THÉORIE DE LA LITfÉRATURE DU ROMANTISME ALLEMAND PRESENTÉE PAR . PHILIPPE JLACO

THÉORIE DE LA LITfÉRATURE DU ROMANTISME ALLEMAND PRESENTÉE PAR . PHILIPPE JLACOUEQJLABARTHE ET JŒANQJLUC NANCY AVEC LA COLLABORATION D9ANNE-MARŒ LANG ÉDITIONS DU SEUIL 27p rue Jacobേ Pareis vxe Galatasaray Üniversitesi Kütüphanesi l IHIH 1111111111llHI11111Hll 1111 CE LIVRE A ÉTÉ ÉDITÉ DANS LA COLLECTION POÉTIQUE SOUS LA DIRECTION DE GÉRARD GENETTE ISBN 2-02-004936-8 © Éditions du Seuil, 1978 Le Code de la propriété intellectuelle interdit les copies ou reproductions destinées à une utilisation collective. Toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle faite par quelque procédé que ce soit, sans le consentement de l'auteur ou de ses ayants cause, est illicite et constitue une contrefaçon sanctionnée par les articles L. 335-2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle. L(ABSOLU 1JITÉRAIRE t.,, .. · Romantisme Gênesp je pourrais bien. me partager en toi Et vague, dans ton portp rouler avec les vagues, Mürir en compagll1lie de tes oranges 1rfor, Être le marbre et li'audace de tes portiques; Hérnsp je rallierais fa. troupe de tes :fillesp ,;r arracherais fo voile de leurs yeux de braise y Je me délecterais au'). coupes de nectar, A toutes, sans jamais m'attarder à aucune. J?h1s de nostalgie vague et de rêves brumeux î Mais fal. statue de pierre, la Cythéréennep Et non pas son reflet, en jouir et i'enlaœrî Je songeai - quand surgit, émergeant de I'écumep La déesse eUe³même en un parfüm de roses. Une voix résonnait : «Je forme et transfigure!» Zacharias Werner La traduction de ce poème de Zacharias Werner (Écrits choisisp publiés par ses amis, Grimmap 184-0o 1841p ][, p, 174) est due à Jean°Baptiste Lacy. IB1Ie est !f>aJrol<e en 1840 dans le M agasin des beauxvarts et de la poésie (troisième année, tome vn). Avant=propos: !1absolu littéraire « Il y a des classifications qui sont ,bien médiocres en tant que ciasslfica­ tions, mais qui gouvernent des nations et des époques entières .. . >> : nous ne serons pas les premiers à remarquer 1 que cette phrase, par laquelle débute le fragment 55 de J.9Athenaeum, semble faite pour être appliquée, autant et peut-être plus qu'à d'autres, à cette classification au nom de laquelle on isole, dans l'histoire et dans la théorie de la littérature, la rubrique du romantisme. Du moins la« médiocrité» - ou l'inconsistance - de cette classification est-elle indiscutable lorsqu'elle recouvre plus particulière= ment le moment initial et initiateur du « romantisme », celui que les Alle­ mands, à la différence des Français, prennent en tout cas Je soin de disę tinguer sous l'appellation de « premier romantisme » ( Frühromantik) . C'est à ce « premier romantisme », lequel constitue aussi le « roman­ tisme >> premier, celui qui a décidé non seulement de la possibilité d'un «romantisme» en général, maïs du cours que devait prendre, à partir du moment romantique, l'histoire littéraire (et l'histoire tout court) - c•est à ce« premier romantisme>>, donc, que ce livre est consacré. Et l'on trou­ vera plus d'une occasion, dans ces quelques pages d'introduction et dans toutes celles qui les suivent, de constater à quel point la dénomination de « romantisme » est peu adéquate à cet objet. Tel qu'on l'entend - ou qu'on ne l'entend pas - d'ordinaire, ce nom manque de justesse, aussi bien. par ce qu'il évoque en tant que catégorie esthétique (et qui bien soue vent se résume en une évocation, si l'on peut dire, de l'évocation, de la sentimentalité ruisselante ou de la nostalgie brumeuse des lointains), que par ce qu'il prétend donner à penser comme catégorie historique (dans une double opposition à un classicisme et à un réalisme ou à un natura0 Hsme); il est moins approprié encore en ceci que jamais les Romantiques du « premier romantisme » ne se sont ct•eux-mêmes donné ce nom (et 1. C'est ce que faisaient R. Ullmann et H. Gotthard en conclusion de leur Geschichte des Begriffes « Romantisch » in Deutschland (Histoire du concept (< romantique >>en Allemagne), Berlin, E. Ebering, 1927, à laquelle nous ferons quelques références dans cet avant0propos. A V ANTPPROPOS lorsqu'il nous arrivera de les nommer ainsi, ce ne sera qu9en raison des Jhabitudes prises, et non sans ironie); il est faux, enfin, de manière très générale9 en ce qu,ii voudrait désigner - époquev école, style ou conception - quelque chose qui appartiendrait d'abord et simplement à un certain passé. Chacune de ces affirmations sera justifiée en son temps. Car nous ne prétendons pas, bien au contraire, qu'elles aillent de soi9 ni