Cahiers d'Extrême-Asie Tsung-mi's Perfect Enlightenment Retreat: Ch'an Ritual D
Cahiers d'Extrême-Asie Tsung-mi's Perfect Enlightenment Retreat: Ch'an Ritual During the T'ang Dynasty Peter N. Gregory Citer ce document / Cite this document : Gregory Peter N. Tsung-mi's Perfect Enlightenment Retreat: Ch'an Ritual During the T'ang Dynasty. In: Cahiers d'Extrême- Asie, vol. 7, 1993. Numéro spécial sur le Chan/Zen : Special Issue on Chan/Zen. En l'honneur de Yanagida Seizan. pp. 115- 147; doi : 10.3406/asie.1993.1063 http://www.persee.fr/doc/asie_0766-1177_1993_num_7_1_1063 Document généré le 19/03/2016 TSUNG-MI'S PERFECT ENLIGHTENMENT RETREAT: CH'AN RITUAL DURING THE TANG DYNASTY Peter N. Gregory Le présent travail traite du Yûan-chùeh ching tao-ch'ang hsiu-cheng i [Manuel pour la culture et réalisation de la retraite du Sûtra de l'éveil parfait]. Cet ouvrage, compilé vers 828 par Kuei-feng Tsung-mi (780-841), décrit une retraite de quatre- vingt à cent vingt jours centrée sur la récitation liturgique du Yùan-chùeh ching. 1 . Signification historique L'étude de ce manuel devrait contribuer à combler une lacune dans les études bouddhiques en ce qui concerne le rituel et la liturgie. Ce texte, compilé durant la période formative du Ch'an, est en effet l'un des rares documents qui éclairent la pratique rituelle au sein d'une école en théorie anti-ritualiste. Il permet donc de remettre en question une des idées reçues sur le Ch'an, et de situer cette école dans le contexte du bouddhisme chinois. Jusqu'à présent, les révisions importantes de l'histoire du Ch'an ont laissé intactes un certain nombre de présuppositions de l'historiographie traditionnelle — et en particulier la prétention qu'avait cette école de représenter une forme unique de pratique bouddhique. L'image qui domine est encore celle, établie sous les Sung, d'un Ch'an radicalement iconoclaste. Certes, un certain nombre de documents datant des T'ang semblent confirmer cet iconoclasme; mais il en existe également beaucoup d'autres, dont le présent texte, qui démontrent le contraire — et qui, peut-être pour cette raison, n'ont pas été retenus par les historiens. Le témoignage de Tsung-mi est d'autant plus important qu'il nous décrit l'accomplissement d'un rituel basé sur une Ecriture canonique (quoiqu'apocryphe) — au sein d'un Ch'an censément anti-ritualiste et anti-scriptural. 2. Le Sûtra de l'éveil parfait Le Sûtra de l'éveil parfait joua un rôle important dans la vie et l'œuvre de Tsung- mi. C'est tout d'abord la découverte de ce texte en 804, alors que Tsung-mi était encore un novice auprès de Tao-yûan, qui lui procura son premier aperçu de l'éveil. Cette expérience motiva son étude subséquente du texte, dont il rédigea une vingtaine d'années plus tard plusieurs commentaires. Malgré sa conversion à la doctrine de YAvatamsaka-sûtra, et sa position éminente dans l'école Hua-yen qui se réclamait de ce texte, Tsung-mi jugeait le Sûtra de l'éveil parfait supérieur à celui de Y Avatamsaka. On sait maintenant qu'il s'agit en fait d'un apocryphe composé au tournant du huitième siècle, et répandu dans les milieux Ch'an de Lo-yang sous le règne de l'impératrice Wu (690-705). La première mention apparaît dans le Ch'uan fa-pao chi, chronique du Ch'an des débuts compilée par un adepte de l'école dite du Nord. Le Sûtra de l'éveil parfait s'inscrit donc dans le mouvement des apocryphes Ch'an destinés à légitimer la nouvelle école — parmi lesquels on peut citer le SUramgama-sûtra chinois (à ne pas confondre avec le texte d'origine sanskrite du même titre) et le Vajrasamâdhi-sûtra. Cahiers d'Extrême-Asie 7(1993-1 994) : 1 1 5- 1 47 1 1 6 Peter N. Gregory Nombre de ces textes, et en particulier le sûtra en question, s'inspiraient sur le plan doctrinal d'un autre apocryphe célèbre, le Traité de l'éveil de la foi selon le Mahâyâna (Ta-sheng ch'i-hsin lun), mais éclipsaient ce dernier par leur revendication du titre prestigieux de sûtra. Le Sûtra de l'éveil parfait fournissait également à Tsung-mi une autorité scripturaire pour sa théorie de l'éveil subit suivi d'une culture graduelle. Le chapitre onze de ce sûtra, en particulier, qui expose la pratique rituelle appropriée aux adeptes de facultés inférieures pour éliminer les obstacles karmiques, est celui sur lequel se fonde Tsung-mi pour définir sa Retraite de l'Éveil parfait. 3. Le manuel de Tsung-mi et la Retraite Le Manuel de Tsung-mi se compose de trois parties : la première (fascicule 1) discute des conditions préalables à la pratique; la seconde, de loin la plus longue (fascicules 2 à 16), de la dévotion rituelle centrée sur le Sûtra; la troisième (fascicules 17-18), de la pratique de la méditation assise. Les érudits japonais comme Sekiguchi Shindai et Kamata Shigeo se sont concentrés sur le début et la fin du texte, et y ont discerné l'influence du Hsiao chih-kuan de Chih-i (538-587), le fondateur de l'école T'ien-t'ai. Plus récemment, on s'est aperçu que la section rituelle s'inspirait également du Fa-hua san-mei ching de Chih-i. Toutefois, le manuel de Tsung-mi diffère nettement de ces deux manuels du T'ien-t'ai par l'accent qu'il place sur le Sûtra de l'éveil parfait. La section rituelle est elle-même divisée en deux parties, la première décrivant une période préliminaire de trois semaines consacrée à la vénération de personnages tels que Vairocana, ManjuérI et Samantabhadra, et au repentir; la seconde décrivant la Retraite proprement dite — qui peut durer, selon les capacités des pratiquants, cent vingt, cent ou quatre-vingts jours. 