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Cet article est disponible en ligne à l’adresse : http://www.cairn.info/article.php?ID_REVUE=RFAP&ID_NUMPUBLIE=RFAP_123&ID_ARTICLE=RFAP_123_0423 Le « leadership administratif » comme concept utile à la modernisation de l’administration publique par Daniel MALTAIS, Michel LECLERC et Natalie RINFRET | Ecole Nationale d'Administration | Revue française d’administration publique 2007/3 - n° 123 ISSN 0152-7401 | ISBN 978-2-9094-6006-2 | pages 423 à 441 Pour citer cet article : — Maltais D., Leclerc M. et Rinfret N., Le « leadership administratif » comme concept utile à la modernisation de l’administration publique, Revue française d’administration publique 2007/3, n° 123, p. 423-441. Distribution électronique Cairn pour Ecole Nationale d'Administration. © Ecole Nationale d'Administration. Tous droits réservés pour tous pays. 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Rinfret 2 soulignent que le développement de ce thème appliqué au secteur public a, jusqu’alors, fait l’objet de peu de recherches et d’études sérieuses. Des difficultés d’ordre épistémologique, le caractère peu visible de son exercice dans le secteur public, les pouvoirs officiels plutôt limités qu’on peut y exercer ainsi que le faible nombre de chercheurs qui se sont intéressés au sujet comptent parmi les raisons qui expliqueraient cette lacune. Ce peu d’intérêt pour le thème du leadership dans le secteur public n’étonne guère ceux qui considèrent que sa pratique, auprès des administrateurs et agents de l’État, n’a tout simplement pas sa place. Après tout, les administrations ne sont-elles pas globalement au service des élus et des membres de gouvernements, seuls légitimés pour agir au titre de leaders ? À l’appui de cette proposition, la « théorie du principal et de l’agent » indique que le rôle des gouvernements, à titre de principal, est d’assurer la prise de décisions stratégiques concernant les grandes politiques de l’État alors que celui des agents doit se limiter à en assurer la mise en œuvre conforme 3. Dans cette optique, certains pourraient même avancer qu’un leadership « fort » assumé par des agents publics constituerait une forme d’usurpation de celui que seuls les responsables politiques peuvent légitimement exercer. Un jugement moins catégorique reconnaîtrait au mieux que les cadres occupant les niveaux hiérarchiques supérieurs et œuvrant à l’interface politico-administrative ont 1. Nous tenons à remercier Mme Valérie Malnati, membre de l’Observatoire des politiques économiques en Europe (Strasbourg) dont la lecture critique des versions successives a contribué à améliorer la qualité du propos. 2. Delisle (Stéphane), Rinfret (Natalie), L’étude du leadership dans le secteur public : état de la situation, Chaire La Capitale en Leadership dans le secteur public, École nationale d’administration publique, Québec, 2006. 3. Pour des précisions sur cette théorie et son application à l’administration, consulter Lane (Jan-Erik), Public administration and public management : The principal-agent perspective, Abingdon, Oxon ; New York (NY), Routledge, 2005. Le concept d’« agent » réfère ici à tous les administrateurs, gestionnaires et autres employés œuvrant dans le secteur public. Revue française d’administration publique no 123, 2007, pp. 423-442 effectivement la possibilité de faire preuve d’un certain leadership, notamment au chapitre de la formulation des politiques publiques 4 tout en insistant sur la légitimité du leadership des élus responsables de la conduite de l’État. À notre avis, ces points de vue, qui ne sont pas sans mérite, n’en sont pas moins des visions simplificatrices du fonctionnement complexe de la plupart des systèmes politico-administratifs en vigueur dans les régimes démocratiques. À l’évidence dans tout régime démocratique, un premier type de leadership public opère lorsque des élus sont portés au pouvoir par les citoyens en raison de leurs promesses électorales, de la vision dont leurs projets sont porteurs ou encore de leur charisme (c’est-à-dire leurs qualités personnelles ou celles qui se dégagent de l’image qu’ils projettent). Les pouvoirs qu’exerceront ces élus sont d’autant plus légitimes qu’ils leur ont été consentis par le peuple. Les employés d’une organisation publique ne choisissant ni leurs supérieurs hiérarchiques ni le ministre représentant leur organisation, ce premier type de leadership public n’est donc pas celui qui peut se développer au sein d’une administration organisée sur la base d’une autorité formelle, hiérarchiquement « partagée » entre de nombreux niveaux, directions ou services. Par conséquent, c’est bien plus, (quoique pas uniquement 5), dans les rapports