1 La notion de guerre préventive 0riane GINIES Assistante de recherche au CEREM
1 La notion de guerre préventive 0riane GINIES Assistante de recherche au CEREM Juriste en droit international 2007 Centre d’Etudes et de Recherche de l’Ecole Militaire CEREM - Ecole Militaire – 21, place Joffre – 00445 Armées Tél. : 01 44 42 45 34 - Fax : 01 44 42 43 84 Internet : publications@cerems.defense.gouv.fr 2 Sommaire Introduction .............................................................................................................................................. 3 1. La légalité de la guerre préventive .................................................................................................. 4 1.1. L’appréciation du caractère licite de la notion de légitime défense préventive ....................... 4 1.1.1. Présentation de la notion de légitime défense préventive dans un contexte de non recours à la force. ........................................................................................................................... 4 1.1.2. La licéité des actions militaires préventives sur consentement de l’ONU ....................... 5 1.2. Le caractère illicite de la notion de légitime défense préventive au regard des critères de la légitime défense classique .................................................................................................................. 7 1.2.1. Le non-respect des critères de nécessité et de proportionnalité de la riposte ................ 7 1.2.2. L’extension abusive du concept de légitime défense au regard de l’opération « liberté immuable » ..................................................................................................................................... 8 2. La légitimité de la guerre préventive ............................................................................................... 9 2.1. Les facteurs favorables à la guerre préventive ....................................................................... 9 2.1.1. « Mieux vaut prévenir que guérir » : la doctrine favorable à une approche évolutive du droit international ............................................................................................................................ 9 2.1.2. les tentatives de justification de la guerre préventive : État de nécessité ? .................. 11 2.2. Les facteurs défavorables à la guerre préventive ................................................................. 12 2.2.1. Le refus par l’O.N.U de défendre la nouvelle doctrine américaine de la légitime défense anticipative .................................................................................................................................... 12 2.2.2. L’incompatibilité des interventions armées unilatérales avec les buts et principes de l’ONU ....................................................................................................................................... 13 * * * 3 Introduction Introduction « SI VIS PACEM PARA BELLUM » : « Si tu veux la paix prépare la guerre ». Sous l’empire du droit archaïque, la souplesse des règles était telle que les États avaient une très grande latitude quant à la conduite de leurs relations internationales1. Dans ce modèle anarchique, aucune norme n’interdisait à un État de faire la guerre2. La force était considérée comme source principale de légitimité et les nations pouvaient recourir à la violence armée pour mettre en œuvre leurs droits ou protéger leurs propres intérêts. La guerre préventive, était donc permise tant qu’elle pouvait être considérée comme juste. Élaborée, au moment où l’épreuve de la seconde guerre mondiale plus meurtrière que la première était en cours, la Charte des Nations Unies consacre, l’acquis du Pacte Briand-Kellogg de renoncement du recours à la guerre 3. Sur le plan normatif l’évolution est menée à son terme par l’article 2 § 4 de la Charte interdisant de recourir « à la menace ou à l’emploi de la force, soit contre l’intégrité territoriale ou l’indépendance politique de tout État, soit de toute autre manière incompatible avec les buts des Nations Unies ». Contrairement au pacte de Paris, qui procédait à une énumération des hypothèses de guerres illégitimes, l’article 2 § 4 de la Charte appelle à une étude au cas par cas de la compatibilité de l’emploi de la force « avec les buts des Nations Unies ». En 1945, lors de la conférence de San Francisco, les États signataires n’éprouvaient qu’une confiance limitée dans l’efficacité du système de sécurité collective qu’ils allaient instituer. En contrepartie de la renonciation à l’emploi de la force qu’ils concédaient aux Nations Unies, le principe de légitime défense devait être présent dans la Charte. Ainsi, l’article 51 de la Charte, reconnaît de façon expresse aux États, un « droit naturel de légitime défense, individuelle et collective, dans le cas où un membre des Nations Unies est l’objet d’une agression armée ». La place même de cet article, au sein du Chapitre VII consacré à la sécurité collective, est significative4. La première entorse au principe de non recours à la force est née. Les ambiguïtés de la rédaction de cet article apparaissent essentiellement à propos de trois problèmes : la définition de la force prohibée, la signification de l’expression « dans leurs relations internationales », et les cas