Les dieux et les armes Inflexions civils et militaires : pouvoir dire Questions

Les dieux et les armes Inflexions civils et militaires : pouvoir dire Questions de défense I N F L E X I O N S civils et militaires : pouvoir dire La revue INFLEXIONS, plate-forme d’échanges entre civils et militaires, est éditée par l’armée de terre. 14, rue Saint-Dominique, 00453 Armées Rédaction : 01 44 42 42 86 – e-mail : inflexions.emat-cab@defense.gouv.fr Télécopie : 01 44 42 43 20 Directeur de la publication : M. le général de corps d’armée Jérôme Millet Rédacteurs en chef : M. le colonel Jean-Luc Cotard Mme Line Sourbier-Pinter Comité de rédaction : M. le général d’armée (2 S) Jean-René Bachelet Mme Monique Castillo M. Jean-Paul Charnay M. le colonel Benoît Durieux M. le général de corps d’armée Pierre Garrigou-Grandchamp M. le lieutenant-colonel Michel Goya M. le rabbin Haïm Korsia M. le colonel François Lecointre Mme Anne Mandeville Mme Véronique Nahoum-Grappe M. l’ambassadeur de France François Scheer M. Didier Sicard Secrétaire de rédaction : adjudant Claudia Sobotka Les manuscrits qui nous sont envoyés ne sont pas retournés. Les opinions émises dans les articles n’engagent que la responsabilité des auteurs. Les dieux et les armes Questions de défense INFLEXIONS civils et militaires : pouvoir dire juin – septembre 2008 | nº 9 Les dieux et les armes Questions de défense Questions de défense dF INFLEXIONS civils et militaires : pouvoir dire INFLEXIONS juin – septembre 2008 | nº 9 janvier – mai 2008 | nº 8 I N F L E X I O N S civils et militaires : pouvoir dire Prochain numéro : Action militaire et buts politiques NUMÉRO 9 LES DIEUX ET LES ARMES ÉDITORIAL  07 BRUNO CUCHE POUR ENGAGER LA RÉFLEXION SOLDAT… AU NOM DE QUOI ? LINE SOURBIER-PINTER 13 L’ACTION MILITAIRE ET LE SACRÉ : POUR UNE APPROCHE RATIONNELLE, ENTRE EXALTATION ET PRAGMATISME JEAN-RENÉ BACHELET 19 ARTICLES PRÉSENCES DU SACRÉ ET DU RELIGIEUXDANS LA VIE MILITAIRE ANTOINE WINDECK 27 ARMÉES ET RELIGIONS, UN POINT DE VUE « TRADITIONNEL » AU TRAVERS D’UNE APPROCHE HISTORIQUE ALEXANDRE LALANNE-BERDOUTICQ 37 AUMÔNERIE AUX ARMÉES ET COMMANDEMENT : QUELLE ÉTHIQUE COMMUNE ? PHILIPPE SAUTTER 49 LES DIEUX ET LES ARMES, TÉMOIGNAGE D’UN AVIATEUR PHILIPPE ROOS 59 TÉMOIGNAGE D’UN OFFICIER D’INFANTERIE DE MARINE KARIM SAA 71 PRATIQUE RELIGIEUSE ET EXERCICE DU MÉTIER DES ARMES : LA PAIX DE L’ÂME POUR MIEUX FAIRE LA GUERRE ? SAHBI SALAH 81 LA LAÏCITÉ DANS LES ARMÉES : UNE CONTRAINTE, UNE NÉCESSITÉ, UNE LIBERTÉ OU UNE FORCE ? FRANÇOIS CHAUVANCY 89 ENGAGEMENT CHRÉTIEN DANS LES AFFAIRES MILITAIRES ET STRATÉGIQUES PIERRE LACOSTE 105 LES ARMÉES ET LE SACRÉ, UN POINT DE VUE CATHOLIQUE PATRICK LE GAL 123 LE PROTESTANTISME : UN REGARD PLURIEL SUR LA GUERRE BERNARD DELANNOY 127 NI PAR LE NOMBRE, NI PAR LA FORCE MAIS PAR L’ESPRIT HAÏM KORSIA 135 DJIHAD, UNE GUERRE « JUSTE » CODIFIÉE ABDELKADER ARBI 141 PRÊTRE OU SOLDAT ? CÉLINE BRYON-PORTET 145 ARMÉES BRITANNIQUES ET FAIT RELIGIEUX : POINT DE SITUATION 2008 SERGE AUFFRET 163 AMERICAN WARRIOR QUELQUES ASPECTS RELIGIEUX DU NOUVEAU CREDO DU SOLDAT AMÉRICAIN 2003 JOHN CHRISTOPHER BARRY 175 Traduction anglaise  POUR NOURRIR LE DÉBAT L’ÉTHICIEN DES ARMES JEAN-PAUL CHARNAY 215 VALEURS ET FORMATION DANS L’ARMÉE, LA SANTÉ, L’ÉDUCATION. JALONS POUR UNE CONCEPTION PARTAGÉE DE LA FONCTION PUBLIQUE LAURENT HUSSON, JOËL HARDY, JACKY NOBLECOURT 261 COMPTE RENDU DE LECTURES  273  ÜBERSETZUNG DER ZUSAMMENFASSUNG AUF DEUTSCH TRANSLATION OF THE SUMMARY IN ENGLISH  279 BIOGRAPHIES  285 BRUNO CUCHE Chef d’état-major de l’armée de terre ÉDITORIAL « L’homme vaut ce que vaut son drame intérieur » Lacordaire Peut-on débattre sereinement et publiquement de religion, du sacré et du rapport aux armes au sein de l’institution mili- taire en 2008 ? Inflexions en a fait le pari audacieux. Et le résultat est à la hauteur de l’ambition de la revue qui est de favoriser la libre expression entre militaires et civils. Car l’échange permet de rapprocher les points de vue, d’éclairer sur la singularité de l’autre et d’enrichir sa propre réflexion : le dialogue engen- dre le respect. Le silence, l’autisme, le non-dit sont la source de toutes les frustrations. Ils génèrent le repli sur soi et les crispations identitaires. Refuser de comprendre l’intime, et plus grave encore, ne pas admettre l’intime chez l’autre, c’est risquer l’incompréhension profonde et la rupture irrémédia- ble de la confiance. Or, sur la question religieuse, pour nous militaires, il s’agit bien toujours de trouver cet équilibre entre la reconnaissance chez chacun de son identité – dont la foi, l’agnosticisme ou l’athéisme sont l’expression la plus singu- lière – et l’exigence d’efficacité collective qui ne peut se diluer dans les