d’abord commandés par la voie hiérarchique entre un groupe d’employés réunis au sein d’une équipe, d’un service ou encore d’une direction, qu’il devient pertinent de poser le défidu développement d’un second type de leadership, que nous qualifions d’« administratif », qui profitera tant aux groupes qu’à ceux qui occupent les postes d’autorité formelle. Par ailleurs, si les détenteurs d’un poste hiérarchique ne peuvent prétendre exercer un leadership du même type que celui des élus, ils ont en contrepartie la possibilité d’établir des relations particulièrement fécondes avec des employés, des pairs ou leurs propres supérieurs, à la faveur des situations probléma- tiques, voire complexes, qu’ils auront à résoudre ensemble. Cet article comprend deux parties. La première, essentiellement théorique, commente quelques définitions du concept, dégage les éléments d’un modèle général et soumet trois grandes propositions en découlant. 6 La seconde partie évoque quelques orientations souhaitables en matière de recherche théorique et appliquée sur le sujet et propose quelques pistes au regard de la formation au leadership. LE LEADERSHIP : QUELQUES DÉFINITIONS ET TROIS PROPOSITIONS GÉNÉRALES Trois définitions du leadership et les éléments d’un modèle général Quiconque s’intéresse au leadership en général prend rapidement conscience de la somme impressionnante des écrits sur ce sujet, une tendance qui perdure. Paradoxalement, ce grand nombre de publications est révélateur de l’absence d’une théorie complète, validée 4. Page (Edward C.), Wright (Vincent) ed., From the Active to the Enabling State, The Changing Role of Top Offıcials in European Nations, New York, Palgrave Macmillan, 2007. 5. Le leadership peut très bien s’exercer au sein d’un groupe par une ou des personnes qui n’occupent pas de positions hiérarchiques dans ce groupe. 6. Nos propos s’inspirent très largement des Carnets de Leadership réalisés ces quatre dernières années par Michel Leclerc, professeur associé à l’ENAP et qui proposent des synthèses d’ouvrages et d’articles portant sur le leadership. Le lecteur pourra retrouver l’ensemble des Carnets produits entre 2004 et 2007 à l’adresse suivante : http://www.cql.enap.ca/fr/nouvelles.aspx ?sortcode=1.19 424 DANIEL MALTAIS – MICHEL LECLERC – NATALIE RINFRET Revue française d’administration publique no 123, 2007, pp. 423-442 et universelle, qui ferait largement consensus. Sans prétendre en développer une dans ce texte, nous proposons d’abord d’en cerner certains éléments déterminants à partir de trois définitions existantes pour ensuite discuter trois propositions générales. La première définition est tirée du volumineux traité de B.M. Bass sur le sujet : « Le leadership est une interaction entre deux ou plusieurs membres d’un groupe qui donne souvent lieu à la structuration ou la restructuration d’une situation de même que des perceptions et des attentes des membres » 7. Cette définition succincte n’étonne guère puisqu’elle rappelle les relations devant exister entre un leader et ses « collaborateurs » 8, relations dont l’articulation précise soulève encore plusieurs interrogations comme nous le verrons plus loin. En fait, son intérêt tient surtout au fait qu’elle souligne les impacts que peuvent avoir ces relations sur une situation, sur les perceptions ou les attentes des membres d’un groupe et qui prennent la forme de « structurations » ou de « restructura- tions ». Le mérite est ici de rappeler le caractère dynamique du phénomène que d’aucuns jugent d’ailleurs impossible à dissocier de celui du changement. Une seconde définition découle d’échanges entre des auteurs ayant consacré de nombreuses années à chercher, à écrire et réfléchir sur le sujet. 9 L’un d’eux, James MacGregor Burns, résume en ces termes la définition qui s’en est dégagée : « Si j’essaie de résumer [...] nos réflexions concernant le leadership, je dirais que nous considérons le leadership comme un processus d’influence, à la fois observable et invisible, s’exerçant dans une société en évolution. Conçue comme une interaction entre personnes évoluant dans des conditions humaines (et inhumaines) marquées par des inégalités, cette interaction est appréciable à l’aune de valeurs morales et éthiques et de la réalisation de changements intentionnels, durables et globaux » 10. Alors que MacGregor Burns avait déjà soumis en 1978, dans un ouvrage fameux sur le sujet, une définition du leadership qui s’apparente étroitement à une forme d’exercice du pouvoir 11, propose à nouveau, en 2001, avec quelques collègues, une uploads/Management/leadership.pdf

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  • Publié le Jui 29, 2022
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