4. Conditions préliminaires Les conditions préliminaires au rituel sont au nombre de sept : après avoir exposé les bénéfices du rituel, Tsung-mi énumère les trois types d'individus qui peuvent en bénéficier, chacun à leur niveau de réalisation. La retraite est ouverte aux pratiquants laïques, hommes et femmes, s'ils remplissent ces conditions. 5. Structure de la retraite Le rituel est divisé en vingt-cinq séquences, et les liturgies spécifiques varient en fonction de la section du Sûtra de l'éveil parfait qui se trouve à l'ordre du jour. Ikeda Rosan a relevé les analogies entre la structure de cette retraite et celle du Samâdhi du Lotus, telle que Chih-i la décrit dans son Fa-hua san-mei ch'an-i : dans les deux cas, il s'agit d'un rituel centré sur la récitation liturgique d'un texte. Toutefois, Tsung-mi semble simplement faire appel à une syntaxe rituelle commune aux diverses traditions bouddhiques, et sans doute ne faut-il pas surestimer l'influence du T'ien-t'ai, comme les érudits Tendai ont parfois tendance à le faire. Le rituel est décomposé par Tsung-mi en huit rubriques, qui recouvrent effectivement celles du Samâdhi du Lotus : invocation, offrandes, exaltation, vénération, repentir, litanies diverses, circumambulation et méditation. Cependant, la séquence rituelle, effectuée six fois par jour, est assez différente : offrandes, exaltation, vénération, repentir, sollicitation, réjouissance altruiste, dedication, et vœux (les quatre dernières Tsung-mi 's Perfect Enlightenment Retreat 1 1 7 rubriques relevant des litanies diverses). En outre, si la structure est à peu près la même, le contenu (les objets du culte) diffère considérablement : les vœux, en particulier, s'inspirent des dix vœux de Samantabhadra, tels qu'ils apparaissent dans la littérature Hua-yen. Chacun de ces rites est censé éliminer certains obstacles karmiques spécifiques (avarice, calomnie, fierté, etc.), et apporter aux pratiquants de facultés inférieures certains gains tels que fortune, éloquence, honneur, etc. Mais surtout, ils leur permettent d'accéder à la sphère de la sagesse. La retraite commence par une invocation des Buddha, Bodhisattva et divinités protectrices diverses (comme le dieu du Mont Kuei-feng, où résidait Tsung-mi). Le cycle rituel quotidien comprend : ( 1 ) une offrande d'encens et de fleurs; (2) un éloge des Trois Joyaux; (3) la vénération rituelle de chacune des entités spirituelles invoquées; (4) le repentir des fautes passées; (5) la récitation d'un couplet priant le Buddha de rester en ce monde; (6) la récitation d'un second couplet exprimant la joie devant les accomplissements spirituels de tous les êtres; (7) le transfert des mérites obtenus en vue de l'éveil de tous les êtres; (8) des vœux divers. La phase suivante du rituel consiste en une circumambulation de l'autel, au cours de laquelle a lieu la récitation liturgique du Sûtra de l'éveil parfait. 6. En guise de conclusion Ce résumé ne peut évidemment pas rendre compte du caractère émotionnel et esthétique, ni de la ferveur dévotionnelle de la retraite. La répétition, six fois par jour, de la séquence rituelle de base — dont la durée devait être d'environ deux heures — suffit peut-être à donner une faible idée de l'énergie nécessaire pour tenir ce rythme durant une période de quatre-vingt à cent vingt jours. L'intérêt de la distinction entre forme et contenu est de montrer que, en dépit de ressemblances structurelles avec les ouvrages de Chih-i, le texte en question n'a pratiquement pas été influencé par la pensée T'ien-t'ai. La forme constitue une sorte de syntaxe rituelle commune à l'ensemble du bouddhisme chinois, tandis que le contenu, qui donne un sens dévotionnel et cognitif à cette forme, est spécifique à chaque école. Certes, du point de vue phénoménologique, cette distinction est sans doute moins pertinente, dans la mesure où le rituel est perçu comme un tout par les participants; mais elle n'en conserve pas moins une valeur heuristique, en permettant de dialectiser l'unité et la diversité de la (ou des) religion(s) chinoise(s). Alors que le bouddhisme chinois, considéré jusqu'à présent dans son aspect doctrinal, a été perçu dans sa diversité sectaire, l'accent sur les structures rituelles uploads/Religion/ tsung-mi-s-perfect-enlightenment-retreat-1.pdf
Documents similaires
-
30
-
0
-
0
Licence et utilisation
Gratuit pour un usage personnel Attribution requise- Détails
- Publié le Fev 08, 2022
- Catégorie Religion
- Langue French
- Taille du fichier 2.6557MB