I-COG L’IDENTIFICATION DU SURDON (SURDOUEMENT, DOUANCE, HAUT POTENTIEL…) Stépha

I-COG L’IDENTIFICATION DU SURDON (SURDOUEMENT, DOUANCE, HAUT POTENTIEL…) Stéphanie Aubertin 17/05/2012 Du (mes)usage du test de QI dans l’identification des personnes à Haut Potentiel 1 Introduction Ce document a été écrit pour un blog (www.talentdifferent.com) et publié sous forme d’une série de 12 billets. Il a pour objectif de mettre en avant la difficulté de l’identification de personnes présentant une intelligence singulière. Il part de l’idée répandue mais erronée que le surdon ne peut être mesuré que par le QI, et que celui-ci en est une mesure exacte. Afin de comprendre la complexité des choses qui rentrent en compte, ce thème sera découpé en plusieurs grandes parties. - Une première partie se concentrera sur la notion d’intelligence et rappellera la diversité des caractéristiques des personnes à Haut Potentiel (HP), caractéristiques qui ne tiennent pas uniquement à ce que l’on nomme « intelligence ».  J’évoquerai pour cela les différentes théories de l’intelligence. Il apparaîtra alors évident que, puisqu’il n’y a pas de consensus sur ce qu’est l’intelligence, la mesurer par l’intermédiaire d’un test représentant le point de vue d’une seule théorie de l’intelligence est un non-sens.  Vous verrez ainsi, après la description de ce qui définit les personnes à Haut Potentiel, que les réduire à une question d’intelligence et donc de mesure d’intelligence est réducteur. - Une seconde partie traitera précisément de l’identification du Haut Potentiel.  Celle-ci peut se fonder sur de multiples critères ; pourtant, en France, le seul QI est mesuré.  J’entrerai alors dans le détail de ce fameux test de QI pour en mesurer ses spécificités, ses qualités et ses limites. - Une troisième partie mettra en avant l’hétérogénéité des performances des personnes à Haut Potentiel au test de QI au niveau intra-individuel, inter-individuel mais aussi inter-groupes. - Enfin, une quatrième et dernière partie présentera les différentes variables qui peuvent influencer la réalisation de toute tâche, notamment celle d’un test de QI. Et je terminerai par vous présenter brièvement les principaux modèles du surdon mettant en avant le poids d’autres facteurs dans la réalisation de l’intelligence. Au terme de ce document, vous aurez, je l’espère, une vision plus objective de l’identification du surdon, mais surtout un regard plus critique sur la toute-puissance du QI (ou d’autres tests) dans un diagnostic, que celui-ci porte sur le surdon ou sur un trouble cognitif. 2 I. Les the ories de l’intelligence Avant tout, il faut savoir qu’il n’existe pas de consensus sur ce qu’est l’intelligence, et par conséquent, pas de consensus sur la mesure de celle-ci. Il en résulte qu’il existe plusieurs théories de l’intelligence. Cependant, s’il n’existe pas de consensus sur une définition exacte de l’intelligence, les chercheurs admettent tout de même ce point : l’intelligence est ce qui nous permet de nous adapter à notre environnement. En tant que psychologue cognitiviste, je dirai que c’est un peu le rôle des fonctions exécutives (voir II), mais il faut avouer que les fonctions exécutives sont un fourre-tout et incluent plusieurs capacités. Les théories de l’intelligence ont évolué au fil du temps. D’une conception unitaire de l’intelligence, on envisage de plus en plus le fait que l’intelligence soit multiple. 1. Conceptions unitaires de l’intelligence 1.1 Une seule intelligence : le facteur g Les tests d’intelligence ont été créés en France par Binet en 1904 à la demande du ministère de l’Education qui souhaitait dépister les enfants déficients afin de les prendre en charge. Il a proposé à de nombreux enfants de tout âge de réaliser différents types de tâches. Binet a ensuite classé ces tâches en fonction de l’âge où elles étaient majoritairement réussies. Est alors née la notion d’âge mental. Ainsi un enfant peut avoir un âge mental supérieur à son âge réel s’il réussit des tâches que des enfants plus âgés réussissent; de même, il peut avoir un âge mental inférieur à son âge réel s’il ne réussit pas les tâches que d’autres enfants du même âge réussissent pourtant. Cela dit, un même retard n’a pas la même valeur en fonction de l’âge réel. Exemple : un retard de 2 ans n’aura pas la même valeur pour un enfant qui a 3 ans d’âge réel (âge mental : 1 an) que pour un adolescent qui a 16 ans (âge mental : 14 ans). Pour remédier à ce problème, Stern (1912) propose de pondérer l’âge mental sur l’âge chronologique de l’enfant. C’est ainsi que le Quotient Intellectuel est né (nous verrons plus tard que ce que l’on appelle aujourd’hui QI n’est pas un véritable Quotient). Un enfant qui a un âge mental de 12 ans et un âge chronologique de 10 ans (avance de 2 ans donc) a un quotient de 12/10 = 1,2. Terman, dans une adaptation américaine du test de Binet en 1916, multiplia ce quotient par 100 afin d’éviter les décimales (ce qui donne 120 dans l’exemple précédent). 