1 CHAPITRE II LES DIFFERENTS MODELES DE LA COMMUNICATION OBJECTIFS DE CONNAISSA

1 CHAPITRE II LES DIFFERENTS MODELES DE LA COMMUNICATION OBJECTIFS DE CONNAISSANCE: - connaître les différents modèles utilisables pour l'étude des communications; - connaître les différentes définitions de la communication portées par ces différents modèles; - connaître les questions auxquelles les différents modèles peuvent répondre; - avoir une idée générale des épistémologies dans lesquelles s'inscrivent ces modèles. 1. LE MODELE EMETTEUR-RECEPTEUR DE LA THEORIE DE L'INFORMATION 1.1. La métaphore du modèle émetteur-récepteur Le modèle le plus connu est le modèle venant de la théorie de l'information: le modèle émetteur- récepteur. Les schémas le représentant ont été tracés des millions de fois depuis son apparition et sont encore tracés aussi fréquemment chaque année. Il est devenu un véritable phénomène culturel, il est même devenu un truisme culturel (une évidence indubitable) parce que d'innombrables personnes pensent spontanément la communication avec ce schéma dans la tête. C'est pourtant un schéma, qui est caduc, qui a été critiqué par tous les spécialistes. Il a été mis au point dans les années 40 par des mathématiciens (Shannon et Weawer, 1945, puis N. Wiener, Cybernétique et société, 1954, trad. fr. 1962, éd. Union Générale d'édition) qui se préoccupaient de la transmission des informations sur les lignes téléphoniques. Il est popularisé sous la forme du schéma dit «émetteur-récepteur», schéma que tout le monde connaît, tant il est toujours et encore une «référence» lorsque l'on parle de communication. Ce schéma répond bien à l'idée banale que l'on se fait de la transmission d'un message (parole, écrit, signal quelconque...). Un émetteur envoie un message à un récepteur. Au départ, le message a donc une signification pour l'émetteur. Il y a ensuite un «codage» du message, c'est-à-dire une mise en forme (signaux morses, par analogie avec le télégraphe; écriture en une langue, par analogie avec la traduction...). D'ailleurs, la métaphore sous-jacente à ce modèle est la métaphore du télégraphe (cf. figure 1). FIG. 1. — Le modèle émetteur-récepteur Le message circule ensuite dans un milieu qui peut le perturber et commencer à en altérer la «pureté» (on dit qu'il y a du bruit, par analogie avec la parole dans le téléphone, ou avec les signaux de fumée dans un ciel venté). Mais ce «canal» peut avoir ses «effets» sur le message: ce sont les études de McLuhan sur l'impact des médias (média «chaud» et média «froid», impact de l'image par rapport à l'écrit ou à la parole...)1. Le «récepteur» reçoit et «décode» ce message (analogie avec la transcription d'un code dans un autre; du code morse à l'écriture normale; de telle langue dans telle autre...). Au bout du compte, il y a un «message» reçu dont on n'est pas sûr qu'il soit le message de départ, c'est-à-dire dont on n'est pas sûr que le sens n'ait pas été altéré. Les «altérations» de messages se faisaient donc par le «bruit» du canal et par le «décodage» du récepteur. La prise de sens est alors un phénomène de type mécanique. À aucun moment elle n'est liée à des effets de contextes. 1 McLuhan, La Galaxie Gutenberg, Paris, Marne, 1967 E R 2 1.2. La problématique du modèle La grande préoccupation des hommes qui pensaient avec cette conception de la communication était de faire en sorte qu'il y ait le moins possible de «déformation», qu'il y ait par conséquent une «bonne communication», et que la signification de départ du message se retrouve bien dans la signification du message à l'arrivée. Lorsque l'on a ce modèle comme lunette de vision, on va privilégier des questions comme celles qui sont posées dans la figure 2. Ce modèle, trop connu, a été entièrement „détruit” (déconstruit) par diverses analyses faites à son sujet. On sait, par exemple, que poser la question: «quelle information de départ?» sous-entend que cette information (et sa signification) existe au départ. Or, on sait, que ce n'est pas toujours le cas. L'information, c'est-à-dire la signification peut «émerger» de l'échange ou de l'action et ne pas être, donc, une donnée de départ. Au début, avec le modèle émetteur-récepteur, la communication était définie comme un transfert d'information d'un acteur à un autre. Sa nature est «structurante», propriété prêtée à ce qui a une certaine «forme» et «met à son moule ce qu'il rencontre». Le «récepteur» est «informé», c'est-à-dire qu'il subit une transformation liée à une plus grande «information» c'est-à-dire, dans cette conception, a un plus grand «savoir». Les propriétés du contenu du message résument la problématique principale sous- jacente de ce modèle. Ce contenu a des «effets» qui sont étudiés2. FIG. 2. — Modèle de la théorie de l'information Ce modèle fait ainsi référence à des problèmes de traduction entre différentes personnes. Il exclut le fait que des personnes pourraient ne pas «comprendre les autres». Nous