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Revue d'histoire du XIXe siècle Patrice Vermeren, Victor Cousin, le jeu de la p

Revue d'histoire du XIXe siècle Patrice Vermeren, Victor Cousin, le jeu de la philosophie et de l'État, l'Harmattan, collection «la philosophie en commun », 1995 Sophie-Anne Leterrier Citer ce document / Cite this document : Leterrier Sophie-Anne. Patrice Vermeren, Victor Cousin, le jeu de la philosophie et de l'État, l'Harmattan, collection «la philosophie en commun », 1995. In: Revue d'histoire du XIXe siècle, Tome 17, 1998/2. Les foules au XIXe siècle. pp. 85-86; https://www.persee.fr/doc/r1848_1265-1354_1998_num_17_2_2347_t1_0085_0000_2 Fichier pdf généré le 09/04/2018 Culture 85 présence d'anatomie (G. Lejean : « Tout le monde n'a pas la passion de clinique et de charcuterie dont sa femme et lui sont possédés depuis un an ». . .). On notera, dans ces deux volumes de correspondance, quelques belles lettres de femmes : Athénaïs, mais aussi Emma de Gérando, Marie d'Agoult, et plus encore Hermione Quinet, apôtre vibrante de la démocratie. On remarquera également une fort intéressante lettre d'Armand Lévy (octobre 1856) sur le principe des nationalités et la question juive qui, pour son auteur, ne pourra trouver sa résolution que dans le retour des Israélites en Palestine. On verra enfin comment peu à peu l'aspect poli¬ tique ou polémique de la correspondance s'estompe : ce régime que l'on croyait tem¬ porairement installé en France dure et s'enracine... Dès lors, Michelet se replie sur sa production - un indice, le gonflement de ses échanges avec Chassin sur qui il s'appuie beaucoup pour avoir accès à La Presse, voire à d'autres journaux amis. Cela ne signifie nullement qu'il renie ses idées et ses idéaux, mais seulement qu'il com¬ prend - comme les proscrits et les exilés - que l'hiver sera plus long que prévu. Au total, ces deux volumes qui couvrent les années 1852-1858 sont à la fois le reflet d'une époque de censure et d'autocensure (celle de l'Empire autoritaire) et une étape du parcours d'un homme vieillissant, mais d'une énergie étonnante, confrontée à la douleur et à la souffrance, tout en ne perdant jamais de vue l'objectif qui est le sien : raconter la France et concourir à sa renaissance. Jean-Claude CARON ♦ Patrice VERMEREN, Victor Cousin, le jeu de la philosophie et de l'État , l'Harmattan, collection « la philosophie en commun », 1995. Victor Cousin est célèbre, mais assez méconnu. On sait qu'il exerça, en son siècle, une domination absolue sur l'enseignement de la philosophie, domination dont les traces sont encore sensibles, que ce soit dans la structure des programmes ou dans le rôle attribué au « philosophe » dans l'École et dans la Cité. L'œuvre poli¬ tique de Cousin s'insère dans un mouvement d'institution de la philosophie com¬ mencé sous l'Empire, complété sous la Restauration, transformé de manière décisive après 1830 par la constitution du programme en un corpus d'énoncés directement issus de l'éclectisme. De précédents livres de Patrice Vermeren ont réuni les pièces de cette opération, et attiré l'attention sur ses présupposés et ses conséquences poli¬ tiques. Celui-ci aussi contribue moins à faire connaître le personnage qu'à éclairer les enjeux de son entreprise philosophique : il s'attache peu à l'œuvre philosophique de Cousin mais étudie l'institution d'une philosophie de l'État libéral. Le rapport de la philosophie de Cousin à sa politique n'est ni simple ni univoque. L'auteur ne pré¬ sente pas l'éclectisme comme « une doctrine d'abord constituée puis asservie à des fins non philosophiques ». Il montre qu'il « participe, tant dans son mode d'élabora¬ tion que dans son architecture conceptuelle, du paradigme politique ». Comme la Révolution est achevée dans la fondation de l'État constitutionnel, la constitution de l'éclectisme manifeste l'épuisement des systèmes philosophiques possibles. Elle n'est pas un conservatisme mais l'élaboration d'un modèle de société post-révolutionnaire qui vise à « capitaliser la tradition et à construire un ordre nouveau caractérisé par le progrès ». Dans une première partie, plutôt descriptive, le livre de Patrice Vermeren revient sur la biographie de Cousin, analyse son engagement libéral, apporte sur son voyage en Allemagne, ses relations philosophiques et sa captivité, des précisions utiles. Il montre les promesses d'engagement politique de la philosophie contenues dans les 86 Lectures célèbres cours de 1828-1829, et le succès de la stratégie cousinienne, en termes de reconnaissance académique et de promotion politique (avec quelques négligences dans le passage concernant son rôle à l'Institut). La deuxième partie, plus approfon¬ die, examine le parcours imposé aux disciples, parcours qui vise à les « rendre plus savants, et plus savants que politiques ». Il s'agit d'un travail immense et collectif de lecture, de traduction et de mise en système des œuvres philosophiques depuis l'Antiquité, qui situe dans l'histoire le lieu de la philosophie. Si la plupart des membres du « régiment » se plient à cette discipline, ce n'est pas le cas de Ravais- son, et sa dissidence a d'importantes conséquences sur la genèse du spiritualisme français. Enfin, étant donné que « c'est dans la crise que se constitue l'orthodoxie de l'ins¬ titution et de sa doctrine, et que s'éprouve le modèle du philosophe salarié », la troi¬ sième partie analyse les plus significatives de ces crises : celle du panthéisme, les affaires Bersot, Zévort et Bouillier. Dans la première, c'est la nature de l'éclectisme qui est en cause, son indépendance envers les systèmes allemands contemporains et la sincérité de son spiritualisme. Dans les autres, des professeurs de philosophie dans l'exercice de leurs fonctions sont mis en cause, et Patrice Vermeren étudie la façon dont Cousin, et le ministère de l'Instruction publique, soutiennent ces profes¬ seurs, et à quelles conditions. Il explique ainsi comment se définit le rôle du profes¬ seur de philosophie, quelle est son indépendance réelle envers ses autorités de tutelle et envers la société, quelles sont les limites de ses prises de position. Il est ainsi amené à opposer à l'éclectisme d'autres façons d'envisager la pratique et la fonction de la philosophie - la « philosophie hors de soi ». Il montre finalement que la socio¬ logie moderne, qui date de 1 872 l'institution de la politique, ne peut le faire qu'au prix du recouvrement de cette autre tradition qui lie la science politique moderne à la philosophie, dans sa double dimension spiritualiste universitaire et utopiste révo¬ lutionnaire. Il est dommage que ce travail de fond sur Cousin - il s'agit d'une thèse - n'aborde que superficiellement la genèse conceptuelle de l'éclectisme, en particulier la référence à Leibniz et le rôle de Maine de Biran dans le virage spiritualiste de la philosophie française du début du XIXe siècle. Il serait intéressant de mettre en regard du rôle public du philosophe, au centre du livre de Patrice Vermeren, la nature et la substance de ses travaux érudits, voire de ses travaux historico-biogra- phiques. Mais cela n'enlève rien à la valeur de la réflexion politique, ni à son intérêt historique. Sophie-Anne LETERRIER ♦ Paul VIALLANEIX, Michelet, les travaux et les jours 1798-1874, Gallimard, 1998. Michelet n'a jamais écrit ses mémoires mais en a laissé beaucoup d'éléments : le « Mémorial » (de son enfance jusqu'en 1815) où il tentait de « faire moins l'histoire de (ses) actions, qui ont été peu de chose, que celle de (ses) sentiments et de (ses) pensées » ; le Journal qu'il écrivit en 1820, à 22 ans « (sa) vie jour par jour », sup¬ planté en 1822 par le Journal des idées et celui de ses lectures, mais rouvert en 1828 et tenu scrupuleusement jusqu'en 1873 ; enfin une monumentale Correspondance générale, éditée déjà jusqu'en 1855 par les soins de Louis Le Guillou. Beaucoup de ces éléments furent exploités autrefois par Gabriel Monod, ami et héritier de l'histo¬ rien, qui lui consacra, outre de nombreux articles, son cours au Collège de France de uploads/Philosophie/ patrice-vermeren-victor-cousin-le-jeu-de-la-philosophie-et-de-l-x27-etat-l-x27-harmattan-collection-la-philosophie-en-commun-1995.pdf