergences restent ce qu’elles sont : générationnelles et d’ordre stra- tégiques, ce qui suffit à nourrir un conflit vio- lent. Quand le fondateur du parti se plaisait, en bon négationniste, à multiplier les dérapages, en se référant très directement à l’antisémi- tisme, au pétainisme et à la nostalgie d’une France royaliste et colo- nialiste, il cédait volon- tiers à un jeu de dupes qui, de fait, l’éloignait de toute possibilité d’accéder au pouvoir. Sa vie politique s’est résumée, de fait, à d’incessantes provoca- tions, en lien avec des courants qui formaient l’archipel éclaté – et conflictuel – de l’extrême droite française où se côtoyaient des monar- chistes, d’anciens vichystes, d’ex-poujadistes, des néo-paganistes, ou bien encore, des mili- tants issus des rangs d’Occident et d’Ordre Nouveau. Des hommes d’action plus que de pensée qui s’inscrivaient, pour certains, dans les pas de Jean-Louis Tixier-Vignancour, dont l’héritier, Jean-Marie Len Pen en personne, al- lait être, pour longtemps, le leader incontesté d’un mouvement nationaliste, d’inspiration contre-révolutionnaire, défendant la vision d’une société d’ordre profondément conserva- trice, renouvelée par l’Action française de Charles Maurras et l’idéologie des droites conservatrices et révolutionnaires du dix-neu- vième siècle, populistes et préfascistes. Le FN, tel que l’imagina, dès 1972, son créa- teur, n’apparaît pas comme un parti cherchant à conquérir le pouvoir, mais comme une force contestataire, se réclamant du peuple contre les élites – le fondement même du populisme -, re- jetant la droite comme la gauche, sans pour au- tant parvenir à masquer son appartenance à une extrême droite peu soucieuse de justice so- ciale et d’efficacité économique. Captation d’héritage. Le père-fondateur du FN éprouve, en revanche, peu d’appétence pour le travail de réflexion mené, parallèle- ment, par le Groupement de recherche et d’études pour la civilisation européenne (GRECE) et le Club de l’Horloge, qui ne man- quent pas une occasion de stigmatiser les ra- cines égalitaires des sociétés occidentales, le libéralisme comme le socialisme, et faire du combat culturel, avec l’idée de « diffé- rence », une arme idéologique pour res- sourcer le vieux natio- nalisme discrédité par les guerres du XXe siècle. C’est bien là une différence de taille avec Bruno Mégret qui s’attachera, pendant les an- nées 1980-1990, à former les cadres du parti et à charpenter un programme idéologique digne de ce nom, autour du triptyque « iden- tité, immigration, insécurité » et son corollaire, la « préférence nationale », censé servir de tremplin à une stratégie d’entrisme, au sein de la droite républicaine. Un héritage dont Marine Le Pen et ses jeunes troupes se réclament très clairement, au- jourd’hui. C’est sans doute là que les diver- gences entre le père et la fille sont les plus marquantes. Elles ne sont donc pas tant idéo- logiques que stratégiques. La fille, comme Bruno Mégret ou Carl Lang, en leur temps, en- tend se donner les moyens d’accéder aux plus hautes responsabilités. Pour cela, il lui faut s’affranchir de la méthode déployée par son Font national : de « vraies fausses » ruptures « Entre le père et la fille, les divergences restent ce qu’elles sont : générationnelles et d’ordre stratégiques, ce qui suffit à nourrir un conflit violent. ». NOTE DE VEILLE ET RIPOSTE SUR LA SITUATION DE LA DROITE ET DE L’EXTRÊME-DROITE 3 géniteur, totalement contre-productive au re- gard de ces aspirations. Mais, qu’on ne s’y trompe pas. L’enracinement idéologique reste le même entre le pater familias, dont la per- sonnalité mêlant les différentes strates de l’ex- trême droite freine l’évolution du parti, et son héritière qui s’emploie à privilégier les thèmes porteurs parmi les catégories sociales en diffi- culté. Entourée de Florian Philippot, Louis Al- liot et de jeunes cadres souverainistes, influencés par la longue bataille idéologique menée par le GRECE, elle se complait ainsi dans la subversion des mots. Exemple parmi d’autres, la laïcité dont elle pré- tend défendre le principe d’application, et qui lui sert d’alibi pour pointer l’islam du doigt. Elle cherche ainsi à rendre présentable une forme de racisme qui postule l’altérité irréductible de l’immigré, à jamais apatride. À ses yeux, la re- ligion du Prophète est consubstantielle au « maghrébin », défini- tivement inassimila- ble. Le jeu est subtil. Il consiste à attribuer à l’islam, et à lui seul, une double incompa- tibilité d’ordre théolo- gique avec, d’une part, le principe de sé- paration, et, d’autre part, la notion d’éga- lité, qui sont au cœur du pacte républicain. Comme s’il existait des cultes dont le dogme serait exempt d’incompatibilité avec les prin- cipes, valeurs et normes civiles de la Répu- blique. Logiques uploads/S4/ regards-sur-la-droite-n0-59.pdf
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- Publié le Oct 22, 2021
- Catégorie Law / Droit
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