1 Université populaire de Caen Basse-Normandie – Année 2013-2014 Contre-histoir
1 Université populaire de Caen Basse-Normandie – Année 2013-2014 Contre-histoire de la philosophie par Michel Onfray – Conférence N° 250 # 17 : Lundi 7 avril 2014 « UNE PHILOSOPHIE DU MOUSTIQUE » 1./ CONTRE L’ONTOLOGIE D’HEIDEGGER a) Formé à la phénoménologie allemande • Connaît les tics • Sait le rapport au réel médiatisé par le concept qui éloigne du monde. • Commentaire de commentaire • Contre la philosophie universitaire. b) Sur la pseudo-concrétude de la philosophie de Heidegger • Dans Philosophy and phenomenology research, mars 1948 • Critique l’ontologie de Heidegger • Mais pas son engagement politique. c) Le Dasein : • Situé hors la nature • Hors un au-delà surnaturel • Cet acosmisme permet un engagement nazi. d) Le concret de Heidegger est un pseudo-concret • Heidegger instaure la primauté de l’Etre sur l’étant – sur les étants. e) Dans cette ontologie l’homme disparaît : • Comme sujet de l’histoire • Comme humain • Comme individu concret • N’est plus qu’un dasein dont l’activité consiste à être-pour-la-mort. f) Ceci génère non pas l’oubli de l’Etre • Mais l’oubli de l’histoire. • L’oubli de la liberté politique, • La négation de l’Autre. g) Tout ceci contribue à préparer un terrain • Qui n’est pas incompatible avec le nazisme. h) Heidegger ne philosophe pas à partir de problèmes académiques et universitaires • Il part des « terreurs philosophiques les plus élémentaires » (21). • Passe à côté du concret. • Ce qui prépare la catastrophe éthique, morale, spirituelle métaphysique, ontologique. 2./ UN STYLE A PART a) Günther Anders revendique une position à part dans la philosophie • Pas dans les institutions, • Pas dans les bibliothèques ou les amphithéâtres. • Veut pouvoir faire « une philosophie du moustique » (27). • Une philosophie de tout ce qu’il y a de plus concret. b) L’obsolescence de l’homme : • Analyse : • Le rôle néfaste de la télévision et de la radio. 2 • Construisent un faux monde qui devient plus vrai que le vrai. • Le rôle des images dans la formation de l’homme aliéné : « l’iconomanie » (17). • L’importance du cinéma dans la fabrication de ce même monde • La construction des stars • Le maquillage comme désir de devenir une chose • Le système pervers des objets • La négation de la mort dans les funérariums • Le jazz comme musique de l’abrutissement • Le symptôme de la disparition du visage • La menace de la bombe atomique • La destruction du monde et de la nature par la technique • L’importance des machines • Et autres sujets délaissés par les philosophes institutionnels. c) N’écrit pas des essais littéraires ou des analyses philosophiques universitaires. • Mais un genre nouveau : « Quelque chose comme un hybride de métaphysique et de journalisme : une façon de philosopher qui prend pour objet la situation actuelle, c’est-à-dire des fragments caractéristiques de notre monde actuel » (22). d) Penser le réel, le concret véritable. e) Il faut donc un style nouveau : • Juxtaposer passages factuels et analyses théoriques, • Considérations anecdotiques et analyses philosophiques pointues, • Des exemples empruntés à la vie triviale. f) Met en scène un contradicteur puriste (heideggérien…) qui lui dirait : • On ne peut philosopher sur les problèmes d’actualité • On ne peut philosopher que sur l’ontologique et non sur l’ontique • On ne peut partir du journal pour penser • On ne peut partir du factuel anecdotique pour parvenir au philosophique – digression • On ne peut accéder au général quand on part du particulier • On ne saurait partir de l’empirique – ainsi la télévision. g) Ce contradicteur n’est pas seul : • Car « d’autres ont formulé la même mise en garde pendant deux mille cinq cents ans. Car en quoi a consisté la passion de la philosophie, celle qui a animé les philosophes les plus divers, si ce n’est à choisir de se détourner avec grandiloquence du contingent, du « mundus sensibilis », pour se tourner vers l’« essentiel », le « mundus intelligibilis » ? » (25). • C’est la signature de la philosophie occidentale. h) Or la philosophie n’est pas mysticisme, idéalisme, • Contemplation fixe des principes • Mais saisie de quelque chose de concret, de réel, de véritable, d’immanent. i) Le philosophe n’est pas un être à part • Il vit comme « l’honnête voisin de ses voisins de palier » (26) • Vivant dans une multiplicité de singularités. j) Les objets de prédilection du philosophe ? • Le spécifique, le