1 בס"ד UNE SINGULIERE FIGURE DE MESSIE POTENTIEL Le personnage de Samson dans l
1 בס"ד UNE SINGULIERE FIGURE DE MESSIE POTENTIEL Le personnage de Samson dans l’enseignement du Maharal de Prague et celui du Rav Tzadok Hacohen de Lublin L’image de Samson, celle montrée par les peintres, si nombreux, qui l’ont représenté, n’est pas flatteuse. Un homme à la musculature spectaculaire est trompé par une femme, plus faible mais rusée. De tous les épisodes si variés de la vie du héros biblique, Cranach, Rubens, Rembrandt, Van Dyck, choisissent, pour des motifs esthétiques évidents, la scène (Juges, 16,19) où Samson s’est endormi sur les genoux de Dalila qui, le trahissant, profite de son sommeil pour lui couper les cheveux où réside sa force. Plus qu’Hercule, Samson est donc devenu le symbole universel d’une masculinité naïve, victime de l’éternelle fourberie féminine. L’autre manière d’aborder le personnage se réfère à la fin de son histoire : Et Samson embrassa, en pesant dessus, les deux colonnes du milieu qui soutenaient le temple, l’une avec le bras droit, l’autre avec le gauche en disant : « Meure ma personne avec les Philistins ! » Et d’un vigoureux effort, il fit tomber la maison sur les princes et toute la foule qui était là, de sorte qu’il fit périr plus de monde à sa mort qu’il n’en avait tué de son vivant1. Samson se tue pour tuer l’ennemi. C’est le « complexe de Samson » qu’on retrouve dans des œuvres nombreuses2. Très récemment, le « complexe de Samson » est redevenu à la mode puisque Samson est le premier chahid, se tuant pour tuer les autres. Un benêt, donc, doublé d’un pécheur, grand amateur de Philistines –exclusivement. Très différente et beaucoup plus complexe est l’image de Samson telle qu’on la trouve dans la Bible, le Talmud, le Midrash, les différents commentateurs et en particulier, le Maharal de Prague3 et le Rav Tzadok Hacohen de Lublin4. 1 Juges, 16,29-30. 2 Dans Samson (1907) d’Henry Bernstein, pièce tournée dans les années trente par Maurice Tourneur, un banquier (dans la première version du texte, il était juif) se ruine pour ruiner l’amant de sa femme. Dans Samson (1961), film d’Andrzej Wajda, un Juif échappé du ghetto de Varsovie se suicide pour tuer une brigade de soldats allemands. 3 Judah Loew ben Betzalel, dit le Maharal de Prague (1512-1609) est l’auteur de livres essentiels qui ne seront publiés que dans les dernières années de sa vie : Le Puits de l’exil, Commentaires sur la Aggada, Les hauts faits de L’Eternel, Les splendeurs d’Israël, etc… Par ses écrits, il influença profondément le Hassidisme et la pensée juive française d’après-guerre, en particulier celle de Léon Ashkénazi, André Neher, Benjamin Gross. Le lien effectué entre le Maharal et la légende du Golem est l’œuvre d’un rabbin romancier, Rav Yehuda Yudel Rosenberg (dans son livre Les Miracles du Maharal présenté comme un manuscrit retrouvé dans une bibliothèque de 2 La bénédiction de Jacob L’histoire de Samson commence dans la Bible, bien avant le livre des Juges5. A la fin de la Genèse, Jacob, sur son lit de mort, bénit ses douze enfants. Par inspiration prophétique, il sait qu’ils deviendront des groupements spécifiques, les douze tribus qui composent le peuple d’Israël, chacune avec sa fonction et ses caractéristiques propres. Au-delà des douze fils, ses bénédictions se rapportent donc aux douze tribus auxquelles les fils vont donner naissance. Or, la bénédiction qu’il donne à la tribu de Dan, celle à laquelle Samson appartient, est étrange : Dan sera l’arbitre de son peuple, sous lui se grouperont les tribus d’Israël. Il sera, Dan, un serpent sur le chemin, un aspic dans le sentier, il pique le pied du cheval et le cheval tombe, renversé… J’espère en ton assistance, Seigneur6. Remarquons d’abord que la traduction française escamote les difficultés du texte qui sont justement le point de départ de la réflexion des commentateurs qui vont s’interroger sur chaque étrangeté de style. Le verset 16 est formulé, littéralement, de la manière suivante, qui n’a aucun sens, ni en hébreu, ni en français : Dan jugera son peuple comme un les tribus d’Israël7. Qu’est-ce que signifie cet incompréhensible « comme un » ? La traduction française, désireuse de fournir un texte logique, rend ce « comme un » par « sous lui se regrouperont ». Le Talmud et le Midrash, eux, vont donner à cette criante obscurité du texte plusieurs interprétations : Rabbi Yohanan a dit : Samson a jugé le peuple d’Israël de la même manière que leur Père dans le ciel comme il est écrit : « Dan jugera son peuple comme un »8. Metz). Mais ce lien, repris ensuite dans d’innombrables échos, littéraires, théâtraux ou cinématographiques, témoigne des pouvoirs surnaturels attribués dès son vivant au Maharal. 