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Sommaire l Page 2 : Les mécanismes de la lecture l Page 10 : Construire les compétences littéraires l Page 19 : Vers une approche transactionnelle et interactive de la lecture l Page 21 : Bibliographie 1/28 Dossier de veille de l’IFÉ • n° 101 • Mai 2015 Lire pour apprendre, lire pour comprendre n° 101 Mai 2015 Dossier de veille de l’IFÉ Vivre en société demande à ce que chacun possède un niveau de littératie le rendant apte à s’épanouir, réfléchir et travailler. Un rapport de l’OCDE définit la littératie comme l’aptitude à comprendre et à utiliser l’information écrite dans la vie courante, à la maison, au travail et dans la collectivité en vue d’atteindre des buts personnels et d’étendre ses connaissances et ses capa­ cités (OCDE, 2000). Pour Nonnon, la litté­ ratie c’est surtout la capacité à construire un rapport au monde et aux savoirs à par­ tir de conduites déductives, cognitives, sociales qui forment un outil « pour inter­ préter le monde, élargir et structurer l’expé­ rience, s’approprier les savoirs ». La littéra­ tie ne se définit plus seulement comme une simple maîtrise de compétences de lecture et d’écriture, ni comme un « ensemble de dispositions lettrées » associé à la seule approche littéraire (Nonnon, 2012) l. L’école joue un rôle essentiel dans l’acqui­ sition des compétences en littératie et de­ puis les documents d’accompagnement du programme de 1992, une attention toute particulière est accordée à l’apprentissage de la compréhension de textes. La maîtrise de la lecture, primordiale pour l’acquisition des connaissances tout au long de la vie, passe par la compréhension de tous types de messages écrits, nécessaire à l’adapta­ tion sociale et professionnelle des jeunes comme des adultes. Ce Dossier de veille souhaite faire le point sur l’activité de lecture, au-delà des appren­ tissages fondamentaux abordés au cycle 1. Cette activité est selon les cas désignée sous les termes de lecture experte, lecture complexe ou lecture littéraire. Nous nous interrogerons sur ce que signifie la com­ préhension de textes et la notion de lecture experte qui lui est associée. Nous aborde­ rons dans un premier temps les questions portant sur les mécanismes cognitifs de la compréhension puis, dans un deuxième temps, nous parlerons de l’enseignement de la compréhension d’un point de vue didactique. Nous réfléchirons enfin sur l’importance de l’engagement du lecteur au regard des facteurs d’apprentissage et de motivation en lecture. LIRE POUR APPRENDRE, LIRE POUR COMPRENDRE Toutes les références bibliographiques dans ce Dossier sont accessibles sur notre bibliographie collaborative. Par Marie Gaussel Chargée d’étude et de recherche au service Veille et Analyses de l’Institut français de l’Éducation (IFÉ) l Dossier de veille de l’IFÉ • n° 101 • Mai 2015 Lire pour apprendre, lire pour comprendre 2/28 LES MÉCANISMES DE LA LECTURE Que veut dire savoir lire à notre époque ? Une première définition caractérise l’acte de lire comme la capacité à établir des relations entre les séquences de signes graphiques d’un texte et les signes lin­ guistiques propres à une langue natu­ relle (phonèmes, mots, marques gram­ maticales), mais c’est aussi la prise de connaissance du contenu d’un texte écrit l. Prendre connaissance, c’est com­ prendre le sens du texte dans un contexte spécifique. Apprendre à lire revient donc à apprendre à comprendre. L’APPROCHE COGNITIVISTE L’apprentissage de la lecture bénéficie de l’apport de nombreuses recherches en psycholinguistique et en psychologie co­ gnitive connues en France dès les années 1980, par les travaux de Michel Fayol no­ tamment. La capacité de lire repose sur deux processus psycholinguistiques : la reconnaissance des mots et la compré­ hension des phrases. La reconnaissance des mots est un processus cognitif qui fait correspondre des graphèmes à des pho­ nèmes alors que la compréhension est un processus qui permet de donner du sens aux phrases écrites. La psychologie cognitive de la lecture s’intéresse princi­ palement à la façon dont le lecteur passe d’une perception visuelle d’un mot à la compréhension du sens qui lui est associé, et ce très rapidement (une demi-seconde maximum). Quelles sont les opérations intermédiaires impliquées dans le proces­ sus de lecture qui permettent d’aller de la perception visuelle à son identification et sa compréhension ? On explore d’abord la nature des représentations orthogra­ phiques, phonologiques, morphologiques, sémantiques puis celle des procédures cognitives influencées par de nombreux facteurs (homophonie, position du regard, association verbale, trajectoire fréquen­ tielle). La conception de la compréhension en lecture a beaucoup évolué au cours des dernières années, en particulier ce qui concerne la hiérarchisation des habi­ letés nécessaires à ce processus. Elle est passée d’un modèle centré sur des séries de listes séquentielles d’habiletés cogni­ tives à un modèle plus entier et intégral des habiletés (Giasson, 