pouvons aussi voir ce que ce modèle «ignore», en le comparant aux autres modèles. Il occulte donc tous les phénomènes de communication que les autres modèles mettront en avant: le problème de la relation affective comme support privilégié de l'échange et de la structuration affective de la communication dans les groupes (mis en lumière par la sociométrie). Dans ce modèle, la communication emprunte des canaux «techniques» mais ne «circule» pas sur le canal de la relation affective nouée entre les êtres; le problème des niveaux de l'échange, des «échanges cachés» et des récurrences rituelles des échanges mis en avant par l'analyse transactionnelle. Il postule donc implicitement que la communication est toujours «du même niveau» (rationnelle le plus souvent) et qu'elle «avance toujours» et non qu'elle puisse tourner en rond et s'enfermer dans des «rituels» à cause des enjeux et des avantages recherchés par les acteurs. Le modèle occulte aussi le problème de la «performance» collective communicatoire d'un ensemble d'acteurs (pour lui, la communication n'est pas le fruit du travail de synchronisation de plusieurs acteurs, c'est une succession d'expressions individuelles). Le modèle occulte encore le problème de la communication considérée comme une métacommunication, c'est-à-dire un commentaire sur une autre communication se déroulant à un autre niveau (ce qui est mis en évidence par le modèle de l'hypertexte, par exemple). Enfin, dans ce modèle, l'information, c'est-à-dire le sens d'un message, est une donnée de base intrinsèquement contenue dès le départ dans le message lui-même alors que le modèle constructiviste «situationnel» met justement l'accent sur le fait que ce sens est le résultat d'une «mise en contexte» dans des contextes différents à l'aide de «processus de contextualisation». 2 R. Rieffel, «Les médias et leurs effets», Cahiers Français, n° 258, 1992 E R Quelle information? Quel codage? Quel parasitage? Quelle distorsion? Quel résultat? Quels effets du canal? Quelle correction retour? 3 2. LE MODELE DE LA COMMUNICATION A DEUX NIVEAUX DE LA DIFFUSION 2.1. La métaphore du modèle Dès les années 1950, les sciences humaines (et notamment la sociologie) abordent le problème de la communication d'une manière différente de celle des mathématiciens3. Elles s'interrogent sur l'impact des mass média (journaux et radio) sur les opinions des citoyens (travaux de Lazarsfeld et de Katz, 1955). Il ne s'agit plus d'étudier en détail la transmission d'un message, mais de décortiquer les processus de l'influence pour pouvoir, d'une part, pallier les tentatives de manipulation de la propagande de guerre et, d'autre part, mieux concevoir et gérer les campagnes électorales. Il y a donc, d'un côté, un souci de contrer la «mauvaise» influence des médias et, de l'autre, le souci de les rendre plus efficaces lorsqu'il s'agit de campagnes «démocratiques» pour la diffusion des idées «démocratiques». La problématique générale des études sur les médias était donc d'emblée posée en termes dichotomiques: effets maléfiques et effets bénéfiques des médias4. Cette problématique, bien que dépassée, a toujours une force d'attraction importante de nos jours et quantité d'études paraissent toujours sur cette dichotomie (voir les études, toujours renouvelées, sur les „effets” de la violence à la télévision et au cinéma sur les enfants). Les recherches ont mis en évidence que les médias n'avaient pas, en général, d'effet direct sur la masse des individus, mais que leur influence passait par l'intermédiaire de «leaders d'opinion»5. Ces leaders d'opinion étaient donc des «relais» auprès des membres de leurs groupes d'appartenance (cf. figure 3). FIG. 3. — Modèle de la communication à deux niveaux 2.2. La problématique du modèle II convient d'étudier en premier lieu ces «cibles» privilégiées qu'étaient, pour les mass média, ces leaders d'opinion en apportant des réponses aux questions: qu'est-ce qu'un leader d'opinion? (définition du «type» de leader d'opinion), sur quel domaine est-il leader d'opinion? quel est son propre réseau d'influence? comment reçoit-il et traite-il les idées reçues des médias (processus d'exposition et de «sélection» des informations)? (cf. figure 4). FIG. 4. — Principales questions posées par le modèle de la communication à deux niveaux 3 P. Lazarsfeld, Berelson & Gaudet, The People's Choice, 1948, New York, Columbia University Press 4 V. Scardigli, L'Essence de la technique, PUF, 1992 5 E. Katz, & P.F. Lazrsfeld, Personnal influence: The Part Played by People in the Flow of Mass Communications, Glencoe, II. Free Press, 1955 Quelles médiations? Quelles d’appartenence Quelle influence? Quelle efficacité? Leader d’opinion Quel type de leader d’opinion? Quel réseau? Quelles uploads/Management/ mucchielli-10-modele-ale-comunicarii.pdf

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  • Publié le Apv 09, 2022
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