UMR ADEF JOURNAL DU SEMINAIRE TAD/IDD Théorie Anthropologique du Didactique & I

UMR ADEF JOURNAL DU SEMINAIRE TAD/IDD Théorie Anthropologique du Didactique & Ingénierie Didactique du Développement There is a phrase I learned in college called, “having a healthy disregard for the impossible.” That is a really good phrase. Larry Page (1973- ) Ceux qui prennent le port en long au lieu de le prendre en travers. Marcel Pagnol (1895-1974) Le séminaire TAD & IDD est animé par Yves Chevallard au sein de l’équipe 1 de l’UMR ADEF, dont le domaine général de recherche s’intitule « École et anthropologie didactique des savoirs ». Ce séminaire a, solidairement, une double ambition : d’une part, il vise à mettre en débat des recherches (achevées, en cours ou en projet) touchant à la TAD ou, dans ce cadre, à des problèmes d’ingénierie didactique du développement, quel qu’en soit le cadre institutionnel ; d’autre part, il vise à faire émerger les problèmes de tous ordres touchant au développement didactique des institutions, et notamment de la profession de professeur de mathématiques. Deux domaines de recherche sont au cœur du séminaire : un domaine en émergence, la didactique de l’enquête codisciplinaire ; un domaine en devenir, la didactique des savoirs mathématiques. La conduite des séances et leur suivi se fixent notamment pour objectif d’aider les participants à étendre et à approfondir leur connaissance théorique et leur maîtrise pratique de la TAD et des outils de divers ordres que cette théorie apporte ou permet d’élaborer. Sauf exception, les séances se déroulent le vendredi après-midi, de 15 h à 17 h puis de 17 h 30 à 19 h 30, cette seconde partie pouvant être suivie en visioconférence.     Séance 2 – Vendredi 13 novembre 2009 QUELLE RECHERCHE ? QUELLES PUBLICATIONS ? 1. Cul par-dessus tête a) Qu’en est-il de la diffusion de la TAD ? D’une façon générale, la diffusion d’un complexe praxéologique passe par des exposés, soit ce que le Trésor de la langue française informatisé définit comme suit : Discours oral ou écrit, où sont présentés selon un ordre déterminé par les règles d’une discipline ou la situation d’énonciation, des données de fait, le contenu d’une discipline, d’une doctrine ou d’une œuvre, les termes d’un problème dans le but d’informer ou de fournir la matière d’une discussion. 2 Utilisant le langage de la gestion, j’ajoute que les exposés en question doivent porter aussi bien sur les stocks de TAD que sur les flux de TAD : il y a l’existant, et il y a ce qui advient et qui modifie l’existant. (Sur les notions utilisées, on pourra voir l’article “Stock and flow” de Wikipedia.) b) Plusieurs problèmes se posent : celui de la production de tels exposés, celui de leur réception et, entre les deux, celui de leur publication. Ces trois conditions de la diffusion sont solidaires. Par exemple, on peut produire un exposé avec l’idée de le faire recevoir d’un certain public à travers une certaine publication. C’est là cependant que les choses se compliquent. c) Pour produire un exposé, il faut évidemment avoir quelque chose à exposer. Cela suppose donc des travaux et, notamment, des recherches. À titre illustratif, je reproduis ici les types d’articles que recense l’American Psychological Association dans son Publication Manual (2009) : 1.01 Empirical Studies 1.02 Literature Reviews 1.03. Theoretical Articles 1.04. Methodological Articles 1.05 Case Studies 1.06 Other types of Articles La présence de la rubrique “Other types of Articles” laisse entendre que ce repérage de différentes catégories d’articles n’écarte rien a priori. Où est donc le problème ? J’ai indiqué plus haut que « pour faire des publications, il faut faire des recherches ». Cette formulation est évidemment fautive : on fait de la recherche pour accroître les connaissances disponibles ; et pour faire connaître cette recherche (questions étudiées, moyens d’étude mobilisées, résultats obtenus, etc.), on expose et on publie – et non l’inverse. Or il semble qu’un autre schéma soit aujourd’hui prévalent : pour d’aucuns, ce qui compte, c’est de publier ; les recherches ne sont plus là que pour fournir matière aux publications : elles sont presque un mal nécessaire. Un pas de plus, et on tente de réduire le plus possible le travail de recherche permettant de publier – ou plutôt, et c’est là un point essentiel, de publier dans de « bonnes » revues supposées. À titre d’illustration, je reproduis ici la liste des revues francophones de sciences de l’éducation publiée par l’AERES (agence d’évaluation de la recherche et de l’enseignement supérieur) en 2008 : Rang A : Revues francophones de position internationale – Revue Française de Pédagogie 3 – Histoire de l’Éducation – Formation-Emploi – Recherche et Formation – Revue des Sciences de l’Éducation (Canada) – Raisons éducatives (Suisse) Rang B : Revues nationales à ouverture internationale – Les sciences de l’éducation pour l’ère nouvelle – Les dossiers des sciences de l’éducation – Éducation et Société – Savoirs – International Journal of School and Violence – RDM – Aster – Repères – Didaskalia – Penser l’éducation – Éducation Permanente – Éducation et didactique – Le Télémaque – Carrefours de l’éducation – Spirale- Revue de recherches en éducation – Pratiques – L’année de la recherche en sciences de l’éducation – Revue internationale d’éducation familiale Rang C : Revues nationales – Cahiers de la recherche sur l’éducation et les savoirs – Nouvelle revue de l’éducation et de la scolarisation – Diversité – Éducation et Formations D : Revues professionnelles, revues de vulgarisation – Sciences Humaines – Cahiers Pédagogiques – Revue du CIEP – Questions vives Bien entendu, ce type de classement pèse sur le travail des chercheurs : en didactique des mathématiques, on devra se contenter de publier dans une revue de rang B, RDM ; publier dans une revue de rang A semble impossible, sauf à accepter une démathématisation invalidante de son exposé. Il est vrai que la même AERES propose dans ses documents le codage ci-après, qui code large : [ACLI] Articles dans revues internationales à comité de lecture 4 [ACLN] Articles dans revues nationales à comité de lecture [OS] Ouvrages scientifiques [CHAP] Chapitres d’ouvrages scientifiques [ACTI] Communications avec actes dans un congrès international [ACTN] Communications avec actes dans un congrès national [INV] Conférences invitées dans un congrès national ou international [ASCL] Articles dans revues sans comité de lecture [COM] Communications orales sans actes dans un congrès national ou international [AFF] Communications par affiche dans un congrès national ou international [OV] Ouvrage de vulgarisation (ou chapitre de ces ouvrages) [DO] Direction d’ouvrages ou de revue [CORP] Corpus, bases de données, ressources, logiciel [TRAD] Travaux de traduction : traductions annotées, travail d’édition (préfaces, notes, commentaires). [AP] Autres productions : notices, entrées de dictionnaires, rapport de fouille, guide technique, rapports de grands projets, compte rendu d'ouvrage, … d) Deux autres points (au moins) doivent encore être notés. Premier point : pour qu’une recherche puisse exister, les chercheurs ont besoin de financements. On sait que, aujourd’hui, à moins de se contenter de financements très modestes, voire résiduels, ainsi que je le fais depuis des années, le financement de la recherche se fait sur projets. Depuis 2005- 2006, la création de l’ANR, l’agence nationale de la recherche, a renforcé encore la rat race des chercheurs : « avoir » une « recherche ANR », ce n’est pas seulement, semble-t-il, obtenir un financement ; c’est obtenir un label – le label ANR. La course du rat démarre donc avec l’ANR et se termine idéalement dans une « revue internationale à comité de lecture », une revue « de rang A ». La recherche n’est plus alors que le point d’appui qui permet de passer de l’un à l’autre. Les effets délétères de ce carcan ont été prévus depuis fort longtemps par le physicien américain d’origine hongroise Leó Szilárd (1898-1964) dans une nouvelle – “The Mark Gable Foundation” – publiée dans un livre intitulé The Voice of the Dolphins (1961), où le narrateur, un chercheur, se voit interrogé par un milliardaire sur la manière de ralentir les progrès de la science, trop rapides à son gré ; le narrateur répond ceci (d’après la réédition publiée par Stanford University Press en 1992) : “It should be obvious,” I said. “First of all, the best scientists would be removed from their laboratories and kept busy on committees passing on applications for funds. Secondly, the scientific workers in need of funds would 5 concentrate on problems which were considered promising and were pretty certain to lead to publishable results. For a few years there might be a great increase in scientific output; but by going after the obvious, pretty soon science would dry out. Science would become something like a parlor game. Some things would be considered interesting, others not. There would be fashions. Those who followed the fashion would get grants. Those who wouln’t would not, and pretty soon the would learn to follow the fashion, too.” (p. 129) J’emprunte la référence précédente au livre récemment publié (Seuil, 2009) sous le titre La science à bout de souffle ? par Laurent Ségalat, « généticien et directeur de recherches au uploads/Science et Technologie/ chevallard-2009-1.pdf

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