1996). Selon la conception sérielle, chaque représenta­ tion linguistique découle du niveau pré­ cédent (l’information sera d’abord traitée orthographiquement, puis phonologique­ ment). Cette conception entraîne de nom­ breux aspects temporellement contrai­ gnants. Selon une conception dite globale ou en cascade, les différentes étapes sont distinctes mais peuvent s’effectuer en parallèle, simultanément. Ferrand et Aroya semblent privilégier une conception dite interactive, qui induit des niveaux de traitement interagissant simultanément et de manière bidirectionnelle les uns avec les autres : l’information sémantique com­ munique avec les traitements morpholo­ giques, phonologiques et orthographiques (Ferrand & Ayora, 2009). Morais, Pierre et Kolinski ont travaillé sur les conditions et caractéristiques du pro­ cessus d’apprentissage de la lecture. Leur examen de la littérature scientifique leur a permis de dégager plusieurs principes : − les représentations orthographiques et phonologiques s’organisent progressi­ vement au cours de la scolarité et sans doute au-delà ; − l’automaticité de l’activation de ces systèmes se développe en parallèle ; − l’utilisation de graphèmes s’accroît dès les premières étapes de l’apprentis­ sage, probablement dans le cadre de la procédure phonologique ; − le décodage phonologique n’est pos­ sible que si le principe alphabétique est découvert par l’enfant ; − s’entraîner à appliquer les correspon­ dances graphèmes-phonèmes a un effet positif sur l’apprentissage de la lecture ; − les mauvais lecteurs peuvent présen­ ter des déficits de capacités phono­ logiques (Morais, Pierre & Kolinski, 2003). Pour résumer, nous pensons que les ca­ pacités phonologiques l jouent un rôle crucial dans les premières étapes d’ap­ prentissage de la lecture, comme nous l’avions déjà mentionné dans notre Dos­ Voir la définition du dictionnaire CNTRL. l l La conscience phonologique est la capacité à percevoir, à découper et à manipuler les unités sonores du langage telles que la syllabe, la rime, le phonème. La prise de conscience d’unités phonologiques et l’apprentissage des correspondances entre unités orthographiques et phonologiques sont essentiels à l’acquisition de la lecture et de l’écriture (Gaussel & Reverdy, 2013). 3/28 Dossier de veille de l’IFÉ • n° 101 • Mai 2015 Lire pour apprendre, lire pour comprendre sier de veille sur l’éducation et la scola­ risation des jeunes enfants (Gaussel, 2014). La conscience phonologique et la connaissance du nom des lettres sont à cet égard reconnues comme des habile­ tés de premier plan dont la combinaison conditionne l’accès au principe alphabé­ tique (Foulin, 2007). Les représentations abstraites : un lexique mental local ou distribué ? La lecture est donc considérée comme un « talent cognitif qui consiste à traiter du langage écrit à travers l’identifica­ tion de mots » (Ferrand & Ayora, 2009). Quels sont les procédés psychologiques permettant une mise en relation entre un mot et son sens ? Les processus vi­ suels, orthographiques, phonologiques et morphologiques sont sollicités et utilisés pour la récupération d’une représentation abstraite en mémoire. L’hypothèse d’un lexique mental (Treisman, 1960), comme un ensemble de connaissances stockées en mémoire (estimé en moyenne à 60 000 mots), a été remise en question dans les années 1990 par les modèles connexion­ nistes qui estiment que le système de connaissances lexicales n’est pas isolé mais est configuré en fonction des acti­ vations entre les unités orthographiques, morphologiques et phonologiques d’un mot. Ces modèles se nourrissent des recherches sur la plasticité des circuits cérébraux. Les deux conceptions diffèrent radicalement et ne sont à ce jour pas dé­ partagées (Gaussel & Reverdy, 2013). Selon la conception théorique classique, les représentations mentales seraient lo­ cales et symboliques, c’est-à-dire classées dans des lexiques spécifiques. La théorie alternative considère que les représen­ tations mentales sont plutôt distribuées ou disséminées dans des lexiques non spécifiques : le mot est traité grâce à un ensemble de connexions. Les méthodes principales qui permettent d’étudier les mécanismes de la lecture sont divisées aujourd’hui selon quatre types d’études. La chronométrie mentale utilisée par les psycholinguistes Les mécanismes mentaux utilisés lors de la lecture ne sont pas observables direc­ tement. Les psycholinguistes se servent donc de différentes mesures de chrono­ métrie mentale comme le temps de réac­ tion (en millisecondes) et la précision. Ces techniques permettraient de refléter la ra­ pidité de traitement des processus cogni­ tifs. Les mouvements oculaires (déplace­ ment des yeux lors de la lecture, saccades au cours de la lecture pendant lesquelles l’œil serait aveugle, fixations) semblent être de bons indicateurs qui permettent d’évaluer l’empan visuel perceptif l. La neuropsychologie cognitive passant par uploads/Philosophie/ 101-mai-2015.pdf

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