Séverine Kodjo-Grandvaux Philosophies africaines Copyright © Éditions Présence
Séverine Kodjo-Grandvaux Philosophies africaines Copyright © Éditions Présence Africaine, Paris, 2013 ISBN papier : 9782708708433 ISBN numérique : 9782708709621 Composition numérique : 2020 http://www.presenceafricaine.com Cette œuvre est protégée par le droit d’auteur et strictement réservée à l’usage privé du client. Toute reproduction ou diffusion au profit de tiers, à titre gratuit ou onéreux, de tout ou partie de cette œuvre est strictement interdite et constitue une contrefaçon prévue par les articles L 335-2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle. L’éditeur se réserve le droit de poursuivre toute atteinte à ses droits de propriété intellectuelle devant les juridictions civiles ou pénales. Présentation Après le grand débat sur « la philosophie africaine » des années 1960-1970, il était nécessaire de faire le point sur les thématiques et les enjeux qui mobilisent les philosophes africains en ce début de XXIème siècle. Et ce d’autant plus que les enseignements en philosophie dite Africana se sont considérablement développés, dans les universités américaines principalement. Séverine Kodjo-Grandvaux, qui connaît autant les études francophones que la riche production anglophone dans ce domaine, nous fait comprendre, à travers Philosophies africaines que la philosophie n’est pas enfermement dans la culture ou la langue, mais rencontre et traduction. Table des matières Préface (Souleymane Bachir Diagne) Effets de miroir I. Philosophie et identité africaines L’invention de l’ethnophilosophie Construire une identité africaine Élasticité de la philosophie II. De la compréhension raciale et ethnique de la philosophie africaine De l’utilisation de la « race » et de l’ethnie en philosophie La philosophie africaine comme volonté de déconstruction De l’universalité de la philosophie et en philosophie III. Déplacement de la notion de philosophie africaine Repenser les notions d’héritage et de tradition philosophique … pour penser la philosophie africaine comme mouvement et lieu de rencontre IV. La philosophie africaine comme praxis : penser le vivre- ensemble Lectures africaines du politique Ré-insérer l’individu dans la société et l’homme dans le monde Pour une philosophie nomade Bibliographie > V Préface Souleymane Bachir Diagne Columbia University, New York oici un livre témoin. Ce dont il témoigne en premier lieu c’est de ce fait qu’aujourd’hui le « philosopher en Afrique » ou plutôt à partir de l’Afrique est un champ en expansion. On n’en jugera pas seulement par les publications qui le manifestent mais également par les types d’ouvrages dits de référence qui en dessinent les contours. Ainsi le Ghanéen Kwasi Wiredu a-t-il réuni il y a quelques années toute une équipe de philosophes africains, dont une majorité d’enseignants dans des universités américaines, autour d’un volume faisant le point sur différentes thématiques, orientations, problématiques, du philosopher en Afrique mais aussi sur sa géographie et son histoire : A Companion to African Philosophy publié en 2004 par Blackwell est le titre de ce volume. On citera également « L’Encyclopédie de la pensée africaine », The Oxford Encyclopedia of African Thought publiée en 2010 sous la direction des Nigérians Abiola Irele et Biodun Jeyifo par Oxford University Press. Sans compter une multiplicité d’anthologies parmi lesquelles il faut sans doute signaler, pour son originalité, celle à paraître sous peu aux éditions Suny (State University of New York), sous la direction de Chike Jeffers, et intitulée Listening to Ourselves. A Multilingual Anthology of African Philosophy. Il s’agit d’un volume multilingue dans lequel sept philosophes africains proposent des réflexions dans les langues africaines qu’ils parlent avec en vis-à-vis une traduction en anglais, systématiquement assurée par un autre que l’auteur lui-même. Séverine Kodjo-Grandvaux a écrit Philosophies africaines en tenant en compte de l’importante littérature en anglais dans le domaine. Son livre témoigne qu’il est en effet impératif, aujourd’hui, de réunifier dans la réflexion les littératures séparées par les frontières linguistiques héritées de la colonisation, celle entre l’Afrique francophone et l’Afrique anglophone en particulier. En second lieu et surtout, ce livre témoigne de ce qu’après la controverse de la « philosophie africaine » au singulier, il faut adapter aujourd’hui le discours à la réalité en mouvement des philosophies africaines, au pluriel. La critique de « la philosophie africaine » est celle d’une philosophie ethnique où souvent l’ethnie se retrouve, comme par glissement, enflée aux dimensions de l’ensemble du continent africain. Ainsi passe-t-on facilement du Bantu ou de l’Akan aux Africains en général. Il y a des philosophies africaines, nous dit Séverine Kodjo-Grandvaux, et ce n’est pas par la multiplication de philosophies nationales ou ethniques, mais parce que la philosophie africaine aujourd’hui vit de se « kaléidoscoper » en « des effets de miroir