Journal de la Société des Américanistes Parenté, rituel, organisation sociale :

Journal de la Société des Américanistes Parenté, rituel, organisation sociale : le cas des Sioux Emmanuel Désveaux Citer ce document / Cite this document : Désveaux Emmanuel. Parenté, rituel, organisation sociale : le cas des Sioux. In: Journal de la Société des Américanistes. Tome 83, 1997. pp. 111-140; doi : https://doi.org/10.3406/jsa.1997.1673 https://www.persee.fr/doc/jsa_0037-9174_1997_num_83_1_1673 Fichier pdf généré le 05/05/2018 Abstract Kinship, ritual, social organization : the Sioux case. Bringing the ritual into the focus of interpretation leads the author to resolve the main discrepancies in Sioux kinship terminology and, more profoundly, in the sociology of this group. He elucidates the « Ghost Lodge Ceremony », a funerary rite devoted to very young children, in order to understand how the phenomena of adoption and of death among the Sioux substitute the classical categories of filiation and alliance as the basic structuring principles. Sioux sociability is literally saturated by way of ritual adoption, the hunka ceremony. With the ideal wife being a war captive, alliance is relegated to the periphery, whrereas the couple of kola, « war companion », occupies a more prominent place. Thus, the analysis renders possible a new vision of Sioux and, particularly, the famous particle ši. Resumen Parentesco, rítuales, organization social : el caso de los siux. Enfocando su interpretación en los rituales, el autor logra resolver las principales discrepan- cias en la terminologia del parentesco de los siux y, más profundamente, en la sociología de este grupo. Partiendo de la comprensión de la « Ghost Lodge Ceremony », un rito funerario dedicado a los pequeños niños, Uega a entender cómo los fenómenos de adopción y de muerte entre los siux sustituyen las categorías clásicas de filiación y alianza como principios estructu- rantes básicos. La sociabilidad siux está literalmente saturada por la ceremonia hunka (el ritual de adopción). Con la esposa ideal siendo una cautiva de guerra, la alianza está relegada a la periferia, mientras que la pareja kola, formada por los « compañeros de arma » ocupa un lugar prépondérante. Así, este análisis hace posible una nueva interpretación de la terminología del parentesco siux, y, especialmente, de la famosa particula ši. Résumé L'auteur se propose de résoudre les difficultés de la nomenclature de parenté des Sioux — et, derrière elle, de la sociologie de ce groupe — en plaçant le rituel au cœur de l'effort d'interprétation. Il table ainsi sur une élucidation de la Ghost Lodge Ceremony — forme rituelle funéraire réservée aux très jeunes enfants — pour comprendre comment l'adoption et la mort se substituent, chez les Sioux, aux catégories classiques de filiation et d'alliance comme principes structurants. Le hunka (l'adoption rituelle) sature littéralement la sociabilité sioux. L'alliance est rejetée à la périphérie, l'épouse idéale étant la captive de guerre, tandis que le couple de kola, « compagnons d'armes » occupe le devant de la scène. Une nouvelle lecture de la nomenclature et, notamment, de la fameuse particule ši, devient alors possible... PARENTE, RITUEL, ORGANISATION SOCIALE : LE CAS DES SIOUX l Emmanuel DÉSVEAUX * L'auteur se propose de résoudre les difficultés de la nomenclature de parenté des Sioux — et, derrière elle, de la sociologie de ce groupe — en plaçant le rituel au cœur de l'effort d'interprétation. Il table ainsi sur une elucidation de la Ghost Lodge Ceremony — forme rituelle funéraire réservée aux très jeunes enfants — pour comprendre comment l'adoption et la mort se substituent, chez les Sioux, aux catégories classiques de filiation et d'alliance comme principes structurants. Le hunka (l'adoption rituelle) sature littéralement la sociabilité sioux. L'alliance est rejetée à la périphérie, l'épouse idéale étant la captive de guerre, tandis que le couple de kola, « compagnons d'armes » occupe le devant de la scène. Une nouvelle lecture de la nomenclature et, notamment, de la fameuse particule ši, devient alors possible... Mots clés : Sioux, Indiens des Plaines, organisation sociale, nomenclature de parenté, rituel, guerre, Ghost Lodge Ceremony. Kinship, ritual, social organization : the Sioux case. Bringing the ritual into the focus of interpretation leads the author to resolve the main discrepancies in Sioux kinship terminology and, more profoundly, in the sociology of this group. He elucidates the « Ghost Lodge Ceremony », a funerary rite devoted to very young children, in order to understand how the phenomena of adoption and of death among the Sioux substitute the classical categories of filiation and alliance as the basic structuring principles. Sioux sociability is literally saturated by way of ritual adoption, the hunka ceremony. With the ideal wife being a war captive, alliance is relegated to the periphery, whrereas the couple of kola, « war companion », occupies a more prominent place. Thus, the analysis renders possible a new vision of Sioux kinship terminology and, particularly, the famous particle ši. Key words : Sioux, Plain Indians, social organization, codes of kinship, ritual, war, Ghost Lodge Ceremony. * EHESS, Laboratoire d'anthropologie sociale, Collège de France, 52, rue du Cardinal-Lemoine 75005 Paris Journal de la Société des Américanistes 1997, 83: p. 1 11 à 140. Copyright © Société des Américanistes. 