4 Rav Tzadok Hacohen de Lublin (1823-1900) est un des penseurs les plus originaux et les plus féconds du Hassidisme. Il commence à écrire à l’âge de 17 ans mais son œuvre ne sera publiée qu’après sa mort –ou brûlée dans l’incendie du ghetto de Lublin pendant la Shoah. 5 Comme partout dans le texte biblique, les thèmes se développent de génération en génération. Par exemple, l’épisode où le roi Saül ne tue pas le roi Agag et perd, en conséquence, sa royauté (Samuel I, chap. 15) est réparé, des générations plus tard par celui où Esther et Mardochée, descendants de Saül, parviennent à éliminer Aman, descendant d’Agag (Esther, chapitres 5-10). Le destin d’un héros biblique ne peut se lire qu’à travers la suite du texte et les générations successives. 6 Genèse, 49, 16-18 (traduction du rabbinat français). 7 Genèse, 49,16 (traduction littérale). 8 Talmud de Babylone, Traité Sota, 10a. 3 Comme l’Unique au monde n’a pas besoin [pour juger] d’assistance, Samson, fils de Manoah, n’a pas besoin d’assistance9. Samson juge seul. Comme le Créateur, il n’a besoin de personne d’autre pour rendre ses jugements. On pourrait ajouter que ce « comme un » fait peut-être allusion, plus généralement, à la terrible solitude de Samson. Il semble n’avoir ni épouse, ni maison, ni enfants. Revenons à la bénédiction donnée à l’ancêtre de Samson, Dan. Qu’y a-t-il d’étrange dans cette bénédiction ? Elle comporte deux parties. Il y a d’abord une vision, comparant Dan à un serpent (« chefifon »), minuscule mais susceptible par son venin de faire tomber et vaincre le puissant guerrier. Plus tard, Samson sera cette force minuscule capable d’affronter de nombreuses armées. Mais, au milieu de la bénédiction, Jacob s’interrompt, comme si il voyait quelque chose d’effrayant et il prie : J’espère en ton assistance, Seigneur10 ! Entre les versets 16 et 17 et le verset 18, il n’y a aucun rapport apparent. Tous les commentateurs s’accordent pour dire que dans cette image, vue prophétiquement par Jacob au moment où il bénit son fils Dan, le patriarche voit, au-delà, loin dans les générations, le destin si paradoxal, de Samson. D’un côté, Samson a une immense stature spirituelle. C’est un Messie potentiel. Mais Jacob voit, prophétiquement, tout à coup, quelque chose d’effrayant dans ce destin de Messie. Il s’interrompt et demande alors le secours divin : Jacob notre père le voit [Samson] et pense que c’est le Messie. Mais quand il le voit mort il dit, celui-ci aussi est mort et il dit : J’espère en ton assistance, Seigneur 11. Les paradoxes de Samson L’existence de Samson telle qu’elle nous est rapportée dans le livre des Juges (chapitres 13,14,15,16) est remplie de mystères et de paradoxes : Il y avait alors à Tzora un homme d’une famille de Danites, appelé Manoah. Sa femme était stérile, elle n’avait point enfanté. Or un ange du Seigneur apparut à cette femme et lui dit : « Vois, tu es stérile, tu n’as jamais eu d’enfant : eh bien ! Tu concevras et tu auras un fils. Et maintenant observe-toi bien, ne bois ni vin ni autre liqueur enivrante et ne mange 9 Midrash Rabba, Béréchit, 98,13. 10 Genèse, 49,18 (traduction littérale). 11 Midrash Rabba, Béréchit, 98,14. 4 rien d’impur. Car tu vas concevoir et enfanter un fils : le rasoir ne doit pas toucher sa tête, car cet enfant doit être nazaréen, consacré à D. dès le sein maternel, et c’est lui qui entreprendra de sauver Israël de la main des Philistins12. » Premier paradoxe : pourquoi le Sauveur d’Israël, celui qui délivre du joug philistin, le 13ème et dernier juge d’Israël, et celui sur lequel le texte biblique s’étend le plus largement, est-il choisi dans la tribu de Dan ? Selon le Midrash Tanhuma, la tribu de Dan est une tribu à part. Ils sont rejetés par la nuée divine. Ils ne jouissent pas de la lumière spirituelle qui baigne les autres tribus13. Dan est le fils de la servante de Rachel, Bilhah. C’est la tribu qui pendant les quarante ans de pérégrinations dans le désert, ferme la marche, ramassant les objets perdus par les autres tribus. La honte du péché du blasphémateur (Lévitique, 24, 10-14), et celle de sa mère, l’unique prostituée, nous dit Rachi, du peuple d’Israël, retombe sur toute leur tribu, la tribu de Dan. Remarquons aussi que, du temps de uploads/Litterature/ une-singuliere-figure-de-messie-potentie-pdf 1 .pdf
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- Publié le Nov 27, 2021
- Catégorie Literature / Litté...
- Langue French
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