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''" LA CONSTITUTION FRA:\ÇAISE DU 4 OCTOBRE 1!158 ,~,:· :!F , .. ; :;~;·~ par JEAN FRANÇO !S AUBERT Pour les amateurs de constitutions. 1!1;-,K fut tilH' bonne i: àllnée. Leur collection s'est <'Il richie d'une pii·ec nounlle;. +•:t; ce qui rst mit•ux encore, l'exemplaire pri•sente d'inrnn- i.!~stables garantil'S d'originaliti·. L<' svsthne qu'il crée n'rst · klti uniblire, ni vraiment fédéral; le ri·gime qu'il i·tablit n'est • 1 -: ; ' • · !..~\ prés~dentirl, ni strictement parlementaire; ln démocratie ·1 .q·~·n in;augure n'est ni Sl'tni-directe, ni purement n•présen- 1 t~tive;;le suffrage qu'il accorde n'est ni universel, ni posi- . i tiyeme!lt restreint. La séparation des pouvoirs y subit un ' avatar' troublant. D'une chambre démesurée, on a fait ~eux chambrettes, presque égales <lans leur modestit•. Enfin, le monarque R deux têtes, dont l'une commande, el l'autre rend des comptes. Ce savant alliage n'a qu'une drslination: · rendre à l'Etat français sa puissance, el l'efficacité à son Gouvernement. L'avenir nous dira si l'entreprise réussit. Nnus n~ pouvons, aujourd'hui, qu'examiner sa genèse ct ses moyens. 1 L'origine de la Constilulion Les circonstances d'où est issue la Cinquième République sont si connues, du main~ dans leur déroulement apparent, qu'il suffira de quelques mots pour les rappeler. Le 15 avril 1958, le Ministère Gaillard trébuchait, sUr la . question des bons offices anglo-américains. M. Bidault, 2 18 Jean François Aubert: puis M. Pleven, furent successivement pressentis, Je second à deux reprises, mais sans résultat. Vint M. Pflimlin, dont la modération parut un gage de succès. Toutefois, tandis , que se déroulait le débat d'investiture, dans la soirée du 13 mai, d'alarmantes nn\lvelles arrivèrent d'Algérie, où le Gouvernement Général avait été saccagé par des émeutiers qui signalaient ainsi leur hostilité ù ce qu'ils con~idéraient comme une politique trop timide. La confiance fut néan• moins accordée à M. Pflimlin (par 271 voix contre 12\l, les communistes s'abstenant): dernier mouvement d'énergie d'une République fatiguée. Entre Paris et Alger, la division s'accentuait. Bientôt, ceux qui ne voulaient pns d'une solution militaire n'eurent, apparemment, d'autre ressource que de s'adresser à M. de Gaulle. Lequel se déclara prêt à assumer le pouvoir (15 mai). Il acceptait même une in- vestiture parlementaire, mais en dehors des formes habi- tuelles (conférence de presse du 19 mai). Et ce fut, en effet, un comportement insolite, que de bousculer le Président du Conseil (27 mai), avant que celui-ci n'cùt démissionné. Tout redevint normal, cependant, Im·sque, le premier juin, le nou- veau Gouvernement obtint l'appui de l'Assemblée nationale (par 32\J voix contre 224). Aussitôt qu'il fut intronisé, le Ministi·rl' de Gaulle déposa trois projcl's de loi devant la Chambre. a) Le pn·micr, sur des pouvoirs spéciaux en ,\lgéric, qui ne faisait que recon- duire une situation pri'<·xistanlc, fut adopté sans difficulté (par 337 voix contre 1\J\l). b) Le deuxième, sur la délégation au Ministère, pendant six mois, d'une très large compétence législative (en toutes matièn·s, hormis celles que la tradition républicaine réservait à la loi: les libertés puhliqucs, le droit des crimes et des délits, cl le régime