3 Parallèlement aux recherches de terrain de Binet, Spearman (1904) propose une première théorie de l’intelligence. Selon Spearman, l’intelligence est générale. Pour en arriver à cette conclusion, il a réalisé des corrélations entre de nombreux résultats scolaires et a observé une corrélation positive, quoique variable, entre toutes les épreuves réalisées à l’école. Il a ainsi isolé un facteur commun qu’il a nommé “facteur g”. Cependant, en plus de ce facteur g, chaque tâche est composée d’un facteur spécifique selon un poids variable. « g » est le facteur g, « v » les variables observées dans les tâches, et « s » le facteur spécifique à chaque variable. Chaque variable est donc influencée par « g » et par « s ». (source : Grégoire, 2009) Modèle de l’évaluation de l’intelligence (facteur g) de Spearman. (source : Grégoire, 2009) 4 1.2 L’intelligence est composée de facteurs multiples indépendants Thurstone (1931), via une analyse mathématique plus poussée (analyse factorielle multiple) sur ces corrélations ne trouve pas de facteur général, mais 7 facteurs indépendants : verbal, numérique, spatial, mémoire, induction, déduction et fluidité verbale. Il appela ces facteurs des aptitudes primaires (« Primary Mental Abilities »). Le modèle des aptitudes primaires mentales de Thurstone (PMA = Primary Mental Abilities; T = Tâche). (source : Lautrey, 2006) Modèle de l’évaluation des facteurs multiples de l’intelligence de Thurstone. « V » est le acteur verbal, « N » le facteur numérique et « S » le facteur spatial. (source : Grégoire, 2009) 5 1.3 Un facteur général ET des facteurs multiples Contrairement à ce que pensait Thurstone, les facteurs correspondant aux aptitudes primaires sont corrélés entre eux. Pour cela, il faut faire une analyse factorielle de second ordre qui puisse rendre compte de la variance commune aux facteurs de 1er ordre. Cette analyse factorielle de second ordre donne donc naissance à un modèle factoriel hiérarchique en 3 strates (Modèle Cattell-Horn-Carroll ou CHC) : 1/ une part de variance correspond à un facteur général; 2/ des parts de variance correspondent à des facteurs larges; 3/ des parts de variance spécifiques à une quarantaine de facteurs primaires. Modèle CHC ((PMA = Primary Mental Abilities; T = Tâche) (source : Lautrey (2006) Les facteurs larges (strate II) ont été identifiés comme suit (caractéristiques empruntées à Lautrey, 2006) :  Intelligence fluide (Gf) : raisonnement, opérations mentales contrôlées, résolution des problèmes nouveaux faisant peu appel aux connaissances  Intelligence cristallisée (Gc) : connaissance du langage, de l’information et d’une culture spécifique  Mémoire et apprentissage (Gm) : efficience de la mémoire à court terme et de la mémoire de travail  Représentation visuo-spatiale (Gv) : capacité à créer, mémoriser, retrouver et transformer des images visuelles  Représentation auditive (Ga) : capacité à analyser, manipuler et synthétiser des éléments sonores  Récupération en mémoire à long terme (Gr) : capacité à stocker de nouvelles informations et à la récupérer sur du long terme  Rapidité cognitive (Gs) : capacité à effectuer de façon automatique et rapide des tâches faciles ou surapprises 6  Vitesse de traitement (Gt) : capacité à réagir ou à décider rapidement en réponse à des stimili simples Les échelles de Wechsler (WAIS, WISC et WPPSI) sont basées sur le modèle CHC de l’intelligence. Cela dit, le débat sur le facteur g est toujours d’actualité et des théories plus récentes de l’intelligence proposent de la considérer comme multiple. C’est le cas de Gardner et de Sternberg. 2. Conceptions pluralistes de l’intelligence 2.1 Les 8 formes d’intelligence selon H. Gardner (1983-1996) Gardner se base sur différents points qui remettent en cause le facteur g pour proposer une conception pluraliste de l’intelligence. Ainsi, en partant du principe : - qu’il existe des créateurs géniaux mais dans un seul domaine, - qu’il existe des “idiots savants” ou “autistes géniaux” qui possèdent des capacités intellectuelles médiocres par ailleurs, - et que des lésions cérébrales précises n’affectent que l’intelligence d’un domaine précis, il identifie plusieurs formes d’intelligence correspondant à 7 domaines différents : linguistique, logico-mathématique, spatiale, kinesthésique, musicale, inter-personnelle et intra-personnelle. Néanmoins, comme le souligne Lautrey (2004) “l’indépendance de ces différentes formes d’intelligence est postulée plus que démontrée”. Il s’agit en effet d’une approche qualitative qui est uploads/Management/ identification-du-haut-potentiel.pdf

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  • Publié le Mai 29, 2021
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