même que les « Romantiq1!les » n'aient pas été à certains égards Jes premiers à entretenir ]'équivoque sur le « romantisme >>. Sans doute une assez longue histoire étaitQeUe nécessaire pour qu'il c!evienne possible, et du même coup urgent, de marquer quelque distance et quelque vigilance dans ce domaine. Mais si fa mésinterprétation qu'enferme le mot« romantisme» est assez générale (exception faite pour les travaux, qui ne sont pourtant pas tous si récents, sur lesquels nous amons à nous appuyer), elle est sans doute plus qu 9aiJQ fours profonde et tenace en France - et pour une simple raison de méconQ Jilaissance. m les noms des frères Schlegei, et celui de leur revue - 19 Athe­ naeum - ne sont pas inconnus, si l'on peut trouver en circulation un certain nombre de citations de leurs textes (et Re p1us souvent de leurs '\< fragments »9 à propos desquels la citation détachée renforce Péquiivoque de fa méconnaissance), iR n'en reste pas moins que rabsence dle traduction9 en France, des textes ]es p]us importants du « premier romantisme » consÿ füue rune des plus sidérantes facunes parnii celles qui font presque de tradition !'apanage singulier de la culture et de Pédition nationales 1• Oir H s9agitĀ avec ]e '\<premier romantisme» - c'est-à-dire avec Ie romànǥ tisme d9/éna, pour lui donner cette appellation toponymique sur ]a motiQ vation de faqueUe nous reviendrons-, de œ que Pon peut aussi désigner, en première approximation du moins, comme fo romantisme théorique, et plus précisément de ce qu 9il va nous falloir examiner comme R 9inauguQ ration du projet théorique dans fa littérature. Autrement dit, de l'inauguQ ration d'un projet dont on ne sait aujourd'hui, bientôt deux cents ans pius tard!, que trop la place qu'il a prise dans le travail théorique moderne - et pas seuîement, loin de là9 sur le registre de la littérature. U n'y a pas à chercll1er bien foin fos marques de l'héritage - en fait, bien pllus qu'un <<héritage>> - dont nous parlons ici; on peut le trouver sur fa couverture de ce Uvrn : intituler une coHection (et une revue) du terme de poétique, qu'estQœ d,autre que remettre en jeu, par-delà Valéry et quelques autres, fo terme et ime partie dlu concept qui résumaient, en 1802, le programme des Leçons sur l9art et la littérature d'August Wilhelm Schlegel 2 - leçons L Déjà dans De t.Allemagne, dont nous reparlerons, Mme de Staël ouvrait fa partie sur << fa littérature et les arts » par le chapitre : Pourquoi les Français ne rendentQils pas justice à la littérature allemande? ... 2, Cf. dcdessous la me section. IL 9 AOO OJLU UTIÉRATIŒ qui ne faisaient elles-mêmes qu9exposer une poétique générale surgie, quelques années plus tôt, dans le cercle d 'Iéna. Si la lacune française xùÜn est que plus étrangeJJ on ne s 9étonnera donc pas qu ዯn paraisse souhaitable de commencer, ici, à la combler, Nous ne ferons en effet que commencer, en allant droit aux textes et aux thèmes qu'il n'est pas abusif de considérer comme essentiels - mais à eux seuls. L'enquête ne sera pas épuisée, mais peut-être seraÛtÛH au moins possible de discerner ce à quoi elle engage. Encore faut-H s'entendre sur ce que peuvent être les intentions d'un pareil travail. n ne s'agit pas pour nous, disons-le tout de suite:. d'une entreprise dl 'archivistes : peu nous importe la reconstitution d'un épisode ancien avec iequel nous JlJl'aurrions, pour le dire avec Nietzsche (qui :n\Ýfiit pas, en cela aussi, sans prolonger le romantisme), que les rapports d•une histoire monumentale ou antiquaire. Notre propos n•est même pas du tout celui d'une histoire, queUe qu•ene soit, du romantisme. U serait plutôt à tout prendre - et nous y reviend drons - celui:. pour une part, d'une histoire dans le romantisme. Mais nous n'avons pas non plus en vue d!exhiber et de prôner un quelconque modèle romantique - à la manière, en gros, de ce qui a pu avoir lieu dans le surréalisme (et, dans une mesure moindre. chez Albert Béguin et queld ques autres 1). Le romantisme ne n.ous mène à rien qu•n y ait Heu d•imiter ou dont il y ait à« s'inspirer». et cefa parce que - on le verra - il nous <<mène>> ct•abord à nous-mêmes, Ce qui ne veut enfin pas dire que nous nous proposerions une pure et simple identification au romantisme et dans le romantisme, ni que nous entendions nous mettre nous-mêmes en abyme dans le romantisme. Nous n•aurons que trop appris chez les Romantiques combien ils ont été les premiers à· romantiser le romantisme, et combien uploads/Litterature/ l-x27-absolu-lite-raire-nancy-amp-labarthe.pdf

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