inépuisables ». Au cœur de sa lecture du philosopher en Afrique se trouvent donc les notions du multiple, de la rencontre, du composé, de la profusion, en un mot de ce concept qui est au centre de la réflexion du philosophe camerounais Jean- Godefroy Bidima, très présent dans ce livre : la traversée. La profusion ou la multiplicité est avant tout celle des langues et s’il y a un point nodal sur lequel les philosophes africains attirent et maintiennent l’attention et la réflexion c’est ce fait que la philosophie parle toutes les langues et non pas seulement le grec ou, à la rigueur, les langues européennes, celles où le verbe « être » joue le rôle grammatical et philosophique qu’on lui connaît depuis au moins Aristote. De la langue, Esope a dit qu’elle est la meilleure et la pire des choses. En matière de philosophie également la question de la langue peut mener au pire comme au meilleur. Le pire est quand la langue est invoquée pour conforter l’idée d’une philosophie ethnique ou, comme écrit souvent Séverine Kodjo-Grandvaux, « nationalitaire ». On aplatit ainsi les catégories de la pensée sur celles de la langue, faisant ainsi de chaque idiome une insularité philosophico-linguistique. Le meilleur, en revanche, advient lorsque l’on s’installe d’emblée dans la multiplicité même des langues et que l’on pense leur rencontre dans la traduction. « Faire du philosophe un traducteur », écrit Séverine Kodjo-Grandvaux parlant d’un aspect essentiel du travail de Kwasi Wiredu. C’est là une expression heureuse qui dit bien, en effet, ce dont il s’agit dans Philosophies africaines : tester dans une démarche de « trans-acculturation » les concepts de la philosophie, examiner ce qu’il advient d’eux dans les déterritorialisations et reterritorialisations qu’ils connaissent lorsqu’ils sont employés à penser hors les langues et situations où ils se sont d’abord rencontrés. De ce meilleur comme de ce pire Kwasi Wiredu offre l’image contrastée : à la fois celle du philosophe qui insiste sur la différence de la langue et qui conduit alors vers l’enfermement dans l’ethnique, et celle du philosophe qui regarde la langue depuis la traduction, depuis la rencontre et l’ouverture à d’autres manières de dire. C’est parce que son œuvre est au croisement de ces deux manières de penser le « philosopher en langues », comme dit Barbara Cassin, que le penseur ghanéen est littéralement au centre de la réflexion de Séverine Kodjo- Grandvaux. On me permettra, pour finir, d’ajouter que ce livre témoigne aussi de ce que veut être la collection nouvelle où il paraît et qu’il inaugure. « La philosophie en toutes lettres » que j’ai l’honneur de diriger est en effet le titre d’une collection consacrée par la « maison » Présence Africaine à la pensée philosophique, dans sa diversité. L’épine dorsale en sera justement ce qui est désigné ici sous l’appellation « les philosophies africaines ». Et, encore une fois, Séverine Kodjo-Grandvaux nous le précise : cela veut dire multiplicité et kaléidoscope. I Effets de miroir maginons qu’un philosophe africain publie un ouvrage de philosophie dans lequel il avoue son ignorance totale de la philosophie occidentale mais se propose, néanmoins, de partir en quête de celle-ci, de la rechercher. Partant du postulat que la raison est ce qui caractérise l’humanité, il émettrait l’hypothèse qu’il existe en Occident une pensée sur l’homme, la société, la nature, le cosmos, la sagesse qui s’apparente à la philosophie. Ce travail qui tenterait de dégager les principaux textes philosophiques occidentaux et d’en comprendre les conditions de possibilité, surprendrait le lecteur occidental tant il doute que l’on puisse philosopher sans connaître la pensée telle qu’elle s’est développée en Occident. C’est-à-dire sans que l’on ait plus ou moins connaissance des textes de Platon, Descartes, Kant, Locke, Hobbes, Hegel… Si l’hypothèse d’un tel philosophe africain est peu réaliste, il semble en revanche qu’elle puisse être appliquée à l’inverse. En effet, combien de philosophes occidentaux appréhendent la philosophie africaine comme un objet d’étude, comme un champ du savoir philosophique à méditer pour développer et perfectionner leur propre réflexion ? Peu le font ; certains, même, se demandent ce qu’est la philosophie africaine tant ils n’en ont jamais entendu parler. Dès lors qu’un philosophe occidental pense la philosophie africaine, nombre de questions apparaissent, la première concernant celle de sa définition et de sa compréhension. Qu’est-ce qu’une philosophie qui se dit africaine ? Quelle est la signification de cette épithète « africain » ? En quel sens peut-on dire d’une pensée qu’elle est africaine ? Mais, à bien y regarder, cette question dépasse largement celle de la philosophie africaine et s’applique à toute qualification uploads/Philosophie/ epub.pdf
Documents similaires










-
37
-
0
-
0
Licence et utilisation
Gratuit pour un usage personnel Attribution requise- Détails
- Publié le Sep 27, 2022
- Catégorie Philosophy / Philo...
- Langue French
- Taille du fichier 1.8561MB