1 L’histoire de la pensée sur la langue La linguistique moderne s’est élaborée

1 L’histoire de la pensée sur la langue La linguistique moderne s’est élaborée grâce à une réflexion critique sur des notions qu’elle a héritées de deux millénaires d’histoire. L’étude du langage est indissociable des sociétés dans lesquelles elle s’élabore car elle est toujours liée à une philosophie, à un certain type de relation au texte (littéraire, politique, religieux…). On retient 3 grands moments dans l’histoire des théories du langage en Occident : •I-la grammaire antique (grecque) •II -la grammaire comparée (XIXème siècle) •III -la linguistique structurale (XXème siècle) I - La grammaire antique : •Dans notre culture, la réflexion sur le langage est solidaire du mode de pensée défini dans la civilisation grecque classique. 1- la rhétorique : les Grecs analysent pour la première fois le langage comme une organisation spécifique. La constitution de la démocratie grecque a fait passer au premier plan le souci de la persuasion politique et rend nécessaire l’apparition des techniciens de la parole. Dans leur volonté de fournir à leurs élèves les moyens de maîtriser le verbe, ils ont été conduits à envisager le langage comme un instrument qu’il était possible d’analyser et de codifier. Exemple : au 3e siècle avant JC, les Stoïciens étudient la relation des sons et des lettres et ils introduisent la différence entre signifié et signifiant. Ils distinguent déjà 5 catégories grammaticales et précisent les définitions. Onoma : noms / substantifs (distinction des noms communs et des noms propres) rhéma, le prédicat, syndesmoï, le lien entre onoma et rhéma, arthron représente les articles et les pronoms enfin métokhé représente la catégorie des adverbes 2 2) Aristote contre les sophistes : Aristote (384-322 avant J-C) a exercé une influence considérable sur toute la culture occidentale. Aristote est considéré comme l'inventeur de la logique : il a élaboré une théorie du jugement, a systématisé l'usage des syllogismes et a décrit les rouages des sophismes. Un sophiste est un orateur et un professeur d'éloquence de la Grèce antique, dont la culture et la maîtrise du discours en font un personnage prestigieux. Aristote a combattu les sophistes qui allaient jusqu’à déformer la vérité. N'ayant en vue que la persuasion d'un auditoire, que ce soit dans les assemblées politiques ou lors des procès en justice, les sophistes développent des raisonnements dont le but est uniquement l'efficacité persuasive, et non la vérité, et qui à ce titre contiennent souvent des vices logiques, bien qu'ils paraissent à première vue cohérents : des « sophismes ». Les sophistes ne s’embarrassaient pas de considérations quant à l'éthique, à la justice ou à la vérité Remarque : en logique aristotélicienne, le syllogisme est un raisonnement logique à deux propositions (également appelées prémisses) conduisant à une conclusion qu'Aristote a été le premier à formaliser. Les deux prémisses (dites « majeure » et « mineure ») sont des propositions données et supposées vraies, le syllogisme permettant de valider la véracité formelle de la conclusion. Avant de chercher à comprendre le fonctionnement des syllogismes, il faut distinguer Validité et Vérité : dire d'un syllogisme qu'il est valide, c'est affirmer que sa forme est valide. Un syllogisme est concluant quand il est valide et toutes ses prémisses sont vraies. - Les hommes sont mortels, Socrate est un homme donc Socrate est mortel ET : Tout ce qui est rare est cher, Un cheval bon marché est rare, Donc un cheval bon marché est cher. Ce syllogisme est formellement valide mais n'est, en revanche, pas concluant. 3 3- Langage, langue et logos : parallèlement à cette approche qui voit le langage comme un moyen d’agir sur autrui, se développe une réflexion philosophique qui tente d’articuler langage et vérité (le logos = le discours mais aussi la rationalité qui préside à toute argumentation). Il s’agit de mettre en relation la structure du langage et celle des propositions par lesquelles l’esprit énonce des jugements vrais ou faux (comparez avec la pragmatique) Remarque : le terme pragmatisme désigne une école philosophique d'origine américaine, dont le fondateur est Charles Sanders Peirce. le pragmatisme représente d'abord une méthode de pensée et d'appréhension des idées . L'application la plus célèbre de la méthode pragmatiste concerne le problème de la vérité qui à dire que le vrai absolument objectif n'existe pas car on ne peut séparer une idée de ses conditions humaines de production. La vérité est nécessairement choisie en fonction d'intérêts subjectifs. 