La banque en ligne dans les pays émergents : le cas de la Tunisie Acte Publié d

La banque en ligne dans les pays émergents : le cas de la Tunisie Acte Publié du 3éme colloque de recherche de l’ESC Amiens Picardie 30 septembre 2004 Achraf AYADI ϒ Chercheur en Sciences de Gestion Laboratoire de Management Interdisciplinaire Transculturel (MINT) GET/Institut National des Télécommunications d’Evry Ihcène KAFFELA Gestionnaire Central des Postes La Poste Tunisienne & l’Ecole Supérieure des Télécommunications de Tunis Résumé : La nature informationnelle des services rend chaque innovation dans les TIC source de profonds changements. Considérant son rôle dans la refonte des processus et la redéfinition de la relation avec les clients, la banque en ligne (BEL) fait partie des innovations récentes les plus importantes. Cependant, contrairement à la littérature correspondante dans les pays développés, la BEL suscite peu d’intérêt dans les pays émergents pour des questions de diffusion. Notre analyse du cas de la Tunisie vient combler ce déficit en terme de recherches dans ce domaine. Après une revue de la littérature sur l’innovation dans les services, nous donnons une vue d’ensemble sur la BEL dans quelques pays émergents. Ensuite, nous nous concentrons sur le cas du marché bancaire tunisien d’abord, en évaluant le développement actuel des services de BEL, puis, en analysant les caractéristiques des banques qui l’ont adopté. Nous concluons sur les apports et les limites du recours à la littérature sur l’innovation dans l’étude de diffusion de la BEL. Mots clés : Innovation, services, banque en ligne, pays émergents. ϒ Auteur de contact. E-mail: achraf.ayadi@int-evry.fr. Adresse: GET/Institut National des Télécommunications, Département SGES, 9 Rue Charles Fourier, 91011 Evry Cedex 2 La banque en ligne dans les pays émergents : le cas de la Tunisie Résumé : La nature informationnelle des services rend chaque innovation dans les TIC source de profonds changements. Considérant son rôle dans la refonte des processus et la redéfinition de la relation avec les clients, la banque en ligne (BEL) fait partie des innovations récentes les plus importantes. Cependant, contrairement à la littérature correspondante dans les pays développés, la BEL suscite peu d’intérêt dans les pays émergents pour des questions de diffusion. Notre analyse du cas de la Tunisie vient combler ce déficit en terme de recherches dans ce domaine. Après une revue de la littérature sur l’innovation dans les services, nous donnons une vue d’ensemble sur la BEL dans quelques pays émergents. Ensuite, nous nous concentrons sur le cas du marché bancaire tunisien d’abord, en évaluant le développement actuel des services de BEL, puis, en analysant les caractéristiques des banques qui l’ont adopté. Nous concluons sur les apports et les limites du recours à la littérature sur l’innovation dans l’étude de diffusion de la BEL. Mots clés : Innovation, services, banque en ligne, pays émergents. 3 Introduction Peu de technologies ont affecté les sociétés modernes autant que l’Internet. La radio, la télévision et les technologies les plus répandues au XXéme siècle ont pris plusieurs décennies pour être adoptées alors qu’il en a fallu moins de 10 ans à l’Internet pour s’affirmer chez des milliers d’opérateurs économiques et des centaines de millions d’individus de part le monde (Lumpkin et al., 2002 ; Gurãu, 2002). Ce contexte a été vécu d’une manière très particulière au sein de certains secteurs à l’image de l’industrie bancaire. En effet, la nature informationnelle des services financiers permet leur transfert sous forme électronique (Yakhlef, 2001). De ce fait, chaque vague d’innovations dans les technologies de l’information et de la communication (TIC) a été porteuse d’une forte industrialisation et informatisation des processus qui ont bouleversé les activités de back-office et l’organisation des systèmes d’information bancaires (SI). Internet s’inscrit dans la continuité de ces changements en amenant avec lui une nouvelle réalité dans la gestion de la relation avec le client. La banque sur Internet ou la banque en ligne (BEL) peut être définie comme un système basé sur le réseau Internet, qui permet aux clients d’une banque d’accéder à leurs comptes et à des informations générales sur les produits et services bancaires via un PC ou tout autre outil intelligent1. Ainsi, l’apparition de nouveaux terminaux mobiles ayant accès à la toile est considérée comme un nouveau facteur de diffusion de l’innovation dans les services bancaires (Yakhlef, 2001). Bien que les recherches sur la BEL soient abondantes aux Etats-Unis et en Europe occidentale, peu d’auteurs se sont intéressés aux cas d’économies émergentes ou en transition (Centeno, 2004). Contrairement aux pays développés, la pénétration d’Internet chez la population est très variable selon les pays et les régions (des différences sont remarquées entre l’Asie et les pays d’Europe de l’Est, d’une part, et ceux du Moyen-Orient et du Maghreb, d’autre part) et les spécificités des marchés bancaires ne sont pas sans influence sur les jeux concurrentiels et l’adoption des technologies (Gurãu, 2002 ; Gerrard et Cunningham, 2003). L’objectif de cet article est d’analyser les conditions et le niveau de développement actuel de la BEL en Tunisie. 