singulier, l’occasionnel, le contingent, l’empirique • « Pourquoi avons-nous, par exemple, le droit, dans le cadre de l’anthropologie philosophique officiellement admise, de philosopher sur l’homme (qui n’est finalement lui aussi qu’une espèce empirique), alors que, si nous écrivions une 3 « philosophie du moustique » ou une « philosophie de l’enfant », nous serions immédiatement soupçonnés de manquer de sérieux ? A cela il n’y a pas de réponse philosophique » (28). k) Les philosophes institutionnels se réclament de la tradition pour empêcher ce genre de pensée. • Ne se remettent jamais en cause • Or la vocation de la philosophie, c’est de remettre en cause les idées reçues. l) « Plus ils sont sûrs d’eux sous ce rapport, plus on a raison de se méfier d’eux en tant que philosophes » (28). • Nomme les philosophes qui ont fait reculer les lignes • Et que les philosophes officiels ont méprisés ou négligés : • Kierkegaard, Nietzsche, Feuerbach, Darwin, Marx, Freud. • Autant de philosophes qui ne se sont pas dits philosophes • Insoucieux des interdits, des tabous, des limites institutionnelles quand ils ont écrit. m) « Le lecteur comprendra qu’un amoureux de la vérité, qui prend modèle sur ces grands esprits exempts de préjugés, marche alors droit vers le singulier, laissant en suspens la question de savoir si, et jusqu’à quel point, ce qu’il fait là peut encore s’appeler philosophie » (28). • Peu importe que la corporation adoube • L’important est de faire avancer la pensée. n) Quand Günther Anders pense la télévision • Ne pense pas pour les professionnels de la philosophie • Mais pour ceux qui regardent la télévision • Afin qu’ils comprennent la toxicité du média • Et vivent conscients de ce danger. 3./ UNE METHODE • Revendique une méthode à part : l’exagération • A laquelle (presque 25 ans avant Jonas) il donne « un sens heuristique » (29). • Les phénomènes restent imperceptibles • Tant qu’on ne les a pas grossis pour mieux les observer. • Soit on exagère et l’on peut connaître • Soit on n’exagère pas et l’on ne connaît pas. 4./ « LA HONTE PROMETHEENNE » a) Il y a « honte prométhéenne » quand les hommes « constatent l’humiliante qualité des choses qu’il a lui-même fabriquées » (37). b) L’artisan pouvait aimer son travail - qui l’avait conduit du morceau de bois au sabot. • L’ouvrier ne le peut car il n’agit que sur un moment de la production • Talent, savoir-faire, compétence, investissement comptent pour rien. c) L’ouvrier a honte de ce qu’il fait • Et honte d’avoir honte. d) Pour dissimuler cette double honte • Affecte l’impudence ou l’indifférence • Il cherche à se tromper lui-même. e) Tout autour de lui a été produit, fabriqué, artificialisé • L’homme a honte de ne pas être lui aussi produit, fabriqué, etc • Il veut alors passer dans le camp des instruments • La honte de sa honte lui fait désirer d’être un objet • Il travaille activement à sa réification – « auto-réification » (46). f) Exemple du maquillage : 4 • Effacement de la nature au profit de l’artifice • La femme ressemble à une chose • Les ongles ne sont plus nus mais peints • Transformés en instruments que les mains manipuleraient • La finition froide du vernis : reniement du passé des ongles • Idem avec cheveux, jambes, visage, corps tout entier • Tout doit être travaillé pour ne pas apparaître nu • Ce qui générerait la honte • « Ce traitement du corps cherche à lui donner la beauté des choses fabriquées » (47). g) A l’aide de « l’ingénierie humaine » (54) l’homme veut en finir avec son corps borné. • Et le transformer en machine, sa divinité. h) Pousse son corps aux points limites, de rupture • Veut l’hybride et l’artificiel • Se soumet à une série incroyable d’expériences pour reculer ses limites • Recycle la haine puritaine des corps • Se transforme en chose, en objet, en gadget • Se soumet à l’accélération, à la dépressurisation, au froid, à la force centrifuge • Si techniquement nous en sommes capables, alors il faut le faire ! i) Ces expériences sont des rites initiatiques • Entrée dans la communauté des adultes • Nous apprenons ce que nous devenons : • Un humain qui veut se réaliser dans le dépassement de l’humain. j) L’idéal ? • Le robot des dessins animés qui avance de manière saccadée, mécanique. • L’homme se transforme uploads/Philosophie/ 21-une-philosophie-du-moustique.pdf
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- Publié le Aoû 21, 2022
- Catégorie Philosophy / Philo...
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