Compilation de discours – CEDRE (les 24-25 novembre 2016) François Hollande, Pr
Compilation de discours – CEDRE (les 24-25 novembre 2016) François Hollande, Président de la République « Madame la ministre ; Monsieur le ministre ; Monsieur le président de PSL ; Monsieur le directeur de l’Ecole normale supérieure ; Mesdames, messieurs qui avez participé à ce colloque, Je suis très heureux de pouvoir à mon tour m’y exprimer. M’y exprimer pour marquer tout l’intérêt que je porte au Centre européen d’études républicaines. Vous avez choisi comme thème de votre travail « modernités républicaines » qui définit parfaitement la situation dans laquelle nous nous trouvons. Parce que personne ne doute de la modernité de l’idée de la République. Mais le thème est aussi revenu en force depuis une vingtaine d’années, sans doute à cause des épreuves que nous avons pu traverser, notamment ces derniers mois, mais aussi de la question de la mondialisation, de ce qu’elle exige d’une Nation ou d’un ensemble pour comprendre quelle est sa place, quel est son destin et quelle est sa forme d’organisation. Le caractère pluriel de la République ne fait pas de doute non plus. Il faut pour s’en convaincre là-encore entendre tous les discours, d’où qu’ils viennent, de tous horizons. Ils se sont tous emparés de la République. Ce n’était pas vrai il y a encore quelques années, quelques décennies. Aujourd’hui la République est devenue un lieu commun, ne nous en plaignons pas, si c’est le lieu commun qui permet de faire du commun ; mais si c’est simplement un mot qui sert à utiliser, voire à recycler d’autres idées, c’est là qu’il peut y avoir détournement de sens. Parce que la République est partout invoquée, sommée, questionnée, contestée, parfois récupérée et détournée. Elle est présentée à la fois comme un malade qu’il faudrait soigner ; comme un remède qu’il faudrait apporter ; comme des racines qu’il faudrait à tout prix préserver et protéger ; comme un avenir ; comme un âge d’or pour les nostalgiques auxquels il faudrait revenir à tout prix ; ou comme un système politique imparfait qu’il serait urgent de réformer et auquel il faudrait apporter des réponses. De même rarement les concepts qui lui sont liés, à la République, ont été autant présents dans le débat public avec l’identité, la citoyenneté, les droits, les devoirs. Le langage républicain est omniprésent. Mais est-on sur que ceux qui l’emploient lui accordent la même signification ? Est-ce que ce n’est pas devenu aussi une forme de langue presque étrangère à une partie de nos concitoyens qui n’entendent plus forcément la République comme un système d’égalité, de promotion, d’émancipation, mais simplement comme une institution. Aussi, paradoxalement, plus on parle de la République et de ses valeurs, plus le besoin se fait sentir d’éclairer même son sens. Non pas pour lui donner une fois pour toute une définition qui prévaudrait sur toutes les autres et qui en exclurait certaines, non pas pour écrire une histoire officielle, un récit national, un roman –j’ai vu que cela pouvait saisir certains– mais pour en faire la possession exclusive de la Nation et pas de telle ou telle famille politique. Je crois que nous avons besoin d’un débat serein, sans malentendu y compris pour réfléchir sur les nécessaires évolutions. C’est pour cette raison que notre pays a voulu se doter d’un grand établissement scientifique, le CEDRE. Je voudrais remercier monsieur CHRISTIN pour l’engagement qui a été le sien pour porter cette idée avec Vincent PEILLON. L’idée est de rassembler les meilleurs chercheurs travaillant sur la République, issus de toutes les disciplines des sciences humaines et sociales : histoire, philosophie, sciences politiques, sociologie, droit, et de les laisser interroger les institutions de la République, les pratiques dans la République, les règles, les normes, les rituels dans lesquels la République s'incarne et les formes nouvelles qu'elle doit se donner. Ces chercheurs de haut niveau pourront confronter leurs perspectives d'un point de vue national mais aussi d'un point de vue international. Pourquoi c'est nécessaire aujourd'hui ? J’en ai évoqué les raisons profondes sur le plan intellectuel et même sur le plan politique mais je veux ajouter un certain nombre de justifications liées aux circonstances. Après les attaques terroristes dont notre pays a été la cible et les événements qui ont forcément profondément marqué notre pays et pas simplement notre pays, puisque nous n’avons pas été les seuls à subir ces assauts et ces agressions, il y a eu de nombreux débats qui se sont ouverts sur le modèle républicain. Sa capacité d'intégration, la laïcité, le vivre ensemble, la possibilité d'être unis dans la diversité, de savoir jusqu'où pouvait aller l'expression personnelle, la liberté