l'idéologie arabe contemporaine DANS « LES TEXTES A L'APPUI » SÉRIE PHILOSOPHIQ

l'idéologie arabe contemporaine DANS « LES TEXTES A L'APPUI » SÉRIE PHILOSOPHIQUE Jean Jaurès, Les origines du socialisme allemand. Paul Nizan, Les chiens de garde (S0 édition). Paul Nizan, Les matérialistes de tantiquité. A.L. Morton, Vutopie anglaise. Georg Lukacs, Thomas Mann. SÉRIE d'h is t o ir e CLASSIQUE Jean-Pierre Vemant, Mythe et pensée chez les Grecs (2s édition). Laurette Séj ourné, La pensée des anciens Mexicains. Yves Lacoste, Ihn Khaldoun. Jean-Paul Brisson, Virgile, son temps et le nôtre. Marcel Detienne, Les maîtres de vérité dans la Grèce archaïque. Sé r ie d’h is t o ir e c o n t e m p o r a in e Thomas Oppermann, Le problème algérien. Daniel Guérin, Sur le fascisme I : La peste brune. Daniel Guérin, Sur le fascisme II : Fascisme et grand capital. SÉRIE SOCIOLOGIQUE Jomo Kenyatta, Au pied du Mont Kenya. Vittorio Lantemari, Les mouvements religieux des peuples opprimés. C. W right Mills, Les cols blancs. C. W right Mills, Vimagination sociologique. SÉRIE ÉCONOMIQUE Réforme agraire au Maghreb (épuisé). Industrialisation au Maghreb (épuisé). Maurice D obb, Croissance économique et sous-dévéloppe- ment. Ernest Mandel, La formation de la pensée économique de Karl Marx. SÉRIE PÉDAGOGIQUE Aïda Vasquez et Fernand Oury, Vers une pédagogie insti­ tutionnelle. Abdou Moumouni, Véducation en Afrique (2e édition). abdallah laroui 1 idéologie arabe contemporaine essai critique préface de maxime rodim on FRANÇOIS MASPERO 1 , place paul-painleré, Y* PARIS 1967 © 1967, Librairie François Maspero. Tous droits de reproduction, de traduction, d’adaptation, strictement réservés pour tous les pays. Préface Voici un livre remarquable par sa lucidité et son honnêteté. On détonnera un jour qu'Ü riait pas été écrit plus tôt, tant la situation actuelle semble Xappeler. Mais, comme disait je ne sais plus quel grand stratège ou quel grand joueur déchecs, quand une bataiUe est gagnée, il faut encore la gagner. L'étonnant maintenant, c est plutôt qu'il ait été écrit, tant il fallait de qua­ lités conjointes pour être digne du rôle offert par révolution historique des idées. Abdallah Laroui s'en montre digne. Con­ naissant aussi bien Thistoire idéologique du monde arabe que celle de ÎEurope, au courant des méthodes danalyses élaborées par le monde moderne, sachant les apprécier sans le dénigre­ ment incompréhensif de ceux qui veulent s'épargner la peine de les étudier et sans la soumission servile de ceux qui ne savent pas les dominer, ouvert et disponible à tout ce qui mérite Xatten­ tion dun homme intelligent et libre, il a soumis les problèmes les plus importants de Tunivers auquel Û appartient à Xanalyse la plus raisonnable qui soit. Analyse animée par une passion, mais qui sait que la passion doit être mise entre parenthèses pour que Xanalyse soit valable. Que lui reprochent sa froideur apparente ceux qui ne savent pas qu'une froideur voulue est le degré extrême dune passion acharnée à atteindre son but l Pour moi qui le connais et qui souffre si souvent de lire tant de pré­ sentations de ces problèmes, faussées par Xignorance, la mau- foi, Xincompétence ou la présomption, je n'ai qu'une crainte. C'est de ne pas être digne de la mission dangereuse dont son amitié et celle de François Maspero m'ont chargé : celle de présenter ce livre exceptionnel. VII Il ne serait pas humain que cette crainte ne s*accompagne dune certaine fierté. Mais cette fierté, eüe doit être partagée par tout cet « Occident critique > auquel Laroui fait appel pour transcender les dilemmes de la conscience arabe actuelle. Et aussi, bien sûr, par ce monde arabe lui-même dont il émane, malgré tout ce qu'Û doit à TOccident, ce monde dont ü sait, mieux que personne, expliquer les difficultés qu'il éprouve à se penser lui-même correctement. Que des hommes tels que lui y surgissent, qu'une pensée comme la sienne s'y exprime, cela est un signe. Comme le rameau que rapportait la colombe de I Arche, il annonce qu'un déluge commence à rétrograder ; de nouvelles terres se dégagent. Il mérite la récompense que le vieil Orient sémitique promettait au messager de bonnes nou­ velles. Et la première serait dêtre lu et compris. Pourquoi ce livre n'a-t-il pas été écrit auparavant ? Pourquoi ne pouvait-il être écrit avant un période qui a commencé il y a bien peu de temps ? Parce qu'une situation devait être dépassée, une situation où Iardeur de la lutte empêchait tout recul. La thèse du marxisme idéologique, selon laquelle seule la lutte éclaire, est vraie et fausse à la fois. Il faut participer, de près ou de loin, à la lutte pour comprendre les véritables enjeux de la situation. Mais il faut reconquérir, dune