Revue Internationale des Sciences Juridiques, Economiques et Sociales ISSN : 26

Revue Internationale des Sciences Juridiques, Economiques et Sociales ISSN : 2665-8364 E-mail : re.in.sjes@gmail.com Faut-il qualifier le droit des marques comme un droit de propriété ? Réflexions sur la nature juridique de la marque en droit marocain Should we qualify trademark law as a property right? Reflections on the legal nature of the mark in Moroccan law Mohammed HABACHI tudiant chercheur E laboratoire droit des affaires Laboratoire Faculté des Sciences Juridiques, Economiques et Sociales de Settat Settat - er Université Hassan 1 Maroc m.habachi1983@gmail.com Tél : 0604336886 Rachid ATTAHIR Enseignant chercheur Faculté des Sciences Juridiques, Economiques et Sociales de Settat Settat - er Université Hassan 1 Maroc tahirirachid2005@yahoo.fr Revue Internationale des Sciences Juridiques, Economiques et Sociales ISSN : 2665-8364 E-mail : re.in.sjes@gmail.com Résumé : Le régime de protection du droit de marque ne peut se concevoir qu’après la détermination de sa nature juridique. Concernant cette dernière, le législateur marocain qualifie le droit de marque comme un droit de propriété. Le droit de la marque possède théoriquement les mêmes attributs (absolu et exclusif) que le droit de la propriété et supporte les mêmes mécanismes (possession et mise en gage) observés en droit des biens. Or, une analyse approfondie de la question démontre que le droit de marque obéit à des règles très différentes de celles observées en droit de propriété. Il s’agit d’appréhender le droit de marque à travers son objet, sa finalité et ses fonctions. Cette analyse permettra de comprendre sa nature juridique qui, elle-même, définira les limites de ce droit. Cet article aborde les aspects touchant à la nature juridique de la marque en droit marocain. Mots clés : Droit des biens, droit de propriété, marque, propriété industrielle. Revue Internationale des Sciences Juridiques, Economiques et Sociales ISSN : 2665-8364 E-mail : re.in.sjes@gmail.com ABSTRACT: The protection of the trademark rights can only be conceived after determining its legal nature. Concerning the latter, the majority doctrine retains the qualification of property right. Trademark law theoretically has the same attributes (absolute and exclusive) as property law and supports the same mechanisms (possession and pledging) observed in property law. However, an in-depth analysis of the question shows that trademark rights obey to very different rules from those observed in property rights. Understanding trademark rights through their object, purpose and functions will make possible to realize its legal nature, which itself will define the limits of the law. This article discuss the aspects relating to the legal nature of the mark in Moroccan law. KEY WORDS: Property law, property rights, trademarks, industrial property. Revue Internationale des Sciences Juridiques, Economiques et Sociales ISSN : 2665-8364 E-mail : re.in.sjes@gmail.com INTRODUCTION : Le contexte : A l’heure actuelle, les marchés sont caractérisés par une compétition féroce où les entreprises se trouvent perpétuellement dans une lutte commerciale et financière pour s’emparer d’une part de ces marchés, devenus de plus en plus concurrentiels et difficiles à pérenniser. Ici vient la marque qui est devenue, de nos jours, une importante richesse dans l’activité économique et constitue un enjeu considérable pour ces entreprises commerciales. Les entreprises marocaines commencent, ces dernières années, à intégrer les marques dans leurs stratégies de développement. Une dynamique qui s’illustre notamment par le chiffre atteint en termes de création de marques. L’OMPIC indique avoir reçu en 2018 environ 13.932 demandes d’enregistrement de marques (1). L’identité de la marque, avec tout ce qu’elle comporte, doit être protégée au risque qu’elle ne perde de sa valeur. Sur le plan juridique, la protection du droit de marque est essentiellement assurée par l’action en contrefaçon. Néanmoins, l’ampleur des actes déloyaux et illicites, favorisés par le principe de la liberté du commerce et de l’industrie, menace d’affaiblir les droits de propriété industrielle censée encourager les investissements et le progrès économique(2). Si les agissements de contrefaçon connaissent une hausse tendancielle (3), c’est absolument à cause du régime juridique de protection en vigueur qui se trouve incapable à lutter efficacement contre ce phénomène. Dans le même ordre d’idées, il est inconcevable de protéger la marque sans pour autant déterminer sa nature juridique. Concernant cette dernière, la législation marocaine qualifie le droit sur la marque comme droit de propriété. Or, l’analyse de la question démontre que les règles appliquées au droit de marque sont très différentes de celles considérées en droit des biens. (1) Office Marocaine de la Propriété Industrielle et Commerciale « Rapport d’activité 2018 », p.18 (2) Iony RANDRIANIRINA « Le droit de marque », université de Poitiers, faculté de droit et des sciences sociales, Thèse en droit privé ; 2013, p.17 (2) Le coût de la contrefaçon est estimé entre 6 et 12 milliards de dirhams, une perte fiscale annuelle de près de 1 milliard de dirhams et 30 000 emplois perdus ou informels. Note de synthèse du Comité National pour la Propriété Industrielle et Anti-Contrefaçon, Février 2013. Revue Internationale des Sciences Juridiques, Economiques et Sociales ISSN : 2665-8364 E-mail : re.in.sjes@gmail.com Les aspects juridiques du droit de marque : Le droit de marque, droit exclusif d’exploitation d’une marque, est décrit majoritairement comme un droit de propriété d’un type particulier. Identifier l’objet du droit de marque dans la place qu’occupe la marque sur le marché dans l’esprit du public et des concurrents amène à une nature juridique nouvelle, celle du droit de marché. Dans un autre sens, le droit à la marque est un droit de clientèle, ce dernier se caractérise par un monopole d’exploitation, ainsi le titulaire de la marque peut s’opposer à ce que tout concurrent utilise le même signe pour désigner un produit semblable ou de nature à créer des confusions. Il constitue une troisième catégorie des droits à côté des droits réels et personnels. En effet, le droit de la marque diffère des droits personnels parce qu’il est opposable à tous. Par ailleurs, le droit de la marque n’est pas pour autant un droit réel parce qu’il est d’une durée relativement courte, il n’est pas perpétuel (4). Définition légale de la marque : la première définition de la marque a été donnée par la Cour d’appel de Paris dans un arrêt du 16 janvier 1868 : « La marque est un moyen matériel de garantir l’origine de la marchandise aux tiers qui l’achètent, en quelque lieu et en quelque main qu’elle se trouve »(5). La première législation marocaine en la matière, à savoir la loi de 23 juin 1916 relative à la propriété industrielle n’a pas donné une définition de la marque. Il faudra attendre la loi 17-97 pour obtenir une définition législative. D’un point de vue juridique, une marque est un signe qui permet à une entreprise de distinguer ses produits ou services de ceux des concurrents. Ainsi, l’article 133 de la loi 17-97 relatif à la propriété industrielle définit la marque comme « un signe susceptible de représentation servant à distinguer les produits ou les services d’une personne physique ou morale ». (4) P. ROUBIER, « Le Droit de la propriété industrielle, », tome.1, 1952. p. 86 et s. RTD civ. 1935. 228 s, cité dans, chavanne, Albert, burst, Jean-Jacques, Azéma, Jacques, « Droit de la propriété industrielle», 7ème édition, Dalloz, 2012, p.2. (5) E. Pouillet, Traité des marques de fabrique et de la concurrence déloyale en tous genres, Imprimerie et Librairie Générale de Jurisprudence Marchal et Billard, 4ème éd., 1898, p. 13. Revue Internationale des Sciences Juridiques, Economiques et Sociales ISSN : 2665-8364 E-mail : re.in.sjes@gmail.com L’évolution du droit des marques : Le Maroc compte plusieurs textes législatifs qui encadrent le droit des marques. En effet, il s’est doté du Dahir du 23 juin 1916 relatif à la protection de la propriété industrielle dans la zone française dans l’empire chérifien, de la loi du 20 juillet 1938 qui couvrait la zone internationale de Tanger et d’autres textes couvrant la zone espagnole(6). Dans un objectif de répondre aux exigences modernes de la protection de la propriété industrielle, notre pays a adopté la loi 17- 97 promulguée par le dahir du 15 février 2000 modifiée et complétée par la loi n°31-05 et la loi n°23-13(7). Sur le terrain international, le Maroc a adhéré à plusieurs conventions à savoir la Convention d’Union de Paris conclu le 20 mars 1883 relative à la protection de la propriété industrielle ; l’arrangement de Madrid ainsi que le protocole de Madrid concernant l’enregistrement international des marques ; la convention de Nice, instituant une classification des produits et des services aux fins de l’enregistrement. Etant membre de l’Organisation Mondiale du Commerce, le Maroc se trouve alors automatiquement lié par l’Accord sur les aspects des Droits de Propriété Intellectuelle qui touchent au Commerce(8) (ADPIC), tendant à harmoniser et à renforcer la protection de ces droits dans les pays signataires. Problématique : La protection de la marque contre la contrefaçon mérite donc d’être renforcée. Pour cela, il est nécessaire tout d’abord de définir sa nature juridique. Comme il y a un doute, si le droit de marque peut-être qualifié comme un droit de propriété au sens exprimé par le droit commun, on peut observer toujours des différences et des ressemblances entre les deux régimes juridiques(9). uploads/S4/ 1-sm.pdf

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  • Publié le Jul 22, 2021
  • Catégorie Law / Droit
  • Langue French
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