4- L’héritage alexandrin a) La naissance de l’esprit grammatical : le mot « grammaire » est issu du terme « gramma » = « lettre ». La grammaire est d’abord une étude pratique des lettres. Les grammairiens d’Alexandrie (Egypte vers moins 300 avant J-C) vont se pencher sur les éléments qui composent une langue. La première grammaire systématique de la culture occidentale apparaît Denys de Thrace (170-90 avant J-C). Elle distingue les parties du discours (article, nom, verbe, pronom, adverbe, préposition, conjonction …) encore valides aujourd’hui. Exemple de catégorisation des discours : le nom et le verbe, l’article, le pronom, la préposition, la conjonction… b) La philologie. Cet intérêt pour la langue est subordonné à un intérêt philologique qui est la fondation (moins 288) de la bibliothèque d’Alexandrie Cette bibliothèque nécessite un gros travail de classement de manuscrits et de commentaires de certains textes (style, lexique, syntaxe) 4 Remarque : la philologie c’est rendre lisibles les textes littéraires prestigieux (les oeuvres d’Homère surtout) dont la langue était éloignée du grec pratiqué au IIIème et IIème siècle avant J-C. C’est une sorte d’exégèse de la langue. La grammaire restera, pour cette raison, longtemps associée à la lecture détaillée des textes et à la copie de ces textes. 3-La querelle sur la langue : les Grecs nous ont aussi légué deux grands débats de philosophie du langage qui ont traversé toute la culture occidentale : l’opposition des analogistes et des anomalistes. Les anomalistes ne voient dans la langue qu’un agglomérat d’usages arbitraires et les analogistes pensent que la structure de la langue est régulière et peut donc faire l’objet d’une science.D’où deux conceptions différentes en ce qui concerne les mots : Les anomalistes ne voient dans la langue qu’un ensemble d’éléments juxtaposés sans logique interne. Ils s’intéressent aux exceptions, aux formes particulières d’une langue, aux curiosités. Les analogistes, tel Aristote, pensent que le rapport entre les signes linguistiques et le monde, l’objet qu’ils désignent, leur référent est conventionnel et immotivé et que la structure de la langue est régulière et peut donc faire l’objet d’une science. 5- Les grammaires latines : les Latins se sont inspirés des grammaires grecques car leur langue était assez proche de celle du grec, en effet, le latin comme le grec est une langue flexionnelle, à déclinaisons. Les grammaires seront avant tout des grammaires morphologiques c’est-à-dire qui s’intéressent aux formes des mots, à leur variabilité (taxinomies) Varron : « De lingua latina » (1er siècle avant J-C) 5- La grammaire médiévale 5-1- Quelques faits importants : 476 (Chute de l’empire romain d’Occident et de Rome), 496 (Clovis est baptisé roi des Francs), 800 (couronnement de Charlemagne), 987 (Hugues Capet, fondateur de la dynastie des Capétiens). 5 5-2-Naissance de la langue romane • 835 (le concile de Tours), 842 (Les serments de Strasbourg et la naissance de l’Europe), 1096 à 1270 (les Croisades) et à partir de 1200 : les premières universités (Paris, Montpellier) 5-3- Le règne du latin : la langue officielle des écrivains, des philosophes, des textes administratifs, des cours universitaires est le latin. Cette langue domine l’ensemble de la vie culturelle. Les grammairiens travaillent tous sur des grammaires latines. Remarque 1 Même si la grammaire n’étudie que la langue latine, seule langue véritablement grammaticale selon les grammairiens du Moyen-Age qui pensent que hormis le latin, les langues sont toutes considérées comme des dialectes grossiers, impossibles à décrire, l’étude de la langue commence à se détacher de la philosophie (XIIème et XIIIème siècles) pour devenir autonome ce qui facilitera l’émergence de la langue française. Remarque 2 •Dante (1265-1321) a été le premier à défendre une langue vulgaire contre le latin. La véritable noblesse du langage se trouve selon lui, non dans un modèle grammatical, mais dans la langue que l’on a apprise sans règles et par imitation. Il a rédigé : « La divine comédie » 6 Remarque 3 : les questions que l’on se pose au Moyen-Age : quelle est la langue primitive, l’origine des langues ? •Les textes qui servent à y réfléchir : l’Ancien Testament : -La langue est donnée par Dieu à Adam et Eve : « Les animaux vinrent en la présence d’Adam, il les vit et donna à chacun son nom véritable ». C’est la « lingua adamica », langue originelle universelle, composante essentielle du dogme de l’unicité de la race humaine. -le Déluge : où Noé a-t-il bien pu construire son Arche ? Disparition de l’humanité. Et donc des langues. -la Tour de Babel et la malédiction qui a suivi : la confusion des langues qui élucide définitivement le mystère de la diversité des langues et donne naissance aux recherches utopiques sur la langue des origines. Le Nouveau uploads/Philosophie/ 6-l-histoire-de-la-pensee-sur-la-langue.pdf

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