Du même auteur Lettre à la France nègre Edmond Nalis, 1969 Le Serpent à Plumes,
Du même auteur Lettre à la France nègre Edmond Nalis, 1969 Le Serpent à Plumes, 2003 Les Mille et Une Bibles du sexe (Sous le pseudonyme d’Utto Rodolph) Éditions du Dauphin, 1969 Vents d’ailleurs, 2015 YAMBO OUOLOGUEM LE DEVOIR DE VIOLENCE roman ÉDITIONS DU SEUIL 25, bd Romain-Rolland, Paris XIVe Cet ouvrage est paru pour la première fois en 1968, aux Éditions du Seuil (ISBN 978-2-02-001109-9). ISBN 978-2-02-123410-7 © Éditions du Seuil, 1968, et mai 2018 pour la présente édition. Le Code de la propriété intellectuelle interdit les copies ou reproductions destinées à une utilisation collective. Toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle faite par quelque procédé que ce soit, sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants cause, est illicite et constitue une contrefaçon sanctionnée par les articles L. 335-2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle. www.seuil.com Ce livre étant une fiction, toute ressemblance avec des personnages réels serait fortuite. Les Éditions du Seuil remercient Ava Ouologuem pour son rôle et son soutien. À l’humble compagne des jours mauvais et de ceux qui furent pires. Note de l’éditeur Quand Le Devoir de violence paraît à la fin de l’été 1968, sa qualité et son originalité sont vite reconnues. L’auteur est un jeune Malien de vingt-huit ans qui a déjà beaucoup écrit mais n’a encore jamais publié. Né à Bandiagara et élevé au pays dogon, il a suivi de brillantes études supérieures en France et est professeur de lycée. Ce qu’il propose au Seuil est une fresque qui s’étend sur huit siècles dans un empire africain imaginaire et renouvelle de façon audacieuse la vision de l’Afrique, celle des Européens comme celle des Africains eux- mêmes. Sa liberté de ton ne connaît aucune contrainte, que ce soit dans les descriptions de violence ou dans les scènes érotiques, et va jusqu’à briser le tabou africain de l’homosexualité. Son écriture est à la mesure de cette audace : élégante, flamboyante par moments, cynique à d’autres, toujours remarquable. La critique, dans sa grande majorité, en convient : Le Devoir de violence est exceptionnel. « Un grand roman africain », titre Le Monde, qui poursuit : « Un roman tout court comme on n’a pas souvent le bonheur d’en découvrir dans le fatras d’une rentrée. » En novembre 1968, le prix Renaudot, attribué pour la première fois à un auteur africain, toutes Afriques confondues, vient confirmer cette reconnaissance. Le succès auprès des lecteurs suit. Si, dans le récit le colon en prend pour son grade, les premières réserves, sinon attaques, viennent d’Afrique où certains n’acceptent pas l’offense faite par Yambo Ouologuem à l’idéologie fière de la négritude : l’auteur du Devoir de violence se plaît à décrire la responsabilité des dirigeants et notables africains dans le malheur de leurs peuples, leur participation à la traite d’esclaves et leur compromission ambiguë, subtile et retorse, avec le colonisateur. La charge la plus violente surgit cependant en Europe et aux États-Unis. En 1971, un chercheur américain dénonce les similitudes entre Le Devoir de violence et Le Dernier des Justes d’André Schwarz-Bart, publié au Seuil en 1959. D’autres accusations de plagiat sont lancées, notamment à l’égard d’un roman de Graham Greene, C’est un champ de bataille (Robert Laffont, 1953). En mai 1972, le Times Literary Supplement britannique les révèle publiquement. L’ « affaire Ouologuem » ne s’arrêtera plus. Aux États-Unis, l’éditeur américain du Devoir de violence pilonne son stock. Le scandale arrive en France où, parfois, les mêmes critiques qui ont encensé l’auteur malien s’acharnent désormais contre lui. Le Seuil finit par cesser la diffusion du roman. Dans la tourmente, le Seuil n’est pas épargné. Ses relations avec Yambo Ouologuem se détériorent rapidement et, dans les milieux littéraires, surtout africains, les reproches fusent. La maison d’édition est accusée d’avoir commandé à l’auteur un remake africain du prix Goncourt 1959 d’André Schwarz-Bart, d’avoir supprimé les marques de citation dans le manuscrit du Devoir de violence et d’avoir laissé passer d’autres emprunts à des auteurs aussi divers que Maupassant ou John D. MacDonald, auteur de la Série Noire. Le temps est venu pour que soit débrouillé, hors de la présente édition, l’écheveau que constitue ce dossier où ne manquent ni malentendus, ni maladresses, ni coups d’éclat et coups de griffes. D’autant qu’on s’accorde aujourd’hui pour reconnaître dans Le Devoir de violence un montage vertigineux de réécritures de textes venus d’horizons culturels multiples, depuis les chroniques arabes jusqu’à la Bible en passant par Flaubert, Suétone ou Tacite, pour en former une œuvre littéraire autonome qui se détache