façon ou dune autre, une certaine distance pour se dégager des illusions idéologiques et pour exprimer, sans crainte des conséquences tactiques, une vision de la lutte elle-même qui ne se réduise pas aux schémas simplifiés du Manuel du combattant ou de celui du gradé. Pour ne pas prendre un exemple trop proche, le militantisme anti­ religieux des philosophes français du XVIII* siècle les empêchait délaborer une théorie tant soit peu valable du phénomène reli­ gieux, alors que les Allemands, sensibles au problème, partie prenante dune certaine façon au conflit, mais moins directe­ ment engagés, se rapprochaient bien plus dune compréhension profonde. Il faut pouvoir apprécier ce qu'il y a de positif dans T ennemi, il faut pouvoir critiquer ce qu'il y a de négatif en notre position, il faut pouvoir dire tout cela, non pas seulement dans le secret de sa conscience sans oser pousser trop loin ses réflexions, vite repris et dominé par les schémas du combat, mais à haute voix, expressément et librement, sans craindre le blas­ phème. Mais que se taise celui qui n'a jamais cru à la réalité de la lutte, à son sérieux, à sa valeur. Sur le calme rivage doù il a regardé la tem pête comme un triste accident des vents et des flots ameutés, il n'a droit de parler que de l'éternité. VIII préface La période qui 8 * achève apparaUra de loin comme naive ainsi que nous semblent naïfs les flots de larmes de Rousseau, les tourments des hommes sensibles de son âge, les poignards agités à la tribune de la Convention en invoquant les mânes de Brutus et de Démosthène. Comment a-t-on pu croire (ou même faire semblant de croire) que les problèmes se réduisaient à la lutte de la vertu contre la corruption ? Mais de naïvetés plus récentes, nous sommes encore loin dètre sortis. La contemplation du monde non occidental par f Occident restera encore longtemps dominée par des mythes simplistes qui ont bien des avantages sur tant de plans différents. Il faudra bien plus qu'un livre lucide pour les détruire. Comment peut-on être arabe? ou nègre-? ou chinois? Sous des masques de subtilité ou de profondeur, beaucoup en sont toujours là. D'un côté, la peur, la haine, le sentiment de supé­ riorité aboutissaient au dénigrement et à T affirmation dune altérité radicale ou s'accumulaient les traits de caractère les plus répréhensibles. Ou bien, dans un second stade, au contraire, certains exaltaient cette altérité reconstruite, vouaient f indigène à une authenticité solitaire qu'aucun point de contact ne liait à la commune humanité, défendaient ardemment leur homunculus contre les analyses froides, les dissections insensibles venues de f étranger. D e foutre côté, la fierté blessée maniait les armes dangereuses (pour soi-même) dèTapologétique, débouchant sur une affirmation dauthenticité non moins radicale que mitigeait seulement f appréhension inquiète de fournir des munitions à f adversaire. Le pluralisme radical auquel on aboutissait dun côté comme de foutre avait maintes séductions : un savoureux relent de concret enfin atteint rehaussait et justifiait la millé­ naire attirance de f exotisme le plus écuîé, on dépassait la vision fallacieuse de funiversalisme abstrait nivelant f humanité dans une mondiale platitude. Quel plaisir pour les uns de montrer en liberté un bel et incomparable animal, pour les autres de se targuer dune essence sans commune mesure avec le reste des humains ! Mais Pascal, encore une fois, a raison. « Ainsi se vont les opi­ nions succédant du pour au contre, selon qu'on a de lumière. » A un niveau plus haut, on retrouve, transformée et dépassée, et pour dautres raisons, « par la pensée de derrière », la représen­ tation imparfaite que des arguments, probants à leur plan, avaient amené à critiquer et à abandonner. L'universalisme abstrait avait tort de négliger la variété des mondes culturels IX particuliers, la force de leur conditionnement, T attachement quüs peuvent susciter. Mais le pluralisme qui lui succéda ria pas moins tort de murer les groupes humains dans dirréduc­ tibles spécificités, de les isoler par dinfranchissables fossés, A un niveau de compréhension plus avancé, on découvre que tout groupe est spécifique, mais qu*aucun riest exceptionnel. Les caractéristiques de chaque culture existent, éUes sont là, fermes et dures, actives et puissantes et nul ne les peut négliger sans dommage. Mais elles riêchappent nullement à F analyse, elles ne sont étem elles ni dans le passé ni dans t avenir, elles ne transcendent pas les lois uploads/Philosophie/ abdallah-laroui-l-x27-ideologie-arabe-contemporaine-maspero-1967.pdf

  • 33
  • 0
  • 0
Afficher les détails des licences
Licence et utilisation
Gratuit pour un usage personnel Attribution requise
Partager