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Samedi 23 mars 11h00 [GMT + 1] NO 303 Je n’aurais manqué un Séminaire pour rien au monde— PHILIPPE SOLLERS Nous gagnerons parce que nous n’avons pas d’autre choix — AGNES AFLALO www.lacanquotidien.fr ––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––– –––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––– L'institution, la singularité et le vide. À propos des simultanées de Pipol 6 Dans notre époque d’Après l’Œdipe où le symbolique devient de plus en plus incapable de faire une place au réel, tout ce qui relève de l’inattendu, de l’incalculable et de l’imprévisible, est craint. Ce monde contemporain – où le marché propose un univers onirique, où la science cherche à mesurer le réel, à le maîtriser, voire à le faire disparaître – trouve un écho dans le refrain de la chanson du célèbre groupe de rock britannique Radiohead : « No alarms and no surprises ». Ainsi, nous interrogerons à Pipol 6 le fait de savoir comment concevoir une présentation clinique qui puisse transmettre un réel refusé par notre civilisation. De plus, comment mettre en valeur la singularité du sujet mise en péril par les discours normatifs ? La question se pose car nous croyons que l’existence de ce réel contingent qui oriente la psychanalyse lacanienne, dépend non seulement de la clinique mais aussi de sa transmission. Une œuvre de l’artiste contemporain Pablo Reinoso nous permet de penser cette problématique. Le cadre de l’institution « Cadre » est le titre que l’artiste a choisi pour cette pièce qui représente un cadre en bois traditionnel mais dont les baguettes qui constituent un des quatre angles s’émancipent de la forme instituée en s’entre-tissant, en se nouant d’une manière singulière. Reinoso fait avec le bois ce que Gaudí faisait avec la pierre. Cet angle – qui malgré son originalité ne dépasse pas les limites du rectangle, établies par le bord extérieur du cadre – appelle l’attention du spectateur invité à reconnaître dans un objet commun, déjà vu, un détail qui fait naître du nouveau. Autrement dit, dans l’institué, ce que nous savons, ce que nous pouvons anticiper de la forme traditionnelle qui permet d’identifier un objet, l’artiste introduit l’inattendu qui fait irruption et surprend. Dans les simultanées de Pipol 6, il s’agira d’inclure dans la construction du cas la dimension institutionnelle. Comment entendre cela ? La notion d’institution peut être prise dans le sens classique des lieux tels que l’école, l’hôpital, le centre de santé mentale et même le divani, mais aussi au sens de ce qui est routine, régularité, coutumes et règlements. Or, ce qui fait cette régularité pour le sujet, c’est ce cadre, cette grille de lecture, que Lacan appelle la « fenêtre du fantasme ». Alors, cet objet d’art évoque d’abord la dimension institutionnelle dans ce que ce cadre a de traditionnel. La singularité Seulement, comme nous disions plus haut, cette œuvre a la particularité de présenter dans un de ses angles une série de nœuds qui introduisent dans la forme classique une singularité qui a à voir avec ce qui est le plus propre au sujet. L’artiste met ainsi en relief une nouveauté en créant une tension entre deux ordres : l’établi et l’inédit. Ces nœuds surprennent parce qu’ils font partie d’une forme connue qu’en même temps ils débordent. Cet objet permet d’apprécier comment ces deux dimensions de l’institué et de la nouveauté coexistent sans s’exclure et illustre comment le cadre et ce qu’il représente de la structure, est nécessaire pour que l’invention propre au sujet puisse émerger comme surpriseii. Par ailleurs, l’originalité de ce cadre qui a la propriété de mettre en relation la structure et les nœuds, nous semble une métaphore heureuse de la façon dont le premier et le dernier enseignement de Lacan peuvent s’articuler dans l’expérience de la psychanalyse. Dans ce fil, nous croyons qu’Après l’Œdipe n’implique pas de se passer de la notion de structure mais de mettre l’accent sur le un par un tout en situant dans chaque cas clinique ce qui est de l’ordre du réel, du symbolique et de l’imaginaire. La direction de la cure, à notre époque, dépendant donc de moins en moins de la référence structurale. Le vide Or, comme Jacques-Alain Miller a pu le dire à Comandatuba, le seul principe qui régit la pratique lacanienne est le « ça rate ». Quand nous comprenons comment une interprétation a opéré, il ne s’agit pas d’une interprétation analytiqueiii. Si la surprise est une faille dans l’établi, une erreur dans la régularité, nous pourrions dire que le « ça surprend » est une déclinaison possible du « ça rate ». Alors, le « cadre » de Reinoso n’est pas un cadre de plus, de la même façon que la roue de bicyclette de Duchamp, élevée au statut d’objet d’art, n’est pas une roue quelconqueiv. Il n’a pas la fonction de tous les autres cadres, celle de border une représentation. Il permet, au contraire, de cerner l’immensité du fond en isolant un morceau du mur. Il fait exister un vide de représentation là où il n’y avait rien. L’artiste nous surprend ainsi une seconde fois en nous invitant – comme Lacan dans le séminaire XIXv – à regarder ce qui passe habituellement inaperçu : le mur lui-même. Cette modalité de la surprise n’est pas, il nous semble, du même ordre que celle produite par les nœuds car elle ne se déduit pas des lois imposées par le cadre, elle n’a aucun rapport avec ce qui la délimite. Ainsi en appliquant cette œuvre au thème des simultanées, nous pourrions dire que c’est grâce à ce cadre de la construction du cas, incluant et l’institué et l’invention singulière, que ce qui ne peut pas être dit est cerné et devient dès lors susceptible d’être transmis. Gil Carozvi avec Bruno De Halleux l’expliquaient ainsi : « Ce qui me surprend à chaque fois, c'est un sentiment de n'avoir pas su dire l'essentiel. Comme si au cœur de ce que nous racontons de notre clinique, de nos recherches, de nos avancées, se loge un indicible, un petit quelque chose qui vaut comme un noyau invisible, une cause intransmissible, condition pour que cette clinique puisse se déployer ». L’effort de construire un cadre dans l’écriture d’un cas vise alors à faire émerger un vide de représentation en cernant un réel qui est moins récit d’une histoire que série de fragments isolés par une logique. L’enjeu est de taille car si « l’avenir de la psychanalyse dépend de ce qu’il adviendra de ce réel »vii, l’existence de celui-ci dépend en partie du discours analytique. A Pipol 6, qui s’inscrit dans les développements de Jacques-Alain Miller à propos de l’Un-tout-seul, nous espérons pouvoir attraper quelque chose de l’ordre du ratage là où il y a eu de la surprise dans l’institué. C’est en faisant émerger ce qui échappe à la norme- mâle que ce qui ne peut pas être dit ni représenté, soit le féminin, ce « noyau invisible », peut se cerner et se transmettre. Car pour que le féminin trouve une place dans l’avenir, ceux qui s’orientent de la psychanalyse lacanienne ont leur partie à jouer dans la civilisation. En y mettant du sien, en étant là, et en faisant partie d’une communauté analytique car il n’y a pas de transmission sans corps et sans autresviii. Laura Petrosino Appel à contributions pour les simultanées de Pipol 6 : Renseignements sur Pipol News 27 *** L’expérience de ce que parler veut dire « Parler n’est pas communiquer … c’est d’abord ouvrir la bouche et attaquer le monde avec, savoir mordre. », écrit Valère Novarinaix. Dans son dernier ouvrage, Vie éprise de parole, Philippe Lacadée s’intéresse ainsi aux différentes manières dont « le langage mange le réel »x – formule frappante du Séminaire XXIII qui dit bien en quoi la parole a prise sur le réel et fait trou. Tout comme elle est aux prises avec lui. Quiconque reçoit des adolescents trouvera de quoi réfléchir sa pratique dans les analyses que livre ici l’auteur quant aux effets du déclin de Nom-du-Père sur cet âge sensible de la vie. Les adolescents du XXIe siècle, enfants du désordre symbolique, connaissent des souffrances proprement modernes. Déjà, dans L’Éveil et l’exil, Ph. Lacadée faisait de l’écriture aI – proposée comme mathème de la modernité par Jacques-Alain Miller – le mathème caractéristique des adolescents. En effet, nombreux sont ceux qui, aujourd’hui, ne sont plus héritiers des valeurs idéales transmises par l’Autre ou pensent ne rien devoir aux symboles de l’Autre. À défaut de don de l’Autre et de dette symbolique, ils n’ont plus le goût des mots articulés à l’Autre. Au nom du réel de leur jouissance, ils rejettent avec ironie le savoir de l’Autre, semblant qui leur paraît sans valeur et inutile. Ph. Lacadée explique les effets de la crise de la fonction paternelle sur le temps logique de l’adolescence en termes de « crise de l’articulation signifiante »xi. Cela paraît très éclairant au regard de la façon dont certains jeunes tournent en rond sous l’emprise ravageante d’une jouissance Une : de l’addiction aux écrans et gadgets aux exigences impérieuses de la pulsion qui réclame uploads/Litterature/ lacan-y-su-unica-invencion-post-freudiana.pdf
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- Publié le Nov 04, 2022
- Catégorie Literature / Litté...
- Langue French
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