brillamment de ses sources et dresse devant le lecteur le miroir de ses propres références. Comme il a mis l’Afrique face aux errements de son passé. Personne ne sort indemne du Devoir de violence. Personne n’est sorti intact de l’affaire qui a suivi sa publication. À commencer par l’auteur. Après un parcours fulgurant où, en quelques années, il publie coup sur coup un pamphlet (Lettres à la France nègre, Nalis, 1969 ; rééd. Le Serpent à plumes, 2003), un ouvrage érotique sous pseudonyme (Les Mille et Une Bibles du sexe, Le Dauphin, 1969 ; rééd. Vents d’ailleurs, 2015) et deux ouvrages de romance sentimentale, Yambo Ouologuem finit par se retirer au Mali, révulsé par toutes ces accusations et emporté par le tourbillon où l’ont entraîné à la fois son génie et son rejet par les milieux littéraires occidentaux. Il cesse bientôt tout contact avec l’Europe et ne souhaite plus traiter de son œuvre passée. Il ne publiera plus jamais. Le 14 octobre 2017, il s’est éteint à Sévaré, au pays dogon, dans le silence public où il s’était enfermé. En cette date-anniversaire, les Éditions du Seuil ont voulu rendre hommage à Yambo Ouologuem en réintégrant le roman dans la collection « Cadre Rouge » où il avait originellement paru. À l’endroit que mérite cette œuvre qui s’inscrit parmi les titres majeurs de la littérature. Ainsi s’effaceront peut-être les tourments pour ne plus laisser place qu’à l’essentiel : la qualité du texte. 1 La légende des Saïfs Le texte de l’édition originale a été respecté, y compris dans les graphies moins usitées aujourd’hui, telles que « iman » ou « peulh ». Seules des corrections typographiques strictement nécessaires ainsi qu’une uniformisation des graphies majoritaires dans le texte ont été appliquées. Nos yeux boivent l’éclat du soleil, et, vaincus, s’étonnent de pleurer. Maschallah ! oua bismillah !… Un récit de l’aventure sanglante de la négraille – honte aux hommes de rien ! – tiendrait aisément dans la première moitié de ce siècle ; mais la véritable histoire des Nègres commence beaucoup, beaucoup plus tôt, avec les Saïfs, en l’an 1202 de notre ère, dans l’Empire africain de Nakem, au sud du Fezzan, bien après les conquêtes d’Okba ben Nafi el Fitri. Raconter la splendeur de cet empire – dont la renommée, atteignant le Maroc, le Soudan, l’Égypte, l’Abyssinie, la noble et sainte ville de la Mecque, fut connue des Anglais, des Hollandais, des Français, des Espagnols, des Italiens, et, bien entendu, des Portugais – n’offrirait rien que du menu folklore. Ce qui frappe, lorsque, le regard béant sur des solitudes amères, anciens, notables et griots parlent de cet Empire, c’est, devant la « bénédiction » implacable de Dieu, ouallahi ! la fuite désespérée de sa population, baptisée dans le supplice, implantée dans le Randé, disséminée le long des arides montagnes de Goro Foto Zinko, jalonnant les îles du fleuve Yamé sur plus de deux mille kilomètres en aval de Ziuko, occupant les frontières extrêmes de la côte Atlantique, se dispersant enfin le long des savanes limitrophes de l’Afrique équatoriale, en groupements d’importance inégale, séparés les uns des autres par des tribus diverses : radingués, peulhs, gondaïtes, berbéro-nomades, n’godos, s’escrimant, pour la prise du pouvoir impérial, en rivalités intestines où la violence le disputait à l’épouvante. En représailles, les Saïfs – aux cris de : À la clarté du Monde ! – ensanglantaient leurs sagaies de crimes et d’exactions tribales… En cet âge de féodalité, pour chanter leur dévotion à la justice seigneuriale, de grandes communautés d’esclaves voyaient, outre le travail forcé, quantité des leurs se laisser emmurer vifs, englués du sang d’enfants égorgés et de femmes enceintes éventrées… Il en fut ainsi à Tillabéri-Bentia, à Granta, à Grosso, à Gagol-Gosso, et dans maints lieux dont parlent le Tarik el Fetach et le Tarik el Sudan des historiens arabes. Il s’élevait toujours ensuite une houleuse imploration, qui retentissait de la place du village aux sombres taillis où dorment les hyènes. Suit un pieux silence, et le griot Koutouli, de précieuse mémoire, achève ainsi sa geste : « Non loin des corps de la horde des enfants égorgés, on comptait dix-sept fœtus expulsés par les viscères béants de mères en agonie, violées, sous les regards de tous, par leurs époux, qui se donnaient ensuite, écrasés de honte, la mort. Et ils ne pouvaient se dérober à ce suicide, pour sauver la vie d’un de leurs frères, témoin impuissant dont le regard, empreint de l’incrédulité du désespoir, était – Al’allah ! – jugé “éploré plus que de uploads/Litterature/ yambo-ouologuem-le-devoir-de-violence-pdf.pdf
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- Publié le Jan 07, 2022
- Catégorie Literature / Litté...
- Langue French
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