Carla Blanco Antella 3e bac Textes philosophiques contemporains Travail final :
Carla Blanco Antella 3e bac Textes philosophiques contemporains Travail final : le panpsychisme L'écriture de ce travail final s'inscrit dans le prolongement de mon travail précédent sur la conscience. Il s'agit pour moi d'explorer des pistes argumentatives à ce qui relevait jusqu'ici uniquement de l'intuition et pouvait en effet paraître dogmatique. Dans mon travail précédent, j'avais émis deux hypothèses : ➔La conscience correspond à la séité, au fait d'éprouver sa subjectivité, de vivre une expérience subjective qui s'ajouterait à la « mécanicité » des corps. La conscience est le fait d'être dans la position du sujet. ➔Cette expérience subjective ne peut manifestement pas être expliquée par les sciences naturelles physicalistes de façon satisfaisante. Quelqu'un qui possède en lui l'entièreté des connaissances que l'on peut avoir sur n'importe quel sujet ignorera toujours la connaissance de celui qui fait l'expérience de ces connaissances en tant que sujet. Il est donc nécessaire d'explorer d'autres paradigmes. L'analyse du panpsychisme que je tente de faire ici est moins un défense assurée des thèses du panpsychisme qu'une tentative d'explorer de nouveaux paradigmes, d'adopter une vision différente du monde que celle qu'on a habituellement. Elle est plus une posture, une ouverture sur une potentielle manière différente de se rapporter au monde et de voir le monde. Elle sert de décalage et de critique par rapport à tous les présupposés sous-jacents aux sciences naturelles qui restreignent notre champ de vision et le champ de possibilité des multiples manières d'être, de communiquer, de ressentir. Il y a deux conséquences aux deux hypothèses formulées ci-dessus : • Comme la conscience est le fait de vivre une expérience subjective, les animaux, plantes, et autres êtres vivants pourraient alors être dotés d'une certaine conscience. Dès lors, il existerait une différence de degré et non de nature dans la conscience. Mais cette différence de degré ne signifierait pas que notre conscience serait plus complexe, plus évoluée que la conscience des animaux ou des plantes. Elle ne le serait que du point de vue de notre manière de nous rapporter au monde, mais serait complètement inadéquate si nous étions un arbre ou un jaguar, par exemple. • Postuler la conscience comme le fait de vivre une expérience subjective suggère de parler de cette expérience en terme de représentation, conceptuelle ou non. Il convient néanmoins de ne pas utiliser le représentationnalisme à des fins naturalistes, c'est-à-dire pour rendre compte de la conscience de façon purement fonctionnelle. Le terme représentation peut ne supposer ni de faculté de raison ni de faculté de conceptualiser. La conscience, définie comme quelque chose « qui permet une représentation, même très simplifiée, du monde et des réactions par rapport à celui-ci »1, ouvre la voie à une conception de l'ensemble de la nature comme ayant une certaine faculté de représentation ou de conscience de son environnement. En effet, si on part du postulat qu'il n'y a jamais un organisme simplement dans un environnement, mais toujours un organisme qui construit autour de lui des conditions « favorables » à la continuation de son existence, c'est qu'il doit y avoir quelque chose (qu'on pourrait nommer conscience de son environnement) au-delà de pures tendances homéostasiques mécanistes. Cela permet également de doter les arbres, les fleurs et autres êtres naturels d'une certaine conscience (même s'il y a des degrés de conscience et que celle-ci ne correspondrait pas à la conscience qui s'applique aux états mentaux, puisque les végétaux n'ont pas d'états mentaux). Selon Kohn, « la représentation n'est pas seulement conventionnelle, linguistique et symbolique. (...) Des formes représentationnelles vont au-delà du langage. Mais aussi au- delà de l'humain. Les formes de vie non-humaines se représentent elles aussi le monde. Cette conception élargie de la représentation est difficile à appréhender car notre théorie sociale associe la représentation au langage. »2 Il me semble que ces thèses sont soutenues d'une manière ou d'une autre par les différentes positions panpsychistes énoncées dans la Stanford Encyclopedia of Philosophy3. Je vais donc les parcourir. Panexpérientialisme >< Pancognitivisme • Le panexpérientialisme soutient que l'expérience consciente est fondamentale et omniprésente. Etre conscient, selon le courant prédominant au sein de la philosophie analytique contemporaine, c'est avoir une expérience, aussi élémentaire soit-elle. Ainsi, tous les êtres vivants seraient dotés d'une certaine expérience, certes moins riche et complexe chez les plantes que chez les jaguars, par exemple, et encore moins que chez les humains. « Le panexpérientialiste soutient que cette diminution de la complexité de l'expérience se poursuit à travers les plantes et jusqu'aux constituants de base de la réalité, peut-être les électrons et les quarks. »4 En effet, on pourrait imaginer doter les électrons