individuelle ou ce que devait faire prévaloir la République au sens de ce que nous devons tous respecter comme loi commune, et ce que c'est ce que la République pouvait porter comme promesses, comme capacité d'emmener tous ses enfants vers le même objectif. Il est plus important que jamais de conduire un dialogue intellectuel et universitaire par-delà nos frontières, parce que ce débat n'est pas propre à la France même s’il y a des régimes très différents, y compris au sein de l'Union européenne, des pays démocratiques. Il est très important que nous puissions voir quelle est notre spécificité, ce qui appartient à l'idée républicaine française et que nous avons en partage avec les autres, ce qui nous distingue et ce qui nous unit en Europe et au-delà de l'Europe. Car l'idée républicaine n'est pas liée à un continent, n'est même pas liée à un stade de développement. L’idée républicaine emporte finalement un message qui est universel. La mission du CEDRE, de ce nouveau centre, c'est aussi de diffuser de la connaissance auprès du plus grand nombre de citoyens. D'abord en constituant des ressources documentaires. Le CEDRE publiera des thèses de doctorants, accueillis ici en son sein, et publiera des classiques de la pensée républicaine. Je suis ici dans l'amphithéâtre JAURES et j'imagine que JAURES aura toute sa place pour la diffusion de ce qu’était la pensée républicaine et qui, à bien des égards, reste encore parfaitement valide aujourd'hui. Presque comme si les drames de l'avant Première Guerre mondiale pouvaient éclairer sur ce qui se passe y compris aujourd'hui au plan international : la reconstitution des empires, la montée des nationalismes, le regard distant sur les libertés, ce qui avait provoqué l'affaire Dreyfus. Autant de textes qu'il faut reprendre aujourd'hui, non pas pour en faire simplement une leçon d'histoire, mais une forme de conviction qui fait qu’à travers les âges, les mêmes passions, les mêmes drames, les mêmes épreuves, les mêmes tentations peuvent aboutir à des remises en cause de ce que l'on croyait les fondamentaux essentiels. Ce qui est frappant dans la dernière période, c'est que ce que l'on croyait le plus évident devient contestable. Ce qu’on pensait être le mieux établi devient sujet de débat. Ce que l'on croyait être des acquis de toute une période qui avait été celle notamment de l'après-guerre, tout cela prend un sens relatif. Le relativisme a tout emporté, tout peut être discuté. Alors il est très important qu'il puisse y avoir ici un centre de recherches qui permette aux enseignants de pouvoir trouver des ressources pour l'enseignement moral et civique. Quand la ministre de l'éducation de l'Education nationale, Najat VALLAUD-BELKACEM, a repris cette idée qui était d'ailleurs contenue dans la loi sur la refondation de l'école, beaucoup, une nouvelle fois ont contesté cette idée, comme si c'était un enseignement qui venait porter une parole officielle. Qu'est ce que signifiaient la morale et la citoyenneté ? Est- ce que c'était bien le rôle de l'école que de transmettre cette connaissance, cette valeur, ces règles de vie ? Alors que c'est le principe même de l'école que de permettre cet enseignement qui s'enrichit de toutes les sciences, de toutes les connaissances. Faut-il pour autant qu'il puisse y avoir un centre de recherche qui alimente l'Education nationale pour lui donner tous les éléments ? Pour faire de cet enseignement moral et civique un apprentissage pour beaucoup de futurs citoyens mais aussi un facteur d'élévation de l’esprit et de connaissance de l'Histoire, connaissance aussi des règles de vie, connaissance du monde. Tel est le sens de l'enseignement moral et civique, y compris de bien comprendre les rôles qu'ont pu jouer les religions dans notre Histoire ou dans l'Histoire du monde. Le CEDRE permettra aussi d'être un lieu de débat. La République, en effet, n'est pas un concept figé qui aurait une définition définitivement établie. On ne peut pas la réduire à un modèle unique, valable pour toutes les situations historiques que l'on pourrait ainsi plaquer et qui serait indifférent aux cultures, à toutes les diversités, à tous les apports qu’un pays comme le nôtre a pu avoir au cours des générations. De la même manière, la République n'appartient pas à un parti, ni à un siècle, ni même à un pays. La République, c'est un ensemble de règles, de fondements, de philosophies, d'aspirations qui ont une vocation universelle. Il y a aussi cette fameuse distinction établie entre la République et la démocratie. La République est uploads/Politique/ compilation-de-discours-intro-colloque-cedre.pdf
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- Publié le Nov 20, 2021
- Catégorie Politics / Politiq...
- Langue French
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