1 1 2 JOURNAL DE LA SOCIÉTÉ DES AMÉRICANISTES [83, 1997 Parentesco, rituales, organization social : el caso de los siux. Enfocando su interpretation en los rituales, el autor logra resolver las principales discrepan- cias en la terminologia del parentesco de los siux y, más profundamente, en la sociologia de este grupo. Partiendo de la comprensión de la « Ghost Lodge Ceremony », un rito funerario dedicado a los pequeflos nifios, Uega a entender cómo los fenómenos de adopción y de muerte entre los siux sustituyen las categorías clásicas de filiation y alianza como principios estructu- rantes básicos. La sociabilidad siux esta literalmente saturada por la ceremonia hunka (el ritual de adopción). Con la esposa ideal siendo una cautiva de guerra, la alianza esta relegada a la periferia, mientras que la pareja kola, formada por los « compafieros de arma » ocupa un lugar prépondérante. Asi, este análisis hace posible una nueva interpretation de la terminologia del parentesco siux, y, especialmente, de la famosa particula Si. Palabras claves : Siux, Indios de las Llanuras, organization social, nomenclatura de parentesco, ritual, guerra, Ghost Lodge Ceremony. I. — Une nomenclature retorse Bien que Morgan ait désigné l'un de ses grands types de classification comme Iroquois-Dakota, sa vision de la nomenclature des Sioux reste très superficielle. Il n'y décèle en effet aucune difficulté particulière par rapport à la grille d'interprétation comparative des nomenclatures de parenté qu'il est en train de mettre au point. Kroeber est le premier, nous semble-t-il, à avoir soulevé le lièvre. Dans un article qui date de 1909, il fait une remarque au sujet de cette nomenclature qui a de quoi plonger les psychanalystes dans un état de ravissement profond ou, au contraire, dans le plus noir des cauchemars. La remarque lance également un redoutable défi à ceux d'entre nous qui « font dans la parenté » : « In the Dakota language, according to Riggs, there is only one word for grand-father and father-in-law. Following the mode of reasonning sometimes employed, it might be deduced from this that these two relationships were once identical. Worked out to its implications, the absurd conclusion would be that marriage with the mother was once customary among the Sioux. » Kroeber poursuit : « in the same language the words for woman's male cousin and for woman's brother-in-law have the same radical, differing only in a suffix. Similar reasonning would induce in this case that marriage of cousins was or had been the rule among the Sioux, a social condition utterly opposed to the basic principles of almost all Indian society. » Nul doute que, sur le premier point, la remarque de Kroeber n'ait fait mouche. La preuve en est que l'équation terminologique rapportée par Riggs, le premier ethnographe des Sioux, entre grands-parents maternels et beaux-parents a bel et bien été confirmée, et que pourtant peu d'auteurs se sont aventurés à la reprendre pour la discuter. En revanche, le premier élève de Boas se trompe partiellement lorsque, pour discréditer la méthode historique, il affirme que le mariage entre cousins croisés est étranger aux sociétés indigènes d'Amérique du Nord (c'est celles-ci qu'il avait en tête), puisque des pratiques matrimoniales qui répondent à cette définition factuelle ont été découvertes par la suite dans les régions voisines du subarctique central. Cela dit, Désveaux, E.] PARENTÉ, RITUEL, ORGANISATION SOCIALE SIOUX 113 Kroeber n'a peut-être pas foncièrement tort : ce n'est pas parce que ce type de mariage existe — au demeurant dénué de tout aspect prescriptif et avec des taux d'occurrence assez faibles — qu'il sert de fondement à l'organisation sociale. Tout juste se manifeste-t-il en vertu de la logique rigoureusement dravidienne des nomenclatures qui prévaut dans les groupes concernés (Désveaux & Selz, sous presse). Quoi qu'il en soit, la question que soulève la nomenclature sioux ne réside pas tant dans l'hypothèse d'une pratique du mariage entre cousins croisés devenue obsolète que dans la règle fixant la distinction entre termes de croisement et d'affinité. La fameuse particule dont parle Kroeber, en l'occurrence le suffixe uploads/Religion/ desveaux-emmanuel-1997-parente-rituel-organisation-sociale-le-cas-des-sioux.pdf

  • 40
  • 0
  • 0
Afficher les détails des licences
Licence et utilisation
Gratuit pour un usage personnel Attribution requise
Partager
  • Détails
  • Publié le Dec 02, 2021
  • Catégorie Religion
  • Langue French
  • Taille du fichier 3.1928MB