i·lectoral), était beaucoup plus révolutionnaire, puisqu'il mettait les Cham- bres en veilleuse. Il reçut pourtant 322 voix (contre 2:32). c) I.e troisième, enfin, qui seul vraiment importe ù notre récit, chargeait le Gouvernement d'élaborer une nouvelle Constitution. Le texte devrait respecter un certain nombre de dogmes (universalité du suffrage, séparation des pou- La constitution française du 4 octobrr 19:>8 19 responsabilité ministérielle, indi>pendam·<• de la et union avec les peuples associés); 0tre soumis ù lill consultatif composé, en majeure pnrtie, de di·putt•s . sénateurs; puis au Conseil d'Etat; el, lïnnl!'mcnl. fail\' d'une votation populaire. Quoique ce progr,llnmt• [ùt plus menaçant que le pr0cédt•nt pour la supri•matie qui se voyait mis hors du circuit constilu- et qui avait donc tout ù erainrln· rie la Hi·puhlique ,e~,','~ltur·e, 350 voix l'approuvèn·nl (contre 161). Apri·s qu<· le 'i'i'.M!nsdl de la Hépubliquc les cul cntérilll's. les trois projets .:.,.'"''""' lois, ll' 3 juin I!ICJX. frouvernl'JltcrJt s\•ngagi:a sans tardl'r dnns ln voie it dü se fairl' ouvrir. Sous la dirretion du (~ani(' des }c;j 'l5tE~iluixll (M. Dehn'). un groupe d'experts du f.onsdl d'Etat ifll:~biTÏ<(n:,a un texte. Celle version fut amcndi•e par un Comite réunissant le l'résident de (iaullt•, 1\1\1. nil>h:ré,l déjlt nommé, :\lollet, Pflimlin, .Jacquinul cl llou- ohouêltf~B<Jil!nV, «ministres d'Etal•> sans por\ef{'uilles, ainsi 1 Cassin, vice-président rlu Conseil d'Etat. Une fois a~lop•té(' en Conseil des :\linistrt•s, elle fut publiée (2!1 juilll'l), pJrtée devant un Comité consultatif où siégeaient Hi délléi!Ué! de l'Assemblée nationale (dont MM. Coste-Floret, . et Teitgcn), 10 rlu Conseil de ln Hépublique (parmi ~~~els MM. Lamine-Gucye ct Marcilhacy), ct 13 personnes cboisies par le Gouverm·ment (où l'on trouve MM. I\'oël et R,eynaud, et le Professeur \Valine). Cc Comité rlélihérn jllsqu'au 14 aoùt, puis transmit ses observations (parti- culièrement importantes en cc qui concernait la Commu- nauté) au Conseil des l\linistrcs, kquel, après de nouveaux amendements, envoya le projet au Conseil d'Etal pour un '·ultime contrôle (23-2\l aotH). On sail que le fruit de celte rapide gestation fut présenté, le 4 septembre, au peuple assemblé sur la Place de la République. Le referendum est du 28. La promulgation, du 4 octobre. Endossée par trente et un millions de voix, contre cinq millions et demi (17 Y, contre 4 Y2 dans la métropole), la nouvelle Constitution n'attendait plus, pour sortir ses pleins effets, que la mise en 20 Jean François Aubert: place des organes qu'elle prévoyait (23 et 30 novembre; élections à l'Assemblée nationale; 21 décembre, élection du Président de la République; 8 janvier 1959, formation du Gouvernement; 26 avril, élections au Sénat). II Le contenu de la Conslilulion La Constitution comprend un court préambule (incluant, curieusement, l'art. 1"), puis 15 litres, se partng<'nnt les art. 2 à 9;!. Le Préambule se réfère, d'abord, à la Déclaration dt• li89 et au Préambule de la rlt'funtc Constitution de 1946, en tant que ces textes consacrent les droits de l'homme et les prin- ' cipes de la souveraineté nationale (e'<•st-it-dire, au fond, de la démocratie). Pratiquement, la référence est globale, car, dans les proclamations qu'elle vise, il n'y a guère