1 Définition adaptée de l’Office of the Comptroller of the Currency (OCC, 1999) 4 Une première revue de la littérature sur l’innovation dans les services permet d’étudier la BEL en tant que la phase la plus récente d’un long cycle d’innovations (Gallouj, 1998). Nous présentons ensuite une synthèse des résultats des études réalisées dans plusieurs pays émergents pour conclure par l’analyse du cas tunisien qui permet de comparer les différentes expériences des pays émergents et d’en tirer des enseignements utiles pour les recherches futures. 1. L’innovation dans les services : une revue de la littérature La définition de l’innovation avancée par Schumpeter dans les années 40 se distingue par son caractère « englobant » en même temps nouveaux produits, nouveaux modes de production, nouveaux marchés, nouvelles sources de matières premières et/ou nouvelle organisation de la production (Gallouj, 1998). Cependant, cette formulation énumérative semble ignorer l’importance de l’innovation dans les services. En fait, à l’époque de Schumpeter, les TIC n’étaient pas ce qu’elles sont devenues aujourd’hui. La nécessité d’adapter cette définition au contexte particulier des services tient au fait que les processus d’innovation dans les industries manufacturières, comparés à ceux du secteur des services, sont radicalement différents (Smits, 2002). Rogers (1983, p.11) définit l’innovation comme étant une idée, une pratique ou un objet qui est perçu comme nouveau par un individu ou par d’autres unités d’adoption2. Cet auteur utilise les concepts « d’innovation » et de « technologie » comme deux concepts équivalents ayant en partage une même base : l’incertitude. Il considère qu’une technologie crée une incertitude pour les adeptes potentiels –celle de ses conséquences- et représente, en même temps, une opportunité de réduction de l’incertitude –celle de l’information à la base de la technologie- qui représente l’efficacité possible d’une innovation à résoudre des problèmes individuels ou organisationnels (Rogers, 1983, pp.12-13). Nous nous plaçons dans l’optique de Rogers (1983) avec, pour objectif, de tenir compte des caractéristiques spécifiques du cycle d’innovation dans les services et des évolutions apportées par l’Internet notamment dans le secteur bancaire. 1.1. Le cycle « inversé » de l’innovation dans les services L’Internet est considéré comme étant une innovation technologique qui fonctionne à la fois comme une « innovation produit » et/ou une « innovation processus » (Prescott 2 Traduction de l’auteur 5 et Van Slyke, 1997 ; Corrocher, 2002 ; Buzzachi et al., 1995). Ceci est conforme à l’analyse de Barras (1986, cité par Gallouj, 1998) qui a été l’un des premiers à énoncer une théorie de l’innovation dans les services. Ce type d’innovations est caractérisé par le cycle inverse de celui connu dans les industries manufacturières : deux premières phases d’innovations incrémentales puis radicales orientées « processus » suivies par des innovations plus orientées « produits » (Gallouj, 1998). Ces trois phases correspondent à l’amélioration de l’efficacité du service, de sa qualité puis la création de nouveaux services. L’apparition de la BEL s’inscrit dans cette dernière étape (Tableau 1). Tableau (1) : Caractéristiques du cycle « inversé » d’innovation dans les services Phase Forme d’innovation Effort compétitif Technologies à l’origine Exemple (secteur bancaire) Impact de la technologie I. Innovation incrémentale des processus Efficience du service (baisse des coûts) Micro- processeurs Industrialisation du back-office Meilleure productivité II. Innovation radicale des processus Qualité du service Mini et micro- ordinateurs Cotations en bourse, DAB Meilleure qualité et variété du capital III.1. Réseaux fixes Home banking PC banking III.2. Réseau Internet Banque en ligne (BEL) III.3. Innovation produit Nouveaux services Réseaux mobiles haut débit et terminaux Banque via Internet mobile Economies de capital et amélioration simultanée de la qualité Source : adapté de Gallouj (1998) En terme d’impact, Internet permet de réaliser simultanément des économies de capital et des améliorations de la qualité du service ce qui confirme sa double nature (produit et processus). Aussi, les extensions possibles au niveau technologique (notamment la mobilité) sont déterminantes dans le renforcement des acquis de l’Internet. Le cycle « inversé » de l’innovation dans les services montre que la BEL n’est qu’une étape parmi d’autres dans la chaîne de l’évolution technologique. Nous nous 6 intéresserons dans ce qui suit à analyser la BEL sous l’angle de la théorie évolutionniste. 1.2. Une vision évolutionniste uploads/Science et Technologie/ la-banque-en-ligne-dans-les-pays-emergents-le-cas-de-la-tunisie.pdf

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