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HAL Id: hal-00979422 https://hal.archives-ouvertes.fr/hal-00979422 Submitted on 16 Apr 2014 HAL is a multi-disciplinary open access archive for the deposit and dissemination of sci- entific research documents, whether they are pub- lished or not. The documents may come from teaching and research institutions in France or abroad, or from public or private research centers. L’archive ouverte pluridisciplinaire HAL, est destinée au dépôt et à la diffusion de documents scientifiques de niveau recherche, publiés ou non, émanant des établissements d’enseignement et de recherche français ou étrangers, des laboratoires publics ou privés. L’histoire des idées: approche théorique et pratique Jean-Paul Rosaye To cite this version: Jean-Paul Rosaye. L’histoire des idées: approche théorique et pratique : Conférence prononcée devant les membres du Centre de recherches interdisciplinaires et transculturelles (CRIT) et dans le cadre du séminaire ” transferts des savoirs et histoire des idées ”, responsable: Danielle Follett. 2014. hal-00979422 1 L'HISTOIRE DES IDÉES : APPROCHE THÉORIQUE ET PRATIQUE J.-P. ROSAYE, TEXTES & CULTURES (EA 4028) UNIVERSITÉ D'ARTOIS INTRODUCTION En tout premier lieu, je tiens à remercier le Centre de recherches interdisciplinaires et transculturelles (CRIT) et notamment Danielle Follett, responsable du séminaire « transferts des savoirs et histoire des idées », de m'avoir invité à venir exposer certains de mes travaux, déjà anciens, sur l'histoire des idées. Le temps me semble en effet venu de les reprendre pour produire une synthèse et faire le point avec vous de ce qu'il est possible d'en dire. A tout le moins, je me propose de présenter sur ce sujet une perspective qui, à défaut d'être universelle, a toutefois le mérite d'exister. En tant qu'historien des idées moi-même, il m'est toujours agréable de parler de l'histoire des idées comme d'une discipline de recherche authentique, et de souligner son importance car elle souffre encore, tout comme les personnes qui s'y intéressent, d'un certain manque de reconnaissance et d'un défaut de statut ; et ce pour des raisons objectives que j'ai bien l'intention d'exposer dans cette intervention. Mon exposé relève de trois ordres de choses : de l'ordre théorique, pour donner les points d'appui épistémologiques de l'histoire des idées, et esquisser des éléments de méthode; de l'ordre pratique, car il s'agit d'évoquer une pratique en tant qu'historien des idées, et de l'ordre institutionnel puisqu'il est possible de justifier l'histoire des idées, à la manière de Martial Guéroult, c'est-à-dire en établissant sa validité théorique et en montrant son droit à une institutionnalisation. Le plan que je suivrai a été établi un peu en fonction de cette visée, mais mon dessein est également d'alterner les points techniques, parfois arides, avec des considérations plus légères (en intensité mais pas en pertinence j'espère) pour présenter ce qu'on pourrait désigner comme les présupposés, puis la nature et enfin la fonction de l'histoire des idées. A l'occasion de ce qui se présente tout de même un peu comme une rétrospective de travaux déjà effectués, j'aimerais revenir en particulier: (1) sur la façon dont on pense l'histoire des idées en France, et notamment dans le monde de 2 l'Anglistique, puisque c'est de ce monde là que je suis parti (2) sur les raisons de l'intérêt marqué pour l'histoire des idées, à certains moments de l'histoire, et notamment de nos jours (3) sur les méthodes proposées en histoire des idées, et sur celle qui me semble la plus appropriée car en accord avec sa nature et son objet (remarque : il ne s'agit effectivement pas d'une méthode universelle qui s'appliquerait en l'occurrence aussi à l'histoire des idées, mais d'une approche qui lui est spécifique, il ne s'agit pas ici de métaphysique) (4) sur les déclinaisons possibles de l'histoire des idées aujourd'hui; je pense notamment aux études dites « transculturelles », qu'il faudra bien que l'on définisse clairement un jour. Si tant est que cela soit effectivement possible, je désire aussi attirer l'attention sur certains de mes présupposés. Comme je viens de le suggérer, le sens principal de ma réflexion émane du projet de Martial Guéroult concernant l'histoire de la philosophie, la dianoématique. En le paraphrasant dans son kantisme, on pourrait dire que l'histoire des idées existe en fait, et qu'il est important de se demander « comment elle existe »1, et aussi pourquoi, par un détour réflexif. Dire cela me permet de régler d'emblée un point qui me semble essentiel : l'histoire des idées n'est pas l'histoire de la philosophie. Elle est plus vaste: non pas que la philosophie soit un monde clos, mais en plus des idées philosophiques l'histoire des idées s'ouvre à des objets plus