de phrase qui n'ait trait à l'un ou l'autr<· de ces deux objets. Le Pré- ambule annonce, en outre, la Hbre communault; de ln Fr·ance et des pays d'outre-mer. Mais nous vl'rrons que, sur œ point, il relève d'une ·autre Constitution, impliqué•c, con li·•· toute logique, semble-t-il, dans la Constitution dt• la Hépublique française 1• Le titre 1 (art. 2 à 4) traite de la souveraine ti·. Il rappelle que la France est une t'(•publiquc indivisible (le mot n'a plus grand sens), laïque, démocratique cl sociale, qui garantit l'égalité devant la loi et la liberté de croyance. Il en déter- mine l'emblème (drapeau tricolore), l'hymne (Marseillaise), la devise (Liberté, égalité, fraternité), le principe (emprunté à la Déclaration de Gettysburg, de 11H;:J: Gouvernement du peuple, par le peuple, pour le peuple) (art. 2). La démo- cratie y est à la fois représentative ct référeudccire. Le 1 Le referendum du 28 septembre 19fl8 présentait, er:: trc autres particularités, celle de soumettre les Institutions françaises au vote de territoires qui allaient précisément, dans les quatre mois suivants, sortir de la Rép~lique française. l.a constitution française du 4 octobre 1958 2t Î~Jfllra 1ge, universel, peut être direct ou indirect (ainsi, pour le 'rétlidtmtde la République et le Sénat) (art.:{). A l'exemple ··la Loi fondamentale de Bonn, l'existence des partis poli- est consacrée, et leur rôle défini (art. 4). Serail-ce le \~::îir'é&llge d'interdictions futures? Le Président de la Hépublique occupe lt• titre Il (art. .i 19). En 1946, il tenait, modcsl<•mt•nt, k titn· \'. La pro- m;Jiiton est révélatrice. 1\ous Yoyons, ici, la figure de proue régime actuel, l'arbitre, le garant, comme dit l'art. 'i. Sa ·puissance nouvelle réd ame un eollègc éleetoral plus larg<' qu~ l'ancien Congrès de Versailles. Ce m· S<·ra pas, toutefois, ·,rensemble de la population, mais un eorps composé dt•s d~puté~, des sénateurs, des ronst•illl'rs gi·néraux (dt• di·parte- m.ents), des membres des ussemb!lot•s d'outre-nwr. ct de r~présentants des <'Onscils municipaux (de communt·s), dan• :lep rapports suivants: un pour les eotnmunes de moins de 1000 habitants; deux jusqu'à :.!000; trois jt,.qu'à :lOOO; puis sik jusqu'à 6000, et neuf jusqu'à \lOOO; en-dessus, tous les conseillers municipaux sont électeurs de droit; enfin, dès 30 000 ·habitants, ils s'adjoignent un tlélégué par millier d'habitants, à la proportionnelle (art. 6). Cc corps élit ensuilt• . le Président selon le système majorilair<· à d~ux tours. On · ,n'.a pas de ·peine à dérnonlrer que les lll'tites communes rurales sont favorisét•s, <'l que l'outre-mer est. quasiment inexistant. Il semblerait qu'en décl'mhn~ 1\151!, sur Xl 000 électeurs, la métropole, avec ses quatre-cinq millions d'habi- , tants, en ait choisi 76 000, le reste de la Communauté, guère moins populeux, 5000. Sur 76 000 élet·Leurs müropolitains, 39 000 seraient venus de villages de moins de deux mille habitants (dont la population totale n't•sl que de seize mil- lions). Le procédé permet de pr(,voir que les fu lurs 1 'résitknts seront modérés. Quant au Général de Gaulle, il est probable qu'il eût été élu uploads/Politique/ aubert-constitution-france.pdf
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- Publié le Oct 25, 2022
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