d'une certaine expérience, basique et beaucoup moins complexe que la nôtre. Cela soutiendrait le fait que, la conscience étant omniprésente, le débat sur la conscience serait plus un débat sur les différences de degrés, et non de nature, entre les différentes formes de conscience dans le monde. Mais il convient d'insister sur le fait que la conscience de l'électron est basique et beaucoup moins complexe que la nôtre, ce de notre point de vue. C'est selon nos critères de ce qu'est être « vraiment conscient » ou « plus-conscient » que la conscience des autres êtres vivants semble plus élémentaire. Parce que oui, si nous imaginons qu'une fourmi devait « vivre » une vie humaine, avec son expérience subjective, cela serait bien trop insuffisant pour rendre compte de notre expérience subjective, qui semblerait alors beaucoup plus complexe. Mais l'expérience de pensée inverse fonctionne aussi, de la même manière. Je ne pourrais pas, avec ma conscience de mon environnement, envisager le monde de la même manière que le 1 https://fr.wikipedia.org/wiki/Conscience#Philosophie 2 E. Kohn, Comment pensent les forêts, Zones sensibles, 2017, p. 29 3 https://plato.stanford.edu/entries/panpsychism/ 4 « The panexperientialist holds that this diminishing of the complexity of experience continues down through plants, and through to the basic constituents of reality, perhaps electrons and quarks » (https://plato.stanford.edu/entries/panpsychism/) fait une fourmi, ma conscience paraissant alors trop pauvre pour cela. Chaque élément conscient est conscient de lui, de son environnement et de son rôle de la manière la plus adéquate pour lui. • Le pancognitivisme soutient que la pensée est fondamentale et omniprésente. Néanmoins, la pensée étant un « processus par lequel l'être humain au contact de la réalité matérielle et sociale élabore des concepts, les relie entre eux et acquiert de nouvelles connaissances »5, donc par définition le propre de l'humain, beaucoup ont beau jeu d'accuser le pancognitivisme d'être un anthropomorphisme. En réalité, ce ne serait pas la pensée, mais plutôt l'agentivité, la séité, qui serait fondamentale et omniprésente. Être, avoir une expérience subjective et une capacité d'action implique-t-il véritablement une pensée complexe omniprésente ? Le pancognitivisme ne semble pas tellement pertinent dans le débat sur la conscience. Dorénavant, le panpsychisme sera donc assimilé au panexpérientialisme. Panpsychisme constitutif (micropsychisme constitutif) >< Panpsychisme non constitutif (émergentisme) Quelle est la relation entre cette conscience élémentaire et basique (des quarks ou électrons, par exemple) et la conscience à laquelle nous croyons habituellement, dont nous dotons les humains et animaux ? • Selon le panpsychisme constitutif, les formes de conscience humaines et animales ne sont pas fondamentales, mais sont fondées sur une forme de conscience au niveau micro. A ce sujet, j'aimerais faire un lien avec une des thèses de Kohn lorsqu'il dit : « La séité n'est pas réservée aux animaux qui ont un cerveau. Les plantes sont aussi des sois. Elle n'est pas non plus coextensive aux organismes physiquement délimités. Autrement dit, les sois peuvent être distribués dans plusieurs corps (un séminaire, une foule ou une colonie de fourmis peut agir comme un soi) et il peut y avoir plusieurs sois dans un seul corps (les cellules individuelles ont une sorte de séité minimale). Le soi est à la fois l'origine et le produit d'un processus interprétatif : c'est un relais de sémiose. (...) Un soi, qu'il soit « confiné dans les limites de sa peau » ou un peu plus distribué, est le lieu de ce que nous nommons « l'agentivité » »6. Ainsi, nous pouvons élargir notre conception de la séité, et plus largement encore, de la conscience. En effet, un séminaire ou une colonie de fourmis peuvent avoir une conscience d'eux-mêmes en tant qu'entité. Pourquoi ne pourrait-ce pas être le cas des électrons, cellules, etc. ? Une telle hypothèse permet alors de penser la subjectivité et l'agentivité qui en découle forcément de façon moins élitiste et anthropocentriste, ainsi que d'aboutir à des théories telles que celle du micropsychisme constitutif. Selon le micropsychisme constitutif, mon cerveau, envisagé comme un tout, est constitué de plus petites parties qui sont des formes de conscience très basiques, et la conscience de mon cerveau dans son ensemble est en quelque sorte constituée de la conscience de ses parties. • Selon le panpsychisme non constitutif, appelé aussi émergentisme, les formes de conscience humaines et animales sont fondamentales tout en étant causalement dépendantes de sujets conscients au niveau micro. 5 Larousse, https://www.larousse.fr/dictionnaires/francais/pens%c3%a9e/59266 6 E. Kohn, Comment pensent les forêts, Zones sensibles, 2017, p. 112 La thèse de Kohn pourrait être uploads/Science et Technologie/ travail-panpsychisme 1 .pdf
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- Publié le Jan 20, 2022
- Catégorie Science & technolo...
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