où le recours à la force serait licite5. L’article 51 permet le recours à la force seulement en réaction à « une agression armée », et à condition que l’État qui agit en légitime défense informe immédiatement le Conseil de sécurité des mesures qu’il a pris pour se défendre. Un comité spécial d’étude a été créé en 1967, dont les travaux ont abouti en 1974 dans une résolution 3314, donne une définition de l’agression armée qui est : « l’emploi de la force par un État contre la souveraineté, l’intégrité territoriale ou l’indépendance politique d’un autre État ou de tout autre manière incompatible avec la Charte ». La portée de la définition retenue par la résolution de 1974 est limitée, ce qui laisse au Conseil de sécurité un rôle décisif dans la mise en application de l’article 51. Le droit de légitime défense ne peut être invoqué qu’aussi longtemps que le Conseil de sécurité n’a pas pris les mesures nécessaires pour maintenir la paix et il doit être exercé en tenant immédiatement informé le Conseil de sécurité des mesures prises. En sus, des conditions de nécessité et de proportionnalité ont été établies afin de prévenir toute dérive à l’interprétation de cet article. 1 H. Wehberg, « L’interdiction du recours à la force :l le principe et les problèmes qui se posent », RCADI, 1951-1, p.21. 2 A. Cassese, Le droit international dans un monde divisé, Berger-Levrault, Paris, 1986, p.34. 3 Pacte Briand-Kellogg entré en vigueur le 24 Juillet 1929, citation de l’article 1er : « Les Hautes parties contractantes déclarent solennellement qu’elles condamnent le recours à la guerre pour le règlement des différends internationaux et y renoncent en tant qu’instrument de politique nationale dans leurs relations mutuelles ». 4 P. Daillier, A. Pellet, « Droit international public », L.G.D.J, Nguyen Quoc Dinh 2002, 7ème éd., p.941 §566. 5 M. Virally, « Commentaire de l’article 2§4 », in J.P Cot et A. Pellet, p.21. 4 Or, si les États semblent d’accord sur le principe de réglementation de l’usage de la force dans les relations internationales, ils ont très souvent, des conceptions différentes et parfois divergentes de la consistance et des implications de cette réglementation. Si bien que les verrous posés, tant par le droit coutumier que par le droit conventionnel, sont fragilisés sous la pression de la pratique étatique. Les États ont donc, tenté de donner des interprétations extensives de l’article 51 de la Charte dans le but d’en élargir la portée normative. De ces divergences d’opinion sont nées des difficultés d’interprétation quant au statut de l’agresseur6, la qualité de victime7, ou encore quant à l’agression armée et plus particulièrement la légitime défense préventive. Entre apercevant une brèche dans le système normatif de la Charte de Nations Unies, certains se sont essayés à une interprétation extensive de la notion de légitime défense leur permettant une action coercitive armée. La question qui se pose actuellement est de savoir si la guerre préventive est licitée par les normes conventionnelles ou encore légitimée par la pratique des États et le nouveau contexte international ? Afin de répondre le plus précisément possible à cette question, nous étudierons dans un premier temps la légalité de la guerre préventive (I), dans une seconde partie nous approfondirons les tentatives de légitimer cette action de guerre préventive (II). 1. La légalité de la guerre préventive L’interprétation du champ d’application restreint de la notion de légitime défense préventive licité par la Charte des Nations Unies (A) rend souvent l’utilisation de cette notion par les États illicites, au regard des critères de légitime défense classique (B). 1.1. L’appréciation du caractère licite de la notion de légitime défense préventive Il est nécessaire de définir la notion de légitime défense préventive au regard du principe de non recours à la force armée (1), et de déterminer les conditions permettant de rendre licite les actions militaires préventives (2). 1.1.1. Présentation de la notion de légitime défense préventive dans un contexte de non recours à la force. L’ambiguïté de l’article 51 de la Charte des Nations Unies, autorisant la légitime défense, est susceptible de toutes les interprétations que les États, qui l’utilisent, en font. La détermination du champ de compétence de l’article 51 et son domaine d’action permet a priori d’éviter tout abus et d’en déduire la place qui sera faite à la notion de légitime défense préventive. Mais les interprétations divergentes des États de la communauté internationale rendent ce travail des plus délicats. La question qui se pose automatiquement est celle de savoir si l’article 51 autorise la légitime défense même quand il n’y a pas d’agression armée en cours, et lorsqu’on a la « certitude » d’une imminente attaque militaire de la part d’un autre État, d’un autre sujet de droit international ou même d’un groupe terroriste.8 A cette question, certains États se sont essayés à une interprétation extensive de la notion de légitime défense afin de justifier la licéité du concept de légitime défense préventive. 6 La notion de LD ne serait elle pas uploads/S4/ la-notion-de-guerre-pr-amp-eacute-ventive-2007.pdf
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- Publié le Aoû 04, 2022
- Catégorie Law / Droit
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