particularismes. Le statut général des militaires de 2005 me semble donner une réponse à la fois suffisamment précise pour fixer des règles de comportement à chacun, sans pour autant nier au fait religieux des fonctions régulatrices au sein de l’institu- tion militaire. L’article 1 fait référence à des notions qui sont communes au registre religieux et militaire : « l’état militaire exige en toute circonstance esprit de sacrifice pouvant aller jusqu’au sacrifice suprême, discipline, disponibilité, loya- lisme et neutralité ». L’article 4, révèle quant à lui toute la difficulté du sujet en mettant en perspective des idées en appa- rence contradictoires, entre les exigences de l’état militaire qui impose « le devoir de réserve », et la « liberté indivi- duelle » ainsi que « la liberté de culte » dont les principes sont réaffirmés. Mais en même temps, en juxtaposant ces princi- pes, il leur donne la même valeur, considérant que l’un ne va pas sans l’autre, que tous ont leur égale importance pour le bon fonctionnement de l’institution militaire. Divergences et convergences caractérisent ainsi la relation entre Dieu et les armes. Et je souhaite en évoquer quelques unes pour contribuer, à ma façon et modestement, au débat à travers un raccourci historique illustratif mais nécessai- rement réducteur. Soyons lucides, les armées françaises ont longtemps porté en elles les stigmates des relations très étroites, parfois ambigües puis finalement conflictuelles entre l’Église catholique et l’État. Le baptême de Clovis et de trois cents de ses guerriers par l’évêque Rémy fonde un lien charnel entre les oratores et les bellatores qui durera quatorze siècles. Roland de Roncevaux, les croisés ou les chevaliers, Jeanne d’Arc sont quelques unes des figures emblématiques d’une collusion assumée qui fait alors la puissance du royaume de France. La Révolution marquera cependant une rupture considérable ; la noblesse catholi- que d’épée perd sa prééminence dans l’armée qui s’ouvre à un nouveau type d’officiers, fils de la République et bien- tôt fils de l’Empire ; les références religieuses sont bannies. Mais Napoléon, très vite, atténue les excès de la Révolution et n’hésite pas à affirmer « qu’il n’y a pas d’hommes qui ne s’entendent mieux que les soldats et les prêtres ». Sous la iiie République, les affaires Dreyfus et André révèlent douloureusement des divisions profondes au sein du corps des officiers, à l’instar de celles de la société d’alors. Dreyfus est un capitaine de confession israélite. Injustement dégradé et condamné à la déportation, il sera finalement gracié et réhabilité. André est ministre de la Guerre et général. Il doit démissionner après que la presse eut révélé qu’il avait donné l’ordre de ficher les officiers catholiques pour mieux les écarter de l’avancement. Au même moment, la séparation de l’Église et de l’État sonne définitivement le glas des relations institutionnelles entre l’ordre guerrier et l’ordre religieux. L’armée est devenue ce qu’elle est aujourd’hui, laïque et républicaine. 8 ÉDITORIAL Cela ne signifie pas pour autant qu’elle ait abandonné toute référence à la religion. Les rites, le cérémonial, la symbolique, certains principes d’organisation, tels la hiérarchie, le port de l’uniforme, des notions comme le « sacrifice suprême », « l’appel au sacré », « le regard vers l’au-delà » demeurent très largement partagés par l’armée et les trois grandes religions monothéistes. Le droit international de la guerre et le droit international humanitaire ont été influencés par les réflexions des grands penseurs chrétiens saint Augustin et saint Thomas d’Aquin. De la même manière, la République française, comme aujourd’hui la République américaine, s’est inspirée de la liturgie chrétienne pour bâtir l’unité nationale et magni- fier les vertus guerrières du peuple. En 1870, après la défaite, Paul Déroulède affirmera ainsi : « l’armée est la grande patronne qui nous baptise tous français ». Charles Péguy exal- tera pour sa part le sacrifice de ceux qui sont tombés au champ d’honneur pendant la Première Guerre mondiale : « heureux ceux qui sont morts dans les grandes batailles. Couchés dessus le sol à la face de Dieu ». Et Henry de Montherlant d’ajouter : « le goût du sacrifice n’est qu’une forme de la prodigalité de la vie ». Mais qui nul autre que le général de Gaulle – officier de l’armée française, catholique et républicain convaincu, qui fut chef de guerre et chef de l’État – pour assumer l’héritage reli- gieux, culturel et politique de la France, tout en s’inscrivant résolument dans la modernité républicaine, tout en inscrivant les militaires uploads/Politique/ inflexions-09-15.pdf

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