nombreux, comme les idées religieuses, économiques, politiques, littéraires, etc., y compris ce que Foucault appelait les « objets incertains » et les « marges non définies » quand il critiquait l'histoire des idées dans son Archéologie du savoir (nous reviendrons sur Foucault un peu plus tard, de façon plus précise). Enfin, il importe de dire que l'histoire des idées, même si elle peut avoir des idées philosophiques pour objet, n'est pas de la philosophie en ce que son but premier n'est pas de se prononcer définitivement sur la vérité des idées ; et elle ne s'inscrit pas totalement dans l'ordre de la raison non plus puisque sa méthode ne se veut pas universelle, comme annoncé précédemment, et qu'elle revendique même, comme nous le verrons ultérieurement, un certain « bricolage », au sens que Paul Feyerabend a donné à ce mot. Commençons par aborder l'histoire des idées par son versant théorique. 1 Martial Guéroult, Philosophie de l'histoire de la philosophie, Paris, Aubier-Montaigne, 1979, p. 49 note a. Voir également, du même auteur, Histoire de l'histoire de la philosophie (Paris, Aubier-Montaigne, 3 vols. 1984-1988). 3 I- LE PROBLÈME DE L'OBJECTIVITÉ EN HISTOIRE Je commencerai par une évocation très subjective de ce qu'a pu signifier pour moi la recherche en histoire des idées. Non pas par vanité ni par autosatisfaction, mais parce que je crois que mon expérience personnelle n'est pas unique. Elle est, je pense, de même nature que ce que vivent certains collègues et cela me permet aussi d'instruire sans trop de difficulté un cas d'espèce, à savoir l'ambiguïté et les obstacles auxquels se heurte ce type de recherche. Ma thèse de doctorat a porté sur T. S. Eliot, un poète et un critique littéraire anglo-américain très connu dans le monde Anglo-saxon (en tous cas bien plus qu'en France). Mais ce n'est pas une thèse de littérature. Je l'ai conçue comme une thèse en histoire des idées en m'attachant plus au signifié qu'au signifiant. Mais même si on range habituellement l'histoire des idées avec les études de civilisation, les rapports au politique, à l'économique et au social étant minces, elle n'a pas non plus été considérée comme une thèse en civilisation. Il y est question de littérature, de philosophie, de théologie dans un contexte moderniste. Je vous laisse imaginer les difficultés des commissions de spécialistes devant lesquelles je me suis présenté. Tout s'est finalement bien passé puisque j'ai réussi à occuper une case au sein de l'institution universitaire, et dans un département d'anglais, mais cette expérience m'a donné à réfléchir. Si bien que ma première communication, après ma nomination comme Maître de Conférences a eu pour objet, précisément, une réflexion sur le statut de l'histoire des idées comme intermédiaire entre les études de littérature et de civilisation dans les départements d'anglais en France. Par chance, elle s'est tenue dans la bibliothèque de l'UFR d'anglais de Paris IV, en présence d'un public déjà acquis à l'idée que l'histoire des idées était importante en soi : il y avait là d'éminents spécialistes de l'histoire des idées en 11e section (notamment Christiane D'Haussy, Marie-Madeleine Martinet, Jacques Carré, etc.). Cette communication, « Histoire et interprétation : le rôle déterminant de l'histoire des idées entre littérature et civilisation »2, non publiée, a été pour moi l'occasion d'une première immersion dans les eaux un peu troubles de la critique historique et de l'épistémologie (au sens français du terme). Elle m'a en tous cas servi de matrice initiale, et je suis allé y puiser par la suite pour écrire deux articles de fond sur l'histoire des idées : « Quel statut et quelle méthode pour l’histoire des idées ? », 2 Journée d’étude du CRECIB (« L’enseignement de l’histoire aux étudiants anglicistes »), Université de Paris-IV Sorbonne, 15 nov. 1997. 4 publié en 20043, et « L'histoire des idées : méthodes, objets et statut », publié en 20094, ainsi que pour le document de synthèse de mon HDR5. Le statut et la méthode en histoire des idées n'étaient que partiellement abordés. En réalité, je me suis davantage concentré sur le problème de l'objectivité en histoire afin de montrer que l'histoire des idées était en mesure d'y parvenir, pour des raisons épistémologiques. Pour le dire en quelques mots, j'ai appuyé à ma façon l'hypothèse de départ du philosophe anglais Preston King dans son ouvrage Thinking Past a Problem : Essays on the History of Ideas : « toute histoire est une forme d'histoire des idées, et le problème consiste à identifier le type d'idée qui lui correspond »6. Cette hypothèse est uploads/Litterature/ l-x27-histoire-des-idees.pdf
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- Publié le Jan 20, 2022
- Catégorie Literature / Litté...
- Langue French
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